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vagin

Personnellement, j'ai un con (cunt). Parfois, c'est 'chatte' ou 'foune', mais la plupart du temps, c'est mon con. Le con est un mot propre, vieux, historique et puissant. J'aime que mon conduit d'évacuation soit aussi le plus puissant juron de la langue anglaise. Ouais. Il est puissant à ce point, les gars. Si je vous dis ce que j'ai en bas, vieilles dames et ecclésiastiques pourraient s'évanouir. J'aime comment les gens sont choqués quand on dit "cunt". C'est comme si j'avais une bombe nucléaire dans le slip, ou un tigre, ou un flingue.

En comparaison, le juron le plus puissant que les hommes aient sorti de leurs parties intimes est "couillon", plutôt franchement banal, et je crois qu'on est autorisé à l'utiliser dans, par exemple, Blue Peter* si quelque chose ne va pas. Dans une culture où presque tout ce qui est féminin est encore considéré comme source de dégoût et/ou de faiblesse - menstruation, ménopause, le simple fait d'appeler quelqu'un "fille" - j'aime que "con" soit, à lui seul, le mot suprême et inaltérable. Il a une résonance presque mystique. C'est un con - nous savons tous que c'est un con - mais on ne peut pas tant le nommer ainsi. On ne peut pas dire le mot même. C'est trop puissant. Un peu comme les Juifs ne doivent jamais dire "Tetragrammaton" - se contentant de 'Jéhovah' en lieu et place.

Auteur: Moran Caitlin

Info: How to Be a Woman. *émission jeunesse

[ pensée-de-femme ] [ mot interdit ]

 
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pensée-de-femme

Je fais aménager le sous-sol de ma maison en appartement indépendant, je le loue à une charmante personne du même âge que moi, veuve elle aussi ou divorcée, qui devient une compagne précieuse, une fidèle amie. Tel est le rêve éveillé dans lequel je me surprends sans cesse à retomber. Il arrive que le locataire soit un homme, ce qui entraîne des conséquences d'un niveau romanesque trop digne de la collection Harlequin pour les coucher par écrit, même dans ce journal intime. C'est comme si j'étais dédoublée - la Helen Reed qu'on voit du dehors, celle qui s'installe dans ses nouvelles fonctions à l'université de Gloucester, calme, efficace, consciencieuse ; et une autre Helen Reed victime de ses illusions, cinglée, désincarnée, qui mène une vie parallèle dans la tête de la première.

La tension qu'engendrent ces deux vies simultanées est presque intolérable. J'attends impatiemment l'heure d'aller me coucher, pour qu'elles entrent ensemble en repos. Le sommeil est un bonheur, mais hélas un bonheur que par définition on ne peut savourer. Il y a peut-être un instant de langueur délicieuse où on se sent décrocher, comme lors d'une anesthésie, mais ensuite on ne reprend conscience que pour savoir que c'est fini, qu'on est réveillé, probablement aux petites heures de la nuit, en proie à des tourments et à des regrets plus accablants que jamais, et il est impossible de se rappeler comment c'était de ne pas les éprouver.

Auteur: Lodge David

Info: Pensées secrètes

[ fantasmatique ] [ romanesque ] [ songes ]

 
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Afrique

Un air musical - qui convie au recueillement - flotte au salon. Les haut-parleurs distillent les morceaux choisis de Louis Armstrong. Pessa invite Wonouplet à s'installer en face de lui. Sans plus lui accorder la moindre attention, il s'enferme dans une attitude de concentration quasi mystique. Il écoute de toutes ses fibres, de tout son être.
Wonouplet a souvent entendu les titres d'anthologie de celui que les mordus du jazz appellent avec affection et déférence le pape Louis Ier. Mais, jamais elle n'a été autant pénétrée, autant chavirée par sa puissance d'évocation du martyre de ses frères de race noire. Le calme et le silence des lieux, le petit côté mystérieux de la maison, l'attitude recueillie de Pessa sont autant de facteurs qui contribuent à caresser sa fibre essentielle, à flatter généreusement son âme, à la plonger dans une sorte de nirvana.
Et comme des gouttes de cristal pur, tombent les premières notes de Nobody knows the trouble I've seen. Un fluide étrange et mielleux envahit Wonouplet. Elle est prise de part en part par cette musique extraordinaire avec laquelle elle fait corps. Et toutes ses fibres participent de la même vibration qui insuffle un baume merveilleux dans les profondeurs les plus intimes, les plus insondables, de son âme. Elle est foudroyée. Littéralement.
Pessa lève sur elle un regard embué de larmes. Le fleuve de l'émotion entre en crue en elle. Pessa ne dit pas un mot mais ils se sont compris. La magie des notes de musique, la voix de Louis Armstrong, imposante et savoureuse, l'évocation de la plus grande tragédie de l'humanité ont opéré en lui une métamorphose plurielle.

Auteur: Nangala Camara

Info: Le Printemps de la liberté

[ source ] [ émoi ]

 

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femmes-hommes

Dans le même temps, les mains peuvent vagabonder sur la poitrine, douce ou velue, vers les petits renflements des mamelons qu'elles peuvent faire doucement rouler entre les doigts, vers le ventre, vers les cuisses, vers les fesses, vers les épaules. Everywhere. Toucher caresser se frotter sucer embrasser mordiller lécher se vautrer passer repasser se rouler se pourlécher.
Elle bascule. Le visage plonge dans les draps.
Pendant que la surface de la langue s'exerce à enrober le gland, les doigts peuvent courir le long de la verge, la soumettant à des pressions variées. Frôlements avec le plat des dernières phalanges ou solide empoignade. Dans le même temps, on s'abandonne à la danse des reins qui frémissent d'impatience. Pendant que la bouche et les mains s'affairent le suc se répand entre les cuisses et les cuisses se frottent l'une l'autre dans la délectation du plaisir donné et promis les hanches se déhanchent le dos louvoie et les seins se glissent dans l'entrejambe. Le corps tourne autour du pivot. Bel axe en vérité.
Elle a les yeux brillants, c'est sûr.
- Et l'assurance de faire mouche à chaque volte de la langue ! On est intimement certaine, dans cette sorte de création, du plaisir donné.
La voix se fait plus rapide.
- Je passe ainsi et ici mes lèvres sur le gland, sans y penser, c'est-à-dire sans le calculer, et le gémissement de l'embouché arrive à mes oreilles ravies. Et la moindre caresse appelle le gémissement et chaque caresse redouble le plaisir donné et chaque fois la bouche embouche sans la moindre hésitation et sans le plus petit calcul, avec la perfection des gestes semi-conscients.

Auteur: Cannone Belinda

Info: L'adieu à Stefan Zweig

[ fellation ] [ excitation ] [ sensualité ]

 

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initiation

Imaginons la durée du parcours dans ce vide [le désert] où les êtres et les événements paraissent échapper sans cesse au cadre de l’espace et du temps. Parfois, tel un mirage squelettique, un acacia se tord dans la chaleur qui vibre… Un chameau ivre au loin… Des mouches incessantes qu’on voudrait pulvériser. Les pas tristes puis lourds s’additionnent au fil des jours et la nuit les pieds font mal ou sont glacés dans un vent cinglant où, par -4°, on peine à s’endormir. A tout cela vient s’ajouter la soif du jour, brièvement calmée par une eau salée à vomir qui redouble la fièvre et l’envie, par de médiocres sardines étalées sur un pain moisi qu’on se partage avec ânes et chameaux. Au 15e jour, au 20e ou plus tard, il se passe alors quelque chose. Comme s’il avait fallu ce décapage au marcheur, à travers l’aprêté des éléments, pour éroder puis faire chuter "une vision du monde", un autre apparaît et monte comme une aurore dans les paysages d’une âme qui s’étonne de se découvrir ainsi, telle une inconnue à elle-même et qui commence à se dire. Dès cet instant, la vie se transforme. Le désert fonctionne comme un miroir maintenant ; tout le subtil du réel avec ses touches de couleurs variées et ses tonalités superbes de sons et de parfums, de sentir et de toucher, comblent progressivement le voyageur. […] Il semble que la vie, tout en étant là dans sa plus grandiose saveur sensible, dans sa sensualité même, participe à d’autres événements intimes que je ne peux désigner que comme étant ceux de l’âme elle-même, qui prend connaissance de sa propre substance.

