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judaïsme

Tzimtzoum. Ce mot risible désigne un concept majeur de la Kabbale. Pour que le monde existât, Dieu, qui était tout et partout, consentit à se rétrécir, à laisser un espace vide qui ne fût pas habité par lui : c'est dans ce "trou" que le monde prit place.

Ainsi occupons-nous le terrain vague qu'il nous a concédé par miséricorde ou par caprice. Pour que nous soyons, il s'est contracté, il a limité sa souveraineté. Nous sommes le produit de son amenuisement volontaire, de son effacement, de son absence partielle. Dans sa folie, il s'est donc amputé de nous. Que n'eut-il le bon sens et le bon goût de rester entier!

Auteur: Cioran Emil Michel

Info: De l'inconvénient d'être né, Folio essais, p.141

[ tsimtsoum ] [ tsimtsum ] [ source originelle ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

Gaule

Les Français ont tous les défauts, sauf un : ils ne sont pas obséquieux. Ils l'ont assez démontré pendant l'Occupation ; je n'en ai vu aucun qui, dans la rue ou ailleurs, se soit aplati devant l'occupant ou qui ait pris un air servile (la Collaboration est tout autre chose ; les collaborateurs se sont vendus : cela est différent). C'est là où les Français ont une nette supériorité sur les Allemands, lesquels dès qu'ils sont battus, deviennent rampants. Mais même en dehors de la défaite, ils sont toujours à plat ventre devant un supérieur hiérarchique : leur obéissance est à base de lâcheté civile et non de consentement à l'ordre.

Auteur: Cioran Emil Michel

Info: Carnets 1957-1972, nrf Gallimard 1997, 27 janvier 1966 p.338

[ impertinence ]

 

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rêves

L’échafaudage d’un cauchemar exige une dépense nerveuse plus exténuante que la construction théorique la mieux articulée. Comment, après le réveil, recommencer la besogne d’aligner des idées quand, dans l’inconscience, nous étions mêlés à des spectacles grotesques et merveilleux, et que nous roulions à travers les sphères sans l’entrave de l’antipoétique Causalité ? Pendant des heures nous étions semblables à des dieux ivres – et, subitement, les yeux ouverts supprimant l’infini nocturne, il nous faut reprendre, sous la médiocrité du jour, le ressassement de problèmes incolores, sans que nous y aide aucun des phantasmes de la nuit. La féerie glorieuse et néfaste aura donc été inutile ; le sommeil nous a épuisés en vain.

Auteur: Cioran Emil Michel

Info: Dans "Précis de décomposition" in Œuvres, éditions Gallimard, 1995, pages 629-630

[ condition supérieure ] [ dissociation structurelle ] [ songes ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

Gaule

Nous devons être reconnaissants à la France de l'avoir cultivé avec maestria et inspiration. C'est d'elle que j'ai appris à ne me prendre au sérieux que dans l'obscurité et, en public, à me moquer de tout. L'école française est celle d'une insouciance sautillante et parfumée. La bêtise voit partout des objectifs ; l'intelligence, des prétextes. Son grand art est dans la distinction et la grâce de la superficialité. Mettre du talent dans les choses de rien - c'est-à-dire dans l'existence et dans les enseignements du monde est une initiation aux doutes français. La conclusion du XVIIIe siècle non encore souillé par l'idée de progrès : l'univers est une farce de l'esprit. [...].

Auteur: Cioran Emil Michel

Info:

[ éloge ]

 

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parole

Si, par hasard ou par miracle, les mots s’envolaient, nous serions plongés dans une angoisse et une hébétude intolérables. Ce mutisme subit nous exposerait au plus cruel supplice. C’est l’usage du concept qui nous rend maîtres de nos frayeurs. Nous disons : la Mort – et cette abstraction nous dispense d’en ressentir l’infini et l’horreur. En baptisant les choses et les événements nous éludons l’Inexplicable : l’activité de l’esprit est une tricherie salutaire, un exercice d’escamotage ; elle nous permet de circuler dans une réalité adoucie, confortable et inexacte. Apprendre à manier les concepts – désapprendre à regarder les choses… La réflexion naquit un jour de fuite ; la pompe verbale en résulta.

Auteur: Cioran Emil Michel

Info: Dans "Précis de décomposition" in Œuvres, éditions Gallimard, 1995, page 688

[ parlêtre ] [ inconscient ] [ symbolisation ] [ atténuation ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

intellectualisation

D.C., qui, dans son village, en Roumanie, écrivait ses souvenirs d'enfance, ayant raconté à son voisin, un paysan nommé Coman, qu'il n'y serait pas oublié, celui-ci vint le voir le lendemain de bonne heure et lui dit : "Je sais que je ne vaux rien mais tout de même je ne croyais pas être tombé si bas pour qu'on parle de moi dans un livre."

Le monde oral, combien il était supérieur au nôtre! Les êtres (je devrais dire, les peuples) ne demeurent dans le vrai qu'aussi longtemps qu'ils ont horreur de l'écrit. Dès qu'ils en attrapent le préjugé, ils entrent dans le faux, ils perdent leurs anciennes superstitions pour en acquérir une nouvelle, pire que toutes les autres ensemble.

Auteur: Cioran Emil Michel

Info: De l'inconvénient d'être né, Folio essais, p.80

[ dégradation ] [ déchéance ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

sainteté

Me répétant les exclamations de Thérèse d’Avila, je la voyais s’écrier à six ans : "Éternité, éternité", puis suivais l’évolution de ses délires, de ses embrasements, de ses sécheresses. Rien de plus captivant que les révélations privées, qui déconcertent les dogmes et embarrassent l’Eglise… J’eusse aimé garder le journal de ces aveux équivoques, me repaître de toutes ces nostalgies suspectes… Ce n’est pas au fond d’un lit que l’on atteint aux sommets de la volupté : comment trouver dans l’extase sublunaire ce que les saintes vous laissent pressentir dans leurs ravissements ? La qualité de leurs secrets, c’est Bernini qui nous l’a fait connaître dans la statue de Rome où la sainte espagnole nous incite à maintes considérations sur l’ambiguïté de ses défaillances…

Auteur: Cioran Emil Michel

Info: Dans "Précis de décomposition" in Œuvres, éditions Gallimard, 1995, page 694

[ ambivalence ] [ désir ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

indépendance

La liberté est un joug trop lourd pour la nuque de l'homme. Même pris d'une terreur sauvage, il est plus assuré que sur les chemins de la liberté. Bien qu'il la considère comme la valeur positive par excellence, la liberté n'a jamais cessé de lui présenter son revers négatif. La route infaillible de la débâcle est la liberté. L'homme est trop faible et trop petit pour l'infini de la liberté, de sorte qu'elle devient un infini négatif. Face à l'absence de bornes, l'homme perd les siennes. La liberté est un principe éthique d'essence démoniaque. Le paradoxe est insoluble. La liberté est trop grande et nous sommes trop petits. Qui, parmi les hommes, l'a méritée ? L'homme aime la liberté, mais il la craint.

Auteur: Cioran Emil Michel

Info: Le livre des leurres, 1936, Oeuvres, Quarto Gallimard 1995, p.257

[ antinomie ]

 

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nombres

Cet après-midi, suis entré par mégarde au Collège de France, dans une salle où le prof écrivait au tableau noir des formules de hautes mathématiques. Pendant une heure, j'ai regardé avec une stupeur admirative ce magicien qui ne cessa de faire surgir des signes merveilleux et, pour moi, parfaitement inintelligibles. Que nos besognes littéraires paraissent vulgaires à côté de cet exercice hallucinant qui supprime pratiquement la parole : le prof d'ailleurs n'y avait recours que pour faire les raccords. S'adonner à une activité inaccessible aux profanes, à une activité qui ne peut être suivie que par quelques-uns, qu'on peut compter sur les doigts, oh, c'est cela que j'aurais aimé faire, et non écrire des articles que le premier venu peut lire et mépriser.

Auteur: Cioran Emil Michel

Info: Carnets 1957-1972, nrf Gallimard 1997, 20 décembre 1962 p.135

[ . ]

 

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individuation

"Suivre sa pente au lieu de chercher son chemin".
Ce mot de Talleyrand me poursuit. Depuis des années, en contrecarrant ma "pente", je me tourne vers des formules de sagesse étrangères à ma nature, je m’emploie à neutraliser mes mauvais penchants au lieu de me laisser aller, de me vouer à … moi-même. C’est un séducteur, c’est le génie du salut qui m’a tenté, et, en y cédant, ne fût-ce que par moments, j’ai contribué de mon mieux à la débilitation de celui que j’étais et que j’aurais dû rester.
On n’est soi qu’en mobilisant tous ses travers, qu’en se solidarisant avec ses faiblesses, qu’en suivant sa "pente". Dès qu’on cherche son "chemin", et qu’on s’impose quelque modèle noble, on se sabote, on s’égare.

Auteur: Cioran Emil Michel

Info: Dans "Oeuvres, page 1492

[ naturelle ] [ simplicité ] [ accomplissement ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson