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corps-esprit

D’une manière générale, il faut bien le remarquer : sur les conditions effectives de la pensée, le Descartes de la maturité n’a guère pris position. […]

En tout cas, nous n’avons, en perspective cartésienne, aucune idée de ce que serait un processus de pensée – ne disons pas un raisonnement, mais un processus de pensée – qui ne serait lié à aucune condition cérébrale. En droit, la substance de la pensée et la substance pensante elle-même sont indépendantes du corps. En fait, le corps assiste toujours la pensée, avec la double dimension du support et du facteur de retardement, de l’auxilium et de l’impedimentum.

En somme, que peut penser l’âme sans le corps ? Si "sans le corps" veut dire : sans une implication expresse du corps dans le processus de pensée, et sans une représentation corporelle plus ou moins ressemblante de l’objet de la pensée, la réponse sera qu’elle peut penser quantité de choses. Si en revanche « sans le corps » veut dire : sans aucune affection d’origine corporelle, la réponse est que nous n’en savons rien, ce qui veut dire : peut-être rien. Et si, assurément, Descartes refuse de considérer la pensée comme une propriété émergente, il ne caractérise en même temps l’esprit comme "chose complète" que de manière très précautionneuse. Disons que l’esprit est chose complète (indépendante) par sa notion et non par son activité.

Si donc il faut reprendre la question du sens du "dualisme cartésien", on dira que ce dualisme est essentiellement fonctionnel. Là où ne règne et où ne peut être obtenue aucune espèce d’évidence empirique (de l’indépendance des opérations de l’esprit à l’égard du corps), on peut néanmoins parler d’une évidence conceptuelle qui se recommande par son utilité intellectuelle et pratique. […] la "distinction réelle" de l’esprit et du corps est destinée à faire respecter la différence entre les objets de la pensée : il n’y a pas à traiter les pensées comme des processus physiques ou de purs produits de processus physiques, ni à considérer les mouvements de la nature comme des réalisations d’intentions. […] Au contraire, la distinction cartésienne règle les manières de parler des choses, et elle permet à la pensée de prendre possession d’elle-même, ou des idées qui lui donnent forme, comme elle peut prendre possession des choses étendues : seule en effet la certitude que ces idées appartiennent originairement à l’esprit […] lui donne l’assurance de pouvoir aller au bout de ses propres opérations et d’atteindre à une perfection spécifique qui autrement relèvera du hasard.

Auteur: Kambouchner Denis

Info: La question Descartes, éditions Gallimard, 2023, pages 158 à 160

[ explication ] [ philosophie ] [ résumé ] [ méthode ]

 
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intégration

(Ur, En allemand préfixe permettant l'accentuation ou l'exagération d'un mot)

En théorie des ensembles, un ur-element (ou urelement) est quelque chose qui n'est pas un ensemble mais qui peut être élément d'un ensemble.

Ils partagent ainsi avec le seul ensemble vide le fait de ne posséder aucun élément, mais pour des raisons tout à fait différentes : rien ne peut appartenir à un ur-element parce que cela n'a pas de sens, alors que rien n'appartient à l'ensemble vide par définition.

Les ur-elements sont aussi appelés atomesindividuséléments primitifs ....

La théorie des ensembles moderne a pu montrer que, pour développer l'ensemble des mathématiques, on pouvait complètement se passer d'atomes. Tous les ensembles utiles peuvent être construits à partir de l'abstraction mathématique qu'est l'ensemble vide. 

Néanmoins les théories des ensembles avec ur-elements gardent leur intérêt, pour des théories des ensembles faibles, ou tout simplement parce qu'elles peuvent apparaître plus naturelles au prime abord. De façon imagée, si on veut prouver que tout homme résidant à Paris réside en France, on va utiliser les propriétés de la relation d'inclusion telles qu'elles sont définies en théorie des ensembles. Pourtant, on ne va pas affirmer pour le prouver que tel homme (ur-element) qui vit à Paris donc en France est construit à partir de l'ensemble vide.

