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décadence

La sexualité des Français toujours plus extrême (et égoïste ?)
Gérard Leleu sexologue, revient sur la dérive des pratiques extrêmes, les risques courus et la dégradation de la sexualité dans nos sociétés.
Atlantico : Il semble que les accidents liés à des pratiques sexuelles extrêmes soient en progression, pouvez-vous nous le confirmer ?
Gérard Leleu : Bien évidemment, et je parle en connaissance de cause... Avant d'être sexologue, j'ai exercé la profession d'urgentiste.
Les gens utilisent de plus en plus de " jouets", si je puis dire, qui sont vraiment d'une proportion inimaginable. S'ils avaient une idée de l'impact que cela pourrait avoir sur leur organisme, ils ne tenteraient pas ce genre d'expériences. Médicalement, c'est de la folie.
En ce qui concerne les corps étrangers, depuis toujours nous en avons trouvé de toutes sortes. Les gens sont d'une imagination débordante. Cependant c'était le plus souvent par auto-érotisme. Cela n'a pas dû tellement changer, de surcroît avec la normalisation des sex-toys, ces derniers sont conformes à certaines normes ce qui diminue potentiellement le danger, du moins plus qu'un ustensile de cuisine.
Les pratiques liées à l'auto asphyxie se développent également. D'autres prendraient du Prozac, ou n'importe quelle drogue, ceux qui se privent d'oxygène utilisent le plaisir car ce dernier provoque la sécrétion de substances hédoniques, (la dopamine, les endorphines... etc...) Certains poursuivent leur quête de plaisir en se recouvrant la tête d'un sachet plastique. La strangulation entraîne une érection ainsi qu'une rétention de CO2 et le phénomène d'hypercapnie qui provoque une sorte de vertiges et d'hypoxie. Les sensations que l'on ressent à ce moment-là, sont des signes proches de la mort c'est extrêmement dangereux.
D'où vient ce besoin d'aller toujours plus loin dans les pratiques sexuelles ?
Désormais les individus visent le maximum de plaisir, on chosifie l'autre. L'autre est un objet dont le but est d'en tirer le plus de plaisir avec absence de sens. La seule chose qui compte c'est la quantité de plaisir au dépend de la qualité. Même si la notion de plaisir est propre à chacun cette dernière s'acquiert à travers les baisers, les caresses, différentes positions, la relation entre deux individus et non pas un simple acte sexuel.
Le plaisir est quelque chose qui s'use. Si telle sensation procure tel plaisir au bout d'un certain temps ce dernier s'atténue, il faut rechercher une sensation plus forte. Cette recherche s'expérimente alors, pour certaines personnes, à travers un objet plus gros plus profond et par conséquent des pratiques de plus en plus extrêmes.
Le seul but est le plaisir et non plus la relation, ou l'amour comme quelque chose de sacré. L'autre est désormais un outil qui vous permet de vous assouvir.
Existe-t-il une démocratisation de ces pratiques que l'on pourrait qualifier d'extrêmes?
La hiérarchie de ce qui est à faire ou à ne pas faire est floue. Cela est peut être dû à une démocratisation. Je pense effectivement que la plupart des gens pratiquaient le masochisme ou le sadisme bien avant le regain d'intérêt pour Sade. Certes, beaucoup de gens s'adonnent à ces jeux sexuels extrêmes cependant, cela a toujours été l'apanage d'une certaine élite. N'importe qui peut désormais trouver un sex-shop alors que tous ces objets autrefois, étaient réservés à une certaine partie de la société.
L'anus actuellement devient de plus en plus souvent le but central de la relation sexuelle avec la pratique du fist (insertion d'un poing) alors qu'avant c'était exceptionnel. Désormais si l'on ne s'aventure pas à l'exploration de l'anus on est considéré comme rétro et dépassé. Il existe une utilisation érotique du rectum de plus en plus forte.
Mon propos n'est pas d'inculquer le bien et le mal, mais de prévenir le danger ou même de dire ce qui contribue ou pas à l'équilibre. Le rectum n'a pas cette vocation-là, quel que soit le plaisir qu'il peut procurer. La pratique est ancienne cependant, il existe une amplification du phénomène qui est dû à une sorte de non-sens de relation sexuelle, l'autre étant un objet et non une personne et un sujet.
C'est très significatif de l'état exécrable de la sexualité en Occident. La sexualité a été réprimée pendant des siècles. Désormais, la notion de pêcher charnel n'existe plus. Toutefois, le malheur de l'Occident c'est que nous n'avons pas de tradition érotique comme cela peut être le cas en Orient. Faute de tradition érotique nous sommes tombés dans l'escalade du " Hard ". Le but n'est plus dans la relation mais dans le plaisir personnel. Et dans la quantité de plaisir et non plus la qualité de plaisir. Jouir de plus en plus, sans considérer que l'autre est différent d'un outil. La tendance de donner la préférence à la voie rectale est un signe d'absence de sens dans la sexualité en occident.
Que cette pratique s'exerce de temps en temps n'est pas le problème, c'est l'obsession et la focalisation des individus sur ce mode de relation qui m'alarme. Et le fait que les individus qui ne pratiquent pas, soient considérés comme dépassés, rétro, ce n'est pas juste.
Quel est votre constat sur cette dérive des pratiques extrêmes ?
Cela ne m'inquiète pas tellement sur le plan médical, bien qu'il existe tout de même d'importants accidents. En tant que médecin, je dois vous dire que cela entraîne certaines complications non négligeables. Néanmoins, je me positionne plus sur le plan de l'humanisme. Mon idéalisme constate effectivement que la sexualité en Occident, n'arrive pas à être sacrée.
Si on prône comme seul but le plaisir et le maximum de plaisir, autrement dit la performance en dépit de la perfection. Cela aboutit à des gens qui sont blasés, qui seront dans la recherche constante de plaisir. Ils vont alors multiplier les moyens, les expériences à travers des objets certes mais également l'amour pluriel, l'amour sadomasochiste. J'ai observé des jeunes qui s'adonnaient à la zoophilie. Les perversions débutent très jeunes.
Sans être dans le moralisme, cela engendre des déséquilibres dans la tête des gens et une mauvaise estime d'eux même. Cela a un impact sur leur équilibre mental et ne conduit pas au bonheur. Ils en arrivent à être déséquilibrés et angoissés. Ce n'est pas un accomplissement. Ils sont désabusés écoeurés très tôt. C'est une escalade qui déçoit toujours puisque ça n'a pas de sens.
Si je m'insurge contre l'état déplorable de la sexualité des Français, ce n'est pas du tout d'un point de vue éthique mais du point de vue de l'équilibre des individus et de leur bonheur de vivre.

Auteur: Leleu Gérard

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[ sociologie ] [ porno ] [ bdsm ] [ caudalisme ]

 

