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impérialisme américain

Si le marché régnait en maître, ce sont les Américains qui régneraient sur lui. Ce sont les multinationales qui ne sont pas plus multinationales que l’OTAN. Tout ça n’est qu’un simple camouflage de l’hégémonie américaine. Si nous suivions le marché les yeux fermés, nous nous ferons coloniser par les américains. Nous n’existerons plus, nous, européens.

Auteur: Gaulle Charles de

Info: C'était de Gaulle, Quarto, Gallimard 2002 d'Alain Peyrefitte

 

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décroissance

L’obstacle le plus puissant à l’empire sans partage du marché est d’une autre nature : il s’agit du désintérêt. Le désintérêt pour ce qu’il a à proposer. Ce désintérêt ne saurait être total : aussi n’est-ce pas d’une disparition qu’il est question. Mais d’une limite à l’emprise, parce que ce que le marché offre à la convoitise n’intéresse que jusqu’à un certain point. Tel est le véritable obstacle à l’hégémonie du marché : s’intéresser à autre chose.

Auteur: Rey Olivier

Info: Dans "Une folle solitude", page 271

[ citation s'appliquant à ce logiciel ] [ curiosité ] [ insoumission ]

 
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optimisme

Chimistes et physiciens, géomètres et mathématiciens, élevés à la condition d’investigateurs de la vérité, sont aujourd’hui, sans qu’ils l’aient voulu, des prêtres de l’Esprit. En conséquence de leurs recherches acharnées, le matérialisme et l’athéisme seront forcés à disparaître, par manque de matière, base qui assurait leurs spéculations négativistes.
Les laboratoires sont des temples où l’intelligence est encouragée au service de Dieu, et, même quand l’activité intellectuelle se pervertit, transitoirement subordonnée à l’hégémonie politique génératrice de guerres, le progrès de la Science, en tant que conquête divine, demeure dans l’exaltation du bien, se dirigeant vers l’avenir glorieux.

Auteur: Chico Xavier

Info: Dans les Domaines de la Médiumnité de Francisco Candido Xavier

[ rationalisme ] [ religions ]

 
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transcendance

L’opposition majeure est donc Espace-Temps, et Réalité-Vérité. Et la tentation majeure de notre civilisation (liée à l’hégémonie technicienne) est la tentative de confusion entre réalité et vérité. Nous faire croire que le réel, c’est le vrai. La seule vérité. Du temps de la querelle des universaux, les réalistes croyaient que la vérité est réelle, nous avons inversé les termes, pour nous tout se limite au réel. Le vrai c’est ce que contient la réalité, ce qu’elle exprime. Rien au-delà. D’ailleurs il n’y a plus d’au-delà. […] Tout ramené à cette réalité constatable, scientifiquement mesurable, pragmatiquement modifiable. La praxis mesure de toute vérité. La vérité n’est plus que l’en-deçà de la vérité, sur lequel il est possible d’agir…

La Parole est seule relative à la Vérité. L’image est seulement relative à la réalité.

Auteur: Ellul Jacques

Info: Dans "La parole humiliée", éditions de la Table Ronde, Paris, 2014, page 45

[ sécularisation ] [ directions complémentaires ]

 
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extrême

Est ce qu’il n’y a pas une autre dimension dans un espace temps mental collectif que la possibilité d’un ressurgissement des valeurs ? Si les valeurs se sont dissoutes, si elles ont été sacrifiées, est-ce que ce mouvement-là n’avait pas quelque chose en lui d’inéluctable ? Où va-t-on ressusciter un système de valeurs qui était celui de la réalité, d’un principe de réalité, d’un principe de représentation...
Moi je verrais les choses aller au terme de ce mouvement, et ce serait nietzschéen de pousser ce qui est en voie de s’effondrer, d’aller voir au-delà de la fin, de la valeur puisque le système nous y a mis. On a bien fait nous la critique quand même, en tant qu’intellectuels et philosophes, la critique de toute ces valeurs-là du bien et du mal, du vrai et du faux... On l’a menée radicalement.
Le système a opérationalisé cette radicalité, il a mis fin à toutes ces valeurs qu’on analysait critiquement. Mais la pensée critique aujourd’hui, elle voit sa propre fin également. Est-ce qu’il n’y a pas une autre alternative qu’une pensée critique nostalgique ?
Je vois plus les choses s’organiser ou se désorganiser dans une adversité radicale : ce système qui est passé de la domination classique à l’hégémonie suscite immédiatement dans le même mouvement quelque chose qui n’est plus négociable, qui n’est plus dialectisable. On peut l’appeler terrorisme, mais pas forcément, ou alors le terrorisme n’étant qu’une métaphore de cette énergie réfractaire, totalement réfractaire à cette évolution-là. Et qui prend des formes, effrayantes je veux bien le reconnaître, des formes violentes, mais pas seulement des formes violentes, quelque chose qui n’est pas négociable, qui ne fait pas partie, qui n’entre pas dans la zone de l’échange généralisé auquel veut nous conduire ce système.