Adjoindre à l'ontologie ensembliste des objets qui ne sont pas des ensembles permet d'étendre son application à d'autres domaines. Mais il faut bien sûr formellement s'assurer que les théorèmes acquis sur les seuls ensembles peuvent s'exporter hors de ce domaine. D'où l'intérêt d'une théorie des ensembles avec ur-elements qui peut le garantir formellement.

Syntaxiquement, leur introduction consiste à enrichir le langage ensembliste (ne comprenant que les symboles de relation binaire d'appartenance et d'égalité) de constantes d'individus.

Les quantifications présentes dans les axiomes de la théorie des ensembles sont alors généralement relativisées aux seuls ensembles et ne s'appliquent pas aux ur-elements.

Dans des axiomatiques comme la théorie des ensembles typée, les objets de type 0, ou atomes, peuvent être considérés comme des ur-elements.

Résultats

L'adjonction d'ur-elements au système des New Foundations de  Quine (NF), a des conséquences surprenantes. En particulier, alors que l'on ne sait pas si la théorie NF est cohérente (relativement à ZFC et ses extensions), la théorie NF avec Ur-elements, notée NFU, se révèle cohérente relativement à l'arithmétique de Peano : une théorie bien plus faible que ZFC. De plus NFU plus l'axiome du choix est cohérente relativement à NFU, alors que NF démontre la négation de l'axiome du choix !

Auteur: Internet

Info: https://fr.wikipedia.org/wiki/Ur-element

[ composant singulier ] [ corps étranger ]

 

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psycho-sociologie post-industrielle

La croyance qui règne aujourd'hui est que la proximité entre les personnes est un bien moral. Le credo en cours aujourd'hui c'est de développer la personnalité individuelle au travers d'expériences de proximité et de chaleur avec les autres. Le mythe qui prévaut aujourd'hui est que les maux de la société peuvent tous être compris comme des problèmes d'impersonnalité, d'aliénation et de froideur. La somme de ces trois éléments consiste en une sorte d'idéologie de l'intimité : les relations sociales de toutes sortes sont réelles, crédibles et authentiques plus elles se rapprochent des préoccupations psychologiques intérieures de chaque personne. Cette idéologie transforme les catégories politiques en catégories psychologiques. Cette idéologie de l'intimité définit l'esprit humanitaire d'une société sans dieux : ce qui est chaleureux représente la divinité. L'histoire de la montée et de la chute de la culture publique remet pour le moins en question cet esprit humanitaire. La croyance en la proximité entre les personnes en tant que bien moral est en fait le produit d'une profonde dislocation que le capitalisme et la croyance laïque ont généré au siècle dernier. Du à cette dislocation les gens ont voulu trouver des significations personnelles au sein de situations impersonnelles, dans des objets ou dans les conditions objectives de la société elle-même. 

Ne parvenant plus à trouver ces significations, à mesure que le monde devenait psychomorphe et donc mystificateur, ils ont alors cherché à fuir, et à trouver dans les domaines privés de la vie, en particulier dans la famille, un principe d'ordre dans la perception de la personnalité. Ainsi, le passé a construit un désir caché de stabilité dans ce désir manifeste de proximité entre  êtres humains. Même si nous nous sommes révoltés contre les rigidités sexuelles sévères de la famille victorienne, nous continuons à faire peser sur les relations étroites avec les autres ces désirs cachés de sécurité, de repos et de permanence. Lorsque les relations ne peuvent supporter ces fardeaux, nous concluons qu'il y a quelque chose qui ne va pas dans la relation, plutôt que dans les attentes non exprimées. Parvenir à un sentiment de proximité avec les autres est donc souvent le résultat d'un processus de mise à l'épreuve ; la relation est à la fois proche et fermée. Si elle change, si elle doit changer, il y a un sentiment de confiance trahi. La proximité chargée d'attente de stabilité rend la communication émotionnelle - déjà assez dure en elle-même - plus difficile d'une marche. L'intimité en ces termes peut-elle vraiment être une vertu ? 

