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désidéalisation

Je ne jalouse pas ces pompeux imbéciles

Qui s’extasient devant le terrier d’un lapin

Car la nature est laide, ennuyeuse et hostile ;

Elle n’a aucun message à transmettre aux humains.



Il est doux, au volant d’une puissante Mercedes,

De traverser des lieux solitaires et grandioses ;

Manoeuvrant subtilement le levier de vitesses

On domine les monts, les rivières et les choses.



Les forêts toutes proches glissent sous le soleil

Et semblent refléter d’anciennes connaissances ;

Au fond de leurs vallées on pressent des merveilles,

Au bout de quelques heures on est mis en confiance ;



On descend de voiture et les ennuis commencent.

On trébuche au milieu d’un fouillis répugnant,

D’un univers abject et dépourvu de sens

Fait de pierres et de ronces, de mouches et de serpents.



On regrette les parkings et les vapeurs d’essence,

L’éclat serein et doux des comptoirs de nickel ;

Il est trop tard. Il fait trop froid. La nuit commence.

La forêt vous étreint dans son rêve cruel.

Auteur: Houellebecq Michel

Info: "Nature" dans "Poésie"

[ civilisation ] [ comparaison ] [ domination technologique ] [ anti-nature ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

stimulant

Sans mot dire, Woland leva son verre et trinqua avec Marguerite. Celle-ci but avec résignation, et sa dernière pensée fut qu’elle ne survivrait pas à ce verre d’alcool. Mais il n’arriva rien de mauvais. Une chaleur vivante coula dans le ventre de Marguerite, qui ressentit en même temps comme un léger choc à la nuque, et ses forces revinrent comme si elle venait de se lever après un long sommeil réparateur. En outre, elle sentit s’allumer en elle une faim de loup. Quand elle se souvint qu’elle n’avait rien pris depuis la veille au matin, son appétit redoubla… Elle se mit à manger goulûment du caviar.
Béhémoth coupa une tranche d’ananas, la saupoudra de sel et de poivre, la mangea, après quoi il se jeta si crânement dans le gosier un deuxième verre d’alcool que tout le monde applaudit.
Quand Marguerite eut bu son second verre, l’éclat des candélabres se fit plus vif et les flammes montèrent plus haut dans la cheminée. Marguerite n’éprouvait aucune ivresse. En plantant ses dents blanches dans la viande, elle sentait avec délectation le jus lui couler dans la bouche. En même temps, elle observait Béhémoth, qui était en train de tartiner une huître de moutarde.

Auteur: Boulgakov Mikhaïl

Info: Dans "Le Maître et Marguerite", trad. Claude Ligny, Editions Laffont, Paris, 1968, page 384

[ sensualité ] [ nourriture ] [ boisson ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

métaphysique

La quatrième de couverture indique: "C'est un fait que l'on assiste, depuis quelques années, à un "retour" de l'ange, dont les formes sont pour le moins diverses. Certes, l'ange est commode. Patient, messager, virtuel, intemporel ou exterminateur, il est surtout gardien, désormais, d'un homme incapable de se garder lui-même, et semble devoir correspondre à la folie sécuritaire qui s'est emparée de notre monde. L'ange de Fechner, au contraire, ne garde rien, et n'a qu'une vague relation avec notre espèce. Il est cosmique ou cosmologique, et s'il nous regarde de quelque manière, c'est plutôt comme une sentinelle facétieuse, campée devant ce qui nous est destiné, mais que nous ne pouvons voir, terrassés par la peur de ce qui nous semble de plus en plus inacessible : notre propre capacité à imaginer le monde. Tel serait alors aussi l'ange de Fechner : témoin de la perte de nos propres ailes. Paru en 1825, De l'anatomie comparée des anges avait su attirer l'attention d'auteurs tels que William James (qui lui a consacré un essai), Henri Bergson, Alfred Jarry ou Sigmund Freund, qui n'hésite pas à ranger Fechner au panthéon des philosophes sur lesquels il s'est "appuyé". Le petit écrit "Sur la danse" (1824), traduit par Claude Rabant, témoigne également de l'humour et de la force imaginative de ce philosophe né et mort à Leipzig  et qui fut, entre autres, l'inventeur de la psycho-physique.

Auteur: Internet

Info: https://books.google.ch/, à propos de l'Anatomie comparée des anges: suivi de Sur la danse de  Gustav Theodor Fechner, éditions de l’éclat, 1997 - 99 pages

[ supra-esprit ] [ moi supérieur ] [ historique ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

transhumances planétaires

Tandis que la lointaine civilisation chinoise retarde l’heure de sa mort en se tournant vers son propre passé, tandis que l’Inde répand, pour soulager sa fièvre, une religion sur l’Asie, l’ombre noie peu à peu les rivages où s’est écoulée l’éclatante et virile jeunesse du monde occidental. Les flux et les reflux, depuis le début de l’histoire, balancent l’océan des peuples du plateau de l’Iran aux terres fraîches et salubres qui regardent l’Atlantique. Des invasions silencieuses ont accumulé dans les plaines du nord de l’Europe les réserves d’hommes qui renouvelleront l’innocence des peuples méridionaux quand un contact trop énervant avec l’Asie affaiblira leur foi dans leur propre intelligence. On a vu les Phéniciens apporter à la Grèce et à l’Italie, avec la science et l’idéal de la Chaldée et de l’Égypte, l’écho indien des ivresses mystiques par qui le saint frisson de la vie universelle est entré dans l’ordre occidental. On a vu la Grèce, entraînée par Alexandre, déposer dans l’âme trouble et lasse de l’Inde, l’étincelle inspiratrice. Rome doit subir à son tour le sensualisme de l’Asie quand elle lui porte la paix… Le mouvement épuisait peu à peu son rythme. Il était nécessaire qu’un grand repos succédât à la dépense d’énergie d’où sortit l’avenir du monde, et que la nature de l’homme se repliât sur elle-même pour imposer à son esprit trop tendu, à ses sens pervertis, l’oubli de leurs conquêtes et le désir de remonter à leurs sources naturelles.

Auteur: Faure Elie

Info: Histoire de l'art. L'art médiéval

[ migrations mondiales ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

énergie psychique

Car la vie continue, malgré la perte de jeunesse ; on peut même la vivre avec une plus grande intensité si l’on n’en entrave pas la marche en jetant un regard en arrière sur ce qui disparaît. Ce regard en arrière serait dans l’ordre s’il ne s’arrêtait pas aux dehors que l’on ne peut rappeler et si l’on se rendait bien compte de l’origine de la fascination exercée par ce qui fut. L’éclat doré des vieux souvenirs d’enfance repose moins sur de simples faits que sur un mélange d’images magiques, soupçonnées plutôt que vraiment conscientes. […] Le "mystère" que l’on perçoit représente le trésor d’images primitives que chacun apporte au monde comme cadeau de l’humanité, somme des formes innées qui sont propres aux instincts. […] Elles constituent l’inconscient collectif. La libido en régression vient-elle animer cette couche, alors apparaît une possibilité de renouvellement de la vie en même temps que de destruction. Une régression conséquente marque un rétablissement de la liaison avec le monde des instincts naturels qui, au point de vue formel également, […] représente la matière originelle. Si la conscience peut la saisir, alors il y aura animation nouvelle et nouvelle ordonnance. Par contre, si la conscience s’avère incapable d’assimiler les contenus de l’inconscient qui font irruption, alors apparaît une situation menaçante car les nouveaux contenus conservent leur forme archaïque et chaotique première et font éclater l’unité conscientielle. Le trouble mental qui en résulte s’appelle […] schizophrénie, autrement dit aliénation par scission.

Auteur: Jung Carl Gustav

Info: Dans "Métamorphoses de l'âme et ses symboles", page 665

[ idéalisation rétrospective ] [ croissance des pensées ] [ intégration ] [ individuation ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

lendemain de cuite

Un valet vint ouvrir les persiennes et les fenêtres des salons. L’assemblée se trouva sur pied, rappelée à la vie par les chauds rayons du soleil qui pétilla sur les têtes des dormeurs.

