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raréfaction

Exposé sur les montagnes du coeur. Vois, tout petit, là-bas,

vois : le dernier hameau de paroles, et plus haut,

mais si petite aussi, une dernière bergerie

de sentiment. Discernes-tu ?

Exposé sur les montagnes du coeur. Pierraille

sous les mains. Sans doute pousse ici

encore quelque fleur ; sur le gouffre muet

fleurit une herbe qui ne sait, chantant.

Mais pour qui sait ? ah, qui commençait à savoir

et se tait à présent, exposé sur les montagnes du coeur.

Sans doute passent ici, la conscience sauve,

bien des bêtes, de sûres bêtes de montagne

qui changent, qui s'attardent. Et le grand oiseau abrité

tournoie autour du pur refus des cimes.  Mais

ici, sans abri sur les montagnes du coeur...

 

Auteur: Rilke Rainer Maria

Info: in "Poémes épars (1907-1926), éd. Seuil, p.87 - trad. Ph. Jaccottet

[ hauteurs ] [ poéme ] [ répétition ] [ solitude ]

 
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Ajouté à la BD par Benslama

Portugal

J'aime Lisbonne aux ruelles détrempées, dégringolant vers le Tage dans un charivari de voitures, de linges humides, de ferronnerie rouillée. J'aime Lisbonne, tachetée de couleurs ocres et rouges, aux poumons noircis par les gris insaisissables du ciel, de l'eau, des rues. J'aime Lisbonne, solitaire en ses palmiers brunis par le soleil, Lisbonne aux murs vérolés, Lisbonne des antennes paraboliques sur les balcons défoncés. J'aime le Musée d'Art Antique mais plus que tout j'aime les nuages au-dessus des façades, le petit peuple lisboète sous le chapiteau céleste, les joueurs d'échecs à deux pas du Cimetière des Plaisirs, les travailleurs austères et impeccables qui se croisent sans se connaître, le parc Edouard VII dont la serre aux essences exotiques de l'Estufia fria et quente finit par disparaître derrière des allées aux essences péruviennes, australiennes, chinoises, dans une jungle de poche où voyager rime avec rester immobile.

Auteur: Le Blanc Guillaume

Info: Lisbonne au coeur

[ ville ]

 

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risque zéro

On a agité le fétiche du principe de précaution, et même celui du principe d’extrême précaution, pour essayer de combler les désirs des populations. Or les populations n’ont pas de désirs, sauf celui de faire tourner en bourriques leurs dirigeants à travers des "psychoses collectives", c’est-à-dire des bouffées délirantes mises en scène par les médiatiques, et auxquelles les politiques doivent aussitôt répondre par une surenchère dans le délire. Ce sont des fêtes, des fêtes noires, des fêtes de la peur, des parades de la peur. Dans la crise de la vache folle, tout le monde a raconté que Chirac avait gagné parce qu’il avait dit, en somme, qu’il fallait absolument qu’il n’y ait plus de risques du tout, nulle part, dans aucun domaine. Pas de risque, ça signifie la mort, ça signifie la table rase, la disparition de tout, la paix des cimetières et des nurseries fusionnées.

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "Exorcismes spirituels, tome 3", Les Belles Lettres, Paris, 2002, page 283

[ dictature sanitaire ] [ expiation ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

morgue

Les tiroirs coulissaient sans le moindre bruit, dans cette fluidité propre aux songes. Et dans cette implacable logique des rêves, David savait déjà que Kristel se trouverait dans le tiroir du milieu. C'était là qu'elle avait échoué, en fin de compte, installée au milieu des autres cadavres, tel un simple morceau de viande ouverte, empaquetée, numérotée. Il ne voulait pas voir ça. Il voulait que ce rêve cesse tout de suite. Mais le rêve continuait. Une odeur de gaz carbonique montait dans l'air. Un froid emplissait le corps de David, le paralysant. Il n'avait jamais fait de rêve d'un tel réalisme auparavant.
Le tiroir du milieu s'ouvrit à sont tour, et Kristel était bien là, paisiblement allongée à l'intérieur. Comme endormie, si ce n'étaient ses immenses yeux, deux ciels d'été fixement ouverts, qui reflétaient une totale incompréhension. Comme si elle se demandait "pourquoi" alors que la vie l'abandonnait.

Auteur: Sire Cédric

Info: L'enfant des cimetières

[ dépouille ]

 

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deuil

Sur les murs de la chambre toutes ses dernières toiles étaient accrochées, formant comme un halo autour de lui et - par la luminosité ou le génie qu'elles irradiaient - rendaient sa mort encore plus lamentable pour nous artistes. ...Au dehors, le soleil était férocement chaud. Nous avons monté la colline d'Auvers en parlant de lui, de l'élan hardi qu'il avait donné à l'art, des grands projets qui l'avaient toujours préoccupé, du bien qu'il avait fait à chacun de nous. Nous sommes arrivés au cimetière, un petit cimetière tout neuf, semé de tombes fraîches. Il est sur la hauteur, face aux champs prêts pour la moisson, sous un immense ciel bleu qu'il aurait pu encore aimer - peut-être. Puis on le descendit dans la tombe. Qui n'aurait pleuré à ce moment-là - le jour était trop à sa ressemblance pour nous empêcher de penser qu'il aurait pu encore vivre heureux.

Auteur: Bernard Emile

Info: après la mort de Van Gogh

[ peinture ] [ été ]

 

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sur le fil

Le bus roulait sur une étroite bande de ciment, juste au dessus de l'eau, sans garde-fous, sans rien de rien ; c'est tout ce qu'il y avait. Le chauffeur se calait dans son siège et on fonçait sur cette étroite bande de ciment bordée d'eau, et tous les passagers du bus, les vingt-cinq ou quarante ou cinquante-deux personnes, lui faisaient confiance ; moi : jamais. Des fois c'était un nouveau chauffeur, et je pensais : comment sélectionnent-ils ces fils de pute? L'eau était profonde des deux côtés ; à la moindre erreur d'appréciation, il nous tuait tous. C'était ridicule. Imagine qu'il se soit disputé avec sa femme ce matin? Ou qu'il ait le cancer? Ou des visions mystiques? Mal aux dents? N'importe quoi. C'était couru : il nous foutait en l'air. Je savait que si c'était MOI qui conduisais, j'aurais envisagé la possibilité ou eu l'envie de noyer tout le monde.

Auteur: Bukowski Charles

Info: Dans "Factotum"

[ fragilité ] [ doute ] [ déconstruction ] [ peur ] [ effroi ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

plaisir

L'homme dépasse toujours, par quelque côté, les définitions par lesquelles on prétend le cerner. Du moins, l'homme dont je parle. Celui-là ne veut pas son bonheur, comme il vous plaît de le dire, il veut sa Joie, et sa Joie n'est pas de ce monde, ou du moins elle n'y est pas tout entière. [...] Je ne dis pas que vos définitions soient absurdes, mais elles ne nous seront jamais communes. Car je puis utiliser les vôtres, et vous ne pouvez vous servir des miennes. Elles vous ont permis parfois d'atteindre un temps à la grandeur - un temps seulement - car vos civilisations s'effondrent au moment même où vous les croyez immortelles, comme ces enfants éblouissants qui portent en eux le germe fatal et ne dépassent pas l'adolescence. [...] Vous ne ferez rien de durable pour le bonheur des hommes parce que vous n'avez aucune idée de leur malheur.

Auteur: Bernanos Georges

Info: Les grands cimetières sous la Lune

[ consumable ] [ ignorance ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

désagrégation immuable

Le désert envahit la terre de l'homme subrepticement. Celui-ci n'est pas fellah, mais il possède tout de même un bout de terrain. Il l'avait possédé. Encore tout jeune garçon, il avait réparé le mur, l'avait cimenté, avait transporté des pierres aussi lourdes que lui, les avait soulevées, les avait mises en place. Mais le désert pénètre malgré tout. Le mur est-il traître, pour laisser passer le désert de la sorte? A moins que le jeune garçon ne soit possédé par un djinn qui sabote le travail de ses mains? Ou la puissance du désert est-elle si grande que ni le garçon, ni le mur, ni le père, ni la mère décédés ne peuvent rien contre lui?

Non. Le désert envahit. C'est un fait; rien de plus. Aucun djinn ne possède le garçon, aucune traîtrise n'habite le mur, aucune hostilité le désert. Rien.

Bientôt, il n'y aura rien. Bientôt, le désert seulement.

Auteur: Pynchon Thomas

Info: V.

[ effritement ] [ éternel ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

crépuscule

L'orbe d'or du soleil tombé des cieux sans bornes
S'enfonce avec lenteur dans l'immobile mer,
Et pour suprême adieu baigne d'un rose éclair
Le givre qui pétille à la cime des mornes.

En un mélancolique et languissant soupir,
Le vent des hauts, le long des ravins emplis d'ombres,
Agite doucement les tamariniers sombres
Où les oiseaux siffleurs viennent de s'assoupir.

Parmi les caféiers et les cannes mûries,
Les effluves du sol, comme d'un encensoir,
S'exhalent en mêlant dans le souffle du soir
A l’arôme des bois l'odeur des sucreries.

Une étoile jaillit du bleu noir de la nuit,
Toute vive, et palpite en sa blancheur de perle ;
Puis la mer des soleils et des mondes déferle
Et flambe sur les flots que sa gloire éblouit.

Et l'âme, qui contemple, et soi-même s'oublie
Dans la splendide paix du silence divin,
Sans regrets ni désirs, sachant que tout est vain,
En un rêve éternel s'abîme ensevelie.

Auteur: Leconte de Lisle Charles-Marie

Info: L'orbe d'or

[ couchant ] [ poème ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

labeur

Les hommes travaillent généralement trop pour pouvoir encore rester eux-mêmes. Le travail : une malédiction que l'homme a transformée en volupté. OEuvrer de toutes ses forces pour le seul amour du travail, tirer de la joie d'un effort qui ne mène qu'à des accomplissements sans valeur, estimer qu'on ne peut se réaliser autrement que par le labeur incessant - voilà une chose révoltante et incompréhensible. Le travail permanent et soutenu abrutit, banalise et rend impersonnel. Le centre d'intérêt de l'individu se déplace de son milieu subjectif vers une fade objectivité ; l'homme se désintéresse alors de son propre destin, de son évolution intérieure, pour s'attacher à n'importe quoi : l'oeuvre véritable, qui devrait être une activité de permanente transfiguration, est devenue un moyen d'extériorisation qui lui fait quitter l'intime de son être. Il est significatif que le travail en soit venu à désigner une activité purement extérieure : aussi l'homme ne s'y réalise-t-il pas - il réalise.

Auteur: Cioran Emil Michel

Info: Sur les cimes du désespoir, OEuvres, Quarto Gallimard 1995, p.88-89

[ abrutissement ]

 

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