 

Auteur: Sennett Richard

Info: The Fall of Public Man

 
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histoire légendaire

[...] le mythe a dans l’ensemble un caractère de fiction. Mais cette fiction présente une stabilité qui ne la rend aucunement malléable aux modifications qui peuvent lui être apportées, ou, plus exactement, qui implique que toute modification en implique de ce fait même une autre, suggérant invariablement la notion d’une structure. D’autre part, cette fiction entretient un rapport singulier avec quelque chose qui est toujours impliqué derrière elle, et dont elle porte même le message formellement indiqué, à savoir la vérité. Voilà quelque chose qui ne peut être détaché du mythe. [...]

Le mythe se présente aussi dans sa visée avec un caractère d’inépuisable. Pour employer un terme ancien, disons qu’il participe du caractère d’un schème au sens kantien. Il est beaucoup plus près de la structure que de tout contenu, et se retrouve et se réapplique, au sens le plus matériel du mot, sur toutes sortes de données, avec cette efficacité ambiguë qui le caractérise. Le plus adéquat, c’est de dire que la sorte de moule que donne la catégorie mythique est un certain type de vérité, où, pour nous limiter à ce qui est notre champ et notre expérience, nous ne pouvons pas ne pas voir qu’il s’agit d’une relation de l’homme – mais à quoi ? [...]

Il ne tient qu’à nous de nous apercevoir qu’il s’agit des thèmes de la vie et de la mort, de l’existence et de la non-existence, de la naissance tout spécialement, c’est-à-dire de l’apparition de ce qui n’existe pas encore. Il s’agit donc des thèmes qui sont liés, d’une part, à l’existence du sujet lui-même et aux horizons que son expérience lui apporte, d’autre part au fait qu’il est le sujet d’un sexe, de son sexe naturel. Voilà à quoi l’expérience nous montre que l’activité mythique est employée chez l’enfant. [...]

Les mythes, tels qu’ils se présentent dans leur fiction, visent toujours plus ou moins, non pas l’origine individuelle de l’homme, mais son origine spécifique, la création de l’homme, la genèse de ses relations nourricières fondamentales, l’invention des grandes ressources humaines, le feu, l’agriculture, la domestication des animaux. Nous y trouvons aussi constamment mis en question le rapport de l’homme avec une force secrète, maléfique ou bénéfique, mais essentiellement caractérisée par ce qu’elle a de sacré.

Cette puissance sacrée, diversement désignée dans les récits mythiques qui expliquent comment l’homme est venu en relation avec elle, se laisse situer pour nous dans une identité manifeste avec le pouvoir de signification, et très spécialement de son instrument signifiant.

Auteur: Lacan Jacques

Info: dans le "Séminaire, Livre IV", "La relation d'objet", éditions du Seuil, 1994, pages 353 à 355

[ caractéristiques ] [ psychanalyse ] [ parole ]

 

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auto-analyse littéraire

Je ne parle jamais de l'Homo festivus mais d'Homo festivus parce que j'en ai fait un personnage conceptuel, quelque chose d'intermédiaire entre le concept et l'être romanesque, ce qui me permet sans cesse de l'aborder par deux côtés, par les idées et par la vie, par la pensée comme par les événements concrets, par l'entendement comme par le mouvement.