Les mouvements du sommeil ayant brisé l’élégant édifice de leurs coiffures et fané leurs toilettes, les femmes frappées par l’éclat du jour présentèrent un hideux spectacle : leurs cheveux pendaient sans grâce, leurs physionomies avaient changé d’expression, leurs yeux si brillants étaient ternis par la lassitude. Les teints bilieux qui jettent tant d’éclat aux lumières faisaient horreur, les figures lymphatiques, si blanches, si molles quand elles sont reposées, étaient devenues vertes ; les bouches naguère délicieuses et rouges, maintenant sèches et blanches, portaient les honteux stigmates de l’ivresse.

Les hommes reniaient leurs maîtresses nocturnes à les voir ainsi décolorées, cadavéreuses comme des fleurs écrasées dans une rue après le passage des processions.

Ces hommes dédaigneux étaient plus horribles encore. Vous eussiez frémi de voir ces faces humaines, aux yeux caves et cernés qui semblaient ne rien voir, engourdies par le vin, hébétées par un sommeil gêné, plus fatigant que réparateur. Ces visages hâves où paraissaient à nu les appétits physiques sans la poésie dont les décore notre âme, avaient je ne sais quoi de féroce et de froidement bestial.

Ce réveil du vice sans vêtements ni fard, ce squelette du mal déguenillé, froid, vide et privé des sophismes de l’esprit ou des enchantements du luxe, épouvanta ces intrépides athlètes, quelque habitués qu’ils fussent à lutter avec la débauche. Artistes et courtisanes gardèrent le silence en examinant d’un œil hagard le désordre de l’appartement où tout avait été dévasté, ravagé par le feu des passions.

Auteur: Balzac Honoré de

Info: Dans "La peau de chagrin", Librairie générale française, 1984, pages 232-233

[ tête dans le cul ] [ laideur ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

monde amniotique

Le murmure de l’océan monte dans la nuit fraîche, comme une caresse, une promesse, un souvenir doux. Les étoiles se reflètent à la surface, des milliers d’étoiles qui palpitent et dansent dans le courant, frêles éclats de ciel tombés du firmament. Les vagues s’enroulent autour de ses chevilles. Un souffle effleure son visage, ses épaules…

Elle frissonne, et plonge.

Les friselis de l’eau sur sa peau lui disent qu’elle est vivante. Les échos qui vibrent dans la matière liquide lui rappellent qu’elle n’est pas seule. Non loin, le parfum âpre d’une présence l’invite à la suivre. Elle se met en mouvement. Sans effort, elle glisse. Ses muscles puissants ondulent et roulent sur ses côtes. L’air qu’elle a puisé dehors embrase ses cellules. Elle n’est entravée par aucune chaîne, aucune chair ne la retient. Elle est libre, libre ! Ivre, elle jaillit, sous le regard sévère des colosses pétrifiés. Impatiente, elle file, elle vole à travers les nappes d’eau mélangées, celles qui montent, tièdes et vives, celles qui tombent, lourdes et lentes. Joueuse, elle flâne, elle flaire, elle frôle, puis dans un sursaut, elle évite les rôdeurs, ces géants saisis par le froid qui dérivent dans la nuit.

Soudain, elle se fige.

La mer a un goût de sel, presque piquant. L’éclat argenté d’un poisson perce l’obscurité. Elle l’effleure, le suit et s’arrête à nouveau. Devant elle s’ouvre un corridor étroit entre deux falaises. Le ciel renversé se drape de transparences turquoise. Au-delà, c’est l’inconnu.

Elle s’avance, change de position.

Viens ! entend-elle.

Les sons se diluent dans le silence, échos lointains, incertains.

Sur le qui-vive, elle écoute encore.

Viens ! l’appelle-t-on.