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âme

Panpsychisme, l'esprit des pierres La plupart pense que tous les humains sont conscients, ainsi que beaucoup d'animaux. Certains, comme les grands singes, semblent même être timides comme nous. D'autres, comme les chiens et les chats, les porcs, manquent d'un sens de l'ego mais ils semblent éprouver les états intérieurs de plaisir, etc... Pour les créatures plus petites, comme des moustiques, nous ne sommes pas aussi sûrs et n'avons pas de scrupules pour les massacrer. Quant aux plantes, elles n'ont évidemment pas d'esprit, excepté dans des contes de fées. Et encore moins les choses non vivantes comme les tables et les pierres. Les Atomes Mentaux "Si l'évolution fonctionne en douceur, une certaines forme de conscience doit être présente à l'origine même des choses. On constate que les philosophes évolutionnistes commencent à en poser le principe. Chaque atome de la galaxie, supposent-ils, doit avoir eu un atome original de conscience lié avec lui. Les atomes mentaux... sont alors fondu en de plus grandes consciences : nous-mêmes et peut-être chez nos camarade-animaux." James William, Principes de Psychologie 1890 Tout paraît de bon sens. Mais le bon sens n'a pas toujours été un si bon guide pour comprendre le monde et sa partie la plus récalcitrante à notre compréhension à l'heure actuelle est bien la conscience elle-même. Comment les processus électrochimiques de notre cerveau, peuvent-ils exister et donner ce jeu en technicolor de la conscience, avec ses transports de joie, ses coups d'angoisse et autres moments de contentement doux alternant avec l'ennui ?... Voici peut-être une des dernières frontières des sciences. Elle nourrit les énergies intellectuelles de la communauté scientifique, les psychologues, philosophes, physiciens, informaticiens et aussi, de temps en temps, le Dalai Lama. Ceci amène certains à une hypothèse un peu folle. Peut-être, disent-ils, que l'esprit n'est pas limité aux cerveaux de quelques animaux. Peut-être est-il partout, présent dans chaque atome, des électrons et neutrinos jusqu'aux galaxies, sans exclure les choses de taille moyenne comme un verre de l'eau ou une plante en pot. Il n'aurait donc pas soudainement surgi quand quelques particules physiques sur une certaine planète se sont retrouvées, après évolution, dans la bonne configuration. Mais plutôt : il y a une conscience dans le cosmos depuis toujours. Cette doctrine que la substance du monde est fondamentalement esprit s'appelle panpsychisme. Il y a quelques décennies, le philosophe américain Thomas Nagel a montré que c'était une conséquence logique de quelques faits raisonnables. D'abord, nos cerveaux se composent de particules matérielles. Ensuite ces particules, dans certains arrangements, produisent des pensées et des sentiments subjectifs. Troisièmement, les propriétés physiques ne peuvent expliquer en elles-mêmes la subjectivité. (Comment l'ineffable expérience qui consiste à goûter une fraise pourrait-elle résulter en équations physiques ?) Nagel a donc théorisé que les propriétés d'un système complexe comme le cerveau ne surgissent pas simplement dans l'existence à partir de nulle part. Elles doivent dériver des propriétés des constituants de ce système. Ces constituants doivent par conséquent avoir eux-mêmes des propriétés subjectives - propriétés qui, dans les bonnes combinaisons, s'ajoutent jusqu'à donner nos pensées et sentiments intérieurs. Et comme les électrons, les protons et les neutrons constituant nos cerveaux ne sont pas différent de ceux qui constituent le reste du cosmos l'univers entier doit donc se composer d'infimes morceaux de conscience. Nagel n'est pas allé jusqu'au panpsychisme, mais aujourd'hui il peut constater quelque qui ressemble à une mode. Le philosophe australien David Chalmers et le physicien Roger Penrose d'Oxford ont parlé de lui. Dans le livre récent "La conscience et sa place dans la nature," le philosophe britannique Galen Strawson défend le panpsychisme contre de nombreuses critiques. Comment se pourrait-il, demandent les sceptiques, que des morceaux d'esprit poussière, avec des états mentaux vraisemblablement simples, se combinent-ils pour former le genres d'expériences mentales compliquées que nous autres humains vivons ? Après tout, quand on rassemble un groupe de personnes dans une salle, leurs différents esprits ne forment pas un esprit collectif simple. (Quoique!) Ensuite il y a le fait incommode qu'on ne peut pas scientifiquement tester cette affirmation qui, par exemple, dirait que la lune a un fonctionnement mental. (Et cela s'applique aussi aux gens - comment pourrez-vous démontrer que vos camarades de bureau de ne sont pas des robots sans connaissance, comme le commandant Data sur "Star Trek" ?) Il y a aussi cette idée un peu pernicieuse : si quelque chose comme un photon peut avoir des proto-émotions, proto-croyances et proto-désirs. Que pourrait alors être le contenu du désir d'un photon?.. Devenir un quark, ironise un anti panpsychisme. Il est plus facile de parodier le Panpsychisme que le réfuter. Mais même si cette recherche de compréhension de la conscience s'avère être un cul-de-sac, cela pourra éventuellement nous aider à nous élever au-dessus de nos pensées conventionnelles de la perspective cosmique. Nous sommes des êtres biologiques. Nous existons parce que nous sommes des autos réplications de nous-mêmes. Nous détectons et agissons sur l'information de notre environnement de sorte que nos réplications continuent. En tant que sous-produits, nous avons développé des cerveaux qui, nous voulons voir comme les choses les plus complexes de l'univers. Mais pensons à la matière brute. Prenez un rocher. Il ne semble pas faire grand-chose, en tout cas pour ce qui est d'animer nos perceptions. Mais à un nano niveau il se compose d'un nombre inimaginable d'atomes reliés par des liaisons chimiques flexibles, ondoyantes et s'agitant ensembles à des cadences que même notre ordinateur géant le plus rapide pourra envier pour encore longtemps. Et ils ne 'agitent pas au hasard. Les intestins du rocher "voient" l'univers entier au moyen de signaux gravitationnels et électromagnétiques qu'ils reçoivent sans interruption. Un tel système pourrait être regardé comme un processeur polyvalent d'informations, dont la dynamique intérieure pourrait refléter n'importe quelle séquence des états mentaux que nos cerveaux traversent. Et là où il y a de l'information, dit le panpsychisme, il y a de la conscience. Ainsi le slogan de David Chalmers, "l'expérience est information de l'intérieur; la physique est information de l'extérieur." Mais le rocher ne se démène pas lui-même comme résultat de toute cette "réflexion". Pourquoi le devrait-il ? Son existence, à la différence de la nôtre, ne dépend pas d'une lutte pour la survie et la reproduction. Il est indifférent à la perspective d'être pulvérisé. Etant poète on pourrait voir le rocher comme un être purement contemplatif. Et on pourrait dessiner cette morale que l'univers est, et a toujours été, saturé d'esprit. Même si nous autres snobs darwiniens reproducteurs retardataires sommes trop fermés pour le réaliser.

Auteur: Holt Jim

Info: Fortean Times 18 Nov. 2007

[ matière ] [ monade ] [ minéral ] [ métaphysique ] [ chiasme ]

 

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filles-garçons

ELLE. Qu’en est-il des cours d’éducation sexuelle à l’école ?

Israël Nisand. Il y a une loi, datant de 2001, qui prévoit trois heures d’information sur la vie affective et sexuelle à partir de l’âge de 4 ans. J’ai rencontré tous les ministres successifs de l’Éducation nationale pour leur demander d’appliquer la loi, rien de plus.

ELLE. Et à quoi ressemble cette éducation sexuelle, alors ?

Israël Nisand. D’abord, il faut arrêter avec le mot éducation sexuelle, ça voudrait dire qu’on peut vous expliquer comment et dans quelles positions. Appelons ça "Information sur la sexualité". Il y a plein d’expérimentations volontaristes comme la mienne, conduites par le Planning familial ou quelques infirmières scolaires. Il y a eu énormément d’essais dans des régions qui tentent de palier le manque institutionnel dans ce domaine mais, sinon, rien. Appliquons la loi, c’est aussi simple que ça ! Le Canada, la Suisse romande le font : il y a une formation des instituteurs. À 4 ans, on apprend à respecter son propre corps. À 6 ans, on apprend le respect de l’autre. À 8 ans, on apprend ce qu’est la vie amoureuse. Bref, tout ce parcours de connaissance est fait par des profs formés pour ça. Puis, vers 11 ans, ce sont des intervenants extérieurs qui viennent parce que les jeunes sont très sensibles à l’interlocuteur et à ses compétences. Lorsque vous me demandiez à quel âge intervenir, certaines institutions souhaiteraient que je vienne plus tôt, en quatrième, parce qu’il y a des fellations collectives dans les toilettes.

ELLE. Comment expliquez-vous cela ?

Israël Nisand. On a confié l’éducation sexuelle de nos enfants au porno, qui est une non-éducation. J’entends des questions folles pendant les cours : "Comment ça se fait que les meufs elles aiment sucer le sexe des animaux ?" "Est-ce que, quand la meuf veut pas, un pote peut la tenir ?" Il y a plein de questions sur la zoophilie. Ils sont complètement animés, cultivés, éduqués par YouPorn.

ELLE. À partir de quel âge les enfants commencent-ils à regarder du porno ?

Israël Nisand. En moyenne, 11 ans. Mais il y a des enfants de 9 ans qui sont addicts et en consomment jusqu’à trois heures par jour. Ils sont comme fascinés, sidérés par ces images, ce qui est d’ailleurs une forme de maltraitance. Car jamais ils ne seront comme les stars du porno avec un zizi très long, et pratiquant telle ou telle position... Ils sont choqués.

ELLE. Est-ce que, comme pour les drogues, plus on consomme jeune, plus c’est nocif ?

Israël Nisand. C’est démontré. Un chercheur canadien a publié plusieurs travaux à ce sujet. Selon la précocité de la consommation et la quantité d’heures par jour, il étudie la sexualité en aval à travers trois marqueurs : l’utilisation des objets dans les premiers rapports, l’âge du premier rapport et le recours à la sodomie lors d’un premier rapport. Hautement significatif. Autre expérience : il a exposé une centaine d’adultes de 22-23 ans, sans perversion de nature pédophile, pendant deux heures à de la pédopornographie et les a réinterrogés : ça les avait bien sûr troublés, cela leur avait aussi donné du plaisir, du désir sur quelque chose qui ne les concernait pas auparavant.

ELLE. Pour autant, les adolescents ont toujours leur premier rapport au même âge ?

Israël Nisand. Non, l’âge du premier rapport est de 16 ans et demi pour les filles, 16 ans et deux mois pour les garçons. Il a bougé. Et bouge considérablement. Ce qui était normal à 17 ans et demi l’est maintenant maintenant à 16 ans. Entendons-nous : je ne suis pas dans le jugement moral, je suis en train de dire que l’on perturbe un mécanisme de fantasmagorie, de création des images et d’enchantement – la rencontre de l’autre avec un commerce qui se fait sur le dos de nos enfants.

ELLE. Que préconisez-vous ?

Israël Nisand. Comme je vous l’expliquais, il faut appliquer la loi et s’inspirer des usages suisse et canadien. Des cours d’information à la sexualité depuis l’âge de 4 ans. Ne chargeons pas les parents ! Il faut que l’école aide. De 4 à 10 ans, les fondamentaux : le respect de soi-même, le respect de l’autre ; c’est quoi la relation entre deux personnes qui s’aiment ? Instits et parents doivent transmettre ces fondamentaux, sinon, c’est foutu. Ensuite, tout se joue à l’extérieur. Il y a donc deux ou trois années de blanc au moment où l’enfant aurait le plus besoin d’être protégé. C’est là que l’école a un rôle fondamental : un adulte complice vient le voir, ce n’est pas un père, une mère, il ne juge pas, mais il va l’aider.

ELLE. Et les parents dans tout ça ?

Israël Nisand. Les parents sont là pour l’éducation à la morale que personne ne peut faire à leur place, mais ils ne peuvent pas donner la licence et interdire. Si les parents n’ont pas appris les interdits, on ne peut plus construire derrière et, s’ils posent les interdits, ils ne peuvent pas dire ensuite : "Il faut laisser de l’air au bout des préservatifs." Je parle en père !

ELLE. Et pour le porno ? Difficile de surveiller tablettes, mobile, réseaux sociaux…

Israël Nisand. Impossible. Je ne suis pas pour la censure mais, quand on veut empêcher une consommation sur Internet dans notre pays : djihadisme, pédophilie… on y arrive. Je demande : primo, que chaque première image de pornographie soit assortie d’une demande de carte Bleue. Rien que ça. Deuxio, une campagne d’information à destination des parents pour leur dire que ça fait du mal aux enfants, qu’ils doivent ranger leur matériel pornographique à usage personnel, car 30 % de la primo-consommation se fait sur des documents qui appartiennent aux parents. Tertio, une campagne d’information pour les enfants expliquant : "La pornographie, ça vous fait du mal, comme la drogue, et on ne la combat pas sans en parler."

ELLE. Les ados ne peuvent-ils pas aussi regarder du porno et en revenir, une fois la curiosité retombée, sans séquelles ? Autrement dit : ne faut-il pas leur faire confiance ?

Israël Nisand. Tout dépend du contexte, de la fragilité affective et de la manière dont on a pu en parler avec les parents. Mais on ne mesurera jamais tout à fait l’effet de sidération des premières images. Je préférerais que les jeunes découvrent la sexualité autrement que par des scènes qui sous-entendent que "non peut vouloir dire oui", avec la violence, le mépris de la femme et la possibilité de l’inceste que ça implique.

Auteur: Nisand Israël

Info: sur Elle.fr, 19 avril 2016

[ initiation ] [ décadence ] [ Internet ] [ femmes-hommes ]

 

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dictature modèle

Mort de Navalny: entre hommage et répression sévère en Russie

(photo) Des Russes rendent hommage à Navalny, Moscou.keystone

Alexeï Navalny était sans doute le plus connu des opposants de Poutine. Les Russes se remettent de la mort de celui que certains considèrent comme un héros. Mais lui rendre hommage n'est pas évident dans ce pays à la répression sévère: même déposer des fleurs peut valoir la prison.

" Je veux au moins lui rendre un dernier hommage», dit une femme âgée enroulée dans une écharpe chamarrée près de la pierre de Solovki, samedi à Moscou. Un flot sans fin de personnes traverse le passage souterrain de la Loubianka. La police tente de diriger le flux – et de capturer chaque visage dans leurs vidéos. Femmes et hommes, jeunes et vieux, et même des familles entières viennent déposer leurs fleurs sur la montagne de bouquets près du bloc de pierre du monument.

Certains veulent s'arrêter un instant, peut-être pour rendre un hommage silencieux. " Jeune femme, continuez à avancer, ne vous arrêtez pas ", hurle un policier dans le mégaphone. " Dégagez le chemin ", crie un autre en indiquant à un couple âgé de quitter le périmètre.

Dans la nuit, les fleurs et les bougies sont enlevées, toujours sous la surveillance de la police. Des milliers de personnes – en larmes pour les unes, en silence pour les autres – ont déposé ces offrandes pour rendre hommage à Alexeï Navalny, mort en détention derrière le cercle polaire: leur idole. Cet homme de 47 ans s'est battu pour rendre possible la contestation dans un pays où exprimer une position contradictoire était devenu impossible – et il a payé cet affront de sa vie.

Mais les fleurs, elles, sont à nouveau là le lendemain. Des œillets et des roses fraîches, rouges, blanches, jaunes, accompagnées d'un ruban noir ou de petits messages. Des montagnes de fleurs sont érigées à Moscou et à Saint-Pétersbourg, à Novossibirsk et à Samara, à Tcheliabinsk et à Tomsk et à Oulan-Oudé.

(photo) Un homme qui a déposé des fleurs en l'honneur de Navalny est arrêté, comme 400 autres en l'espace de deux jours.

La police saisit parfois brutalement les supporters de Navalny avant de les jeter dans les fourgons stationnés au bord de la route. Selon l'organisation russe de défense des droits de l'homme OWD-Info, plus de 400 personnes auraient été arrêtées à travers la Russie alors qu'elles déposaient des fleurs durant le week-end. Certaines d'entre elles ont déjà reçu leur sentence: quinze jours de détention.

(photo) Des fleurs sur le monument du Goulag

Près de la pierre Solovki à Moscou, quelqu'un a écrit " n'ayez pas peur " au marqueur bleu sur une feuille de papier quadrillé posée à côté de la mer de fleurs. En face trône le bloc ocre-brun de la Loubianka, l'imposant siège des services secrets russes (FSB).

Autrefois, lorsque le service s'appelait encore Tchéka puis KGB, c'est ici que les bourreaux prononçaient les sentences qui expédieraient des millions de personnes au Goulag. Le monument Solovki et son lourd bloc de pierre rappellent ainsi les crimes du stalinisme.

Septante ans après la mort de Staline, rien n'a changé en Russie. La colonie pénitentiaire de Charp, dans laquelle Navalny est mort – du " syndrome de la mort subite ", comme l'ont annoncé avec le plus grand sérieux les agents pénitentiaires à sa mère et à son avocat – date de l'époque du Goulag. 

Un soulèvement populaire reste trop dangereux

C'est Navalny qui a montré au peuple russe ce qu'est la politique. Il leur a fait sentir ce qui fait d'un homme un citoyen. Mais il a perdu ce combat contre un Etat qui joue au chat et à la souris – et qui continue ce jeu avec son cadavre.

Celui-ci serait, selon le journal russophone Novaïa Gazeta Europe, à l'hôpital régional de Salekhard. Un témoin affirme que le corps présentait des bleus qui pourraient être dus à des convulsions. Navalny serait apparemment mort d'un arrêt cardiaque, mais on ne sait pas pourquoi son cœur a cessé de battre.

En ligne aussi, les Russes expriment leurs pensées pour celui qui était la figure de proue de l'opposition russe. Sur son canal Telegram, un Moscovite estime:

" Un soulèvement populaire secouerait le Kremlin. Il faudrait au moins 100 000 personnes "

Mais est-ce que lui-même y participerait? " Non, c'est trop dangereux ". Ceux qui auraient eu le courage de résister se sont exilés par centaines de milliers. Des lois de plus en plus répressives ôtent à ceux qui sont restés dans le pays toute possibilité d'influer sur la politique. Il n'y a pas d'exutoire, pas de parti qui puisse être une alternative. Il n'y a pas d'opposition.

Les pseudo-opposants parlementaires acquiescent à tout, se courbent, et font au final partie de ce régime qui utilise tout son pouvoir pour faire taire les critiques. La persécution politique de Navalny a montré jusqu'où l'Etat russe était prêt à aller. Sa mort, qui n'est pas simplement un décès, mais bel et bien un assassinat politique, le montre également.

" On ne nous laisse même pas faire notre deuil en paix. Regarde, à Amsterdam, les gens peuvent se réunir et pleurer ensemble. Mais ici? Ce type nous chasse avec sa matraque. Et nous partons, bien sûr. "

Un homme âgé à sa voisine près de la pierre de Solovki à Moscou.

