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savoir désagréable

Qu’on aime le pot-au-feu, la lecture, le surf, parce que dans chaque cas un bon cuisinier, un professeur de lettres, une belle amie a su éveiller une sensibilité, sans doute. Mais jamais un philosophe n’a eu le talent encore moins la capacité d’apprendre à quiconque à aimer le monde. Aurait-il ces qualités, il ferait de son élève un non-philosophe. La philosophie ne comble pas un besoin d’aimer le monde mais de l’interpréter. Une fois interprété, le monde demeure le monde — y compris pour le philosophe. Non un objet d’amour mais l’intarissable source d’incertitudes et d’inquiétudes. Pas de philosophie sans un monde anxiogène. De tous les animaux, l’humain est le plus apeuré. De tous les humains, le philosophe est le plus angoissé. Dans un système ou un aphorisme, il épanche sa phobie des hommes, de l’histoire, de la nature — de tout. Si on désire aimer le monde, pas de moyen plus funeste que de philosopher. Comme en toute recherche d’amour, que ce soit pour en recevoir ou en donner, c’est s’exposer au désarroi et au ridicule. Il est plus sage de se divertir, de s’ébattre, de boire, de se droguer. Le monde, alors, devient plus aimable.

Auteur: Schiffter Frédéric

Info: Publication facebook du 22.10.2021

[ déplaisante ] [ maladive ] [ anti-idéaliste ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

sciences

Les spécialistes n'en ont jamais fini. Non qu'ils n'en aient pas fini, simplement, en ce moment : il leur est tout à fait impossible d'imaginer que leur activité prenne fin. Peut-être même de le souhaiter. Peut-on se figurer, par exemple, que l'homme aura encore une âme, quand la biologie et la psychologie lui auront appris à la comprendre, à la traiter dans son entier ? Néanmoins, nous aspirons à ce moment ! Tout est là. Le savoir est une attitude, une passion. C'est même, au fond, une attitude illicite : comme le goût de l'alcool, de l'érotisme ou de la violence, le besoin de savoir entraîne la formation d'un caractère qui n'est plus en équilibre. Il est tout à fait faux de dire que le chercheur poursuive la vérité, c'est elle qui le poursuit. Il la subit. Le Vrai est vrai, le fait est réel indépendamment du chercheur : simplement le chercheur en a la passion ; la dipsomanie du fait détermine son caractère, et il se soucie comme d'une guigne de savoir si ses constatations engendreront quelque chose de total, d'humain, d'accompli, ou si elles engendreront quoi que ce soit. C'est une nature contradictoire, souffrante, et cependant extraordinairement énergique.

Auteur: Musil Robert

Info: L'homme sans qualités/Editions du Seuil Points 1956 T.1 p.271

[ philosophie ] [ curiosité ] [ drogue ]

 

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lecture

Ce qui compte aussi, c'est le fait de feuilleter, de courir, de fuir d'une page à l'autre, d'être complice d'un épanchement délirant qui s'est coagulé ; ce qui compte, c'est la bassesse d'un enjambement, l'assurance de la vie dans une seule phrase, et la réassurance des phrases dans la vie. Lire est un vice qui peut se substituer à tous les autres pour nous aider à vivre, parfois ; c'est une débauche, une intoxication qui vous ronge. Non je ne prends pas de drogue, seulement des livres ; certes j'ai aussi mes préférences, il y a beaucoup de livres que je ne digère pas, il y en a certains que je ne consomme que l'après-midi, d'autres la nuit seulement, il y a des livres que je ne lâche pas, que je traîne dans tout l'appartement, du salon à la cuisine, je les lis debout dans le couloir sans utiliser de marque-page, je ne remue pas les lèvres en lisant, j'ai très tôt appris à lire parfaitement, je ne me rappelle pas la méthode mais vous devriez la rechercher un jour ; elle devait être excellente dans nos écoles primaires de province, du moins à l'époque où j'ai appris à lire.

Auteur: Bachmann Ingeborg

Info: malina (1971, 288 p.)

[ addiction ] [ sensations ] [ permanence du mouvement ]

 

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drogue

Il n'y a pas grand-chose à dire sur l'acide, à part que c'est vraiment un trip. On s'aventurait dans un espace incertain et inconnu. En 1967-1968, les choses bougeaient très vite, il y avait beaucoup de confusion et d'expérimentation. Le truc le plus dingue dont je me souvienne sous acide, c'est un vol d'oiseaux - des oiseaux, des nuées d'oiseaux de paradis que je regardais passer et repasser devant mes yeux, sauf qu'ils n'étaient pas là. En fait, c'était des feuilles d'un arbre agitées par le vent. On était sur un chemin de campagne, tout était très vert et je pouvais presque voir chaque battement d'ailes individuel. C'était décomposé au point que j'aurais pu dire : "Hé moi aussi je peux!" C'est pour ça que ça ne m'étonne pas que des gars sautent par la fenêtre de temps à autre : parce que tu as l'impression d'avoir compris d'un coup comment on fait. Il aurait fallu une demi-heure à un de mes oiseaux pour traverser mon champ de vision, incroyables battements d'ailes, et je pouvais voir la moindre plume. Ils me regardent tous comme s'ils me disaient : "Allez toi, aussi essaie!" Merde il y a certaines choses que je ne peux pas faire.

Auteur: Richards Keith

Info: Life

[ lsd ] [ hallucination ]

 
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démagogie

Maintenant, le pouvoir revendique sa propre disparition. On voit un ancien président de la République [Valéry Giscard d’Estaing] écrire qu’il a souffert d’être séparé de ses concitoyens. C’est-à-dire qu’il ne supportait pas sa fonction. Ce même président avait pris la manie de s’adresser, à la télévision, à ceux qu’il gouvernait au singulier... : "Madame, Mademoiselle, Monsieur" ; pour moi, c’est le comble. […] Il laisse entendre qu’il est mon président, à moi qui l’écoute. Il n’est pas mon président, il n’est le président de personne en particulier, il est le président de la République française, de la nation française. En détruisant la mise à distance symbolique du pouvoir, il commettait une faute grave contre le véritable fondement de la démocratie, qui repose sur la représentation, sur une mise en scène. La mise en scène est une mise à distance, et une mise en miroir qui permet la respiration, qui permet aux individus et aux groupes de se trouver, de se constituer en se séparant de leur propre image. Alors que la prétendue convivialité, déthéâtralisée, déritualisée, casse l’humain, détruit les individus en les laissant seuls face au néant. Démerde-toi, drogue-toi, suicide-toi, c’est ton affaire, il y aura des garagistes qui répareront si c’est réparable, et des flics si besoin est.

Auteur: Legendre Pierre

Info: Entretien. "L'humanité a besoin de l'ombre pour échapper à la folie", Le Monde, 22 avril 1997

[ inversion ] [ fausse proximité ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

drogue

Je ne sais pas vraiment, Tam. Je ne sais pas du tout. Disons que ça me rend les choses plus réelles. La vie est rasoir et inutile. Au départ, on est plein de rêves extraordinaires et puis on se retrouve assis dessus. On se rend compte qu'on va tous y passer sans avoir vraiment trouvé les grandes réponses. On prend au sérieux toutes leurs théories à cent litres de salive à l'heure et, en fait, c'est nos propres vies qu'ils nous servent mais sous d'autres formes. Et jamais ils nous ont musclé les pattes avec des trucs cohérents sur les vraies grandes choses. En deux mots, ta vie est courte, décevante et ensuite tu meurs. On occupe nos vies avec de la merde, comme les carrières et les relations, pour nous faire croire que tout n'est pas totalement inutile. L'héro est une drogue honnête parce qu'elle te dépouille de toutes ces illusions. Avec l'héro, quand tu te sens bien, tu te sens immortel. Quand tu te sens mal, elle fait poquer dix fois plus le caca ambiant. C'est la seule drogue qui soit honnête. Elle n'altère pas ta conscience. Elle te file juste un bon coup et une sensation de bien-être. Après, tu vois la misère du monde comme elle est et tu ne peux pas t'anesthésier contre.

Auteur: Welsh Irvine

Info: Trainspotting

[ héroïne ] [ littérature ]

 

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visionnaire

Les pièces de Shakespeare sont telles des planètes gravitant autour d'un astre qui serait notre présent, chacune d'elles, tour à tour, s'éloignant puis s'approchant de notre monde et de notre sensibilité. Si l'on veut suivre cette belle image, due à Peter Brook, le ciel shakespearien est, en cette fin d'année, particulièrement encombré. Entre autres pièces à l'affiche, le Festival d'automne propose deux Hamlet, l'un monté par le même Peter Brook, l'autre par l'allemand Peter Zadek qui a confié le rôle-titre à une femme. Quant aux Comédies de Shakespeare, elles viennent d'être rassemblées en deux volumes dans la collection Bouquins-Laffont, complétant ainsi une nouvelle édition bilingue intégrale qui fait autorité. Une conjonction si favorable ne nous met pas pour autant à l'abri des hypothèses farfelues et autres sornettes dont on affuble régulièrement Shakespeare. Après qu'on l'ait taxé d'être un prête-nom (pour Francis Bacon ou même Christopher Marlowe), homosexuel (en raison des ambiguïtés amoureuses qui transparaissent dans ses Sonnets), un astronome, un chef de guerre au service du Comte de Leicester, un espion même, il est suspecté aujourd'hui, par une équipe de chercheurs d'Afrique du Sud, d'avoir fumé du cannabis. Les visions suscitées par la drogue pourraient coïncider avec les sombres images et les puissants délires qui traversent son oeuvre. Fumette or not fumette ? Question bien futile qui n'ébranlera pas la mécanique céleste dont Shakespeare est le génial démiurge.