Philosophe ou sociologue, je parlerais en effet de l'Homo festivus, mais c'est bien ce dont je me garde comme de la peste car alors il me serait impossible de faire ce que j'ai entrepris, et qui seul compte à mes yeux, à savoir le portrait du temps, la recréation de l'époque ; ce qui ne se peut envisager qu'à partir des méthodes et avec les instruments variés (du sérieux à la farce) de l'art. Maintenant, pour en revenir à cette solitude sexuelle d'Homo festivus, qui contient tous les autres traits que vous énumérez, elle ne peut être comprise que comme l'aboutissement de la prétendue libération sexuelle d'il y a trente ans, laquelle n'a servi qu'à faire monter en puissance le pouvoir féminin et à révéler ce que personne au fond n'ignorait (notamment grâce aux romans du passé), à savoir que les femmes ne voulaient pas du sexuel, n'en avaient jamais voulu, mais qu'elles en voulaient dès lors que le sexuel devenait objet d'exhibition, donc de social, donc d'anti-sexuel. Nous en sommes à ce stade. Dans une société maternifiée à mort (et où, pour être bien vu, il faut toujours continuer à radoter que le féminin n'a pas sa place, est persécuté, écrasé, etc.), l'exhibitionnisme, où triomphent les jouissances prégénitales, devient l'arme fatale employée contre le sexuel, je veux dire le sexuel en tant que division ou différence des sexes (qualifiée de source d'inégalités ou d'asymétries), et en tant que vie privée. L'exhibitionnisme est la forme sexuelle que prend aujourd'hui l'approbation des conditions actuelles d'existence.

C'est pour cela que je peux diagnostiquer, à partir des avalanches de parties de jambes en l'air qu'on nous montre ou qu'on nous raconte dans des livres, à la fois un désir forcené d'intégration sociale (par l'exhibition que réclame et même qu'exige cette société-ci) et une volonté plus forcenée encore de mort du sexuel adulte. Il n'y a aucune contradiction entre la pornographie de caserne qui s'étale partout et l'étranglement des dernières libertés par des "lois antisexistes" ou réprimant l'"homophobie"comme il nous en pend au nez et qui seront, lorsqu'elles seront promulguées, de brillantes victoires de la Police moderne de la Pensée. 

Auteur: Muray Philippe

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homme-machine

L'IA de DeepMind peut construire une vision du monde à partir de plusieurs images.
L'intelligence artificielle peut maintenant se mettre à la place de quelqu'un d'autre. DeepMind a développé un réseau neuronal qui lui a appris à "imaginer" une scène à partir de différents points de vue, à partir d'une image seulement.
Avec une image 2D d'une scène - par exemple, une pièce avec un mur de brique et une sphère et un cube de couleur vive sur le sol - le réseau neuronal peut générer une vue 3D à partir d'un point de vue différent, rendant les côtés opposés des objets et modifiant l'endroit où les ombres tombent pour maintenir la même source de lumière.
Le système, nommé Generative Query Network (GQN), peut extraire des détails d'images statiques pour deviner les relations spatiales, y compris la position de la caméra.
"Imaginez que vous regardez l'Everest et que vous bougez d'un mètre - la montagne ne change pas de taille, ce qui vous dit quelque chose sur sa distance", dit Ali Eslami qui a dirigé le projet à Deepmind.
"Mais si vous regardez une tasse, elle changera de position. C'est semblable à la façon dont cela fonctionne."
Pour former le réseau neuronal, lui et son équipe lui ont montré des images d'une scène à partir de différents points de vue, utilisés pour prédire à quoi ressemblerait quelque chose depuis derrière ou du côté. Le système s' auto enseigne aussi via le contexte, les textures, les couleurs et l'éclairage. Ce qui contraste avec la technique actuelle de l'apprentissage supervisé, dans lequel les détails d'une scène sont étiquetés manuellement et transmis à l'IA.
L'IA peut également contrôler des objets dans l'espace virtuel, en appliquant sa compréhension des relations spatiales à un scénario où elle déplace un bras robotique pour ramasser une balle. Elle apprend beaucoup comme nous, même si nous ne le réalisons pas, dit Danilo Rezende de DeepMind, qui a également travaillé sur le projet.
En montrant au réseau neuronal de nombreuses images en formation, l'IA peut identifier les caractéristiques d'objets similaires et s'en souvenir. "Si vous regardez à l'intérieur du modèle, nous pouvons identifier des groupes de neurones artificiels, des unités dans le graphique de calcul, qui représentent l'objet ", dit Rezende.
Le système se déplace autour de ces scènes, faisant des prédictions sur l'endroit où les choses devraient être et à quoi elles devraient ressembler, en s'ajustant quand ses prédictions sont incorrectes.
Il a pu utiliser cette capacité pour élaborer la disposition d'un labyrinthe après avoir vu quelques photos prises de différents points de vue.

