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soliloque

Délivré de toutes les passions terrestres qu’engendre le tumulte de la vie sociale, mon âme s’élancerait fréquemment au-dessus de cet atmosphère, et commercerait d’avance avec les intelligences célestes dont elle espère aller augmenter le nombre dans peu de temps. Les hommes se garderont, je le sais [,] de me rendre un si doux asile où ils n’ont pas voulu me laisser. Mais ils ne m’empêcheront pas du moins de m’y transporter chaque jour sur les ailes de l’imagination, et d’y goûter durant quelques heures le même plaisir que si je l’habitais encore. Ce que j’y ferais de plus doux serait d’y rêver à mon aise. En rêvant que j’y suis ne fais-je pas la même chose ? Je fais même plus ; à l’attrait d’une rêverie abstraite et monotone je joins des images charmantes qui la vivifient. Leurs objets échappaient souvent à mes sens dans mes extases, et maintenant plus ma rêverie est profonde plus elle me les peint vivement. Je suis souvent plus au milieu d’eux et plus agréablement que quand j’y étais réellement. Le malheur est qu’à mesure que l’imagination s’attiédit cela vient avec plus de peine et ne dure pas si longtemps. Hélas, c’est quand on commence à quitter sa dépouille qu’on en est le plus offusqué !

Auteur: Rousseau Jean-Jacques

Info: Les Rêveries du promeneur solitaire. Fin de la cinquième promenade

[ monologue intérieur ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

anti-natalisme

On raconte que le christianisme est populationniste, mais j’ai des flopées de textes sous la main où la chose, au contraire, est décrite comme une fatalité plutôt encombrante. Saint Jérôme. Saint Thomas. Saint Ambroise. Les évaluations dubitatives de saint Augustin, qui ne trouve en fin de compte, comme justification à l’espèce à se reproduire, que la nécessité où elle est de remplir le plan de Dieu en faisant le nombre d’enfants connu de Lui seul au terme duquel surviendra la fin du monde. Perspective qui se trouve déjà dans l’Apocalypse au chapitre où est rompu le Cinquième Sceau et où les âmes des martyrs qui demandent quand arrivera le Jour du Jugement s’entendent répondre de patienter parce que le chiffre de ceux qui sont comme eux destinés à être mis à mort n’est toujours pas atteint. […] En son essence aucune religion véritable ne peut être d’abord nataliste (l’Eglise catholique ne s’y est résignée que poussée a contrario par les hérésies gnostiques frénétiquement opposées à toute procréation et qui divinisaient du même coup l’ "union" sexuelle). Ce sont les Tyrannies qui sont natalistes, et avec acharnement, parce que l’idéologie c’est le culte de l’Avenir et que l’avenir c’est l’enfant, pas l’annulation de tout dans la fin du monde et son jugement. 

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "Exorcismes spirituels, tome 2 : Mutins de Panurge", éd. Les Belles lettres, Paris, 1998, page 277

[ textes bibliques ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

précognition

L’accumulation de coïncidences – ou de résonances – la plus remarquable survint dans les colonnes de mots croisés du Daily Telegraph, juste avant le débarquement des Alliés en Europe, le jour J du 6 juin 1944. Les mots codés qui désignaient les différentes opérations furent peut-être parmi les secrets les mieux préservés de la dernière guerre. Le nom de code de l’ensemble du plan d’invasion était Overlord (suzerain). Celui des opérations navales, Neptune. On appelait les deux plages de Normandie où devaient débarquer les troupes américaines Utah et Omaha. Et les ports artificiels qui seraient installés sur les plages, Mulberry (mûrier).
Le premier mot de code parut dans la solution des mots croisés 5775 du Daily Telegraph, le 3 mai : UTAH. Le deuxième, le 23 mai : OMAHA. Le troisième, MURIER, le 31 mai. Le quatrième et le cinquième, les principaux, tous les deux le 2 juin, quatre jours avant le jour J : NEPTUNE et SUZERAIN.
On demanda à M15 de faire une enquête. Les mots croisés avaient été composés par M. Leonard Sydney Dawe, instituteur, qui habitait Leatherhead, dans le Surrey. Il était depuis plus de vingt ans le doyen des auteurs de mots croisés du Daily Telegraph. Il ignorait avoir utilisé des mots de code, et n’avait pas la plus petite idée de la façon dont ils lui étaient venus à l’esprit.

Auteur: Koestler Arthur

Info: Dans "Le hasard et l'infini", trad. Michèle Fructus, éd. Tchou, 1977, page 47

[ phénomène parapsychologique ] [ perception extrasensorielle ] [ conscience globale ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

processus défensif

[...] nous nous apercevons [...] que nous avons à combattre dans l’analyse cinq sortes de résistances, provenant de trois directions, le moi, le ça et le surmoi, le moi étant la source de trois formes de résistance différant par leur dynamique. La première de ces trois résistances du moi est la résistance de refoulement [...]. Il faut en distinguer la résistance de transfert, qui est de même nature, mais qui provoque, dans l’analyse, des manifestations différentes et bien plus nettes, car elle parvient à établir une relation avec la situation analytique ou même avec la personne de l’analyste, de sorte qu’elle anime d’une vigueur nouvelle un refoulement qui n’aurait dû être que remémoré. Une autre résistance du moi [...] est celle qui provient du bénéfice de la maladie, et se fonde sur l’intégration du symptôme dans le moi. Elle correspond au fait que le moi se dresse contre la renonciation à une satisfaction ou à un soulagement. La quatrième sorte de résistance – celle du ça – est celle que nous venons de rendre responsable de la nécessité de la perlaboration. La cinquième résistance, celle du surmoi, est celle que nous avons reconnue la dernière ; c’est la plus obscure, mais non pas toujours la plus faible ; elle semble prendre racine dans le sentiment de culpabilité ou le besoin de punition s’opposant à tout succès, et par conséquent aussi à la guérison par l’analyse.

Auteur: Freud Sigmund

Info: "Inhibition, symptôme et angoisse", traduit de l’allemand par Michel Tort, Presses Universitaires de France, 1973, pages 88-89

[ défense ] [ psychanalyse ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

totalitarisme

Un jour, je serais assise dans une pièce - je me l'imaginais austère, un bureau normal -, et l'on me poserait des questions. Des questions de différents degrés, dont certaines anodines ; mais moi, je m'étais promis de ne répondre à aucune question que ce soit et j'avais bien l'intention de m'en tenir là (ô ! ton imagination, ma soeur !). Puis, au bout d'une, deux ou vingt heures - ne parlait-on pas d'interrogatoires qui duraient des jours entiers, avec quelques courtes interruptions ? -, mon interrogateur sortirait cet épais carnet vert dans lequel je venais de noter consciencieusement ce qu'aujourd'hui, hier, avant-hier, j'avais fait, lu, entendu, que j'avais vu, et même le temps qu'il faisait. Bon, dirait alors mon interrogateur - il resterait très poli jusqu'aux questions du troisième et même du quatrième degré, et ce n'est qu'aux questions du cinquième degré qu'il deviendrait soudain très rude, mais je m'y attendrais et je tiendrais tête aussi à la rudesse, peut-être même plus facilement qu'à la politesse (ma soeur ! ma soeur...) : bon, dirait-il. Parlons franchement. Et, à chaque question, avec mes propres mots, pris dans mon propre carnet de notes, il me lirait les réponses que j'aurais encore si fièrement refusé l'instant d'avant. Et maintenant, Monsieur Je-sais-tout, peux-tu m'expliquer pourquoi je continue malgré tout à noter tout cela dans mon carnet, si ce n'est par fierté, témérité, orgueil ?
Parce que tu penses : ils n'oseront pas.

Auteur: Wolf Christa

Info: In "Ce qui reste", éd. Stock, p. 62-63

[ vie privée ] [ peur ]

 

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Ajouté à la BD par Benslama

agonie

L'odeur du cinquième colle à ma blouse. Je la nettoierais cent fois qu'elle garderait encore la trace de mes allers et retours incessants.
Là-haut, la femme-oiseau-de-feu s'accroche et ne lâche rien :
- Pas de morphine. Je serai là jusqu'au bout, sans avoir l'esprit embrouillé.
L'équipe et moi passons chaque jour pour lui faire entendre raison. Parce qu'elle souffre et qu'on espère la soulager, croit-on.
Elle nous observe avec indulgence, elle sait la vérité : l'équipe soignante et moi, on voudrait tous qu'elle accepte pour nous tranquilliser, parce que la mort, c'est douloureux et effrayant : nous avons beau la côtoyer tous les jours, elle fait tous les jours aussi peur. Chaque soignant remet une couche lors de son passage :
- Pas d'antalgiques ? Êtes-vous certaine ?
Ou :
- On ne vous laissera pas dans cet état !
Hier, c'en était trop, la femme-oiseau-de-feu a haussé le ton et, avec l'air d'une mère qui dispenserait une leçon à son fils, elle a tapoté ma joue :
- Vous vous inquiétez tous pour rien : mon état ne signifie pas que je vais mourir, mais que je suis arrivée à la fin de ma vie.
Voilà : pas sa mort, non, mais la fin de sa vie. Tout simplement. Pour elle, la différence est abyssale. Elle est sereine dans sa douleur et dans la fin de sa vie. Réfléchit-on jamais au sens de certains mots ? Ils sont cuisants comme une brûlure de cigarette, mais ils font sens.

Auteur: Beaulieu Baptiste

Info: Alors voilà : Les 1001 vies des Urgences

[ passage ] [ détachement ] [ foi ]

 

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idiomes musiques

Au commencement était le verbe nous disent les anciens. Pour moi, celui du commencement fut roumain. Le médecin et ceux qui avaient veillé sur ma difficile naissance parlaient le roumain. Chez moi, on parlait roumain, je passais la majeure partie de mon temps avec Maria, la jolie fille de paysans qui s’occupait de moi et m’adorait en roumain. Ce n’était, certes, pas la seule phonétique de mon environnement. Dans la Bucovine d’avant la dernière guerre mondiale, on parlait l’allemand, le yiddish, l’ukrainien, le polonais et un étrange mélange de slave, caractéristique des Ruthènes. La grande guerre fratricide entre le yiddish, la langue de l’exil, plébéienne, laïque, et l’hébreu sacré, élitiste, connut, ne l’oublions pas, son heure dramatique à la Conférence de Czernowitz en 1908, quand la victoire solennelle du yiddish (" les Juifs sont un seul peuple, leurs langues est le yiddish") ne pouvait laisser augurer la suprématie spectaculaire et définitive que la création de l’État d’Israël allait assurer quatre décennies plus tard à la langue hébraïque. Lorsque mon grand-père demanda si j’avais des ongles, afin d’évaluer les chances du nouveau-né, je suppose qu’il le fit en yiddish, bien qu’il sût l’hébreu, parlât couramment le roumain, et que dans sa librairie on vendît essentiellement des livres roumains.

À 5 ans, déporté en Transnistrie avec toute la population juive de Bucovine, je ne connaissais que le roumain. Lors de mon premier exode au-delà du Dniestr, la langue roumaine subit l’exil en même temps que moi.

Auteur: Manea Norman

Info: La cinquième impossibilité, p. 45, première page du texte "La langue exilée", 2002

[ judaïsme ] [ enfance ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

océan

Quand ils reprirent la mer, ils essuyèrent une tempête d'une violence telle que, lorsque le cinquième jour se leva sur la lutte fantastique que soutenait le Saltash contre les flots déchaînés pour arriver seulement jusqu'au sud de l'Islande, Ericson se dit que c'était le pire temps de toute la guerre, le pire du monde entier. La mer était devenue comme un champ de bataille rugissant, où l'ouragan chassait et soulevait les navires comme des bouts de papier. Le convoi n'avait plus la forme d'un convoi ; un bateau était à peine un bateau dans cette immensité hurlante. Ce tumultueux coup de vent du sud, croissant en furie de jour en jour, semblait animé d'une méchanceté à laquelle on ne pouvait échapper ; chaque navire était comme un fugitif désespéré, condamné à être lynché par une foule dont les mouvements avaient passé d'une mauvaise humeur maladroite à une rage aveugle. De gigantesques vagues se précipitaient en grondant sur les pygmées qui devaient être leurs proies ; parfois la surface tout entière de la mer se soulevait d'un coup, et le navire qui se trouvait sur le chemin son assaut tremblait et chancelait tandis que des tonnes d'eau verte s'écroulaient sur son pont et dévalaient en torrent sur toute sa longueur. Les embarcations étaient fracassées, les cheminées bosselées, les passerelles et les roufs écrasés; des hommes disparaissaient par-dessus bord sans une trace, sans un cri, balayés de la vie comme des images effacées d'un tableau noir par un impérieux coup d'éponge.

Auteur: Monsarrat Nicholas

Info: La Mer cruelle

 

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pathologie psychologique

Parmi les facteurs qui contribuent à causer les névroses, et qui créent les conditions dans lesquelles les forces psychiques se mesurent les unes aux autres, trois ressortent particulièrement ; un facteur biologique, un facteur phylogénétique, un facteur purement psychologique. Le facteur biologique est l’état de détresse et de dépendance très prolongée du petit d’homme. [...]

[facteur phylogénétique] Nous observons que, chez l’homme, à la différence de la plupart des animaux qui lui ont apparentés, la vie sexuelle ne se développe pas d’un seul tenant, de ses débuts à la maturité, mais connaît, après un premier épanouissement qui s’étend jusqu’à la cinquième année, une énergique interruption, pour reprendre ensuite à la puberté, et renouer avec ses débuts dans l’enfance. [...]

Le troisième facteur, ou le facteur psychologique, se trouve dans une imperfection de notre appareil psychique, qui correspond exactement à la différenciation en son sein d’un moi et d’un ça et qui, par conséquent, se rattache aussi, en dernière analyse, à l’influence du monde extérieur. En considération des dangers de la réalité, le moi est contraint à se mettre en position de défense contre certaines motions pulsionnelles du ça, et à les traiter comme des dangers. Mais le moi ne peut se protéger contre les dangers pulsionnels intérieurs de manière aussi efficace que contre un fragment de la réalité extérieure. En effet, lié lui-même intimement au ça, il ne peut se défendre contre le danger pulsionnel qu’en restreignant sa propre organisation et en tolérant la formation de symptôme en contrepartie des dommages qu’il cause à la pulsion.

Auteur: Freud Sigmund

Info: "Inhibition, symptôme et angoisse", traduit de l’allemand par Michel Tort, Presses Universitaires de France, 1973, page 84

[ inconscient ] [ origine ]

 

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chronos

Dans le tiroir inférieur de la commode, je retrouve une lettre arrivée ici, une première fois, voilà vingt-six ans. Une lettre affolée, qui respire encore quand elle arrive pour la seconde fois.

Une maison a cinq fenêtres : par quatre d’entre elles, le jour brille avec calme et félicité. La cinquième fait face à un ciel noir, à l’orage et à la tempête. Je suis à la cinquième fenêtre. La lettre.

Parfois il existe un abîme entre le mardi et le mercredi, mais vingt six ans peuvent défiler en un instant. Le temps n’est pas une distance en ligne droite, mais plutôt un labyrinthe, et quand on s’appuie au mur, au bon endroit, on peut entendre des pas précipités et des voix, on peut s’entendre passer, là, de l’autre côté.

Cette lettre n’a-t-elle jamais eu de réponse ? Je n’en sais plus rien, c’était il y a si longtemps déjà. Les innombrables seuils de l’océan ont poursuivis leur marche. Le cœur a continué à bondir, de seconde en seconde, comme un crapaud dans l’herbe humide d’une nuit d’août.

Les lettres sans réponses s’amassent là-haut, comme les cirrostratus qui annoncent la tourmente. Elles ternissent les rayons du soleil. Je répondrai un jour. Un jour, lorsque je serais mort et que j’arriverai enfin à me concentrer. Ou du moins assez loin d’ici pour arriver à me retrouver. Quand je viens d’atterrir dans la grande ville et quand je longe la 125e Rue, dans le vent qui balaie la rue des ordures en fête. Moi qui aime tant flâner et me perdre dans la foule, un T majuscule dans la masse du texte sans fin.

Auteur: Tranströmer Tomas

Info: "Répondre aux lettres", in Baltiques: Œuvres complètes 1954-2004, Poche 2004 , trad Jacques Outin

[ épistoles ] [ relativité ] [ correspondance ] [ procastination ]

 
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Ajouté à la BD par miguel