autocritique
Quand je considère ce que je suis, ce que j'ai toujours été, je trouve ceci, que j'écris sans ostentation, comme pour moi seul uniquement : je n'ai jamais eu aucune ambition, je n'ai jamais rien désiré, je ne me suis jamais cru aucun talent, les compliments me font rire, je ne me suis jamais déplacé sans, aussitôt arrivé, me demander ce que j'étais venu faire là, je ne me suis jamais rien acheté sans, aussitôt, le voyant chez moi, me demander pourquoi je m'en étais embarrassé, où que je sois allé, j'ai toujours trouvé que tout se ressemble, je n'ai jamais rien connu, goûté, senti, entendu d'agréable complètement, jamais rien ne m'a enlevé au-dessus du train-train des jours toujours pareils. Je le dis souvent : "On viendrait me dire demain voici cinquante mille francs que nous voulons dépenser pour vous. Quoi vous ferait plaisir ? Que désirez-vous ?" Je répondrais: "Rien." Pourtant, l'homme le plus gai, le plus amusant avec les gens, plein d'entrain, de traits, de boutades, de moqueries, de franchises malicieuses, la physionomie aussi vive que les paroles. Nature humaine ? Auteur gai, homme triste. Acteur comique, homme triste. Clown bouffon, homme triste. Homme d'esprit homme triste.
Auteur:
Léautaud Paul
Années: 1872 - 1956
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Journal 1937, Lundi 25 Janvier
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autocritique
Demain je reprendrai à nouveau cet important poème
A propos de Ferguson [Mara], homme jaloux et trompé
Qui braille la vérité, la vérité, et ne peut en supporter la plus petite lueur. Ce poème m’ennuie, et j’espère qu’il ennuiera
Toute bonne âme qui le lira, étant en quelque sorte
Au plus proche de moi-même mais surtout à mes antipodes ;
Mais ayant ordonné à l’artillerie lourde de faire feu
Je dois pilonner jusqu’au bout.
Ce soir, ma chère,
Oublions tout ça, ceci et la guerre,
Isolons-nous juste au-delà du temps,
Toi avec ton whisky irlandais, moi avec mon vin rouge,
Tandis que les étoiles passent au-dessus de l’océan qui ne dort jamais,
Et peu après minuit j’en cueillerai certaines pour t’en faire une couronne ; nous parlerons de l’amour et de la mort,
Thèmes solides comme le roc, vieux et profonds comme la mer,
N’admettant rien de plus opportun, rien de moins réel
Tandis que les étoiles passent au-dessus de l’océan qui ne connaît pas le temps,
Et quand elles s’évanouiront nous aurons agréablement passé la nuit.
Auteur:
Jeffers Robinson
Années: 1887 - 1962
Epoque – Courant religieux: Récent et libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain, poète
Continent – Pays: Amérique - Etats-Unis
Info:
Dans "Mara ou Tu peux en vouloir au soleil", Préface, trad. de l’anglais (États-Unis) par Cédric Barnaud, éditions Unes, 2022
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