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renouvellement

Pourquoi les saints peuvent-ils sans s'épuiser travailler et souffrir mille fois plus que nous ? C'est parce qu'ils vivent dans un présent perpétuel, parce qu'ils incarnent le mot du Christ : à chaque jour suffit sa peine. Ce qui nous épuise, c'est que notre présent est rongé sans cesse de regrets, d'appréhensions et de craintes imaginaires. Comment nos possibilités d'action immédiate ne seraient-elles pas très limitées, dévorés que nous sommes par ce qui n'est plus et par ce qui n'est jamais ? Le saint élimine de sa vie le parasitisme du passé et de l'avenir : aussi chaque instant est-il gonflé pour lui de plénitude et de vigueur éternelles.

Auteur: Thibon Gustave

Info: L'échelle de Jacob

[ émerveillement ] [ tabula rasa ] [ confiance ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

éthique

Se bercer de l’attente d’un progrès spirituel qui sortirait du progrès matériel comme l’arbre sort de la graine ou l’oiseau de l’œuf, est un beau rêve qui risque de se terminer en cauchemar. Il y a là deux ordres de grandeur qui, comme Pascal l’a montré une fois pour toutes, sont absolument irréductibles l’une à l’autre. Ce qui ne signifie pas qu’on doive les séparer. Car si l’essor technique ne peut être, à aucun degré, la cause d’une ascension spirituelle, il porte en lui l’exigence de cette ascension. [...]

En résumé, le progrès technique doit nous apparaître comme une question posée par la science à la conscience.

Auteur: Thibon Gustave

Info: Dans "L'équilibre et l'harmonie", Librairie Arthème, Fayard, 1976, page 24

[ développement ] [ autolimitation ] [ puissance ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

démagogie

Vous proclamez que la paresse, l’ivrognerie ou l’adultère ne sont pas des obstacles absolus entre l’âme et Dieu, pourvu qu’ils s’accompagnent de charité et d’humilité. Encore une fois, vous avez raison, mais, en mettant indistinctement en lumière cette évidence intérieure, vous risquez de justifier et d’ancrer dans leur péché le paresseux, l’ivrogne ou l’adultère – et sans leur donner pour autant la charité et l’humilité. Pis que cela : vous risquez de stériliser en eux le germe de ces vertus en leur inspirant un nouvel orgueil, plus subtil et plus impur que celui des pharisiens vertueux : l’orgueil du pécheur qui se sent sauvé quoi qu’il fasse, la suffisance dans le désordre.

Auteur: Thibon Gustave

Info: Notre regard qui manque à la lumière, Librairie Arthème Fayard, 1970, page 196

[ fausse charité ] [ malveillance réelle ] [ bienfaisance hypocrite ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

facilité

On a pu parler de ce que la vie conjugale a de banal, de monotone, de terre à terre. Je ne sais que trop combien l’homme est capable de banaliser et de prostituer les choses les plus profondes. Mais si la vie conjugale est souvent plate, quel nom donner à la vie sexuelle extraconjugale ? Je crois que c’est une des plus subtiles malices du diable d’essayer de persuader aux hommes que l’ordre c’est la mort, et le désordre la vie. En réalité, rien n’est plus plat que le vice. Le diable n’est pas profond, - il n’est que révolté. C’est un déserteur qui essaie de se faire prendre pour un évadé.

Auteur: Thibon Gustave

Info: "Ce que Dieu a uni", libraire Arthème Fayard, 1962, page 121

[ médiocrité ] [ dévalorisation ] [ décadence ] [ inversion des valeurs ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

créature-créateur

[…] le Dieu qui m’a créé à sa ressemblance me pardonnera peut-être de n’avoir aimé dans les créatures finies que son image infinie. Car, en vérité, je n’ai jamais aimé, je n’ai jamais cherché que toi – toi l’innocence sans bords, toi la bouche qui ne sait pas dire non. J’ai brouillé les distances et les plans ; j’ai pu me noyer dans la boue et me perdre dans les nuées, mais dans cette boue je n’ai cherché que la trace de tes pas et dans ces nuées que le sillage de tes éclairs. Si ma folie a violé les bornes de ta loi, cette folie n’était que l’impatience de mon amour.

Auteur: Thibon Gustave

Info: Notre regard qui manque à la lumière, Librairie Arthème Fayard, 1970, page 245

[ recherche ] [ naturel-surnaturel ] [ errance ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

pandémie

Et d’ailleurs, imaginons dans quel état de panique effroyable serait plongé l’homme moderne, si prompt à s’émouvoir au moindre faux pas de la science ou quand surgit la moindre épidémie – une vague grippe qui arrive des profondeurs de l’Asie et qui, en définitive, ne tue que des gens bien près de mourir de tout façon, parce qu’ils sont assez ou assez faibles pour cela -, eh bien, s’il surgissait une épidémie comme par exemple la peste noire du Moyen Âge, qui a fait 35 millions de victimes, à peu près le tiers de la population, je crois que nos contemporains n’y résisteraient pas… Ceux que la peste aurait épargnés mourraient quand même – de terreur ! 

Auteur: Thibon Gustave

Info: L’homme devant la nature, 1973, in Les hommes de l’éternel : Conférences au grand public (1940−1985), éditions Mame, Coll. Raisons d’Être, 2012

[ terreur médiatisée ] [ dictature sanitaire ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

tradition

Le véritable esprit conservateur est autre chose. Il ne consiste pas à retourner en arrière, mais à remonter jusqu'à la source. Nous ne voulons pas répéter, mais renouveler. Et pour cela nous devons nous placer au centre même du jaillissement de l'histoire, c'est-à-dire au coeur de cette nature humaine et politique qui varie à l'infini dans ses manifestations, mais dont l'essence même reste à jamais identique parce qu'elle subsiste au-delà du temps. L'accident passe et se démode, l'être subsiste. Et si nous nous tournons souvent vers le passé, ce n'est pas par nostalgie de ce qui n'est plus, mais pour y découvrir, sous le flux des contingences, les linéaments d'une nécessité qui demeure.

Auteur: Thibon Gustave

Info:

[ racines ]

 

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vertu théologale

Est-ce être pessimiste que de voir le mal et le danger là où ils sont et d’y chercher des remèdes ? Quant à la vertu d’espérance, elle n’a rien à voir avec cet optimisme aveugle et béat qui se voile les yeux devant le mal et s’imagine que, quoi qu’il arrive, tout ira fatalement de mieux en mieux : elle consiste plutôt à ne jamais se décourager ni perdre pied, quelles que soient l’épaisseur du mal et la gravité du péril. [...]

L’espérance chrétienne est une vertu surnaturelle, enracinée dans la foi en la toute-puissance et en la toute-bonté de Dieu, et dont aucune catastrophe temporelle ne peut et ne doit venir à bout.

Auteur: Thibon Gustave

Info: Dans "L'équilibre et l'harmonie", Librairie Arthème, Fayard, 1976, page 49

[ définie ] [ différence ] [ question ]

 

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incomplétude

La liberté n’est pas seulement la possibilité de choisir, mais aussi la possibilité d’être choisi. Être libre, c’est être vide, disponible. On parle d’une place libre par opposition à une place occupée ; d’un homme marié, on dit qu’il n’est plus libre, etc. A l’échelle humaine, la notion de liberté implique donc, dans une certaine mesure, la notion de manque et de pauvreté : l’être libre est imparfait, indigent : il attend ce qui doit le compléter et l’épanouir, ce qui doit tuer sa liberté. Et, réciproquement, l’exercice de la liberté, c’est à dire le choix, suscite une autre pauvreté : on ne peut choisir qu’une chose à la fois ; la réalisation d’une seule possibilité entraîne l’avortement de toutes les autres.

Auteur: Thibon Gustave

Info: Notre regard qui manque à la lumière, Librairie Arthème Fayard, 1970, page 52

[ castration ] [ définition ]

 

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condition humaine

On accuse le péché originel. Loin de nous la pensée d’en sous-estimer les méfaits ! Mais une explication totale du conflit humain par la chute procéderait vraiment d’une réflexion trop indolente. Si Adam vivait au-dessus de tout conflit, c’est moins en raison de l’intégrité de sa nature que des dons préternaturels dont cette nature était revêtue. Per peccatum homo fit tantum homo*. Le conflit entre les sens et l’esprit ne relève pas uniquement de motifs moraux (chute originelle) ; il s’enracine dans la constitution ontologique de l’homme. [...]

Nous pourrons donc conclure : la chute originelle a désaxé, "dénaturé", tourné vers la corruption et le désordre, la tension entre les sens et l’esprit essentiellement inhérente à la nature humaine.

Auteur: Thibon Gustave

Info: "Ce que Dieu a uni", libraire Arthème Fayard, 1962, pages 53 à 55, * : l'homme ne devient homme que par le péché

[ précarité cosmologique ] [ effets ]

 

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