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formacja

Nous ne comprenons vraiment que ce qui fut énoncé et enregistré par les deux ou trois générations précédant notre culture propre. Seules les formulations utilisées par ces strates antérieures rapprochées sont "compréhensibles", littéralement. En effet, ces consensus d'un réel sont suffisamment contigus dans le temps - tant les terminologies qui en font rapport que la réalité qui en fut le socle -, un peu comme si nous en avions respiré les odeurs et éprouvé les émotions grâce à nos ascendants proches, parfois aussi aidés en celà par l'école, qui consolida ces éléments de la culture collective d'un moment/époque : le notre, l'air d'un temps. Tout ce qui est au-delà est de seconde main, sujet à caution. Ce que nous nous nommons culture collective, sur le temps long, les annales écrites, parait, après réflexion, hors de portée, très discutable. A tout le moins inextricable fouillis quasi irrationnel dont il n'y a peut-être rien d'autre à tirer qu'une forme de divertissement. J'ai même le sentiment que l'époque la plus intelligible est celle de nos grands-parents ; explicitée  par nos parents et déjà bien digérée/distanciée par les années. 

Il est imaginable qu'en ce qui concerne les annales "vidéos" des époques à venir, ce sera encore plus vrai, parce qu'avec une matière toujours plus pléthorique  ce sera tout aussi facile à manipuler. D'où nécessaire honnêteté et impartialité des historiens.

Auteur: Mg

Info: 13. 2. 2021

[ continuité trompeuse ] [ décontextualisation historique ] [ mémoire communautaire ] [ limitation ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

écriture

Pourquoi écrire, si je n'écris pas mieux ? Mais que deviendrais-je si je n'écrivais pas le peu que je réussi à écrire, même si, ce faisant, je demeure très inférieur à moi-même ? Je suis un plébéien de l'idéal, puisque je tente de réaliser ; je n'ose pas le silence, tel un homme qui aurait peur d'une pièce obscure. Je suis comme ceux qui apprécient davantage la médaille que l'effort, et qui se parent des plumes du paon.

Pour moi, écrire c'est m'abaisser ; mais je ne puis m'en empêcher. Ecrire, c'est comme la drogue qui me répugne et que je prends quand même, le vice que je méprise et dans lequel je vis. Il est des poisons nécessaires, et il en est de forts subtiles, composés des ingrédients de l'âme, herbes cueillies dans les ruines cachées de nos rêves, coquelicots noirs trouvés sur les tombeau de nos projets, longues feuilles d'arbres obscènes, agitant leurs branches sur les rives des eaux infernales de l'âme.

Ecrire, oui, c'est me perdre, mais tout le monde se perd, car vivre c'est se perdre. Et pourtant je me perds sans joie, non-pas comme le fleuve qui se perd à son embouchure - pour laquelle il est né, encore inconnu -, mais comme la flaque laissée dans le sable par la marée haute, et dont l'eau lentement absorbée ne retournera jamais à la mer.

Auteur: Pessoa Fernando (Alv. de Campos)

Info: Le livre de l'intranquillité

[ quête ] [ passe-temps ] [ mémoire ] [ solitude ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

langage

Je traduis des extraits, principalement de l'anglais ou de l'allemand, vers le français. Internet est très amusant pour ce faire, si l'on part du point de vue que le matériel de base est correct !. En traduisant, fréquemment avec l'aide de dictionnaires, voire à l'occasion d'un traducteur en ligne, je découvre pleins de nouveaux mots.
Comme tout le monde je retiens beaucoup mieux les mots que je peux associer à une situation vécue. Et comme ici ces mots sont découverts/appris de manière purement cérébrale sur un écran d'ordinateur, j'en déduis que cette situation existe, sous jacente, dans mon vécu, comme en attente d'y relier ce mot nouveau. On apprend pas autrement une langue que par l'expérience d'un réel ou d'une circonstance.
J'en déduis que le temps n'a aucune importance.
Mais discerne aussi, l'âge aidant, un de ses effets... La durée s'allongeant certains de ces mots/phrases symboles, axiomes de nos raisonnements, se modifient.
Une fois fixés par quelque instant "mémorable", les voilà qui, chacun son rythme, prennent leur essor hors de la réalité... pour meubler notre esprit/songes, comme les chauves-souris viennent s'agglutiner petit à petit à l'aube de leur grotte, esquissant des motifs au plafond de la caverne... groupes-formes qui, au gré de notre attention ou notre état d'esprit, changent de signification... Comme ces nuages qu'on rêvasse au chaud de l'été. Et voilà ce nuage "continent africain" devenu "fourmi" dodue le temps d'un détournement d'attention.