Auteur: Internet

Info: http://www.magazine-litteraire.com/dossiers/dos_393.htm

[ littérature ]

 

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écriture

Pourquoi écrire, si je n'écris pas mieux ? Mais que deviendrais-je si je n'écrivais pas le peu que je réussi à écrire, même si, ce faisant, je demeure très inférieur à moi-même ? Je suis un plébéien de l'idéal, puisque je tente de réaliser ; je n'ose pas le silence, tel un homme qui aurait peur d'une pièce obscure. Je suis comme ceux qui apprécient davantage la médaille que l'effort, et qui se parent des plumes du paon.

Pour moi, écrire c'est m'abaisser ; mais je ne puis m'en empêcher. Ecrire, c'est comme la drogue qui me répugne et que je prends quand même, le vice que je méprise et dans lequel je vis. Il est des poisons nécessaires, et il en est de forts subtiles, composés des ingrédients de l'âme, herbes cueillies dans les ruines cachées de nos rêves, coquelicots noirs trouvés sur les tombeau de nos projets, longues feuilles d'arbres obscènes, agitant leurs branches sur les rives des eaux infernales de l'âme.

Ecrire, oui, c'est me perdre, mais tout le monde se perd, car vivre c'est se perdre. Et pourtant je me perds sans joie, non-pas comme le fleuve qui se perd à son embouchure - pour laquelle il est né, encore inconnu -, mais comme la flaque laissée dans le sable par la marée haute, et dont l'eau lentement absorbée ne retournera jamais à la mer.

Auteur: Pessoa Fernando (Alv. de Campos)

Info: Le livre de l'intranquillité

[ quête ] [ passe-temps ] [ mémoire ] [ solitude ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

banlieue

Pour me donner du courage, je glisse dans ma pochette de cours un dessin de Ferri pour Fluide Glacial : une petite poule au tableau devant une classe de loups qui dit : "Je vous préviens, cette année je serai impitoyable !"
(...)
Christophe, grande baraque de 15 ans, refuse d'écrire avec autre chose qu'un crayon à papier et d'une écriture si minuscule qu'elle semble disparaître dans le papier. Mais il parle d'une voix énorme, poussant des hurlements en classe, sans raison, ce qui le fait rire aux éclats.

Samia, sensibilité à fleur de peau, très agressive, ne veut pas qu'on la regarde, ni qu'on corrige ses copies. J'ai eu son frère l'année précédente et je sais que leur père est mort sous leurs yeux, poignardé dans le salon familial pour une histoire de drogue. Je sais aussi que Samia et Ahmed ne sont pas leurs vrais prénoms.

Steeve boit et arrive manifestement déjà bien imbibé le matin. Les autres en ont peur, il est plus âgé, d'une violence incontrôlable. Je suis enceinte quand il lève la main sur moi parce que je refuse de le laisser sortir de cours. Il renonce quand même à porter le coup au dernier moment et sort en claquant la porte. J'en pleurerai encore des semaines après. Parce que j'ai eu peur et parce qu'aucun élève de la classe n'a fait mine de s'interposer.

Auteur: Deramaux Gabrielle

Info: Collège inique (ta mère!)

[ enseignement ]

 

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portrait

Un jour de juillet dernier, dans ce journal [Libération], à la veille de la Love Parade de Berlin, apparut ainsi la photo d’un personnage trentenaire dont la physionomie abondamment piercée se montrait en couleurs. Pourquoi nous parlait-on de cet inconnu ? Parce que c’était un raver et qu’il allait précisément se rendre, cette année encore, à la Love Parade de Berlin. Il s’agissait donc d’un héros de notre temps, et chacun sait qu’il vaut mieux survivre avec son temps que mourir dans les ténèbres. Au fil de l’article, dans lequel il était question de "danseurs fluo-délire" et de boutiques de "boisson tchaï", on apprenait que cet homme de Nulle-Part-Land, végétarien comme il se doit, ne buvait que des choses saines car il comptait bien danser toute sa vie, qu’il était généralement habillé d’une "mégatunique psychédélique ornée d’une spirale de sphères orange, jaunes, violettes" afin de se mettre des couleurs plein la tête, qu’il était membre d’une association de ravers préventifs, Techno plus, prônant la rave propre, sans drogues, qu’il avait découvert Trotski, Marx et Proudhon au rayon Histoire de la Fnac, et qu’il avait ensuite "poussé la révolte jusqu’à se manifester au cri de "Libérez Marie-Jeanne, enfermez Jean-Marie"". Un bon petit diable, en somme, un mouton à cinq pattes comme on s’exprime dans la néo-presse quand on veut faire l’éloge de ceux que possède au plus haut point le frisson sacré de l’enthousiasme fraternel. 

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "Exorcismes spirituels, tome 2 : Mutins de Panurge", éd. Les Belles lettres, Paris, 1998, page 128

[ caricature ] [ cliché ambulant ] [ homo festivus ] [ fêtard sans frontières ] [ ironie ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson