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fureur

La colère est la forme commune des passions dans leur paroxysme ; de toutes, même de la peur. Et c'est là qu'on peut voir comment l'homme arrive vite à oublier son intérêt prudemment calculé, et même sa propre conservation. Il est ordinaire qu'une colère, même née de petites causes, nous porte à des actes extravagants, comme de frapper, de briser, et même d'injurier des choses. Et j'ose dire que le plus profond de la colère est la colère d'être en colère, et de savoir qu'on s'y jettera, et de la sentir monter en soi comme une tempête physique. Le mot irritation en son double sens, explique assez cela, si l'on y pense avec suite. L'enfant crie de plus en plus fort principalement parce qu'il s'irrite de crier, comme d'autres s'irritent de tousser.

Auteur: Alain

Info: Mars ou la guerre jugée, Les Passions et la Sagesse, la Pléiade, Gallimard <p.584>1960

 

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survie

C'est une idée assez commune que révolution et guerre sont filles de pauvreté. Mais ce n'est qu'une demi-vérité. Ce ne sont point les pauvres qui sont redoutables, ce sont les humiliés et les offensés. L'aiguillon du besoin ne fait qu'un animal peureux ; pensée de vol, non pensée de vengeance. Et la pensée s'occupe toute à chercher un repas après l'autre. Tête et ventre. Les passions veulent du loisir, et un sang riche. On croit que la faim conduirait à la colère ; mais c'est là une pensée d'homme bien nourri. Dans le fait une extrême faim tarit d'abord les mouvements de luxe, et premièrement la colère. J'en dirais autant du besoin de dormir, plus impérieux peut-être que la faim. Ainsi la colère ne serait pas naturellement au service des désirs, comme on veut d'abord croire.

Auteur: Alain

Info: Propos I, Bibliothèque de la Pléiade, nrf Gallimard 1956 , 15 février 1926 p.675

[ primordiale ]

 

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hasard

Le fatalisme est une disposition à croire que tout ce qui arrivera dans le monde est écrit ou prédit, de façon que, quand nous le saurions, nos efforts ne feraient pas manquer la prédiction, mais au contraire, par détour imprévu, la réaliseraient. Cette doctrine est souvent présentée théologiquement, l'avenir ne pouvant pas être caché à un Dieu très clairvoyant ; il est vrai que cette belle conclusion enchaîne Dieu aussitôt ; sa puissance réclame contre la prévoyance. Mais nous avons jugé ces jeux de paroles. Bien loin qu'ils fondent jamais quelque croyance, ils ne sont supportés que parce qu'ils mettent en argument d'apparence ce qui est déjà l'objet d'une croyance ferme, et mieux fondée que sur des mots. Le fatalisme ne dérive pas de la théologie ; je dirais plutôt qu'il la fonde. Selon le naïf polythéisme, le destin est au-dessus des dieux.

Auteur: Alain

Info: 81 chapitre sur l'esprit et les passions, Les Passions et la Sagesse, la Pléiade, <p.1173>

 

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sentiment

Il faut que j'explique encore de plus près l'idée essentielle de ce livre, qui est que ce sont les passions, et non les intérêts, qui mènent le monde. Et je suis surtout disposé à y revenir lorsque je pense à ces descriptions si incomplètes de la nature humaine qui ont cours maintenant, d'après lesquelles toutes nos actions s'expliqueraient par un intérêt personnel plus ou moins dissimulé. Si l'on prend les choses ainsi, il y a un tel contraste entre l'homme de ces livres et l'homme des tranchées, que l'on veut imaginer quelque miracle surhumain, par où revient l'idée toujours si puissante de la guerre décrétée surhumainement, et par conséquent inévitable. C'est pourquoi je ne pourrais jamais expliquer trop longuement le mécanisme des passions et ses redoutables effets. Il faut d'abord que vous sachiez que le dernier secret de la chose est dans le Traité des Passions, de Descartes, et est assez caché, malgré l'apparence.

Auteur: Alain

Info: Mars ou la guerre jugée

 

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commander

"Soyons indulgents ; car ils ont beaucoup souffert, et ils souffriront encore";. Ce raisonnement se trouve toujours mauvais, parce que la moindre partie de liberté conduit à réfléchir. Les vues du praticien sont plus justes. "Soyons très sévères, car ils ont beaucoup souffert ; ils ne nous le pardonneront jamais, s'ils ont le loisir d'y penser". Alors tombent les coups de marteau, et sur le point sensible ; alors la moindre liberté est pourchassée. Les exercices et les sanctions, tout, jusqu'aux faveurs, a pour fin d'abolir entièrement l'idée même d'un droit et le moindre mouvement d'espérance. Ainsi, quand on veut faire agir un gaz, on le comprime. Toute cette force jeune étant ainsi comprimée et contrariée avec suite, sans une faiblesse par l'action d'un système parfait, alors il n'y a plus échappée que contre l'ennemi ; et c'est lui qui paiera. Voilà en bref l'histoire d'un régiment d'élite, et la pensée constante d'un vrai chef.

Auteur: Alain

Info: Mars ou la guerre jugée, Les Passions et la Sagesse, la Pléiade Gallimard 1960 <p.557-558>

[ machiavélisme ] [ armée ] [ pensée de droite ]

 

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guerre

Je veux dire ici quelque chose que l'on ne discutera point ; c'est qu'il faut se défier beaucoup des opinions et des sentiments de l'élite au sujet de la guerre. Pourquoi ? Parce que l'élite trouve trop d'avantages dans cet ordre resserré que la guerre impose. Qu'un banquier, un chef d'industrie, et même un inventeur ambitieux y trouvent occasion de dominer, cela est connu. Mais il faut dire que tous ceux qui exercent un pouvoir retrouvent en cet état violent l'importance et la majesté, idoles presque oubliées aux temps heureux de la paix. Le jeu de la force a des suites effrayantes ; le simple citoyen en fait le compte, et considère comme évident pour tous que la guerre est le plus grand des maux ; d'où il conclut trop vite que tout homme, à toute place, s'efforce contre la guerre, et que, donc, si la guerre vient, c'est qu'on ne pouvait y échapper. Idée funeste, qui frappe de stérilité tous les sentiments pacifiques.

Auteur: Alain

Info: Mars ou la guerre jugée, Les Passions et la Sagesse, Pléiade, nrf 1960 <p.603>

[ manipulation ]

 

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sciences

Qu'un garçon ne fasse voir aucune aptitude pour les mathématiques, cela avertit qu'il faut lui enseigner obstinément et ingénieusement. S'il ne comprend pas ce qui est le plus simple, que comprendra-t-il jamais ? Évidemment, le plus facile est de s'en tenir à ce jugement sommaire, que l'on entend encore trop : " Ce garçon n'est pas intelligent. " Mais ce n'est point permis. Tout au contraire, c'est la faute capitale à l'égard de l'homme, et c'est l'injustice essentielle, de le renvoyer ainsi parmi les bêtes, sans avoir employé tout l'esprit que l'on a, et toute la chaleur d'amitié dont on est capable, à rendre à la vie ces parties gelées. Si l'art d'instruire ne prend pour fin que d'éclairer les génies, il faut en rire, car les génies bondissent au premier appel, et percent la broussaille. Mais ceux qui s'accrochent partout et se trompent sur tout, ceux qui sont sujets à perdre courage et à désespérer de leur esprit, c'est ceux-là qu'il faut aider.

Auteur: Alain

Info: Propos sur l'éducation, p.48, P.U.F 1969

[ théorique ]

 

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volonté

Ainsi d'un homme qui cède à la peur, je ne dirai jamais qu'il a choisi de céder à la peur. Car il n'est pas difficile de céder à la peur ; il est inutile de le vouloir ; la peur tire continuellement ; il n'y a qu'à la laisser faire. Comme pour dormir le matin, il suffit de s'abandonner. Le paresseux ne choisit point la paresse ; la paresse se passe très bien d'être choisie. La gourmandise de même, et la luxure, et tous les péchés ; cela va tout seul. L'automobile, au tournant, ira dans le ravin ; elle ira toute seule dans le ravin. Dès que l'homme ne se dirige plus, les forces extérieures le reprennent. Et si j'écris n'importe quoi, ce sera une sottise. Le bavard qui se lance, ou qui seulement s'endort, ira de sottise en sottise. Ce que les anciens, hommes de jeux et de sports, avaient très bien vu, disant que la force gouvernante ou est directement bonne et que nul n'est méchant volontairement.

Auteur: Alain

Info: Propos I

 

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rigoler

Le rire est directement contraire à cette forcenée attention à soi, qui est le fond du sérieux. Le rire secoue tout le corps comme un vêtement, laissant chaque partie s'ébattre à sa guise. Par essence le rire est un abandon de gouvernement, et le premier remède contre cet absurde gouvernement qui noue et paralyse. Le rire rétablit les échanges en déliant ; il aère, nettoie et repose. Quoi de mieux ? Mais le rire a ceci de mauvais qu'il attaque le sérieux en son centre et menace de le détrôner. Et c'est un scandale, pour celui qui s'est fait de belles raisons d'être triste, que toutes ces raisons se perdent soudain par cette négation de toute attitude qu'est le rire. "Ne prétendez point" se ramène à ceci : "ne tendez point". Mais on veut prétendre. Ainsi le rire est comme une violence, et une tentative de vous faire sauter comme un nourrisson. Il faut toutes les précautions de l'art comique pour que le rire soit vainqueur. Mais aussi ce triomphe est beau.

Auteur: Alain

Info: Les idées et les âges, Les Passions et la Sagesse, la Pléiade, Gallimard 1960p.173>

[ décoincer ] [ désinhiber ]

 

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libre arbitre

Ainsi d'un homme qui cède à la peur, je ne dirai jamais qu'il a choisi de céder à la peur. Car il n'est pas difficile de céder à la peur ; il est inutile de le vouloir ; la peur tire continuellement ; il n'y a qu'à la laisser faire. Comme pour dormir le matin, il suffit de s'abandonner. Le paresseux ne choisit point la paresse ; la paresse se passe très bien d'être choisie. La gourmandise de même, et la luxure, et tous les péchés ; cela va tout seul. L'automobile, au tournant, ira dans le ravin ; elle ira toute seule dans le ravin. Dès que l'homme ne se dirige plus, les forces extérieures le reprennent. Et si j'écris n'importe quoi, ce sera une sottise. Le bavard qui se lance, ou qui seulement s'endort, ira de sottise en sottise. Ce que les anciens, hommes de jeux et de sports, avaient très bien vu, disant que la force gouvernante ou le vouloir est directement bonne et que nul n'est méchant volontairement.

Auteur: Alain

Info: Propos I, la Pléiade, Gallimard 1956 <30 mai 1922 p.410>

 

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