Auteur: Albrecht Pierre-Yves

Info: L'initiation, pages 222-223

[ transfiguration ] [ état de conscience ] [ épreuve ] [ dépassement ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

métaphysique

Il n'y a en effet rien de plus présomptueux de la part de l'individu que de s'imaginer qu'en raison du fait qu'il conçoit quelque chose qui transcende la Divinité personnelle, il peut ne pas tenir compte de Dieu dans sa quête de la transcendance. (...) la grâce de Dieu est l'indispensable moyen d'atteindre la transcendance. Même si sur le plan discursif il semble y avoir là une contradiction - la grâce émanant du Dieu personnel donnant lieu à la réalisation de l'Essence qui transcende le Dieu personnel -, l'apparence de contradiction disparaît dès que l'on comprend le principe essentiel suivant : le Dieu personnel n'est rien d'autre que l'Essence divine s'affirmant ou se déterminant au niveau de l'Être ; c'est la seule et même Réalité qui s'exprime comme Divinité personnelle, quel que soit le moyen dialectique d'indiquer la relativité de ce niveau de l'Être face à l'Absolu surontologique. Ainsi, sous ce rapport, la "grâce de Dieu" n'est rien d'autre que l'attraction ontologique qu'exerce l'Essence transcendante sur la conscience la plus intime de l'individu ; le moyen par lequel le Dieu présent au-dedans est appelé à réaliser le Dieu présent au-dessus ; le processus par lequel l'immanence rejoint la transcendance.

Avant de pouvoir les dépasser, il faut ainsi donner son dû, au niveau approprié, à chacun des trois "objets" fondamentaux - la religion, l'individualité, le Dieu personnel - appelés à être transcendés. S'acquitter de ce triple dû signifie : suivre les préceptes de la religion, permettre à la vertu spirituelle de gouverner l'âme, avoir une soumission totale à Dieu conçu comme l'infiniment "Autre" et une foi illimitée en Lui. C'est seulement alors, et conformément aux moyens spécifiques et aux conditions qu'offre la Tradition, que l'on peut s'engager sérieusement sur la voie de la transcendance.

Auteur: Shah-Kazemi Reza

Info: Dans "Shankara, Ibn Arabi et Maître Eckhart'

[ théologie ] [ créateur-créature ] [ foi source ] [ humilité ] [ triade ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

gestalt

Quand les manchots font la tortue.
Chaque année, les manchots empereurs mâles réalisent une petite prouesse. Juste après la ponte, et alors que les femelles sont parties pêcher à des centaines de kilomètres de là, ils restent couver le précieux oeuf sur la banquise durant plus de soixante jours. Pour résister aux rigueurs de l'hiver austral - jusqu'à -30 °C et des vents pouvant souffler jusqu'à 200 kilomètres/heure -, une seule solution: se serrer les uns contre les autres au sein d'une formation compacte, appelée la "tortue". Les chercheurs ont montré qu'à l'intérieur d'une tortue, les températures peuvent avoisiner les 37 °C, soit une température proche de la température corporelle du manchot. Néanmoins, ce qui se passait au sein de cette tortue restait encore mystérieux...
Grâce à des vidéos tournées près de la base scientifique française de Dumont d'Urville, en Antarctique, et au travail de modélisation effectué par une équipe de biophysiciens allemands, on en sait désormais plus sur le fonctionnement intime des tortues. Elles bougent imperceptiblement, toutes les demi-minutes environ, selon une onde de propagation proche de ce qui se passe dans les embouteillages automobiles. "Il suffit qu'un individu, situé au centre ou en périphérie de la tortue, se déplace d'un ou deux centimètres, pour que l'ensemble du groupe se mette à bouger. Pour éviter que l'air froid ne s'engouffre, son voisin comble l'espace laissé vacant, et ainsi de suite...", décrit André Ancel, chercheur CNRS au Département d'écologie, physiologie et éthologie de l'Institut pluridisciplinaire Hubert Curien, qui cosigne l'article paru dans le New Journal of Physics.
L'intérêt de ces déplacements incessants est que les individus exposés au froid, sur les bords de la tortue, soient remplacés régulièrement. Mais ce ne serait pas le seul intérêt. Les chercheurs tentent désormais de déterminer si ces "vagues" régulières n'ont pas aussi la fonction de faire tourner l'oeuf entre les pattes du mâle, afin que sa température reste homogène (il est exposé à la fois à la chaleur de la poche incubatrice du père et au froid des pattes sur lesquelles il est posé).

Auteur: Internet

Info: New Journal of Physics

[ mâles-femelles ] [ sciences ] [ survie ] [ animaux ]

 

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femmes-par-hommes

Maintenant, réfléchissant dans le noir à leur passé, il s'apercevait qu'il ne pouvait y avoir qu'une raison à la façon acrobatique et distante que Nora avait de faire l'amour : comme les prostituées qui vendent leur corps, mais non leur plaisir, Nora, simplement, ne l'aimait pas. Toutefois cette explication ne lui sembla pas satisfaisante : Nora répétait constamment qu'elle l'aimait dans les occasions les plus intimes et les plus désintéressées et il n'avait pas de raison d'en douter. Mais alors ? Il se dit que son manque de participation à l'amour ne pouvait s'expliquer que s'il l'entendait au-delà des limites du rapport sexuel. En réalité, pensa-t-il, la manière qu'avait Nora de faire l'amour sous-entendait une attitude psychologique analogue : aux démonstrations amoureuses de Lorenzo elle répondait, en fait, par l'immobilité, l'indifférence, carrément par l'agacement et la répulsion. Maintenant, à y bien repenser, il se rappela que Nora n'aimait pas être caressée sur le visage, alors que c'est une des caresses les plus affectueuses ; dès qu'il ébauchait ce geste, elle ne pouvait s'empêcher de détourner la tête. Qu'est-ce que cela signifiait ? Comment cela pouvait-il être compatible avec l'affirmation obstinée et sincère de Nora qui prétendait l'aimer ? Lorenzo se souvint du comportement analogue d'un de ses chats, chez ses parents, sauvage et méfiant, habitué à vivre à la maison le jour et sur les toits la nuit, il se dérobait à la caresse ou se retournait et faisait mine de le griffer. Lorenzo avait demandé à sa mère pourquoi l'animal ne voulait pas être caressé. Elle avait répondu :
- Parce que tu ne lui plais pas.
- Mais nous lui donnons une maison, de la nourriture, il devrait au moins se laisser caresser.
- Il est égoïste, il veut recevoir et non pas donner. Ou plutôt, si tu réfléchis un peu, il y a quelque chose qu'il nous donne.
- Quoi ?
- Sa beauté. Il est beau. Il se laisse contempler, il ne veut pas donner davantage.
Maintenant, en repensant aux mots de sa mère, il crut pouvoir expliquer l'attitude de Nora dans l'amour. Comme le chat de sa mère, Nora était simplement égoïste : tout en acceptant son amour, elle ne ressentait pas le besoin d'y répondre, elle se contentait de vivre sous ses yeux, de se laisser regarder.

Auteur: Moravia Alberto

Info: La femme léopard

[ distantes ] [ froides ]

 

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troubles psychologiques

Nous avons vu que dans le cas de l’autisme l’invasion par le champ maternel se fait par défaut de consistance du champ paternel, mécaniquement en quelque sorte. Le garçon se noie dans cette emprise fusionnelle. Dans le cas de l’anorexie, l’emprise maternelle est sous le mode actif de l’abus, par confiscation symbolique phallique. L’envahissement maternel dans les deux ordres respectivement féminin et masculin de l’inscription corporelle et de l’institution symbolique occulte le vis-à-vis paternel qui seul permet, par le modèle référentiel de possibilité de placement relationnel correct qu’il représente, l’indispensable et vital établissement de la jeune fille dans sa féminité. N’ayant à proprement parler plus de "place", elle s’efface dans l’ordre spécifique – constituant - de sa présence au monde : l’ordre corporel, non sans avoir préalablement tenté de lutter sur le terrain symbolique du père usurpé par la mère, terrain dont le lieu spécifique structurel est le langage et l’intellection (i.e. l’ordre re-présentatif) : la quasi-totalité des jeunes filles concernées par l’anorexie présentent un profil intellectuel brillant. Cette contre-rotation effectuée dans un premier temps précédent les troubles alimentaires est extrêmement destructive et conduit de fait la jeune fille à s’établir dans une schize intime qui vient disjoindre son unité corps-esprit. C’est dans ce sens qu'on pourrait éventuellement ranger l'anorexie mentale du côté des psychoses, à ceci près qu'il ne s'agit pas d'une disjonction psychique mais que le point de fracturation du sujet s'établit à la jonction corps-esprit. L’anorexie serait donc un trouble réactionnel de l'identification face à une mère abusive, où là encore l'évanescence du père serait en cause. Ce qui en ferait ainsi le pendant structurel féminin de l'autisme. Alors que l’autisme est un trouble de l’établissement de l’être au monde spécifiquement masculin - sa destructivité s’exprime au niveau de l’institution du sujet masculin tout juste avant la cristallisation subjectale, donc typiquement au moment de l’apprentissage du langage, vers deux ans, par un défaut d’émergence, ou au pire une régression -, l’anorexie est un trouble de l’établissement de l’être au monde spécifiquement féminin : sa destructivité s’exprime au niveau de la constitution du sujet féminin dans sa complétude corporelle – il est donc logique que ce trouble trouve une expression post pubertaire. En résumant, l’autisme s’attaque à l’ordre de l’institution (du sujet), l’anorexie s’attaque à l’ordre de la constitution (corporelle).

Auteur: Farago Pierre

Info: Une proposition pour l'autisme, page 50

[ sexuation ] [ parallélisme ] [ origines ]

 
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immanence

Rien n'est aléatoire, et ne le sera jamais, qu'il s'agisse d'une longue suite de jours d'un azur parfait qui commencent et se terminent dans une pénombre dorée, des actes politiques les plus chaotiques en apparence, de l'essor d'une grande ville, de la structure cristalline d'un joyau qui n'a jamais vu la lumière, des répartitions de la fortune, de l'heure à laquelle le laitier se lève, de la position de l'électron ou de l'apparition d'un hiver glacial surprenant qui se répète. Même les électrons, censés être les parangons de l'imprévisibilité, sont des petites créatures apprivoisées et obséquieuses qui se déplacent à la vitesse de la lumière, allant précisément là où elles sont censées aller. Ils émettent de faibles sifflements qui, lorsqu'ils sont appréhendés dans des combinaisons variées, sont aussi agréables que le vent qui traverse une forêt, et ils font exactement ce qu'on leur dit. De cela, on est certain.

Et pourtant, il existe une merveilleuse anarchie, en ce sens que le laitier choisit le moment où il se lève, le rat choisit le trou dans lequel il va plonger lorsque le métro dévalera la voie depuis Borough Hall, et le flocon de neige tombera comme il veut. Comment est-ce possible ? Si rien n'est aléatoire et que tout est prédéterminé, comment le libre arbitre peut-il exister ? La réponse à cette question est simple. Rien n'est prédéterminé, tout est déterminé, ou était déterminé, ou sera déterminé. Peu importe, tout s'est passé en même temps, en moins d'un instant, et le temps fut inventé parce que nous ne pouvons pas comprendre d'un seul coup d'œil l'énorme toile détaillée qui nous a été donnée - alors nous la suivons, de façon linéaire, morceau par morceau. Cependant, le temps peut être facilement maitrisé, non pas en chassant la lumière, mais en prenant suffisamment de recul pour le voir dans son intégralité. L'univers est immobile et complet. Tout ce qui a été est, tout ce qui sera est, et ainsi de suite, dans toutes les combinaisons possibles. Alors qu'en le percevant nous nous imaginons qu'il est en mouvement et non terminé, il est tout à fait achevé et d'une étonnante beauté. En fin de compte, ou plutôt, comme les choses sont réellement, tout événement, aussi petit soit-il, est intimement et sensiblement lié à tous les autres. Toutes les rivières coulent à pleins flots vers la mer ; ceux qui sont séparés sont réunis ; les perdus sont rachetés ; les morts reviennent à la vie ; les jours au parfait azur qui  débutèrent pour se terminer pareillement dans une pénombre dorée continuent, immobiles et accessibles ; et, lorsque tout est perçu de manière à faire fi du temps, la justice devient apparente non pas comme quelque chose qui sera, mais comme quelque chose qui est.

Auteur: Helprin Mark

Info: Winter's Tale. Trad Mg

[ présent perpétuel ] [ maintenant éternel ]

 

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