Auteur: Whyte Chelsea

Info: https://www.newscientist.com, 14 juin 2018

 

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post-capitalisme

Nous pensons que nous vivons une mutation de l’économie libidinale, c’est-à-dire de la sublimation, c’est-à-dire de la science et des activités de l’esprit en général, une mutation qui nécessite des "agencements" nouveaux, je reprends le mot deleuzien délibérément : des agencements nouveaux entre l’initiative privée, bancaire, industrielle, de Recherche-Développement, et une nouvelle forme de puissance publique. Pas forcément l’État, mais aussi des ONG ou des associations en lien avec l’Europe, capables de créer des externalités en vue de bâtir de nouvelles solvabilités qui, pour le moment, n’existent pas.

Nous disons qu’il s’agit véritablement de changer de paradigme et de voir le caractère limite de la situation actuelle : le désir industriellement traité conduit à la destruction du désir, ce qui engendre la démotivation et du travailleur et du consommateur, là où, comme le redisent Boltanski et Chiapello après Max Weber, le capitalisme "marche" à la motivation ; sans motivation, il ne peut pas fonctionner. Il y a eu des techniques de fabrication artificielle de la motivation, et ces techniques ont fini par détruire cette motivation. Nous disons que c’est un problème écologique. On a exploité des champs de pétrole, de charbon et on a détruit ce qu’on exploitait, et il faut trouver des énergies renouvelables. C’est la même chose dans le domaine du désir, il faut trouver une énergie renouvelable de la libido.

Or la libido est constituée par des techniques ; ce n’est pas une énergie qui se développe spontanément, mais elle est articulée sur des techniques, des "fétiches", et plus généralement sur des prothèses : c’est la technè, l’artefactualisation du vivant qui constitue la libido, ce que Freud n’a pas pensé. Le capitalisme a très bien vu cela, il a développé, dans un sens, qui n’est pas celui de Marx, le "fétichisme" de la marchandise : il a utilisé la puissance de l’artefact comme captation du fantasme afin de fixer la libido sur ses propres objets. Le problème, c’est qu’il a fini par détruire toutes les structures qui sont les conditions de fonctionnement de cette libido, et qui ne se réduisent pas à la calculabilité. Donc le capitalisme a fini, en captant la libido, par la désingulariser. Or une libido désingularisée n’est plus une libido, c’est une pulsion. Aujourd’hui le capitalisme est arrivé à sa limite, il a transformé la libido en pulsion. Mais la pulsion, il ne sait pas quoi en faire, elle lui explose à la figure, et c’est ce que nous vivons en ce moment. Le 11-septembre a signé l’entrée dans cette situation, qui existait depuis bien longtemps, mais qui s’est, là, datée historiquement.

Auteur: Stiegler Bernard

Info:

[ sexualisation ]

 
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perception visuelle

J'ai mis au jour les illusions d'optique qui créent l'impression d'une forme géométrique inexistante à partir d'éléments simples. L'une des figures les plus connues qui porte mon nom est celle du triangle de Kanizsa, qui est formé par trois triangles blancs disposés en triangle, avec un cercle noir au centre de chaque triangle. L'illusion créée est celle d'un triangle blanc plus grand dont les côtés sont formés par les bords des triangles blancs et les bords des cercles noirs. 

Mes travaux ont eu une influence importante sur la compréhension de la perception visuelle et ont contribué au développement de la psychologie cognitive.

Ce fameux triangle imaginé est un exemple de contour subjectif. Un contour subjectif est un contour perçu qui n'est pas réellement présent dans l'image puisque'il montre bien la façon dont notre cerveau peut compléter des informations manquantes en utilisant les informations disponibles dans l'image pour créer une image complète et cohérente.

Ce qui nous aide à comprendre comment notre cerveau construit une image du monde qui nous entoure et nous apprend plusieurs choses importantes sur la façon dont nous percevons le monde : 

1. Notre perception est active et constructive. Elle  construit une image du monde en complétant les informations manquantes. Dans ce cas, notre cerveau complète l'image en créant un triangle blanc qui n'est pas réellement présent. 

2. Notre perception est influencée par nos attentes, qui influencent la façon dont nous interprétons l'image. C'est pourquoi nous percevons un triangle blanc, même si celui-ci n'est pas réellement présent.

3. Notre perception est subjective puisque ce que nous  percevons dépend de notre propre expérience et de nos propres interprétations. Il est possible que deux personnes regardant la même image ne perçoivent pas la même chose.

4. Notre perception est influencée par le contexte. Si nous sommes entourés d'autres images de triangles blancs, nous sommes plus susceptibles de percevoir un triangle blanc dans l'image du triangle de K. 

En résumé notre cerveau est actif et il construit une image du monde en complétant les informations manquantes, en tenant compte de nos attentes, de nos expériences et du contexte dans lequel nous nous trouvons.

Cet effet est utilisé par les illusionnistes. Par exemple, on place un objet sur une table, puis on le recouvre d'une feuille de papier. On peut peut ensuite dessiner les contours d'un triangle sur la feuille, de sorte qu'un objet semble à l'intérieur du triangle. 

Les artistes peuvent aussi utiliser l'illusion du triangle de Kanizsa pour créer des œuvres qui sont à la fois belles et déroutantes.

Auteur: Kanizsa Gaetano

Info:

[ prestidigitation ]

 

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cité imaginaire

A Eudoxia, qui s'étend de haut en bas, avec des ruelles sinueuses, des escaliers, des impasses, des taudis, un tapis est conservé sur lequel on peut contempler la véritable forme de la ville. À première vue, rien ne semble moins ressembler à Eudoxia que le dessin du tapis, ordonné en figures symétriques qui répètent leurs motifs le long de lignes droites et circulaires, tissées avec des aiguilles de couleurs vives, dont on peut suivre l'alternance des trames tout au long de la chaîne. Mais si vous vous arrêtez pour le regarder attentivement, vous vous persuadez qu'à chaque détail du tapis correspond une place dans la ville, et que toutes les choses contenues dans la ville sont incluses dans le dessin, disposées selon leurs véritables relations, qui échappent à votre œil distrait par l'agitation du fourmillement de la cohue. Toute la confusion d'Eudoxia, le braiement des mules, les taches de noir de fumée, l'odeur du poisson, c'est ce qui apparaît dans la perspective partielle que vous saisissez ; mais le tapis prouve qu'il existe un point à partir duquel la ville montre ses véritables proportions, le modèle géométrique impliqué dans chacun de ses plus petits détails.

Il est facile de se perdre dans Eudoxia : mais si l'on se concentre pour regarder le tapis, on reconnaît le chemin que l'on cherchait dans un fil cramoisi, indigo ou amarante qui, par un long virage, nous conduit dans une enceinte violette qui est notre véritable point d'arrivée. Chaque habitant d'Eudoxia compare à l'ordre immobile du tapis sa propre image de la ville, sa propre angoisse, et chacun peut trouver caché parmi les arabesques une réponse, l'histoire de sa vie, les tournants du destin.

Un oracle a été interrogé sur la relation mystérieuse entre deux objets aussi différents que le tapis et la ville. L'un des deux objets, - fut la réponse, - a la forme que les dieux ont donnée au ciel étoilé et aux orbites sur lesquelles tournent les mondes ; l'autre en est un reflet approximatif, comme toute œuvre humaine.

Les augures étaient depuis longtemps certains que le dessin harmonieux du tapis était d'origine divine ; c'est dans ce sens que l'oracle a été interprété, sans donner lieu à controverse. Mais de la même manière, on peut tirer la conclusion inverse : que la véritable carte de l'univers est la ville d'Eudoxia telle qu'elle est, une tache qui s'étend sans forme, avec des rues toutes en zigzag, des maisons qui s'effondrent les unes sur les autres dans la poussière, des incendies, des cris dans le noir.

Auteur: Calvino Italo

Info:

[ fractale ] [ reflet solipsiste ]

 

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société marchande

Reste à établir que l'adjectif "immortel" s'applique bien à nos produits, même les plus fragiles. Il y a désormais une nouvelle forme d'immortalité : la réincarnation industrielle, c'est-à-dire l'existence de produits de série. En tant qu'objet singulier (cette vis, cette machine à laver, ce microsillon "longue durée", cette ampoule électrique), chaque produit a des performances, un domaine d'application et une durée de vie limités. Mais, si on la considère en tant que marchandise de série, la nouvelle ampoule électrique ne prolonge-t-elle pas la vie de l'ancienne qui avait grillé ? Ne devient-elle pas l'ancienne ampoule ? Chaque objet perdu ou cassé ne continue-t-il pas à exister à travers l'Idée qui lui sert de modèle ? L'espoir d'exister à nouveau dès que son jumeau aura pris sa place, n'est-ce pas une consolation pour chaque produit ? N'est-il pas devenu "éternel" en devenant interchangeable grâce à la reproduction technique ? Mort, où est ta faux ?

[...]

Quand des milliers de pages sont parties en fumée lors des autodafés de livres organisés par Hitler en 1933, aucune page absolument unique n'a brûlé, à la différence de ce qui s'était produit lors de l'incendie de la bibliothèque d'Alexandrie. Chacune d'elles avait en réalité des centaines ou des milliers de sœurs. Aussi ignominieuses qu'aient pu être les intentions de l’incendiaire, d'aussi mauvais augure qu'ait pu être son geste - laissant prévoir qu'il livrerait bientôt aux flammes tout autre chose que du papier -, la destruction qu'il opérait n'était encore, à ce stade, qu'une farce. Au milieu des cris de la foule qui dansait autour des bûchers, passait invisible, légère, hors de portée des flammes, une farandole moqueuse, celle des livres originaux criant : "Brûlez nos exemplaires ! Brûlez-les ! Vous ne nous brûlerez pas pour autant !" - avant de se disperser aux quatre vents. Les livres prétendument détruits vivent toujours aujourd'hui à des milliers d'exemplaires.

[...]

Certes, le monde dans lequel nous vivons n’est pas un "royaume des Idées". Mais il est incontestablement plus "platonicien" que ne l’a jamais été le monde des hommes. Et ce pour la simple raison qu’il se compose de choses qui sont en grande partie des produits de série standardisés, des produits qui ont vu le jour en tant qu’imitations ou reproductions de modèles, de plans ou de matrices. Ils doivent leur existence à des Idées. [...] Cette possibilité de réincarnation ne prend fin que lorsque l’altération touche l’ "Idée" même du produit, c’est-à-dire lorsque l’on préfère adopter un nouveau modèle. Les milliers d’objets reproduits d’après l’ancien modèle disparaissent alors progressivement ; rien de plus aisé à comprendre.

Auteur: Anders Günther Stern

Info: Dans "L'obsolescence de l'homme", trad. de l'allemand par Christophe David, éditions Ivrea, Paris, 2002, pages 69-70

[ cycle de vie et de mort ] [ prolifération ]

 

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