Auteur: Querbalec Émilie

Info: Les chants de Nüying - Prélude

[ appartenance ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

théorie économique

Dans son étude de l’économie capitaliste et des cycles qui l’animent, Kondratieff affirme que le système évolue par périodes de soixante ans. Il distingue quatre phases au sein d’un cycle complet, qui correspondent aux quatre saisons du calendrier :
-Le printemps est la période d’expansion robuste de l’économie, accompagnée d’une inflation soutenue. Plusieurs effets bénéfiques se font sentir pendant le printemps : baisse du chômage, hausse des salaires, diffusion de la prospérité, réduction de la pauvreté. Si l’on cherche à repérer cette phase au cours du cycle le plus récent, c’est la période des Trente Glorieuses, entre 1945 et 1974.
-L’été qui s’ensuit est une première période de stagnation d’une dizaine d’années, avec à la fois un chômage croissant et une inflation persistante. Dans le cycle récent, il s’agit de l’après-choc pétrolier, entre 1975 et 1984.
-L’automne, qui dure une quinzaine d’années, voit un retour de la croissance, mais accompagnée de la déflation et d’un développement de la consommation grâce à l’expansion de l’endettement. Dans notre histoire moderne, cette saison ressemble furieusement à la période 1985-2008, laquelle eut une durée de vingt-trois ans, donc sensiblement plus longue que l’automne que Kondratieff avait calculé dans sa théorie.
-Enfin, l’hiver voit l’éclatement d’une crise qui résulte de toutes les tensions accumulées dans l’économie […]. Les richesses artificielles nées de l’excès d’endettement sont détruites, la déflation et le chômage s’installent, dépression et récession règnent. Dans la théorie originale de Kondratieff, la durée de l’hiver est de cinq ans. En ce qui concerne la période actuelle, la crise a éclaté en 2008 et le monde capitaliste n’en sortira probablement pas avant quelques années encore : pour beaucoup de raisons structurelles et conjoncturelles, aucune perspective de reprise sérieuse de la croissance ne semble se dessiner avant les années 2020-2025.

Auteur: Bouchard Jean-François

Info: Dans "L'éternelle truanderie capitaliste", pages 133-134

[ exemple ] [ théorie-pratique ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

autoportrait

Je suis probablement ce qu’on appelle un décadent, et il doit exister en moi (comme définition extérieure de mon esprit) de ces scintillations tristes, d’une étrangeté postiche, qui cristallisent en mots imprévus une âme exotique et véhémente. Je sens que je suis ainsi fait, et que je suis absurde. C’est pourquoi je tente, pour imiter une hypothèse des auteurs classiques, de figurer tout au moins, par le biais d’une mathématiques expressive, les sensations décoratives de mon âme de remplacement. Il arrive un moment, au cours de mes méditations écrites, où je ne sais plus bien où se trouve le centre de mon attention - dans les sensations éparses que j’essaye de décrire, telles des tapisseries inconnues, ou bien dans les mots au milieu desquels, en voulant décrire ma description elle-même, je finis par m’embrouiller, m’égarer et voir d’autres choses par-delà. Je sens se former en moi des associations d’idées, de mots et d’images - tout cela de façon lucide et diffuse en même temps -, et je dis tout autant ce que j’éprouve que ce que je crois éprouver ; je ne distingue plus ce que mon âme me suggère des images qui fleurissent sur le sol où elle les a laissé choir ; je ne discerne même plus si le son d’un mot barbare, ou le rythme d’une phrase intercalée, ne m’éloignent pas du sujet déjà bien défini, de la sensation engrangée, et ne me dispensent pas ainsi de penser et de dire, comme des grands voyages faits pour me distraire. Et tout cela qui, avec la répétition, devrait me donner une impression de futilité, d’échec, de souffrance enfin, ne réussit qu’à me donner des ailes dorées. Dès que je me mets à parler d’images - et peut-être parce que j’allais en condamner l’abus -, voilà que naissent en moi d’autres images ; dès que je me dresse en moi-même pour refuser ce que je n’éprouve pas, me voilà précisément en train de l’éprouver, et mon refus lui-même devient une impression tout ornée de broderies ; lorsque, ayant finalement perdu confiance en mes efforts, je veux me laisser aller aux voies de traverse, voici qu’un terme bien classique, un adjectif spatial et sobre, me font voir clairement devant moi, avec l’éclat d’un rayon de soleil, la page écrite somnolentement, et les lettres nées de l’encre de ma plume sont alors une carte absurde aux signes magiques. Et je me dépose en même temps que ma plume, et je m’enveloppe dans la longue cape de l’inertie, adossé à mon siège, épars, lointain, intervallaire et succube, final comme un naufragé se noyant en vue d’îles merveilleuses, au sein même de ces mers dorées de mauve dont, sur des couches lointaines, il avait véritablement rêvé.