Auteur: Baudrillard Jean

Info: Entretien "Penser le présent" dans Répliques (2005)

[ imprévu ] [ émergence ] [ catastrophe ] [ réalité intégrale ]

 

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paradigme

Ainsi, j’ai considéré l’ensemble de la textualité canonique, c’est-à-dire la variété des sources qui témoignent de la reprise de l’Idée impériale romaine par la papauté, non plus seulement sur le mode de l’hégémonie politique [...] mais de façon beaucoup plus radicale encore en réformant l’Église elle-même par une appropriation du Corpus juridique romain. Au mépris de la Romanité ininterrompue incarnée à l’est par l’empereur de Constantinople, ce vaste mouvement, assuré de sa légitimité par une tradition de commentaires de théologie politique, assortis de manipulations de textes [...] a été rendu possible par la Réforme grégorienne précisément, à l’occasion de l’affrontement entre le Saint-Siège et le Saint-Empire romain (germanique) sur le terrain féodal. C’est au XIIe siècle qu’en apparaissent les effets institutionnels massifs, soutenus par la renaissance intellectuelle d’une ampleur inédite, transmise par la mémoire savante sous l’étiquette de Scolastique : la Science des écoles.

[...] nous assistons à la formation d’un Mouvement romano-canonique complexe, qui pour la civilisation européenne a valeur d’une Bible seconde. Autrement dit, le Moyen Age a échafaudé, distincte des textes de l’Ancien et du Nouveau Testament, l’autre Bible de l’Occident, laquelle nous tient encore, sous l’emprise de causes parfaitement identifiables. [...]

Je tire les conséquences d’une Révolution dont les implications mises au jour par l’exploration érudite ont affecté de façon décisive, sur le mode d’une causalité généalogique, la structuration de la Modernité européenne.

[...] Les contenus du Monument romano-canonique ne sont plus d’actualité, du moins telle que nous l’entendons, car nombre de concepts issus des interprétations médiévales ont continué de cheminer sous des appellations renouvelées dans les systèmes normatifs nationaux élaborés par les Temps modernes. Mais la logique constitutive, elle, est demeurée intacte, et c’est elle qui nous autorise aujourd’hui à parler de Modèle institutionnel occidental, aussi bouleversés qu’ont été les contenus au fil des siècles. Les Occidentaux, eux aussi, véhiculent une tradition, pour l’essentiel refoulée. Mes travaux nomment ce phénomène de refoulement notre lien à l’Immémorial.

Auteur: Legendre Pierre

Info: Dans "Leçons X, Dogma : Instituer l'animal humain", Librairie Arthème Fayard, 2017, pages 65-66

[ christianisme ] [ historique ] [ inconscient ]

 
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structure autonome

Le principe de réalité a coïncidé avec un stade déterminé de la loi de la valeur. Aujourd’hui, tout le système bascule dans l’indétermination, toute réalité est absorbée par l’hyper-réalité du code et de la simulation. C’est un principe de simulation qui nous régit désormais en place de l’ancien principe de réalité. Les finalités ont disparu, ce sont les modèles qui nous génèrent. Il n’y a plus d’idéologie, il n’y a plus que des simulacres. C’est donc toute une généalogie de la loi de la valeur et des simulacres qu’il faut restituer pour saisir l’hégémonie et la féérie du système actuel – révolution structurale de la valeur. [...]

Le capital n’est plus de l’ordre de l’économie politique : il joue de l’économie politique comme modèle de simulation. Tout le dispositif de la loi marchande de la valeur est absorbé et recyclé dans le dispositif plus vaste de la loi structurale de la valeur, et rentre ainsi dans les simulacres de 3e ordre [...]. L’économie politique est ainsi assurée d’une éternité seconde, dans le cadre d’un dispositif où elle a perdu toute détermination propre, mais où elle garde son efficace comme référentiel de simulation. Il en fut exactement de même pour le dispositif antérieur de la loi naturelle de la valeur, ressaisie comme référentiel imaginaire (la "Nature") par le système de l’économie politique et la loi marchande de la valeur : c’est la valeur d’usage, qui mène une existence fantôme au cœur de la valeur d’échange. Mais celle-ci à son tour, à la spirale suivante, est ressaisie comme alibi dans l’ordre dominant du code. Chaque configuration de la valeur est ressaisie par la suivante dans un ordre de simulacre supérieur. Et chaque phase de la valeur intègre dans son dispositif le dispositif antérieur comme référence fantôme, référence fantoche, référence de simulation.

[...] Le 3e ordre est le nôtre, il n’est plus de l’ordre du réel, mais de l’hyperréel, et c’est là seul que des théories ou des pratiques, elles-mêmes flottantes et indéterminées, peuvent l’atteindre et le frapper à mort.

Auteur: Baudrillard Jean

Info: Dans "L'échange symbolique et la mort", éditions Gallimard, 1976, pages 9-10

[ repères virtuels ] [ modernité ] [ cybernétique ]

 

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communisme

Le nom de Gramsci revient sans cesse depuis plusieurs mois, dans les médias, sur les réseaux sociaux, il est cité en permanence. Qui est-il et quelle est sa pensée?
Gramsci distingue deux types de sociétés. Pour faire simple, celles où il suffit, comme en Russie, de prendre le central téléphonique et le palais présidentiel pour prendre le pouvoir. La bataille pour "l’hégémonie" vient après, ce sont les sociétés "orientales" qui fonctionnent ainsi… Et celles, plus complexes, où le pouvoir est protégé par des tranchées et des casemates, qui représentent des institutions culturelles ou des lieux de productions intellectuelles, de sens, qui favorisent le consentement. Dans ce cas, avant d’atteindre le central téléphonique, il faut prendre ces lieux de pouvoir. C’est ce que l’on appelle le front culturel, c’est le cas des sociétés occidentales comme la société française, italienne ou allemande d’alors.
Au contraire de François Hollande et de François Lenglet, Antonio Gramsci ne croit pas à l’économicisme*, c’est-à-dire à la réduction de l’histoire à l’économique. Il perçoit la force des représentations individuelles et collectives, la force de l’idéologie… Ce refus de l’économicisme mène à ouvrir le "front culturel", c’est-à-dire à développer une bataille qui porter sur la représentation du monde tel qu’on le souhaite, sur la vision du monde…
Le front culturel consiste à écrire des articles au sein d’un journal, voire à créer un journal, à produire des biens culturels (pièces de théâtre, chansons, films etc…) qui contribuent à convaincre les gens qu’il y a d’autres évidences que celles produites jusque-là par la société capitaliste.
L’hégémonie, c’est l’addition de la capacité à convaincre et à contraindre
La classe ouvrière doit produire, selon Gramsci, ses propres références. Ses intellectuels, doivent être des "intellectuels organiques", doivent faire de la classe ouvrière la "classe politique" chargée d’accomplir la vraie révolution: c’est-à-dire une réforme éthique et morale complète. L’hégémonie, c’est l’addition de la capacité à convaincre et à contraindre.
Convaincre c’est faire entrer des idées dans le sens commun, qui est l’ensemble des évidences que l’on ne questionne pas.
La crise (organique), c’est le moment où le système économique et les évidences qui peuplent l’univers mental de chacun "divorcent". Et l'on voit deux choses: le consentement à accepter les effets matériels du système économique s’affaiblit (on voit alors des grèves, des mouvements d’occupation des places comme Occupy Wall Street, Indignados, etc); et la coercition augmente: on assiste alots à la répression de grèves, aux arrestations de syndicalistes etc…
Au contraire, un "bloc historique" voit le jour lorsqu’un mode de production et un système idéologique s’imbriquent parfaitement, se recoupent: le bloc historique néolibéral des années 1980 à la fin des années 2000 par exemple. Car le néolibéralisme n’est pas qu’une affaire économique, il est aussi une affaire éthique et morale.
A travers ces écrits, il devient le grand penseur des crises, casquette qui lui donne tant de pertinence aujourd’hui, et surtout depuis 2007 et 2008 que la crise financière propage ses effets. Dans ces Cahiers, il apporte à l’œuvre de Marx l'une des révisions ou l’un des compléments les plus riches de l’histoire du marxisme. Pour beaucoup de socialistes, il faut attendre que les lois de Marx sur les contradictions du capitalisme se concrétisent pour que la Révolution advienne. La Révolution d’Octobre, selon Gramsci, invalide cette thèse. Elle se fait "contre le Capital", du nom du grand livre de Karl Marx.
Le penseur italien fait partie du patrimoine intellectuel de l’Europe. Il a forgé des outils qui sont utiles aujourd’hui pour analyser le monde, comprendre comment les gens le voient et participent à la vie sociale, comment individus et médias interagissent, comment les représentations et les identités se forment continuellement et magmatiquement. Il a donné naissance à des écoles de pensée foisonnantes et utiles pour qui veut agir sur le monde.

Auteur: Brustier Gaël

Info: *Doctrine visant à considérer l'économie comme centrale dans le fonctionnement

[ socialisme ]

 

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contrepouvoir

L'HÉGÉMONIE CULTURELLE SELON GRAMSCI

Constatant que les révolutions communistes promises par la théorie de Marx n’avaient pas eu lieu dans les sociétés industrielles de son époque, Gramsci formule une hypothèse. Si le pouvoir bourgeois tient, ce n’est pas uniquement par la main de fer par laquelle il tient le prolétariat, mais essentiellement grâce à son emprise sur les représentations culturelles de la masse des travailleurs. Cette hégémonie culturelle amenant même les dominés à adopter la vision du monde des dominants et à l’accepter comme "allant de soi".

Cette domination se constitue et se maintient à travers la diffusion de valeurs au sein de l'École, l'Église, les partis, les organisations de travailleurs, l'institution scientifique, universitaire, artistique, les moyens de communication de masse... Autant de foyers culturels propageant des représentations qui conquièrent peu à peu les esprits et permettent d’obtenir le consentement du plus grand nombre.

Pour renverser la vapeur, toute conquête du pouvoir doit d’abord passer par un long travail idéologique, une lente préparation du terrain au sein de la société civile. Il faut, peu à peu, subvertir les esprits, installer les valeurs que l’on défend dans le domaine public afin de s’assurer d’une hégémonie culturelle avant et dans le but de prendre le pouvoir.

Exemple récent, l’idéologie néolibérale qui s’est auto-instituée comme seul système d’organisation économique possible. Il est le fruit d’un long travail sous-terrain de conquête des esprits depuis les cercles de réflexion d’économistes américains et européens (think-tanks) des années 50 aux journalistes, hauts fonctionnaires, leaders d’opinion, lobbys et artistes qui imposent peu à peu ses principales idées dans la sphère culturelle : "La compétition généralisée est saine", "Le marché s’auto-régule", "Il faut limiter les dépenses publiques et baisser les impôts", "L’État est un mauvais gestionnaire", etc.) avant de connaître une traduction politique dans la prise de pouvoir par Ronald Reagan aux États-Unis, Margaret Thatcher en Angleterre jusqu’à Deng Xiaoping en Chine.

CONQUERIR LA SOCIETE CIVILE

Pour Gramsci, l'État ne se résume pas au seul gouvernement. Même si ces sphères se recoupent souvent, on peut distinguer deux lieux de son pouvoir :

— D’une part, la "société politique2 qui regroupe les institutions politiques, la police, l’armée et la justice. Elle est régie par la force.

— D’autre part la "société civile" qui regroupe des institutions culturelles (université, intellectuels, médias, artistes) et qui diffuse de manière ouverte ou masquée l'idéologie de l'État afin d'obtenir l'adhésion de la majorité de la population. Elle est régie par le consentement.

Si dans les régimes dictatoriaux, c’est surtout la société politique qui règne (par l’oppression), dans les sociétés occidentales démocratiques, c’est principalement la société civile qui organise la domination. C’est donc dans son cadre que le combat (culturel) doit être mené et non par une confrontation frontale avec la société politique.

Si l’on suit Gramsci, il faut d’abord distiller les idées progressistes, travailler aux marges et dans les interstices, réaliser un travail de "termite" pour ronger progressivement toutes les bases de la société capitaliste traditionnelle. L’objectif est celui de combattre les intellectuels de la classe dominante. Une tâche que Gramsci confiait aux intellectuels au sens large (ceux qui manipulent des idées), du moins ceux qui sont organiquement lié aux travailleurs. Il faut pour ce faire percer dans les médias de masse, envahir le langage courant, ou encore imposer ses thèmes et ses concepts dans le débat universitaire et public. À gauche, cela pourrait être d’une part de remettre en cause préceptes et mots du néolibéralisme pour les disqualifier et d’autre part d’imposer des thèmes et des termes comme "catastrophe écologique", "salaire maximum", "relocalisation", "gratuité", "coopérative", "paix économique", "services collectifs", "peuple", "écroissance", "précariat", "égalité réelle", "recherche du bien-être", etc.

À ce titre, si internet permet de nos jours une accélération de ce travail de sape et de diffusion de messages contraire à l’ordre du discours, la lutte contre l’hégémonie de la classe dominante doit aussi être menée en profondeur dans les réseaux sociaux humains. C’est notamment le rôle de l’éducation populaire.

Auteur: Berthier Aurélien

Info: 4 avril 2011, www.agirparlaculture.be

[ sociologie ] [ subversion sémantique ]

 

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pouvoir sémantique

Wokisme, un protestantisme déréglé?

À l’instar de plusieurs chercheurs américains qu’il cite largement dans son étude*, l'auteur observe dans cet activisme progressiste un post-protestantisme débarrassé de sa théologie, soit un nouveau puritanisme entièrement sécularisé.

L’analogie? "La rédemption des péchés du monde ne se réalise plus à travers le sacrifice christique, mais par celui du bouc émissaire, à savoir la figure de l’homme blanc hétérosexuel, symbole qui réunit les trois fautes à la racine des injustices sexuelles, raciales et de genre: la masculinité, la blanchité et l’hétéronormativité", lit-on dans le document. Ou encore: "Les rêves d’une société parfaite que le christianisme reportait à un Royaume céleste doivent être matérialisés ici-bas et immédiatement." Interview avec un chercheur très critique à l’endroit de son objet d’étude.

- Le wokisme découlerait du protestantisme. Comment cela?

- Un certain nombre d’intellectuels protestants et catholiques nord-américains analysent le phénomène woke comme une forme de protestantisme sécularisé, c’est-à-dire l’idée qu’un certain nombre de thèmes chrétiens (l’Éden, le péché originel, la confession, le blasphème, etc.) ont été capturés par la frange progressiste de la gauche et transférés dans le champ politique. L’orthodoxie morale n’est plus produite par les Églises mais par les divers activismes qui composent le mouvement de la Justice Sociale (anti-racisme, droits LGBT, féminisme, etc. ndlr).

- Concrètement, de quelle manière se manifeste ce nouveau puritanisme?

- De multiples manières et à différents étages de la société. Essentiellement, ce puritanisme est le produit de l’hégémonie de la gauche dans les champs intellectuel et culturel. Il fabrique des hiérarchies et des tabous utiles à un certain nombre de groupes d’intérêt et circonscrit les interprétations dicibles dans les universités et les grands médias.

- On assiste, avec ce courant, à une nouvelle moralisation de l’espace public, avec une mobilisation autour de la notion de justice sociale et le souci des minorités. Ne faudrait-il pas s’en réjouir?

- Plus d’un s’en réjouissent, mais je ne partage pas cet optimisme. L’impact des idées politiques ne s’évalue pas à partir des intentions de leurs promoteurs. Or nous avons affaire à un mouvement profondément anti-libéral et passablement anti-scientifique – il suffit de lire les intellectuels qui nourrissent ce phénomène pour s’en convaincre. Rien n’est plus dangereux que des révolutionnaires qui s’imaginent pur de cœur.

- Plusieurs observateurs parlent d’une "religion civile". L’analogie au champ religieux vous semble-t-elle pertinente ?

- Elle est pertinente pour deux raisons: la première est que le wokisme fonctionne à la manière des cosmographies religieuses, c’est-à-dire qu’il procure une explication globale du fonctionnement de la société et de l’histoire, et offre à ses ouailles sens, ordre et direction. La seconde est que le comportement sectaire et les hyperboles moralisantes des activistes invitent naturellement une comparaison avec les mouvements religieux fondamentalistes. Pour preuve, le recours à des concepts infalsifiables et tout-puissants, comme le "patriarcat" ou le "racisme systémique".

- Comment comprendre que le langage du wokisme soit si présent au sein du monde protestant et de ses Églises?

- Il y a aussi beaucoup de résistance, mais je suppose qu’une partie du clergé entend profiter de la vitesse acquise de cette nouvelle religion civile, reproduisant des comportements analogues aux Églises, et capable de mobiliser certains segments de la population. Articulé autour de notions de justice sociale, d’équité, d’inclusivité, le militantisme woke peut assez aisément être réapproprié dans un contexte ecclésial. On peut aussi s’attendre à une demande par le bas, un certain nombre de membres motivés dans les communautés exigeant de leur hiérarchie un positionnement sur les grands thèmes du jour. La chose n’est pas très surprenante quand on pense, par exemple, à l’influence que le marxisme a pu exercer sur les théologiens de la libération en Amérique latine. Les Églises ne sont pas imperméables aux modes. 

- Vous pointez, au sein de ce phénomène, l’absence de "gardes-fous théologiques". Qu’entendez-vous par là?

- L’idée qu’un corpus théologique, qui s’est construit à travers des siècles d’affinage et de conciles, procure un cadre normatif à des notions de justice, de péché ou de rédemption. Libérées de ce cadre et réintroduites dans une religiosité révolutionnaire, ces idées prennent le mors aux dents. Le Royaume des Cieux se transforme en l’ambition d’établir ici-bas une société parfaitement égalitaire, quels qu’en soient les coûts.

- Vous êtes très critique à l’égard de ce mouvement. En quoi considérez-vous qu’il tende à glisser dans le fondamentalisme, voire le totalitarisme?

- La volonté de faire disparaître toutes les "inégalités", c’est-à-dire ici les disparités entre sexes ou entre populations, requiert nécessairement un État autoritaire régulant et corrigeant les effets des choix individuels. L’autoritarisme de la gauche progressiste n’est pas simplement la conséquence accidentelle d’une raideur idéologique propre au militantisme. Tout comme l’illustre l’histoire des économies planifiées, l’autoritarisme est l’inévitable propriété émergente du système.

- Votre étude souligne la contradiction de ce mouvement, dont les membres se proviennent majoritairement des classes les plus aisées…

- L’hypothèse que je trouve la plus séduisante a été formulée par le psychologue Rob Henderson: les classes supérieures nord-américaines signalent leur statut, c’est-à-dire se reconnaissent entre pairs et se distinguent du peuple, non plus seulement à l’aide de produits de luxe, mais aussi à l’aide d’idées luxueuses. Les coûts de ces idées sont assumés par les classes populaires tandis que les bénéfices à la fois matériels et immatériels sont capturés par les classes supérieures. Selon cette perspective, le wokisme est un outil dans un jeu de pouvoir et de statut. Son adoption signale son appartenance au camp du Bien et son institutionnalisation assure des débouchés professionnels à toute une classe de diplômés issus de filières académiques où le savoir tend à se dissiper au profit de l’activisme.

- N’allez-vous pas un peu loin en dénonçant une stratégie qui serait à nouveau profitable aux plus privilégiés, en faisant fi de leurs bonnes intentions?

-
Je ne pense pas que les activistes dont nous parlons ici soient des cyniques travaillant consciemment à consolider leur statut et je ne doute pas que leur mobilisation puise son énergie dans de bonnes intentions. Le problème réside dans la confusion entre les slogans et la réalité, d’une part, et dans la perception naïve que les bonnes intentions font de bonnes réformes, d’autre part. Or les réformes proposées par ces activistes (qui sont articulées sur toute une batterie de programmes préférentiels, de coûteuses formations, de régulations du langage) oscillent le plus souvent entre l’inutile et le contre-productif. 

Auteur: Moos Olivier

Info: Entretien avec Anne-Sylvie Sprenger à propos de *"The Great Awokening. Réveil militant, Justice Sociale et Religion", Religioscope, déc. 2020

[ cancel culture ] [ erreur catégorielle ] [ antispiritualisme ] [ bien maléfique ]

 

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