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causes-effets
Mantharâ détestait son ombre. C’était une chose que d’être bossue, c’en était une autre que de voir sa difformité s’étaler sur un mur, dix fois plus grande que nature. Malheureusement, la servante chargée de la torche, trop lente à descendre du carrosse, la suivait au lieu de la précéder. La flamme vacillante faisait fuir l’ombre de Mantharâ devant elle, danser sa silhouette sur les pavés de la rue puis sur la paroi à l’extrémité de l’impasse. A cette heure tardive, après plusieurs nuits blanches d’attente anxieuse, cette vision était plus que l’infirme n’en pouvait supporter. Elle se retourna brusquement, faisant sursauter la servante avant même que la gifle ne s’abattit sur sa joue. La fille laissa échapper un couinement, mais ne lâcha pas la masâl*. Malgré la faible clarté de la torche, la marque des longs doigts osseux se dessinait aussi nettement que des cils sur sa peau pâle. Elle fixa intensément Mantharâ, se demandant quelle erreur elle avait commise, mais la bossue ne se donna pas la peine de l’en informer. Déjà, elle était repartie de sa démarche traînante vers le fond de l’impasse.
Auteur:
Ashok Kumar Banker
Années: 1964 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain de langue anglaise
Continent – Pays: Asie – Inde
Info:
Le Râmâyana, Tome 1 : Le prince d'Ayodiâ, *torche
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rapports-humains
]
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incompréhension
]
saison estivale
La fin de l'été, aux Solovki, fait penser à un rêve : l'horizon émerge des brumes comme une histoire interrompue au milieu d'un mot, le ciel est gris cendré, la mer d'un gris nacré, et dans l'air c'est l'été de la Saint-Martin. Çà et là, les bouleaux s'enflamment, les herbes jaunissent, la mousse embaume. La terre est recouverte d'une brume grise où dorment prés et marécages ; les lacs aussi semblent sommeiller, rêvant des arbres et des gens penchés au-dessus d'eux. Les gens s'attristent de voir l'été finir et boivent pour prolonger ce rêve. Seulement parmi les oiseaux retentit le vacarme qui précède le voyage : les canards apprennent à nager à leurs petits, les vanneaux pressent au départ, les canards mandarins s'énervent, et les plongeons manigancent quelque chose. Brusquement l'automne est là... ... Nous salons harengs et bolets. Les nuits, sur l'archipel rallongent, comme les ombres des jours, et il fait noir comme dans un four. On aperçoit seulement par moments, tout à coup, des éclats de lumière dans le ciel, comme si elle sourdait de l'autre monde. C'est une sévernoïe sïanié, une aurore boréale...
Auteur:
Wilk Mariusz
Années: 1955 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain
Continent – Pays: Europe - Pologne
Info:
Le Journal d'un loup, p85-86
[
été indien
]
[
littérature
]
femmes-par-hommes
Il n'y a rien de plus obscène que les sentiments. Toutes ces paroles. Que l'ombre d'un ange, un jour, s'approche de toi, alors que tu fais consciencieusement ton travail de pute, les pattes écartées, comme toutes les salopes de cette planète pourrie, les mères, les soeurs, les fiancées, baisées, bourrées, enfilées, défoncées, démolies, haletantes, toujours à essayer de prolonger en jouissant le cauchemar de la vie, comme si ça ne suffisait pas comme ça, déjà, mais non, encore, encore, haletantes, trempées, retournées, malaxées, concassées, déshabillées, en hiver, en été, toujours dans des chambres étouffantes, gigotant, sautant, bavant, hurlant, oh oui que l'ombre d'un ange, par n'importe quel temps, s'approche, dans le silence absolu, et décrète la fin de cette mascarade. Car la vie n'est pas douce, et elle n'est pas bonne, contrairement à ce qu'on essaie de nous faire croire un peu partout. Pas de raisin dans la vigne, pas de figue au figuier. Les feuilles sont flétries, les eaux empoisonnées. La création est ratée, Solange le disait souvent, et les grandes villes sont des repaires de chacals, maintenant : une sale brume recouvre tout.
Auteur:
Martinet Jean-Pierre
Années: 1944 - 1993
Epoque – Courant religieux: Récent - libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Jérôme : L'enfance de Jérôme Bauche
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désespoir
]
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noirceur
]
[
pessimisme
]
échographie
Le jour où Pierre reçut la grande photo sur carton, il sauta en l'air, ne se contint plus.
- Je distingue très mal l'image.
On apercevait, en un brouillard de grisaille, le bas de la cage thoracique, l'ombre mate du bassin maternel et le squelette de l'enfant bien formé, la tête en bas, genoux au menton, faisant une immobile culbute où s'arrondissait son épine dorsale annelée dans un recroquevillement de momie péruvienne, comme dans les plus anciens ensevelissements humains, comme dans les jarres néolithiques.
- Que c'est laid ! dit Pierre, déçu.
- C'est ravissant, dit Hedwige, enthousiaste.
Quelques jours plus tard, ce fut une autre affaire. Cette fois, Pierre voulut écouter au stéthoscope battre le cœur de l'embryon. Il se penchait sur cette grande caverne habitée qu'était le corps d'Hedwige, appuyait son front contre elle, enfonçant aux oreilles les deux écouteurs, prêtant une attention auditive à ce ronron, à ce léger cliquetis qu'était le cœur de son enfant.
- Si tu me continues à me tourmenter ainsi, il aura des convulsions, cria Hedwige, crispée.
Auteur:
Morand Paul
Années: 1888 - 1976
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain
Continent – Pays: Europe - France
Info:
l'homme pressé (1941, 350 p., Gallimard, p. 230, 231)
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poésie du détail
]
[
couple
]
[
famille
]
[
cocasserie émouvante
]
couchant
Les beaux jours sont rares, mais de quelle magie ils parent la blanche banquise ! La plaine, comme poudrée de diamants, étincelle sous le clair soleil ; les icebergs et les hummocks dressent leurs arêtes d'argent et projettent derrière eux des ombres diaphanes, d'un bleu si pur qu'elles semblent un lambeau détaché du ciel. Les chenaux décrivent des méandres de lapis-lazuli, et, sur leurs bords, la jeune glace prend des teintes d'aigue-marine. Vers le soir, insensiblement, les ombres changent, tournent au rose tendre, au mauve pâle, et, derrière chaque iceberg, il semble qu'une fée, en passant, ait laissé accroché son voile de gaze. Lentement, l'horizon se colore en rose, puis en jaune orange, et, lorsque le soleil a disparu, longtemps encore une lueur crépusculaire persiste, s'estompant délicieusement sur le fond bleu sombre du ciel où scintillent, innombrables, les étoiles. Plus souvent, hélas ! la brume noie tout ce qui nous entoure dans de blancs floconnement ; les nuages bas se confondent avec les dos arrondis des hummocks ; les ombres ont disparu avec les contours des choses, et c'est à tâtons qu'il faut marcher dans ces blancheurs opaques.
Auteur:
Gerlache de Gomery Adrien De baron
Années: 1866 - 1934
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: marin, explorateur de l'Antarctique
Continent – Pays: Europe - Belgique
Info:
Quinze mois dans l'Antarctique : L'Expédition de la Belgica 1897-1899, pp. 158-159, Chapitre 9, Le premier hivernage dans la banquise australe
[
pôle sud
]
racines
Personne n’est la patrie. Même pas le haut cavalier
qui dans l’aube d’une place déserte
régit un coursier de bronze le long du temps
(…)
Personne n’est la patrie. Même pas les symboles.
Personne n’est la patrie. Même pas le temps
chargé de batailles, d’épées et d’exodes
et du lent peuplement de ces régions
(…)
La patrie, mes amis, c’est un acte perpétuel
comme le perpétuel univers (si l’Eternel
Spectateur cessait de nous rêver
un seul instant, nous serions foudroyés
par le blanc et soudain éclair de son oubli)
Personne n’est la patrie, mais nous devons tous être dignes
de ces anciens gentilhommes qui jurèrent
qu’ils seraient ce qu’ils ignoraient, des Argentins,
(…)
Nous sommes l’avenir
De ces vaillants, la justification
de ces morts. Sauvons-les, assumons cette charge
de gloire que lèguent ces ombres à notre ombre.
Personne n’est la patrie, mais nous le sommes tous.
Que dans mon cœur et dans le vôtre, incessamment
brûle la limpide flamme mystérieuse.
Auteur:
Borges Jorge Luis
Années: 1899 - 1986
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain, devint aveugle, non-voyant
Continent – Pays: Amérique du sud - Argentine
Info:
Oda escrita, 1966, extraits. In "L’autre, le même". Pour célébrer le cent-cinquantenaire de l’indépendance de l’Argentine, traduction Ibarra
[
poème
]
[
nation
]
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continuité
]
fin de nuit
La lune descendait lentement, en beauté, elle s'enfonçait dans les profondeurs de l'horizon, et de longues ombres voilées glissaient dans le ciel, au travers desquelles apparaissaient les étoiles. Bientôt, cependant, elles se mirent à pâlirent elles aussi devant une splendeur à l'est, et l'aube s'annonça dans le bleu naissant du ciel. La mer devint de plus en plus calme, aussi calme que la douce brume qui couvrait son sein et dissimulait ses troubles, tout comme dans notre vie tumultueuse les couronnes éphémères du sommeil recouvrent l'âme meurtrie et lui font oublier son chagrin. Les anges de l'Aurore s'élancèrent de l'orient à l'occident, d'une mer à l'autre, d'un sommet à l'autre, répandant la lumière sur leur poitrine et sur leurs ailes. Ils sortaient des ténèbres, parfaits, glorieux, et avançaient sur la mer calme, sur la basse côte, sur les marais au-delà, et sur les montagnes au-dessus ; sur ceux qui dormaient en paix et sur ceux qui se réveillaient dans la peine ; sur les méchants et les bons ; sur les vivants et sur les morts ; sur le vaste monde et sur tout ce qui y respire ou y a respiré.
Auteur:
Haggard Henry Rider
Années: 1856 - 1925
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain
Continent – Pays: Europe - Angleterre
Info:
She: A History of Adventure
[
épique
]
[
matin
]
écriture
mon ombre m’espionne à chaque pas
pour rendre son rapport à la Mort
mais moi je fais semblant
d’être calme et obéissant
je regarde les croix qui ne sont autres
qu’emplâtres sur la face de la Terre
et je dis : ça me va, Madame la Mort,
ça me va !
le Temps avale avide
les battements de mon coeur
il me laisse comme pourboire
quelques souvenirs
juste quelques petits souvenirs
et je dis : ça me va, Monsieur le Temps,
ça me va !
heureux et triste à la fois
car je suis encore
une dispersion de la lumière
dans une goutte de sang
je fais ma prière
et je dis : ça me va, Madame la Vie,
ça me va !
je fais semblant
d’être calme et obéissant
mais le soir
ayant l’air d’un rêveur
j’écris
et les mots s’alignent
comme des armées silencieuses
sur la feuille de papier
combattant la fatalité
Auteur:
Caragea Ionut
Années: 1975 -
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain, poète et essayiste
Continent – Pays: Europe - Roumanie
Info:
Armées silencieuses
[
poème circadien
]
eros-thanatos
Je laisse courir mes doigts sur la photo
déchirée d’un magazine & pliée
chez Fils et Amants.
Elle a une main sur sa hanche
& l’autre pointe un revolver
vers une cible échappant
de l’objectif. Entre une équipe
de femmes en treillis, elle met au défi
le soleil de pénétrer son ao dai.
Des officiers de haut rang laissent leurs yeux
voyager sur la soie tandis qu’ils poussent des pions
sur des cartes sous un ciel de mort.
Les ombres rampent sous ses pieds.
Sait-elle que les soldats la déshabillent
derrière leurs lunettes noires d’aviateurs ?
Elle est aussi délicate qu’un roseau
sur la berge, juste soupesant le flingue
dans sa main, un lotus maculé de sang
enraciné dans l’air agité.
Un autre genre de fleurs voluptueuses
dans la chair, de mauvais augure comme une photo
sur un cercueil attendant d’être
perdue parmi les papiers & les notes,
mais cela fait quand même mal quand le pistolet
joue avec le cœur de cette manière.
Auteur:
Komunyakaa Yusef
Années: 1947
Epoque – Courant religieux: Récent et libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: poète, essayiste, professeur
Continent – Pays: Amérique - Etats-Unis
Info:
Le Xuan, Beau printemps, traduction Cédric Barnaud
[
guerre
]
[
brutalité
]
[
réconfort
]
humanité
L'énergie d'un trillion de bombes atomiques dans chaque centimètre cube d'espace
Si notre univers n'est que la pâle ombre d'un ordre plus profond, qu'est-ce qui se cache encore, enveloppé dans la chaîne et la trame de notre réalité ? Bohm a une idée. Selon notre compréhension actuelle de la physique, chaque région de l'espace est remplie de différents types de champs composés d'ondes de longueurs variables. Chaque onde possède toujours au moins une certaine énergie. Lorsque les physiciens calculent la quantité minimale d'énergie qu'une onde peut posséder, ils constatent que chaque centimètre cube d'espace vide contient plus d'énergie que l'énergie totale de toute la matière de l'univers connu ! Certains physiciens refusent de prendre ce calcul au sérieux et le voient comme erroné. Bohm pense que cet océan infini d'énergie existe bel et bien et nous renseigne au moins un peu sur la nature vaste et cachée de l'ordre implicite. Il pense que la plupart des physiciens ignorent l'existence de cet énorme océan d'énergie parce que, comme les poissons qui n'ont pas conscience de l'eau dans laquelle ils nagent, on leur a appris à se concentrer principalement sur les objets noyés dans l'océan, sur la matière.
Auteur:
Talbot Michael Coleman
Années: 1953 - 1992
Epoque – Courant religieux: Récent et libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain, journaliste spécialiste des phénomènes paranormaux
Continent – Pays: Amérique du nord - Usa
Info:
[
basses vibrations
]