Auteur: Pessoa Fernando (Alv. de Campos)

Info: Le livre de l'intranquillité

[ introspectif ] [ langage ] [ onirisme ]

 

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femme-par-femme

La singularité est paradoxale. Synonyme du terme "original", la singularité semble être à la fois "à l’origine de toute chose" et "différente de la norme". C’est cette dualité qu’explore Mai Tabakian, au travers d’une oeuvre complexe, qui entremêle les signifiants et les références. Une œuvre unique, avec des spécificités tant techniques qu’esthétiques, qui tranche dans le paysage de l’art contemporain et invite à visiter de nouvelles frontières. "Singularité" est une invitation au voyage. Mai Tabakian crée des œuvres singulières qui mettent en dialogue par le biais d’un langage fait de signifiants asiatiques et de signifiés européens; à l’image de l’œuvre (...) Comme chez les Grecs, le mythe se mêle aux mathématiques dans l’œuvre de Mai Tabakian. Les cibles de "Flying Targets" sont une mise en abîme de la spirale de l’œuvre. Elles semblent comme aspirées par un invisible trou noir, au centre duquel se trouve la "singularité", selon les termes scientifiques de l’astronomie. La singularité est le point infinitésimal où est concentrée toute la matière de l’étoile ; ou pourrait-on dire de "L’étoile noire", cette œuvre forte de l’exposition, qui domine l’ensemble des "Nucleus". Autour de la singularité se trouve "l’horizon des événements", une région de l’espace où rien ne peut échapper à sa gravité, pas même la lumière. Une région mouvante et aspirante qui nous captive, qui nous hypnotise et nous amène, tel un cycle cinétique perpétuel à la spirale de "Spectrum Invaders". (...) En littérature, la "singularité" c’est l’être au monde de l’auteur, c’est cette permanence qui le rend tout à la fois en rapport avec le monde et hors du monde. Cette singularité s’incarne dans le style*. Le style dit à la fois tout du monde, tout d’un monde, et tout de l’impossible compréhension globale du monde. D’aucun pense souvent que le style se donne à voir immédiatement. Mais ici, le "style" est un mystère. Le fil ne tisse pas l’œuvre, il ne joue pas un rôle de l’ombre entre les étoffes, mais il s’affirme comme le trait du dessin, comme acte créateur, visible, existant à part entière. L’œuvre de Mai Tabakian est aussi singulière en ce sens qu’elle affirme un acte d’existence, un féminisme assumé, sans en faire pour autant un sujet à traiter. Sa technique spécifique, son traitement du tissu et son usage du fil, son goût pour l’éclatement des couleurs est un langage de la singularité féminine dans la création, notamment contemporaine, qui n’est pas sans rappeler les œuvres de Louise Bourgeois ou de Nikki de Saint Phalle. Dès lors que l’on a posé cela, il ne peut être anodin que la fleur, la rosace, le cercle et le cycle soit des figures omniprésentes du travail de l’artiste. Les oeuvres de Mai Tabakian sont des litotes complexes du monde. Elles disent le "tout", elles disent l’universel, par la singularité; c’est à dire l’unicité, l’étrangeté aussi, l’affirmation d’être en tout cas.

Auteur: Poizat Céline

Info: http://www.maitabakian.com/2016/03/singularite-texte-de-celine-poizat.html

[ beaux-arts ] [ exister ]

 

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