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personnage

Tibère était gros, robuste, et d'une taille dépassant la moyenne ; large d'épaules et de poitrine, il avait, de la tête aux pieds, tous les membres bien faits et heureusement proportionnés ; sa main gauche était plus souple et plus forte que l'autre ; les articulations en étaient si fermes, qu'il pouvait percer du doigt une pomme récemment cueillie et sans tare, et d'une chiquenaude blesser la tête d'un enfant ou même d'un adolescent. Il avait le teint blanc, les cheveux plantés assez bas derrière la tête, de sorte qu'ils lui couvraient même la nuque, ce qui paraissait être chez lui un trait de famille ; un visage noble, quoique souvent parsemé tout à coup de boutons ; des yeux très grands, qui, chose extraordinaire, voyaient même la nuit et dans les ténèbres. [...] Il marchait le cou raide et dressé fièrement, le visage d'ordinaire contracté, en général sans rien dire ou en n'adressant que de très rares paroles même à ceux qui l'entouraient.

Auteur: Suétone

Info: Vies des douze Césars, tome 2, Tibère, Caligula, Claude, Néron, livre 3 Tibère, LXVIII

[ historique ]

 

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portrait

Kienschäper est un homme tout en longueur, qui marche courbé vers l’avant et approche de la soixantaine. Il a des cheveux blancs en bataille et un visage très brun, éclairé par le sourire de deux yeux bleus pleins de jeunesse. Sans faire de phrases, il a guéri les blessures d’Eva, de la même façon qu’il est venu à bout des enfants du village à force de patience, et que, muni d’un sécateur et d’huile carbolique, il a parcouru les vergers des paysans pour rendre la vigueur à leurs arbres.

Marcher à travers champs le soir avec lui et l’entendre expliquer que peu de choses sont nécessaires pour rendre à la terre sa fécondité ; le voir aider une vache à vêler, ou redresser une clôture, de sa propre initiative, ou soigner ses abeilles avec amour ; écouter ce qu’il joue doucement à l’orgue pour eux seuls, sentir que tout rentre dans l’ordre et dans la paix après le passage de cet homme : cela réconforte Eva, mieux que n’importe quelle parole consolatrice.

Auteur: Fallada Hans

Info: Dans "Seul dans Berlin", traduit de l’allemand par A. Virelle et A. Vandevoorde, éditions Denoël, 2002, page 386

[ sage ] [ homme-par-femme ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

glose

Il se baissa et souleva la draperie. Le livre s'étalait à terre contre la rondeur du vase de nuit à filets orange.

- Montrez voir, dit-elle. J'ai mis une marque. Un mot que je voulais vous demander.

Elle avala une gorgée de sa tasse tenue sans souci de l'anse et ayant essuyé tout de go le bout de son doigt sur la couverture, se mit à suivre le texte avec une épingle à cheveux jusqu'à ce qu'elle rencontrât le mot.

- Mes tempes si quoi ?  demanda-t-il.

- Là, dit-elle. Qu'est-ce que ça veut dire ?

Il se pencha vers elle et lut près de l'ongle poli de son pouce.

- Métempsychose ?

- Oui. D'où sort-il celui-là ?

- Métempsychose, reprit-il, fronçant le front. C'est grec, ça vient du grec, ça signifie la transmigration des âmes.

- Quelle balançoire ! dit-elle. Sortez-moi ça en mots simples.

Il sourit, regardant de côté son air moqueur.

Auteur: Joyce James

Info: "Ulysse", éd. Gallimard, p.94-95, traduction d'Auguste Morel

[ vocabulaire ] [ intimité ]

 
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Ajouté à la BD par Benslama

déclaration d'amour

Nous nous étions connus tout petits à l'école.
Comme son père était de mon père voisin,
Nous partions tous les deux sac au dos le matin
Nos têtes s'encadraient d'une même auréole.

Dans la rose candeur du sourire enfantin,
Nous étions bons amis. Quand les flots du Pactole
Roulaient chez l'un de nous, par hasard, une obole,
Nous divisions toujours en deux parts le festin.

Souvent, aux lendemains de mes fainéantises,
Me laissant consulter en route son devoir,
Elle sut m'épargner l'horreur du cachot noir.

Moi, je grimpais pour elle à l'arbre des cerises,
Pour elle je pillais la vigne et le pommier,
Et je la défendais comme un bon chevalier.

II
Plus tard, à l'âge d'or où dans notre poitrine
Vibre l'enchantement des frissons amoureux,
A l'âge où l'on s'égare au fond des rêves bleus,
Sans songer à demain et ce qu'il nous destine,

Sous les érables du grand parc, à la sourdine,
Nous nous cachions, loin des oreilles et des yeux,
Et, son front virginal penché sur mes cheveux,
Ensemble nous lisions le divin.

Auteur: Lamartine Alphonse de

Info: Premier amour I

[ poème ]

 

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art pictural

C'est une si belle chose que la lumière, que Rembrandt, presque avec ce seul moyen, a fait des tableaux admirables. On ne conçoit point de rayons et d'obscurité qui appellent plus puissamment les regards. Il n'a, le plus souvent, représenté qu'une nature triviale, et cependant on ne regarde pas ses tableaux sans gravité et sans respect. Il se fait, à leur aspect, une sorte de clarté dans l'âme, qui la réjouit, la satisfait et la charme. Ils causent à l'imagination une sensation analogue à celle que produiraient les plus purs rayons du jour, admis, pour la première fois, dans les yeux ravis d'un homme enfermé jusque-là dans les ténèbres. Dans ses belles figures, comme son rabbi, la lumière, il est vrai, n'est plus l'objet principal dont l'imagination soit occupée ; mais elle est encore le principal moyen employé par l'artiste pour rendre le sujet frappant. C'est elle qui dessine ces traits, ces cheveux, cette barbe, ces rides et ces sillons qu'a creusés le temps. Ce que Rembrandt a fait avec le clair-obscur, Rubens l'a fait avec l'incarnat.

Auteur: Joubert Joseph

Info:

[ beaux-arts ] [ texte-image ] [ peinture ]

 
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mère-filles

De ses quatre filles, j'étais celle qui correspondait le moins à ses canons esthétiques. Planche à pain, j'avais les cheveux qui n'ondulaient pas, un front trop bombé, des sourcils mal dessinés, des dents pas du tout éclatantes, des lèvres charnues, indices d'une sensualité à réfréner, une myopie m'obligeant à porter des lunettes aux verres aussi épais que des culs de bouteille, la dégaine d'une iroquoise qui a avalé son parapluie, bref, selon Big Mother, je faisais bien d'être une bûcheuse, car je n'étais pas mariable - qui s'intéresserait à moi, promise à un emploi d'institutrice ou de prof de français, insatisfaite et mal rétribuée? Je m'offusquais de ce mépris pour mes enseignants, sans qui le dressage de Big Mother aurait occasionné un ébranlement. Aller en classe, c'était lui échapper pour quelques heures, fouiner dans les bibliothèques, c'était amasser des trésors et y puiser, pas seulement afin de me doter d'une teinture de culture: forte de ces richesses, je me fabriquais une personnalité, je me blindais contre les méchancetés de celle qui, en tous lieux, se plaisait à nous diminuer, mes sœurs et moi.

Auteur: Lê Linda

Info: À l'enfant que je n'aurai pas

[ sororie ] [ famille ] [ autoportrait ] [ humiliation ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

aliments

Après la plage, nous raccompagnions les filles jusqu'à la ferme, Mme Le Dour avait préparé un goûter de crêpes - non pas les crêpes fines ou les galettes de sarrasin fourrées de choses salées comme on les trouve maintenant, mais de vraies krampouzen de froment épaisses et lourdes, sans sucre ni beurre, et les bolées de cidre tiède (le cidre glacé doit être une invention américaine). Comme de toutes les nourritures d'enfance (les gnocchis cuisinés par la bonne Maria chez ma grand-mère, ou le foufou et la soupe de cacahuètes d'Ogoja au Nigéria), j'ai gardé le goût de ces crêpes, l'épaisseur chaude, le tanin du cidre dans les bols de grès, quelque chose de doux et de sauvage à la fois, dans la pénombre enfumée de la ferme, avec l'odeur des vaches, la lueur du jour par la porte ouverte, les reflets du quinquet sur la vaisselle des étagères et sur les clous des lits-clos formant des losanges et des rosaces, et aussi le rire niais des deux filles qui les vengeait de la violence des arrosages et des poignées de sable dans leurs cheveux.

Auteur: Le Clézio Jean-Marie

Info: Chanson bretonne - L'enfant et la guerre : Deux contes

[ manger ] [ jeunesse ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

rembobinage mental

C'est vrai. Tout aurait été différent si elles n'étaient pas allées ce jour-là à l'anniversaire de Zorana. Si Suzana ce jour-là n'avait pas téléphoné pour lui proposer de l'accompagner, elle n'aurait jamais connu Frane. Si, comme elle l'avait prévu, elle était restée à la maison emmitouflée dans les couvertures, jamais de toute sa vie elle n'aurait rencontré Anka Sarié. Elle aurait avalé une aspirine et regardé Spiderman à la télévision, et Mme Sarié et elle n'auraient été que deux individus parmi la centaine de milliers d'habitants vivant dans la même chacun dans son rayon de ruche. Si elles s'étaient croisées, ça n'aurait été qu'incidemment, par hasard, dans un bus ou dans une queue à la caisse. Le regard de Bruna n'aurait noté qu'en passant ses hanches larges, ses cheveux courts et son visage anguleux. Ce visage se serait fondu dans le nerf optique, il se serait perdu dans un segment du cerveau, dans la banque de données infinies des visages sans importance qu'on voit et qu'on oublie aussitôt. Anka et elle se seraient côtoyées sans y prêter attention et auraient disparu dans l'anonymat.




Auteur: Pavicic Jurica

Info: La femme du deuxième étage

[ supposition ] [ induction ] [ déclic ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

boîte échangiste

Quelque chose, depuis l’année dernière, semble s’être durci. Un couple de jeunes fait l’amour sur la piste ; l’homme a de longs cheveux bouclés et blonds, son ventre est plat et musclé. La femme est brune, sa peau est mate. Il la prend par-derrière, ses fesses parfaitement rondes sont soulevées très haut, la cambrure de ses reins est magnifique. Un quinquagénaire s’approche, essaie de la toucher ; elle le repousse d’un geste brusque. Les autres couples, maintenant, restent à distance ; ils font cercle, à trois mètres des jeunes gens. L’homme se retire un instant, son sexe est brièvement baigné par un éclat de lumière violette ; puis il recommence à pénétrer la femme, sur un rythme plus rapide ; la lumière stroboscopique joue sur ses abdominaux en plein effort. Je vais m’asseoir sur une banquette. Près de nous, un couple de sexagénaires allemands ; l’homme est débraguetté et mou. La femme porte une guêpière en latex, mais sa viande dépasse d’un peu partout ; son regard est désemparé : ils sont vraisemblablement proches de la retraite. Elle pose une main sur le sexe de son mari, sans parvenir à le ranimer ; puis ils terminent leur bière. Nous repartons assez vite.

Auteur: Houellebecq Michel

Info: "Lanzarote", Librio, 2021, page 81

[ violence symbolique ] [ professionnalisation ] [ débandade ] [ exclusion ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

souper

Elle sourit, je regardai ma montre. Il était onze heures du soir. Sur la nappe comme dans un filet affluaient les poissons : le saumon, les truites en anneau, les harengs, les anchois en bouquet de six, liés par la queue. Mais on ne servit à boire que du lait et une bière non fermentée. D'un sac à éponges je sortis sournoisement l'aquavit norvégien. Aïno bat des mains, débouche la bouteille avec une épingle à cheveux et, de plaisir, éternue. Elle verse deux rase-bords, me tend l'un, prend l'autre; se mettant au garde à vous, elle claque les talons et la langue, me fait l'immédiat hommage de son verre vide, dont elle tourne vers moi le fond avec des mots de convention que je n'entends pas. Elle avait ôté ses bottes et revêtu d'une chemise intérieur avec des broderies paysannes; un collier d'ivoire végétal errait sur elle comme une deuxième dentition. Nous mangions sans parler, pareils à un couple anglais. Les joues d'Aïno étaient luisantes sans poudre ni rouge, ainsi que tous ces visages scandinaves où un sang agile étend son fard que renfoncent le grand air ou le moindre regard. Avec éloquence deux bouteilles parlèrent. Nos têtes bourdonnaient.

Auteur: Morand Paul

Info: Ouvert la nuit (1922, 253p., le livre de poche, p.227)

[ univers nordique ] [ épicurien ] [ repas copieux ] [ alcool ]

 

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