Auteur: MG

Info: 21 octobre 2009

[ mémoire ] [ sélective ] [ métamorphose ]

 

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souvenirs

Je me rappelle tout ce que j'entendais dire des amours d'Orpha et de Louis, tout ce que j'observais moi-même. Mais je ne m'en souviens ni quand je le voudrais, ni comme je le voudrais.

C'est comme pour les morceaux de piano, dont on m'obligeait à étudier cent fois les passages difficiles. Il me suffit aujourd'hui d'en jouer les deux premières notes pour que mes doigts retrouvent le tout; - à condition de ne pas penser à ce que je fais, à condition, que ma main seule travaille.

Ainsi, quand maman me montrait le postillon de l'étoile bêta de la Grande Ourse, ou la nébuleuse d'Orion... j'écarquillais les yeux: je ne la vois pas maman? "Regarde à côté tu verras."

Pour percevoir l'histoire d'Orpha et de Louis, il me faut la chercher, non directement dans le passé, mais parmi les choses d'alors, c'est-à-dire dans ma vie d'enfant, au jardin de mon père, que Louis cultivait.

Que je retrouve deux ou trois notes, tout le trait suivra; que je regarde "à côté" et je verrai ces choses, comme le postillon de la Grande Ourse; que je saisisse une couleur, une saveur, une lumière de ce temps-là, et leur amour renaîtra de la mer chantante du passé, comme la buée du printemps en ce jour de mon enfance, comme Vénus, de l'écume. Je retrouverai leur histoire, comme on découvre la nébuleuse d'Orion par les claires nuits de gelée sans lune.

Auteur: Gevers Marie

Info: Madame Orpha

[ mémoire récitative ] [ musique ]

 

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inconscient

Chacun de ces moments où nous avons été profondément conscients, chaque moment au cours duquel nos perceptions furent claires, intenses et authentiques, est marqué pour toujour du sceau indélébile du détail des formes et sensations dont l'expérience fut reçue. Et le retour de toute forme ou sensation similaire peut superposer ce souvenir sur le présent et amener ainsi le passé à revenir et revivre. Alors, si à l'instant de cette résurrection, au lieu d'oblitérer le présent nous pouvions continuer à en être conscient, si nous pouvions retenir le sens entier de notre identité et en même temps revivre pleinement ce moment  que nous avions cru effacé pour toujours, alors, et  alors seulement, nous sommes enfin  en pleine possession du temps perdu et atteignons en nous-même l'essence la plus profonde de notre être, très éloignée de cette personnalité superficielle que nous considérons en général comme étant nous-même. L'entièreté de notre temps est stocké dans la série des souvenirs authentiques qui se sont accumulé aux cours de nos expériences et notre vraie vie est seulement possible lorsque nous cessons d'en être séparé. C'est seulement alors que notre essence propre, qui reste elle inchangée, inchangeable, et par conséquent indépendante des loi du temps, peut revenir à la surface. Cette part de notre être, bibliothèque du passé et qui vit encore, cette part de nous qui  par conséquent est intemporelle, est du coup une réalité entièrement étanche et imperméable à tout changement.

Auteur: Leon Derrick Lewis

Info: *Introduction to Proust: his life, circle and his work. Published by Kegan Paul, Trench, Trubner 1940.

[ mémoire sélective ] [ réminiscence ] [ moi ] [ ego ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

psychanalyse

L’analyse n’est pas une simple reconstitution du passé, l’analyse n’est pas non plus une réduction à des normes préformées, l’analyse n’est pas un épos, l’analyse n’est pas un éthos. Si je devais la comparer à quelque chose, ce serait à un récit qui serait lui-même le lieu de la rencontre dont il s’agit dans le récit.

Le problème de l’analyse réside dans la situation paradoxale où se trouve le désir de l’Autre que le sujet a à rencontrer, notre désir, qui n’est que trop présent dans ce que le sujet suppose que nous lui demandons. En effet, le désir de l’Autre qu’est pour nous le désir du sujet, nous ne devons pas le guider vers notre désir, mais vers un autre. Nous mûrissons le désir du sujet pour un autre que nous. Nous nous trouvons dans la position paradoxale d’être les entremetteurs du désir, ou ses accoucheurs, ceux qui président à son avènement. [...]

