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biographie

[A propos de Simone Weil] Née à Paris en 1909, ancien élève d'Alain, elle entra très jeune à l'Ecole normale supérieure et passa brillamment l'agrégation de philosophie. Elle enseigna ensuite dans divers lycées et se mêla très tôt à la politique. Il va sans dire que ses convictions révolutionnaires qu'elle manifestait sans le moindre souci des convenances professionnelles ou mondaines lui attirèrent quelques ennuis administratifs qu'elle accueillit avec un dédain transcendant. À un inspecteur général qui la menaçait de sanctions pouvant aller jusqu'à la révocation, elle répondit en souriant : "Monsieur l'Inspecteur, j'ai toujours considéré la révocation comme le couronnement normal de ma carrière."  Elle milita dans les rangs de l'extrême-gauche, mais elle n'adhéra jamais à aucune formation politique, se bornant à défendre les faibles et les opprimés quels que soient leur parti ou leur race. Voulant partager à fond le sort des pauvres, elle demanda un congé et s'embaucha dans les usines Renault où, sans révéler à personne sa qualité, elle travailla pendant un an comme fraiseuse. Elle avait loué une chambre dans un quartier ouvrier et vivait uniquement du maigre produit de son travail. Une pleurésie vint interrompre cette expérience. Au moment de la guerre d’Espagne, elle s’engagea dans les rangs des Rouges, mais elle eut à cœur de ne jamais se servir de ses armes et fut une animatrice plutôt qu’une combattante. Un accident physique (elle s’était par inadvertance ébouillanté les pieds) la fit ramener en France.

Auteur: Thibon Gustave

Info: Préface à "La pesanteur et la grâce" de Simone Weil, Librairie Plon, 1988, pages 9-10

[ caractère ] [ intransigeance ]

 
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religieux-civil

Les papes et les théologiens qui émettent ces principes [actes pontificaux] raisonnent en quelque sorte dans l’abstrait, pour une société ayant conservé l’unité de foi et filialement soumise à l’autorité pontificale. Ils font à leur manière, si j’ose ainsi parler, leur ile d’Utopie, leur Salente, ou leur République de Platon, exposant, d’après leurs maximes, les lois d’une société parfaite, sans se préoccuper des nécessités contingentes et des réalités actuelles, ce qui ne les empêche nullement d’en tenir compte dans la pratique, de s’y accommoder et de se faire aux circonstances. Quand les règles idéales ainsi posées seraient en contradiction manifeste avec les principes de notre droit public, y aurait-il là de quoi alarmer sérieusement les gouvernements et les peuples modernes ? Non, en France du moins, car, chez nous, les fanatiques ou les illuminés, qui rêvent de construire sur la terre une sorte de contrefaçon de la Jérusalem céleste, sont les seuls à voir en de telles maximes une règle de conduite applicable à notre temps et à notre état social. Les autres, non seulement les catholiques qui, au contact du siècle, se sont plus ou moins entachés d’idées libérales, mais tous ceux qui ont quelque esprit politique ou quelque sens pratique, sentent la folie de pareils songes et prennent à tâche de s’en disculper. Ils s’efforcent de rassurer les princes et les peuples en leur rappelant qu’en fait, dans la sphère concrète, l’Eglise n’a jamais condamné aucune forme de gouvernement ni aucune constitution politique.

Auteur: Leroy-Beaulieu Anatole

Info: Les catholiques libéraux, l'Église et le libéralisme de 1830 à nos jours, Librairie Plon, 1885, pages 203-204

[ indépendance ] [ ingérence ] [ temporel-éternel ]

 

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idiomes musiques

Au commencement était le verbe nous disent les anciens. Pour moi, celui du commencement fut roumain. Le médecin et ceux qui avaient veillé sur ma difficile naissance parlaient le roumain. Chez moi, on parlait roumain, je passais la majeure partie de mon temps avec Maria, la jolie fille de paysans qui s’occupait de moi et m’adorait en roumain. Ce n’était, certes, pas la seule phonétique de mon environnement. Dans la Bucovine d’avant la dernière guerre mondiale, on parlait l’allemand, le yiddish, l’ukrainien, le polonais et un étrange mélange de slave, caractéristique des Ruthènes. La grande guerre fratricide entre le yiddish, la langue de l’exil, plébéienne, laïque, et l’hébreu sacré, élitiste, connut, ne l’oublions pas, son heure dramatique à la Conférence de Czernowitz en 1908, quand la victoire solennelle du yiddish (" les Juifs sont un seul peuple, leurs langues est le yiddish") ne pouvait laisser augurer la suprématie spectaculaire et définitive que la création de l’État d’Israël allait assurer quatre décennies plus tard à la langue hébraïque. Lorsque mon grand-père demanda si j’avais des ongles, afin d’évaluer les chances du nouveau-né, je suppose qu’il le fit en yiddish, bien qu’il sût l’hébreu, parlât couramment le roumain, et que dans sa librairie on vendît essentiellement des livres roumains.

À 5 ans, déporté en Transnistrie avec toute la population juive de Bucovine, je ne connaissais que le roumain. Lors de mon premier exode au-delà du Dniestr, la langue roumaine subit l’exil en même temps que moi.

Auteur: Manea Norman

Info: La cinquième impossibilité, p. 45, première page du texte "La langue exilée", 2002

[ judaïsme ] [ enfance ]

 

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cartésianisme

Autrement dit, tout le système du savoir tel que Descartes l’a décrit est tiré, par une opération purement intellectuelle, d’un petit nombre de principes a priori estimés évidents. Cette affirmation est capitale, car elle implique la méconnaissance de la vraie révolution intellectuelle du XVIIe siècle, c’est-à-dire de la méthode consistant à aller des faits aux causes et non plus à supposer des principes universels dans la nature pour en déduire les phénomènes et leurs explications. L’usage cartésien de la notion de causalité tourne le dos à la science de son temps, dont sa philosophie ne peut donc nullement être considérée comme la "totalisation" ni même comme le début d’une prise de conscience moyennement lucide. Inconscient des concepts neufs qui naissaient sous ses yeux, Descartes recommande "de commencer par la recherche des premières causes, c’est-à-dire des principes", ce qui est préconiser le retour aux physiques et aux biologies déductives de l’Antiquité, dans ce que l’Antiquité offrait de plus stérile, et non pas dans ce qu’elle offrait de points d’appui pour lutter contre la scolastique. […]

Aussi ne faut-il pas se méprendre sur les applications pratiques et les expériences dont Descartes annonce le programme à la fin du Discours de la méthode. Il ne se propose pas d’expérimenter au sens où Galilée le faisait. A l’inverse, comme Platon, il a confiance dans la validité absolue de ses principes a priori, aperçus par la seule lumière du raisonnement, et donc, par avance, il est sûr de leur efficacité dans la pratique.

Auteur: Revel Jean-François

Info: Préface au Discours de la méthode de René Descartes, Librairie générale française, 1973, page 17

[ critique ] [ conservateur ] [ préjugé ]

 

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mythologie grecque

Le paradigme ovidien du désespoir de la séparation met en scène un séduisant jeune homme, Narcisse, dont la nymphe Écho – Écho la résonnante (resonabilis Echo) "qui ne sait ni se taire quand on lui parle, ni parler la première" - brûlée de désir, est amoureuse. Méprisée, elle le maudit, et Narcisse va subir le tourment du non-séparé, privé d’écho, indécis devant son image, et conséquemment méconnaissant l’objectivité-altérité du monde.

Tourment de celui qui voyant, ne sait pas ce qu’il voit (quid videat nescit) : s’approchant d’une source pour apaiser sa soif, et tandis qu’il boit, épris soudain de son image, "il prend pour un corps ce qui n’est que de l’eau". Narcisse demeure étranger à ceci, que j’exprimerai en empruntant à Paul Valéry : faire entrer dans ce qui est, le levain de ce qui n’est pas. Nous retrouvons, par le mythe, la problématique d’un vide symbolique, la question de l’être au cœur de l’institution du sujet

[...] le mythe de la nymphe Écho s’offrant amoureusement à Narcisse emprisonné dans l’étreinte de lui-même devient pour nos le paradigme de la vulnérabilité du principe de Raison. En termes politiques, le mythe invite à reconnaître l’absolutisme inhérent à la fonction d’instituer, quand il s’agit du pouvoir de manier ce que, depuis Freud, nous appelons le narcissisme, c’est-à-dire de manœuvrer les identifications du sujet à travers le rapport à l’image de soi : la Raison est en cause, car sont en jeu l’inceste et son autre face, le meurtre.

Auteur: Legendre Pierre

Info: Dans "Leçons X, Dogma : Instituer l'animal humain", Librairie Arthème Fayard, 2017, pages 123-124

[ interprétation ]

 

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nature

Ainsi on rebrousse chemin, après avoir amarré la barque dans une trouée des roseaux, et s'être étendu un moment sur l'herbe de la berge. Le soleil réchauffe encore le vallon de toute sa vigueur ; il n'y a pas un souffle d'air, mais une barre de fraîcheur s'allonge déjà au pied de chaque arbre en travers de la rivière, aussi distincte qu'une ombre portée. Souvent j'ai entendu chanter dans les barques qui revenaient de Coulènes ; ainsi que l'eau lisse par-dessus la crête du barrage, ce qui s'épanchait dans ce chant, c'était comme un excédent tranquille ; seulement ce qui débordait à la fin, sans violence, de l'engrangement d'une journée sans nuages. Les voix, que le soir isole et rend plus liquides, font résonner au retour l'écho de la Roche qui Boit ; la tour quadrangulaire de la chapelle enfin est en vue par-dessus les roselières : le bronze de sa cloche qui sonne languissamment l'heure retentit toujours plus proche qu'on ne s'y attendait et semble élargir sur l'eau, amortir sans hâte ses vibrations comme un caillou qui tombe dans une mare. C'est d'ici seulement, encadrée entre les bouquets plumeux des roseaux, reflétée sur l'eau tremblante, et cassée comme une mosaïque par les feuilles des macres et des nénuphars, que cette laide bâtisse de pèlerinage n'est pas tout à fait indigne qu'on la regarde, et mérite le nom secret que je lui conserve dans mon souvenir, nom que j'ai volé à une pauvre bourgade de la Brière : la chapelle-des-Marais.

Auteur: Gracq Julien

Info: "Les eaux étroites", librairie José Corti, 1976 – pages 70-71]

[ moire ] [ réverbération ] [ littérature ]

 

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école laïque

Cette propension, si contraire à l’esprit et aux espérances du vrai libéralisme, s’expliquerait mal si la sphère des intérêts religieux n’était beaucoup plus vaste qu’elle ne le semble au premier abord. Les préoccupations religieuses, on l’a vu maintes fois dans les dernières années, compliquent et passionnent bien des questions diverses. C’est dans le champ de l’enseignement surtout que les partis politiques sont exposés à des conflits avec l’Eglise ; c’est sur ce terrain glissant que l’Etat est le plus souvent poussé à entrer en lutte avec elle au nom de la raison, de la science ou de l’intérêt national. Oubliant son incompétence en matière de doctrines, il se laisse parfois entraîner à faire contre les idées religieuses ce qu’il a longtemps pratiqué à leur profit. Il se laisse investir du rôle et des fonctions de la religion ; il a ses dogmes philosophiques ou scientifiques qu’il fait prêcher au peuple, et jusqu’à ses catéchismes qu’enseigne une sorte de sacerdoce laïque. Il tend à s’arroger le droit qu’il dénie à l’Eglise, le droit de façonner les générations à sa ressemblance et de couler les âmes dans un moule de son choix, en sorte que si les prétentions de certains croyants nous ramèneraient au moyen âge, celles de certains démocrates nous feraient reculer jusqu’à cette espèce de communisme moral où l’enfant, regardé comme chose publique, était la propriété de la cité. Quelle déconvenue pour les libéraux, qui avaient proclamé le principe de l’incompétence de l’Etat et qui en attendaient la pacification religieuse !

Auteur: Leroy-Beaulieu Anatole

Info: Les catholiques libéraux, l'Église et le libéralisme de 1830 à nos jours, Librairie Plon, 1885, pages XVI-XVII

[ endoctrinement ] [ substitution ] [ éducation ]

 

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réflexivités

A chaque fois qu'un nouveau lecteur s'empare d'un roman, il le récrit, il en fait un remake, il le met en scène tel qu'il ne l'a encore jamais été. Le père Goriot a des centaines de millions de têtes différentes, Madame Bovary autant de voix, et si vous lisez demain "la Recherche du temps perdu ", vous entendrez une Sonate de Vinteuil dont vous inventerez chaque note. Vous l'entendrez tout aussi distinctement que ce Swann qui sous votre crâne l'entendra aussi pour la première fois. Car le Swann que vous aurez forgé n'aura jamais existé avant que vous ne le fassiez apparaître. Imaginez la foule immense des Swann recrées par les lecteurs de "la Recherche" depuis que Proust l'a tiré du néant. Une foule immense comme la population d'une mégalopole. Des gens dont aucun n'a la même tête, dont les vêtements se ressemblent à peine, et chacun de murmurer dans la cacophonie générale sa "petite phrase de Vinteuil" dont les autres n'ont pas la moindre idée. Lire, c'est inventer en silence un univers. C'est le contraire de la servitude. Lire, c'est un acte d'indépendance. Il faut aller chercher le texte au fond d'une librairie, d'une bibliothèque, d'un grenier où il nous attend depuis trois générations et suivre patiemment ses phrases comme des filons. Lire, c'est claquer la porte aux images et à la bande-son que l'environnement nous impose. C'est ne plus rien laisser entrer en soi que le cerveau ne filtre, ne réfléchisse, ne recrée. Recréer, c'est créer. Soyez Dieu, bordel, lisez !

Auteur: Jauffret Régis

Info: in "Marianne n° 1097

[ harangue ] [ lecture ] [ liberté ]

 

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destin

Oui, certes, la matière est grave, presque triste, digne d'analyse surtout. Le fait que je vais vous révéler a, en effet, pour point de départ, l'existence d'une fatalité s'ajoutant au lourd faisceau déjà des fatalités humaines et longtemps méconnues par les observateurs superficiels. L'alphabet - ça a l'air innocent un alphabet : eh bien ! c'est tout simplement un succédané, comme disent les apothicaires, de la boîte de Pandore - est une source insondable de maux mystérieux ; car dans ses vingt-quatre caractères, chacun de nous a une lettre qui lui porte malheur. Ne vous récriez pas ! Voilà vingt ans que je pioche ma découverte et je suis sûr de ce que j'avance aujourd'hui. J'avais été moi-même l'objet de ma première observation. Mes maîtresses ne me trompaient jamais (oh ! non, elles s'en gênaient, les pauvres !) qu'avec des gens dont le nom commençait par un B. Bientôt je ne leur en voulus plus, car je sentais qu'elles subissaient, comme moi, une loi supérieure à leur volonté. Mais je ne leur aurais pas passé, par exemple, un amant ayant un C ou un D pour initiale. Je me contentai de fuir comme la peste les bonshommes qui s'appelaient Benoît, Bertrand, Barnabé, etc... Et maintenant encore, quand passant devant un corbillard surmonté d'un écusson, je vois un B se prélassant parmi les draperies noires, j'ai un accès secret et coupable de joie mauvaise, quelque chose comme une voix qui me dit intérieurement : Enfin ! en voilà encore un de moins !

Auteur: Silvestre Armand

Info: in "Histoires réjouissantes", éd. A la Librairie illustrée, p. 143-144

[ signes prémonitoires ] [ humour ]

 
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système philosophique

Et c’est ainsi que, dans la construction de sa physique, Descartes accepte toujours de jouer toute sa philosophie sur n’importe laquelle de ses conclusions : car si l’on prétend attribuer au maillon le plus faible la même force qu’au maillon le plus solide, réciproquement la chaîne entière n’a jamais que la force de son maillon le plus faible. Pari gagné sur le mouvement de la Terre : "Je confesse que, s’il est faux, tous les fondements de ma philosophie le sont aussi." (A Mersenne, fin novembre 1633). Pari perdu sur l’instantanéité de la lumière : "Si on m’en pouvait prouver la fausseté, je serais prêt à confesser que je ne sais rien en philosophie." (A Beeckman, 22 août 1634.) L’important est sans doute que le dogmatisme cartésien devait nécessairement jouer ce jeu fou, puisqu’il voulait l’unité de la chaîne sans rien sacrifier de la spécificité des maillons.

Le jeu a été joué, il a été perdu, et – selon toute vraisemblance – il ne pouvait pas être gagné : il nous a laissés devant l’opposition entre une raison individuelle, puissance de critique, et une pluralité de disciplines sans unité. De ce coup de dés, il reste la tentation d’un jeu qui ne peut pas, selon toute vraisemblance, être gagné : la philosophie, qui consiste à jouer justement contre la vraisemblance. Il en reste aussi un ouvrage, le Discours de la méthode : curieusement, on ne le lit plus guère et il a la réputation d’énoncer des banalités depuis que nul ne se risque sur les chemins qu’il proposait.

Auteur: Beyssade Jean-Marie

Info: Commentaire au Discours de la méthode de René Descartes, Librairie générale française, 1973, page 101

[ épreuve ] [ erreur ] [ critique ]

 

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