Deux amies plus jeunes, qui se sont arrêtées après avoir déposé des fleurs au musée d'à côté et regardent désormais le bloc de pierre au loin, concluent: " Résister ? Sans Navalny ? Qui va le faire ? Nous n'avons pas tous son courage. "

Est-ce que Ioulia Navalnaïa, son épouse, ou Daria Navalnaïa, sa fille, ont ce courage? Elles ont porté les idées d'Alexeï Navalny dans le monde, surtout après son empoisonnement et pendant sa détention, elles ont fait tout ce qu'elles pouvaient pour obtenir sa libération.

Ioulia Navalnaïa a évoqué la mort de son mari vendredi dernier lors de la conférence sur la sécurité à Munich.

L'apparition de Ioulia Navalnaïa à la conférence sur la sécurité de Munich, peu après l'annonce par les autorités russes de la mort de son mari, était à la fois oppressante et impressionnante. L'ancienne banquière se battra pour que sa mort soit élucidée, comme elle l'a toujours fait. D'autres devront assumer l'héritage politique de Navalny – s'ils parviennent à sortir de leur torpeur. 

Auteur: Internet

Info: https://www.watson.ch/ - Inna hartwich, moscou / ch media, 19.02.2024, Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci

[ autocratie ] [ pouvoir intransigeant ] [ contradicteur exemplaire ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

pouvoir sémantique

Wokisme, un protestantisme déréglé?

À l’instar de plusieurs chercheurs américains qu’il cite largement dans son étude*, l'auteur observe dans cet activisme progressiste un post-protestantisme débarrassé de sa théologie, soit un nouveau puritanisme entièrement sécularisé.

L’analogie? "La rédemption des péchés du monde ne se réalise plus à travers le sacrifice christique, mais par celui du bouc émissaire, à savoir la figure de l’homme blanc hétérosexuel, symbole qui réunit les trois fautes à la racine des injustices sexuelles, raciales et de genre: la masculinité, la blanchité et l’hétéronormativité", lit-on dans le document. Ou encore: "Les rêves d’une société parfaite que le christianisme reportait à un Royaume céleste doivent être matérialisés ici-bas et immédiatement." Interview avec un chercheur très critique à l’endroit de son objet d’étude.

- Le wokisme découlerait du protestantisme. Comment cela?

- Un certain nombre d’intellectuels protestants et catholiques nord-américains analysent le phénomène woke comme une forme de protestantisme sécularisé, c’est-à-dire l’idée qu’un certain nombre de thèmes chrétiens (l’Éden, le péché originel, la confession, le blasphème, etc.) ont été capturés par la frange progressiste de la gauche et transférés dans le champ politique. L’orthodoxie morale n’est plus produite par les Églises mais par les divers activismes qui composent le mouvement de la Justice Sociale (anti-racisme, droits LGBT, féminisme, etc. ndlr).

- Concrètement, de quelle manière se manifeste ce nouveau puritanisme?

- De multiples manières et à différents étages de la société. Essentiellement, ce puritanisme est le produit de l’hégémonie de la gauche dans les champs intellectuel et culturel. Il fabrique des hiérarchies et des tabous utiles à un certain nombre de groupes d’intérêt et circonscrit les interprétations dicibles dans les universités et les grands médias.

- On assiste, avec ce courant, à une nouvelle moralisation de l’espace public, avec une mobilisation autour de la notion de justice sociale et le souci des minorités. Ne faudrait-il pas s’en réjouir?

- Plus d’un s’en réjouissent, mais je ne partage pas cet optimisme. L’impact des idées politiques ne s’évalue pas à partir des intentions de leurs promoteurs. Or nous avons affaire à un mouvement profondément anti-libéral et passablement anti-scientifique – il suffit de lire les intellectuels qui nourrissent ce phénomène pour s’en convaincre. Rien n’est plus dangereux que des révolutionnaires qui s’imaginent pur de cœur.

- Plusieurs observateurs parlent d’une "religion civile". L’analogie au champ religieux vous semble-t-elle pertinente ?

- Elle est pertinente pour deux raisons: la première est que le wokisme fonctionne à la manière des cosmographies religieuses, c’est-à-dire qu’il procure une explication globale du fonctionnement de la société et de l’histoire, et offre à ses ouailles sens, ordre et direction. La seconde est que le comportement sectaire et les hyperboles moralisantes des activistes invitent naturellement une comparaison avec les mouvements religieux fondamentalistes. Pour preuve, le recours à des concepts infalsifiables et tout-puissants, comme le "patriarcat" ou le "racisme systémique".

- Comment comprendre que le langage du wokisme soit si présent au sein du monde protestant et de ses Églises?

- Il y a aussi beaucoup de résistance, mais je suppose qu’une partie du clergé entend profiter de la vitesse acquise de cette nouvelle religion civile, reproduisant des comportements analogues aux Églises, et capable de mobiliser certains segments de la population. Articulé autour de notions de justice sociale, d’équité, d’inclusivité, le militantisme woke peut assez aisément être réapproprié dans un contexte ecclésial. On peut aussi s’attendre à une demande par le bas, un certain nombre de membres motivés dans les communautés exigeant de leur hiérarchie un positionnement sur les grands thèmes du jour. La chose n’est pas très surprenante quand on pense, par exemple, à l’influence que le marxisme a pu exercer sur les théologiens de la libération en Amérique latine. Les Églises ne sont pas imperméables aux modes. 

- Vous pointez, au sein de ce phénomène, l’absence de "gardes-fous théologiques". Qu’entendez-vous par là?

- L’idée qu’un corpus théologique, qui s’est construit à travers des siècles d’affinage et de conciles, procure un cadre normatif à des notions de justice, de péché ou de rédemption. Libérées de ce cadre et réintroduites dans une religiosité révolutionnaire, ces idées prennent le mors aux dents. Le Royaume des Cieux se transforme en l’ambition d’établir ici-bas une société parfaitement égalitaire, quels qu’en soient les coûts.

- Vous êtes très critique à l’égard de ce mouvement. En quoi considérez-vous qu’il tende à glisser dans le fondamentalisme, voire le totalitarisme?

- La volonté de faire disparaître toutes les "inégalités", c’est-à-dire ici les disparités entre sexes ou entre populations, requiert nécessairement un État autoritaire régulant et corrigeant les effets des choix individuels. L’autoritarisme de la gauche progressiste n’est pas simplement la conséquence accidentelle d’une raideur idéologique propre au militantisme. Tout comme l’illustre l’histoire des économies planifiées, l’autoritarisme est l’inévitable propriété émergente du système.

- Votre étude souligne la contradiction de ce mouvement, dont les membres se proviennent majoritairement des classes les plus aisées…

- L’hypothèse que je trouve la plus séduisante a été formulée par le psychologue Rob Henderson: les classes supérieures nord-américaines signalent leur statut, c’est-à-dire se reconnaissent entre pairs et se distinguent du peuple, non plus seulement à l’aide de produits de luxe, mais aussi à l’aide d’idées luxueuses. Les coûts de ces idées sont assumés par les classes populaires tandis que les bénéfices à la fois matériels et immatériels sont capturés par les classes supérieures. Selon cette perspective, le wokisme est un outil dans un jeu de pouvoir et de statut. Son adoption signale son appartenance au camp du Bien et son institutionnalisation assure des débouchés professionnels à toute une classe de diplômés issus de filières académiques où le savoir tend à se dissiper au profit de l’activisme.

- N’allez-vous pas un peu loin en dénonçant une stratégie qui serait à nouveau profitable aux plus privilégiés, en faisant fi de leurs bonnes intentions?

-
Je ne pense pas que les activistes dont nous parlons ici soient des cyniques travaillant consciemment à consolider leur statut et je ne doute pas que leur mobilisation puise son énergie dans de bonnes intentions. Le problème réside dans la confusion entre les slogans et la réalité, d’une part, et dans la perception naïve que les bonnes intentions font de bonnes réformes, d’autre part. Or les réformes proposées par ces activistes (qui sont articulées sur toute une batterie de programmes préférentiels, de coûteuses formations, de régulations du langage) oscillent le plus souvent entre l’inutile et le contre-productif. 

Auteur: Moos Olivier

Info: Entretien avec Anne-Sylvie Sprenger à propos de *"The Great Awokening. Réveil militant, Justice Sociale et Religion", Religioscope, déc. 2020

[ cancel culture ] [ erreur catégorielle ] [ antispiritualisme ] [ bien maléfique ]

 

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FLP défini 3

Les Fils de La Pensée est un site-application dédié à l'encouragement de la lecture. Et, plus encore, de la lecture analytique.  

Mais pas que.

Initié à l'orée du 3e millénaire, alors que le numérique rétrécit une planète terre où la domination américano-occidentale post ww2 se termine, FLP veut se positionner "à partir du langage" c'est à dire en contemplant le monde pratiquement sur le mode peircéen du quasi-esprit.

Ainsi notre site-agrégateur-moteur de recherche collectif tente d'aller un peu plus loin que ce que les idiomes, unificateurs grégaires, font déjà. Ceci en proposant des pistes susceptibles d'amener le développement d'une lexicologie humaine (ici francophone) élargie, en mouvement, souple... et charpentée différemment comme explicité plus loin. 

FLP est aussi un espace de réflexion communautaire trans-partisan HOMME - machine, à l'heure où on veut nous faire croire que les chatbots générateurs de texte sont une intelligence artificielle (A.I. - I.A.) susceptible d'être comparée à celle des hommes - voire supérieure à cette dernière.  Alors que ce ne sont que de fantastiques outils, dangereux pour deux raisons au moins selon nous.  a) L'utilisation que tout pouvoir cherchera à en faire b) La dépendance, voire l'abrutissement, qu'elles pourront générer. 

FLP s'essaye donc à semer les graines d'une refondation des structures de la classification sémantique - sans bien sûr abandonner les savoirs partagés antérieurs. C'est à dire sans remettre en cause notre évolution ni ce qu'il y a "au dessous du langage",  ce dernier ne représentant que l'hyperstructure évolutive du monde-miroir-anthropique consensuel, miroir qui grandit au fur et à mesure de la progression et de l'affinement de notre science, c'est à dire de représentations qui recherchent une forme de vérité/exactitude sur base, entre autres, d'analogies et de hiérarchisations. Hiérarchisations souvent ridicules, probablement à l'instar du faible niveau de notre jeune espèce dans le grand et mystérieux concert cosmique.  

Structuration sémantique à venir potentiellement plus fiable et durable parce que simultanément partie d'une meilleure compréhension-intégration humaine avec la matrice Gaïa et le reste du vivant.

Mais restons bien humbles et revenons à FLP. Sachant que chacun d'entre nous est par essence limité par son imprégnation propre : milieu, époque, pays, langue, famille, genre, conformation physique, épisodes de vie, etc. et étant assumés et assurés certains prérequis quant à un minimum d'"existence physique" et d'éducation au verbe du participant, FLP essaye ce dépassement classificateur en s'appuyant sur deux idées perpendiculaires syntonisées.  

Primo : développement et l'approfondissement de l'idiosyncrasie de chacun, principalement par lecture réflexive et compréhension/analyse. 

Secundo :  meilleure intégration/compréhension de chaque subjectivité personnelle au sein des idées ; humaines dans un premier temps et, pourquoi pas, de la nature dans un sens plus large, avec cette idée parallèle d'une réintégration dans le concert du vivant après tous ces épisodes capitalo-anthropocentrés des singes trop malins que nous sommes. 

En bref :   approfondissement personnel      versus       élargissement collectif incorporateur.

Nous retrouvons ici le concept de tétravalence cher à nos yeux où se combinent l'horizontalité de l'intégration aux rouages du présent (principe féminin, empathique ?), avec une verticalité qui tend à vouloir incorporer le MOI dans la continuité de l'évolution (principe masculin, égoïste ?). 

Il y a ici une parenté évidente - que FLP voudrait développer - avec les quatre liaisons de covalence du carbone (et en lien avec les 4 bases dont sont formées les chaines de la double hélice de l'ADN ?). Nous croyons encore une fois que s'en inspirer aidera à  une meilleure représentation humaine au sein du mystérieux processus de la vie émergé de notre matrice Gaïa ; à l'heure où la science  à  déjà bien montré combien nos représentations du réel sont à revoir de fond en comble.

Nous préconisons-anticipons donc le développement d'une classification à partir d'une double base duale, extension des 2 axes conceptuels habituels : ying-yang, mâle-femelle, vie-mort, ouranien-chtonien, doute-certitude, noir blanc, etc... ici sémantiques, qui sont à appréhender comme deux vecteurs doubles, orthogonaux , qui copulent, modélisent, conjuguent et fusionnent sans cesse les formulations, c'est à dire comment nous nous représentons le réel sous forme de consensus humain verbaux.

Voilà donc défini un cadre et quatre vecteurs-directions, sans autre forme méthodologique que la présentation de ce "chassis conceptuel".  Chassis sous-jacent qui, avec l'aide de l'outil FLP, ses règles simples, et les possibilités de précision sémantique qu'Internet permet, aidera le participant-inserteur à aller  un cran plus loin, c'est à dire à réfléchir, en extrapolant et dédoublant parfois la double dualité foncière qui nous anime. 

On pourra partir par exemple de idée simple d'un "dictionnaire intriqué  à deux termes". Termes définis et mis ensemble dans une recherche, dont les combinaisons vont générer diverses variations, en partant de la plus courte. Recherche-exploration "à deux mots" dont on pourra comparer les résultats tels qu'exprimés par une femme, ou par un homme, ou autre... Les paramétrages de lieu, époque, pays, etc. venant ensuite pour qui voudra aller plus loin.

Ainsi, via les bidouillages de chacun et des échanges multiples, principalement portés sur une "exactitude sémantique consensuelle", le dictionnaire FLP devrait s'auto-construire - sans jamais vouloir conclure - par la pratique et le partage communautaire. 

C'est donc une entreprise collective qui combine deux orientations orthogonales : occupation du temps et développement personnel, ces derniers participants à la construction et au développement d'un dictionnaire linguistique communautaire, base de données  multidimensionnelle  enchevêtrée  - en espérant de continuels élagages-mises à jour-corrections des extraits insérés. Tout ceci idéalement en développant et mettant en pratique un ordonnancement sémantico-taxinomique qui s'inspire de ce que nous savons de l'esprit qui est dans la matière.

Mais ne nous emballons pas. Voyons d'abord FLP comme un instrument de recherche, transversal et sérendipitaire, sur fond de délassement.  

Nous croyons au plaisir du lire, de la pensée, de la rêverie... de la curiosité qui avance par crans....  Pas assouvie, mais nourrie... souvent parce que le langage - c'est à dire tous les hommes rassemblés -, formule et matérialise pour un temps nos sentiments-sensations-idées, avant que chaque représentation personnelle (pas de représentations sans verbe) ne diverge et se développe plus avant à sa manière dans un corpus idiomatique jamais fixé. 

Nous pensons que l'esprit a soif de nouveau et répondons à cette appétence en proposant le double plaisir conjugué de la lecture et de la quête. Bon dieu quel bonheur de découvrir des choses parce que formulées jusqu'à nous paraitre intelligibles !

Auteur: Mg

Info: mars, avril 2023

[ prospective ] [ alcènes et alcynes  ] [ gnose ]

 

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pamphlet

Coucou ! C’est moi, me revoilà. Vous ne me reconnaissez pas ? Pourtant, vous m’avez chaque année dans votre cheminée.

C’est moi, oui, Big Father, avec ma grande barbe hydrophile, mon traîneau à clochettes et des cadeaux dégueulasses plein ma hotte, emballés dans du splendide papier clignotant.

Vous ne m’avez pas vu venir, une fois de plus ? C’est normal. Personne ne sait jamais comment je débarque. Chaque année, je trompe mon monde. On ne m’entend pas arriver, et puis un matin, c’est fait, ça y est, tout est joué. La torture des fééries recommence.

Une fois encore, j’ai réussi à suspendre, pendant la nuit, mes guirlandes grotesques en travers des rues, comme autant d’insultes anonymes. Une fois encore, mes boules multicolores et mes illuminations pernicieuses sont apparues aux vitrines. Sans que personne me voie. Sans que personne me voie jamais. Une fois encore, ma grande terreur s’installe. Les semaines vont se dérouler comme des veilles funèbres. Les gens vont courir partout, épouvantés, le long des façades, avec leurs paquets obligatoires. Il est revenu, ça y est, il s’est réinstallé, celui qu’on redoutait. Celui dont on évitait même de prononcer le nom, de crainte de le voir surgir. C’est fait. La Bête est là. L’Eminence rose est de retour. La ville n’existe plus, ni la vie, ni rien. Tout est redevenu Noël.

Comme je m’amuse, à contempler la joie qu’ils affichent et à connaître le fond noir de leurs âmes angoissées ! Qu’ils me craignent, pourvu qu’ils me célèbrent ! En vérité, ma menace les rend malades bien avant décembre. Chaque année, on voudrait espérer que je ne vais pas revenir. Chaque année, on me sent approcher comme un mal inconnu, un cauchemar, une fièvre. Le Père Noël fait peur. L’année dernière, au restaurant, j’en ai entendu plusieurs, à voix basse, dès la fin d’octobre, qui parlaient de moi avec la trouille au ventre : "Qu’est-ce que tu fais pour les fêtes ? – Mais je ne sais pas. – Comment, tu ne sais pas ? – Non, pas encore. – Tu n’as rien prévu ? Mais tu es fou ! Il faut que tu t’en occupes ! Noël c’est demain ! Et la Saint-Sylvestre ! Tu ne te rends pas compte ! D’ici quinze jours, peut-être huit, il y aura des trucs partout ! Des guirlandes ! Des boules lumineuses !"

Oui, je flanque la panique ; mais il n’y a que depuis quelques années que je commence, chez certains, je le sais, à susciter de la haine.

Oh ! pas une haine bien dangereuse ! Rien de grave. Le monde est beaucoup trop définitivement ensucré, gnangnantifié et sans retour, colonisé par les bonnes intentions, la prudence et les mièvreries, pour que je me sente en péril. L’horreur du bonheur est peut-être une idée neuve en Europe mais elle ne risque pas de faire beaucoup d’émules. Je sais qu’il y en a, chaque année, qui rêvent de vomir tout le mal qu’ils pensent de ma fête du Cœur venimeuse, de cette apothéose ravageante de l’approbation du monde, de cette culmination de la résignation enfestée. Mais je suis bien tranquille. J’ai été si souvent honni pour de mauvaises raisons que les excellentes de maintenant ne risquent pas d’être saisies avant longtemps.

Tout semble avoir été dit contre moi. la critique est recuite. C’est mon plus beau triomphe, d’avoir fatigué jusqu’à ceux qui me détestent. Quel ennui les saisit, quel accablement, dès qu’ils envisagent de me vitupérer ! Quelle sensation effarante d’inutilité ! Ils savent déjà tout ce qu’on va leur balancer ! Les accusations de banalité, de trivialité, qu’ils vont endurer ! Rentrer dans le lard du Père Noël, cette vieille porte ouverte ? Composer le millième rappel de la transformation du rite païen du solstice d’hiver en fête chrétienne à son tour sécularisée par le business ? La cent millième attaque futile contre la Nativité détournée de sa pureté originelle, noyée sous les cadeaux paralysants, les téléphones qui parlent, le super-Nintendo parfumé à la framboise, les chocolats à quartz et toutes les autres saloperies en multiplication galopante ? Vous êtes tombé sur la tête ?

Le Père Noël est une ordure ? Comme vous y allez ! Regardez-vous un peu. C’est tous les jours Noël maintenant. Ma grande réussite, c’est qu’on croit que mon oppression ne dure que quelques semaines par an, alors que je suis le ressort des illuminations des douze mois de l’année. Noël, c’est Noël. Et pâques c’est aussi Noël. Et le 15 août. Et la Saint-Sylvestre. Et le bonheur de merde des vacances, cette paix des grands cimetières sous le soleil. Les mains à Nikons valent les tronches à boudins blancs. Les gueules de camping-cars valent les têtes de bûches au chocolat. Toutes les fiestas conduisent à moi. et toutes les rages, et toutes les ruées, et toutes les foires. Et toutes les roues de la Fortune. Et tous les Manèges de la télé. Et toute la quincaillerie clinquante de l’égalité par la joie, de la fraternité par l’extase niaise, de l’apothéose du Rien tonitruant qu’on étend par couches de plus en plus épaisses sur la violence toujours recommencée, mais de plus en plus niée, du genre humain.

Qui est plus philanthrope, plus humanitaire, plus tartuffien solidaire que moi ? Qui règne davantage sur les plateaux ? L’avenir m’appartient. C’est moi le Cavalier suprême de l’Apocalypse en rose. Je préfigure si parfaitement la société future, l’humanité de demain bien gâteuse, bien transparente et transfrontières, bavante de positivité dans ses centres-villes toilettés, avec ses Twingo fœtales aux chouettes banquettes sièges-bébés, ses cadeaux infantiles, sa classe dominante d’apparatchiks du loisir, de tour-opérateurs, de charlatans de l’urbanisme rigolo, de promoteurs guimauve de la babyphilie définitive, d’entrepreneurs meurtriers de gaieté publique, qu’il faudrait la subtilité géniale d’un Kojève au moins (ce drôle de type qui avait placé sa fortune en actions de la Vache qui rit et qui avait des ennuis avec ses femmes parce qu’il refusait farouchement de leur faire des enfants) pour comprendre ce que je fabrique vraiment ; Kojève qui avait découvert, et dès 1943, qu’avec la fin de l’Histoire allait disparaître l’inégalité juridique entre l’enfant et l’adulte. "Ne pouvant pas supprimer le contrôle de l’action enfantine, on introduira donc un contrôle de l’action adulte", prévoyait-il. Mais c’est ça, Noël ! C’est exactement moi ! Mais ce qu’il n’avait pas deviné, Kojève, c’est que ça se ferait en pleine foire, en plein rideau de fumée de carnaval ! Joyeux Noël ! Bonne santé ! C’est maintenant que mon règne de corso fleuri peut démarrer.

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "Exorcismes spirituels I - Rejet de greffe", pages 398 à 400

[ convention sociale ] [ bonheur obligatoire ] [ consumérisme ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

extraterrestres

Comment pourrions-nous comprendre l'électricité si notre approche consistait à nous placer au sommet d'une colline en attendant d'être frappés par la foudre ?

Il me semble que nous avons cette même attitude vis-à-vis des Ovnis. Nous avons très peu d'éléments pour évaluer ce que représente vraiment ce phénomène.

Une première possibilité, qui me semble dépassée, serait qu'il s'agisse d'un phénomène naturel, comme des forces piézoélectriques ayant la capacité d'interagir avec le subtil dispositif électro-chimique du système nerveux humain, afin de créer une sorte d'hallucination, une transfiguration, ou un ravissement. Plus concrètement, ça se ramène à trois questions : Est-ce que nous y sommes pour quelque chose ? Sommes-nous visités, ou bien y a-t-il un autre occupant dans la maison dont nous ne serions pas conscients ? J'ai eu des expériences de contact, j'ai observé un Ovni de très près, il m'est arrivé de rencontrer des entités d'autres dimensions, mais ça ne m'a pas déterminé à adopter une position tranchée. Malgré l'attention extrême que je portais à cette observation, il ne me semble pas possible de conclure parce qu'il y a toujours des éléments qui contredisent les autres hypothèses.

Jacques Vallée n'est pas revenu là-dessus tout à l'heure mais je me souviens que dans son ouvrage, le "Collège invisible", il avait insisté sur l'absurdité qui fait partie des expériences de contact, où le récit du contacté contient le plus souvent des détails qui nous sembleront parfaitement ridicules. C'est comme si des éléments d'invalidation devaient toujours être incorporés dans les récits les plus sincères afin d'entretenir le doute. De ce fait, le monde scientifique n'estime pas utile d'étudier plus avant le phénomène qui leur semble relever surtout de la pathologie

Je relisais récemment Carl Jung et son "Flying Saucers, A Modern Myth of Things Seen in the Skies" publié en 1954, et je pense que personne à ce jour n'a surpassé son approche.

[Extrait condensé : "Le problème de l'existence physique éventuelle des objets volants me parait tellement important que je crois de mon devoir de lancer un cri d'alarme, comme je le fis à l'époque où se préparaient des événements qui devaient frapper l'Europe au plus profond d'elle-même".]

Terence McKenna poursuit : "J'ai tendance à penser que nous ne pouvons correctement aborder le problème des Ovnis, ou d'autres domaines aussi subtils, à cause des restrictions de notre langage. Il serait vain de tenter de rallier un consensus sur le sujet. Nous sommes déjà incapables de nous accorder sur ce qui caractérise un soufflé réussi. Donc je pense que nous passons totalement à côté en tentant de proposer une explication définitive". 

Si le phénomène Ovni est une manifestation du superviseur de l'inconscient collectif, nous devrions alors nous demander pourquoi, et comment procède-t-il ?

Terence McKenna rend hommage à Jacques Vallée et à son "système de contrôle spirituel" :

A part Jung, le seul à mon avis qui ait correctement abordé la question est Jacques Vallée, quand il a écrit : "Il est moins utile de s'interroger sur la nature du phénomène que de s'intéresser aux effets qu'il produit; on voit alors clairement que les Ovnis laminent notre foi en la science. Ils sont un antidote au paradigme scientifique qui s'est développé depuis 400 ans et nous a conduit au bord de la catastrophe mondiale...."

Il pense qu'il existe dans la structure de la psyché humaine une sorte de super-ego, un contrôleur supérieur dans la conscience collective, qui est capable d'agir en suscitant des phénomènes qui tendent à rectifier des dérives pathologiques ou mortelles dans la conduite de nos sociétés. Les corrections nécessaires ne peuvent intervenir au niveau personnel ni institutionnel; c'est alors le niveau supérieur de la conscience collective de l'espèce, comme un dispositif de contrôle, qui fait obstacle aux idéologies destructrices qui se sont mises en place et produit des manifestations capables de les éradiquer.

Pour moi, l'objectif des manifestations Ovnis est de contrer les effets du rationalisme dominant qui entraîne actuellement autant de souffrances, en injectant des éléments capables de le déstabiliser.

Il existe une autre possibilité où le gouverneur supérieur n'aurait pas directement pour rôle de renverser le matérialisme ambiant : il se peut que nous partagions depuis toujours cette planète avec une autre espèce intelligente, qui nous avait longtemps laissés évoluer librement, jusqu'au point où nous commencions à représenter une nuisance. Dans ce cas, les conséquences sont les mêmes que sont les mêmes que celles évoquées précédemment.

Pour Terence McKenna, une divulgation de la vérité entraînerait un immense chaos dans nos sociétés :

"J'ai abordé cet aspect avec une des entités et elle m'a répondu : 'Nous avons préféré que vous pensiez à une invasion aliène, parce que les populations seraient paniquées si nous leur laissions découvrir ce qui se passe vraiment!' 

"Je dois aussi mentionner la possibilité que ces engins volants ne soient pas des vaisseaux mais des capsules temporelles. Dans ce cas nous serions probablement fascinés de contempler nos très lointains descendants, venus nous porter le message d'un évènement majeur."

Le passage suivant est extrait d'une conférence titrée "Alien love", qui situe le niveau de ses expériences personnelles : "Ces myriades d'êtres que je rencontrais dans ces séances se métamorphosaient en d'étranges machines, semblables à d'énormes sphères ciselées comme des joyaux, qui leur permettaient de créer des objets en les chantant."

Les aliens se trouvent en ce cas dans un endroit inattendu... le champ de la conscience, toujours aussi méconnu.

McKenna ajoute : "Je suis toujours stupéfait que nous nous posions la question depuis 45 ans, sans que personne n'ai encore émis ce genre de proposition : si nous pensons être visités par des formes de vie organiques et intelligentes venues d'une autre dimension ou d'une région de notre galaxie, nous devrions alors examiner très attentivement notre environnement pour y rechercher des traces de leur présence. Pourrait-on trouver des formes de vie, parmi les millions que nous connaissons, qui ne seraient pas originaires de cette planète ? Il serait possible de lancer une étude comparative de l'ADN. Certains d'entre vous savent déjà ce que j'en pense : les plantes et les champignons qui renferment des substances psychoactives ont les meilleures chances de figurer parmi les envahisseurs extraterrestres dans l'environnement de cette planète."

En résumé : "Sans le recours aux substances psychédéliques, je pense qu'on ne pourra pas aborder sérieusement la question des Ovnis; ce serait comme tenter de comprendre la nature de l'univers en se privant d'un bon télescope."


Auteur: McKenna Terence

Info: Sur les états amplifiés de conscience et le rôle des "forces spirituelles", présentation de Graham Hancock lors du symposium Angels, Aliens and Archetypes auquel participait aussi Jacques Vallée en 1987

[ science-fiction ] [ DMT ] [ spéculations ] [ astral ]

 

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léviathan

Le calamar géant qui a fait trembler les mers

Il a fallu plusieurs siècles aux savants pour donner crédit aux récits des marins attaqués par un terrifiant monstre marin. Le calamar géant devint un personnage littéraire à part entière au travers d’œuvres telles que Les Travailleurs de la mer de Victor Hugo ou Vingt Mille Lieues sous les mers de Jules Verne.

Les chroniques et les sagas nordiques du Moyen-Âge décrivent un terrifiant monstre marin qui faisait la taille d’une île et se déplaçait dans les mers séparant la Norvège de l’Islande. Au XIIIe siècle, la saga islandaise Örvar-Oddr parle du "monstre le plus grand de la mer", capable d’avaler "des hommes, des bateaux et même des baleines". 

Cette intrigante apparition revient dans des textes ultérieurs, comme la chronique du Suédois Olaus Magnus, qui décrit au XVIe siècle de colossales créatures, capables de couler un bateau. Ce type de récits continue de circuler au XVIIIe siècle, époque à laquelle ce monstre commence à être connu sous le nom de kraken (littéralement “arbre déraciné”), un terme norvégien désignant une réalité pour le moins fantasque. Dans son Histoire naturelle de la Norvège (1752), Erik Ludvigsen Pontoppidan, évêque de Bergen, décrit en effet le kraken comme "une bête d’un mille et demi de long qui, si elle s’accroche au plus grand navire de guerre, le fait couler jusqu’au fond" et précise qu’il "vit dans les fonds marins, dont il ne remonte qu’une fois réchauffé par les feux de l’enfer".

Pourtant, ces descriptions ne sortaient pas totalement de l’imagination de leurs auteurs. Erik Ludvigsen Pontoppidan nota par exemple que "les décharges de l’animal troublaient l’eau" ; il pourrait donc s’agir d’un calamar géant. L’histoire du kraken est liée aux péripéties vécues dans des mers inconnues par des marins qui les relataient à leur retour. Si les marins nordiques s’étaient limités à l’Atlantique Nord, l’entrée dans la modernité a toutefois étendu le champ d’observation à l’ensemble du Pacifique.

Certains marins ont parlé d’un "diable rouge", un calamar qui attrapait et dévorait des naufragés ; d’autres ont évoqué des animaux marins insatiables, mesurant de 12 à 13 m de longueur. La succession de témoignages d’officiers de marine racontant avoir été confrontés à ces créatures déconcertait les scientifiques. Si le célèbre naturaliste suédois Carl von Linné, le père de la taxonomie moderne, inclut le kraken dans son Systema naturae (1735), la plupart des scientifiques n’étaient pas prêts à assumer l’existence du terrible monstre nordique. Le sort injuste que subit le Français Pierre Denys de Montfort illustre cette fermeture d’esprit. Dans son Histoire naturelle générale et particulière des mollusques, le naturaliste consigna en 1801 l’existence des animaux "[les plus grands] de la Nature quant à notre planète" : le "poulpe colossal"et le "poulpe kraken". Il se fondait sur des récits nordiques et des témoignages de marins contemporains, qu’il mit en relation avec un animal similaire cité par le naturaliste romain Pline l’Ancien. Il inclut dans son oeuvre une illustration représentant l’attaque d’un navire par un poulpe géant au large de l’Angola, qui devint l’image emblématique du kraken, mais suscita le rejet unanime de la communauté scientifique et le discrédita à vie.

Or, les témoignages sur l’existence de cet animal légendaire continuaient à se succéder. Le capitaine de baleinier Frank Bullen raconta ainsi qu’il avait sans l’ombre d’un doute assisté au combat d’un "énorme cachalot" avec un "gigantesque calamar". Selon sa description, les yeux de l’animal étaient situés à la base de ses tentacules, corroborant l’idée qu’il s’agissait plutôt d’un calamar (pieuvre et poulpe possédant des bras, mais pas de tentacules).

L’épisode qui marqua un tournant dans l’histoire des calamars géants se produisit en 1861, lorsque le navire français Alecton se trouva confronté à un céphalopode de 6 m de long au nord-est de Ténériffe, dans l’Atlantique. Son commandant, le capitaine de frégate Frédéric Bouyer, relata cette rencontre dans un rapport qu’il soumit à l’Académie des sciences : l’animal "semblait vouloir éviter le navire", mais le capitaine se disposa à le chasser en lui lançant des harpons et en lui tirant des coups de fusil. Il ordonna même de le "garrotter […] et de l’amener le long du bord", mais la créature finit par s’enfoncer dans les profondeurs. Frédéric Bouyer conserva ainsi un morceau du calamar, qu’il fit parvenir au prestigieux biologiste Pierre Flourens. 

Le calamar géant devint un personnage littéraire à part entière au travers d’œuvres telles que Les Travailleurs de la mer de Victor Hugo ou Vingt Mille Lieues sous les mers de Jules Verne. Toujours avide de nouvelles découvertes scientifiques, Jules Verne décrivit dans son roman l’épisode de l’Alecton et toutes les références mythiques et historiques à l’animal ; il y inclut aussi l’attaque d’un calamar contre le Nautilus lui-même. Les scientifiques analysèrent pour leur part les témoignages de marins et les restes de calamars récupérés en mer ou échoués, et conclurent qu’il s’agissait d’une espèce particulière, qu’ils baptisèrent Architeuthis dux.

Le mystère continue de planer autour de cet animal. On ne sait presque rien de son cycle de vie ni de ses habitudes, ni même s’il s’agit d’une seule espèce de calamar. Seules une équipe de scientifiques japonais et une chaîne nord-américaine ont pu le filmer de manière brève respectivement en 2006 et 2012. On sait malgré tout que les mâles mesurent environ 10 m de long et les femelles 14. Son oeil, le plus grand du règne animal, peut mesurer jusqu’à 30 cm de diamètre. 

L’habitat de cet animal se situe dans des profondeurs extrêmes, surtout dans l’océan Pacifique, mais aussi dans l’Atlantique. Il trouve par exemple refuge dans le canyon d’Avilés, à 5 000 m de profondeur au large des Asturies. Habitués à en rencontrer lorsqu’ils partent en mer, les pêcheurs locaux n’ont guère accordé d’importance à la controverse autour de son existence. Cet animal leur est si familier qu’ils lui ont même donné un nom : le peludín ("petit velu") ; un musée, qui lui est consacré, a par ailleurs ouvert ses portes en 1997 à Luarca, sur la côte des Asturies. 

Qu’on l’appelle peludín ou Architeuthis dux, on sait désormais avec certitude que cet animal existe, même s’il n’est pas aussi sauvage que la créature sortie de l’imagination nordique et des bestiaires de la Renaissance. Il est désormais si réel que seuls notre abandon de l’exploration sous- marine et l’absence de progrès de la science entravent encore son étude et la connaissance que nous en avons. D’ici là, le mystère qui l’entoure continuera d’alimenter des légions de cryptozoologues résolus à ressusciter le kraken, mais aussi les créatures les plus romantiques de nos vieilles légendes marines.

Auteur: Armendariz Xabier

Info: sur https://www.nationalgeographic.fr/, 6 juillet 2021

[ mythologie ] [ homme-animal ]

 

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cheptel humain

Malgré tout le bonheur que m’a procuré, à titre personnel, chaque voyage entrepris ces dernières années, une impression tenace s’est imprimée dans mon esprit : une horreur silencieuse devant la monotonie du monde. Les modes de vie finissent par se ressembler, à tous se conformer à un schéma culturel homogène. Les coutumes propres à chaque peuple disparaissent, les costumes s’uniformisent, les mœurs prennent un caractère de plus en plus international. Les pays semblent, pour ainsi dire, ne plus se distinguer les uns des autres, les hommes s’activent et vivent selon un modèle unique, tandis que les villes paraissent toutes identiques. Paris est aux trois quarts américanisée, Vienne est budapestisée : l’arôme délicat de ce que les cultures ont de singulier se volatilise de plus en plus, les couleurs s’estompent avec une rapidité sans précédent et, sous la couche de vernis craquelé, affleure le piston couleur acier de l’activité mécanique, la machine du monde moderne. Ce processus est en marche depuis fort longtemps déjà : avant la guerre, Rathenau avait annoncé de manière prophétique cette mécanisation de l’existence, la prépondérance de la technique, comme étant le phénomène le plus important de notre époque. Or, jamais cette déchéance dans l’uniformité des modes de vie n’a été aussi précipitée, aussi versatile, que ces dernières années. Soyons clairs ! C’est sans doute le phénomène le plus brûlant, le plus capital de notre temps.

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Conséquences : la disparition de toute individualité, jusque dans l’apparence extérieure. Le fait que les gens portent tous les mêmes vêtements, que les femmes revêtent toutes la même robe et le même maquillage n’est pas sans danger : la monotonie doit nécessairement pénétrer à l’intérieur. Les visages finissent par tous se ressembler, parce que soumis aux mêmes désirs, de même que les corps, qui s’exercent aux mêmes pratiques sportives, et les esprits, qui partagent les mêmes centres d’intérêt. Inconsciemment, une âme unique se crée, une âme de masse, mue par le désir accru d’uniformité, qui célèbre la dégénérescence des nerfs en faveur des muscles et la mort de l’individu en faveur d’un type générique. La conversation, cet art de la parole, s’use dans la danse et s’y disperse, le théâtre se galvaude au profit du cinéma, les usages de la mode, marquée par la rapidité, le “succès saisonnier”, imprègnent la littérature. Déjà, comme en Angleterre, la littérature populaire disparaît devant le phénomène qui va s’amplifiant du “livre de la saison”, de même que la forme éclair du succès se propage à la radio, diffusée simultanément sur toutes les stations européennes avant de s’évaporer dans la seconde qui suit. Et comme tout est orienté vers le court terme, la consommation augmente : ainsi, l’éducation, qui se poursuivait de manière patiente et rationnelle, et prédominait tout au long d’une vie, devient un phénomène très rare à notre époque, comme tout ce qui s’acquiert grâce à un effort personnel.

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Toutes ces choses, que j’ai seulement évoquées, le cinéma, la radio, la danse, tous ces nouveaux moyens de mécanisation de l’humanité, exercent un pouvoir énorme qui ne peut être dépassé. Toutes répondent en effet à l’idéal le plus élevé de la moyenne : offrir du plaisir sans exiger d’effort. Et leur force imbattable réside en cela : elles sont incroyablement confortables. La nouvelle danse peut être apprise en trois heures par la femme de ménage la plus maladroite, le cinéma ravit les analphabètes, desquels on n’exige pas une grande éducation pour profiter de la radio ; il suffit de mettre les écouteurs sur la tête, pour déjà l’entendre rouler dans l’oreille – même les dieux luttent en vain contre un tel confort. Ce qui n’exige que le minimum d’effort, mental et physique, et le minimum de force morale doit nécessairement l’emporter auprès des masses, dans la mesure où cela suscite la passion de la majorité. Et ce qui aujourd’hui encore réclame l’indépendance, l’autodétermination ou la personnalité dans le plaisir paraît dérisoire face à un pouvoir aussi surdimensionné. À vrai dire, au moment où l’humanité s’ennuie toujours davantage et devient de plus en plus monotone, il ne lui arrive rien d’autre que ce qu’elle désire au plus profond d’elle-même. L’indépendance dans le mode de vie et même dans la jouissance de la vie ne constitue plus, désormais, un objectif, tant la plupart des gens ne s’aperçoivent pas à quel point ils sont devenus des particules, des atomes d’une violence gigantesque. Ils se laissent ainsi entraîner par le courant qui les happe vers le vide ; comme le disait Tacite : “ruere in servitium”, ils se jettent dans l’esclavage […].

Ainsi, aucune résistance ! Ce serait une présomption scandaleuse que d’essayer d’éloigner les gens de ces petits plaisirs (intérieurement vides). Parce que nous – pour être honnêtes – qu’avons-nous d’autre à leur donner ? Nos livres ne les touchent plus, car ils ont cessé depuis longtemps de procurer les sueurs froides ou les excitations fébriles, que le sport et le cinéma prodiguent à foison. Ils ont même l’impudence d’exiger au préalable de nos livres, de notre effort mental et de notre éducation, une coopération des sentiments et une tension de l’âme. Nous sommes devenus – admettons-le – terriblement étrangers à tous ces plaisirs et passions de masse et donc à l’esprit de l’époque, nous, dont la culture spirituelle est une passion pour la vie, nous, qui ne nous ennuyons jamais, pour qui chaque jour est trop court de six heures, nous, qui n’avons besoin ni de dispositifs pour tuer le temps ni de machines d’arcade, ni de danse, ni de cinéma, ni de radio, ni de bridge, ni de défilés de mode. Il nous suffit de passer devant un panneau d’affichage dans une grande ville ou de lire un journal qui décrit en détail les batailles homériques des matchs de football pour sentir que nous sommes déjà devenus des outsiders, tels les derniers encyclopédistes pendant la Révolution française, une espèce aussi rare et menacée d’extinction aujourd’hui en Europe que les chamois et les edelweiss. Peut-être qu’un jour un parc naturel sera créé pour nous, derniers spécimens d’une espèce rare, pour nous préserver et nous conserver respectueusement en tant que curiosités de l’époque, mais nous devons avoir conscience que nous manquons depuis longtemps d’un quelconque pouvoir pour tenter la moindre chose contre cette uniformité croissante du monde. Devant cette lumière éblouissante de fête foraine, nous ne pouvons que demeurer dans l’ombre et, tels les moines des monastères pendant les grandes guerres et les grands bouleversements, consigner dans des chroniques et des descriptions un état de choses que, comme eux, nous tenons pour une déroute de l’esprit.

Auteur: Zweig Stefan

Info: L'uniformisation du monde

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Ajouté à la BD par Coli Masson