Sans doute l’analyse est-elle une situation où l’analyste s’offre comme support à toutes les demandes et ne répond à aucune, mais est-ce seulement dans cette non-réponse – qui est bien loin d’être une non-réponse absolue – que se trouve le ressort de notre présence ? Ne faut-il pas faire une part essentielle à un élément qui est immanent à la situation, et qui se reproduit à la fin de chaque séance ? J’entends, ce vide auquel notre désir doit se limiter, cette place que nous laissons au désir pour qu’il s’y situe – bref, la coupure.

Auteur: Lacan Jacques

Info: Dans le "Séminaire, Livre VI : Le désir et son interprétation", éditions de La Martinière et Le Champ Freudien éditeur, 2013, page 572

[ difficulté ] [ distanciation ] [ sans mémoire sans désir ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

objectivité diachronique

Les cultures opèrent leur filtrage en nous disant ce qu'il faut conserver et ce qu'il faut oublier. Dans ce sens-là, elles nous offrent un terrain commun d'entente, y compris à l'égard des erreurs.Vous pouvez comprendre la révolution qu'opère Galilée seulement à partir des théories de Ptolémée. Il nous faut partager l'étape Ptolémée pour accéder à l'étape Galilée et nous rendre compte que le premier s'était trompé. Toute discussion entre nous ne peut se faire que sur la base d'une encyclopédie commune. Je peux même vous démontrer que Napoléon n'a jamais existé - mais seulement parce que nous avons appris tous les trois qu'il a existé. C'est là la garantie de la continuité du dialogue. Ce sont des grégarismes qui autorisent le dialogue, la création et la liberté. Avec Internet, qui vous donne tout et vous condamne, comme vous venez de le dire, à opérer un filtrage non plus par la médiation de la culture mais de votre propre chef, nous courrons le risque de disposer désormais de six milliards d'encyclopédies. Ce qui empêchera toute entente. C'est un peu de la science fiction, car il y aura toujours des forces qui pousseront les gens à adhérer aux même croyances, je veux dire qu'il y aura toujours l'autorité reconnue de ce qu'on appelle la communauté scientifique internationale, à laquelle nous faisons confiance parce que nous voyons qu'elle est capable de revoir et corriger de façon publique ses conclusions, et cela chaque jour. C'est à cause de notre confiance dans la communauté scientifique que nous croyons dur comme fer que la racine carrée de 2 est 1,4142135... etc.

Auteur: Eco Umberto

Info: N'espérez pas vous débarrasser des livres, P. 88-89

[ tri ] [ mémoire collective ] [ évolution ] [ historique ]

 

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maladie

Depuis trente ans, chaque matin il lui préparait son thé. Celui de la boîte rouge décorée d'un Ganesh, le dieu indien à tête d'éléphant, protecteur des voyageurs qui s'aventurent en pays inconnu et des écrivains, avec sa défense brisée qui lui servit de plume pour écrire Le Mahâbhârata. Thé vert, quatre doses de gingembre, trois clous de girofle, deux bâtons de cannelle, quelques cosses de cardamome, des grains de poivre noir. Son mélange à elle, souvenir de ses voyages en Inde. Parmi les boîtes de thé pour les différents moments de la journée, dans le petit meuble en bois blanc grillagé rempli d'épices, il ne se trompait jamais. Chaque matin, il dosait, ébouillantait la théière et l'appelait pour partager cet instant unique. Mais ce matin-là, il est arrivé près d'elle, hagard et désespéré, portant toutes les boîtes dans ses bras : "C'est lequel, je ne sais plus ?"
Lors des catastrophes aériennes on recherche désespérément "les boîtes noires" qui vont fournir des indices, mots, cris, graphiques. Ces traces lisibles par les spécialistes du décodage. Elles contiennent tout ce qu'il faut pour expliciter les circonstances de l'accident et ainsi autoriser à trancher les responsabilités, trouver les coupables, juger. Toutes ces révélations qui vont permettre aux familles de commencer "le travail du deuil".
Pour elle, c'est une boîte rouge, la boîte de Pandore qui a libéré en même temps que ses senteurs exotiques l'angoisse d'un à-venir inconnu et innommable. Elle connaît exactement la date et l'heure. Ce matin- là, elle a "su". L'intuition fulgurante que rien ne serait donc jamais plus comme avant. Déchirure entrevue vite pansée de déni et de refus.

Auteur: Huguenin Cécile

Info: Alzheimer mon amour

[ mémoire ] [ vieillesse ] [ oubli ]

 

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simulacre

Je me souviens avoir entendu le grand poète espagnol Rafael Alberti à une lecture. J'étais très jeune et il me parut donc très vieux, avec ses cheveux blancs qui lui tombaient sur les épaules et son costume blanc. J'étais choquée aussi de le voir accompagné par une femme qui ne semblait pas beaucoup plus âgée que moi ; elle portait une jupe si courte qu'on pouvait voir sa culotte quand elle marchait, et des bottes blanches en plastique, des "go-go" comme on les appelait. Je me rappelle que l'un d'eux portait une cage à oiseaux, blanche, avec une colombe blanche à l'intérieur, mais à vrai dire, il est possible que j'aie inventé ce détail, au cours des années, peut-être pour accentuer en moi l'impression que j'avais eue, et qui subsiste : que c'était la lecture poétique la plus étrange à laquelle j'aie assisté. Alberti lisait ses poèmes en espagnol et son traducteur américain, Ben Bellit, les lisait en anglais. Ben était sobre, timide, d'allure assez conventionnelle ; il portait une veste en tweed et une cravate. Alberti donna à Ben un pistolet jouet, ce qu'on appelait un pistolet à pétard, un jouet qui pouvait faire beaucoup de bruit, et il a dit à Ben de se tirer dans la tête à chaque fois que lui, Alberti, lui ferait signe, et c'est exactement ce qui se passa : Alberti lisait en espagnol, s'arrêtait, regardait Ben, et Ben, non sans réticence, se tirait dans la tête. Mais quand Ben lisait des poèmes, Alberti tenait le pistolet, et de temps en temps il se tirait dans la tête avec un réel entrain. Il me semble que c'était une grande leçon de traduction.

Auteur: Ruefle Mary

Info: In "Madness, rack, and honey", éd. Wave Books, p. 235 - ma traduction

[ inculpation ] [ passeur ] [ mémoire ] [ codes vestimentaires ] [ spectacle littéraire ]

 
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Ajouté à la BD par Benslama

bibelots

Dans ma chambre, il y a deux petits objets qui ont une grande valeur pour moi, ils ne sont donc pas négociables. L’un d’eux est une frise en pierre, ramassée dans les décombres de la bibliothèque de Sarajevo pendant les années de siège. J’ai fréquenté ces lieux lors des dizaines de voyages en tant que conducteur de convois d’aide, pendant leur enfer. J’avais la quarantaine et je quittais le chantier de construction où je travaillais comme maçon. Les autres travailleurs gardaient ma place. Ce morceau de pierre blanche et taillée, exposé sur un ancien bâtiment musulman écroulé par les obus de la fin du siècle, contient mon époque, mon appartenance au XXe siècle.

L’autre objet est un boulon massif à tête carrée, utilisé pour fixer un rail à sa traverse. Je l’ai ramassé sur le ballast défoncé et labouré du camp d’extermination de Birkenau/Brzezinka en Pologne. C’était le mois d’avril, j’étais seul, enveloppé dans un silence servi par le vent, qui agissait comme un serveur balayant tout sans bruit. J’ai marché sur le quai le long duquel plus d’un million de vies étaient descendues des wagons de marchandises plombés. J’ai parcouru les mètres jusqu’à la fin de la course, où la sélection a eu lieu. J’ai marché sur ces derniers pas. J’étais entouré des ruines du siège d’une infamie. J’ai ramassé parmi les bouts de fer rouillé, éparpillés, le boulon à tête carrée. Il est un peu tordu, probablement martelé. J’ai enlevé la rouille avec mes mains, j’avais des paumes en papier de verre à l’époque. Maintenant, il est posé sur la table de mon bureau. Il appartient au milieu des années 1900, époque où je n’étais pas là et dont j’ai hérité de la génération de mes parents.

Auteur: Luca Erri De

Info: " Circa il valore ", 24 octobre 2013, in " Itinéraires ", Œuvres choisies ; © Gallimard, 2023

[ fétiches personnels ] [ mémoire ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste