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retrouvailles

La première conversation téléphonique, celle que lança Pelletier, démarra laborieusement, même si Espinoza attendait cet appel, comme si tous deux avaient eu du mal à se dire ce que tôt ou tard ils devaient se dire. Les premières vingt minutes eurent un ton tragique, le terme de destin fut employé dix fois et celui d'amitié vingt-quatre fois. Le nom de Liz Norton fut prononcé cinquante-neuf fois, dont neuf fois pour rien. Le nom de Paris fut avancé en sept occasions. Madrid en huit. Le mot amour fut prononcé deux fois, une fois par chacun d'eux. Horreur fut prononcé en six occasions et bonheur une fois (c'est Espinoza qui l'employa). Résolution fut dit en douze occasions. Solipsisme, sept. Euphémisme, dix. Catégorie, au singulier et au pluriel, neuf. Structuralisme, une (par Pelletier). Les termes de littérature nord-américaine, trois. Les mots dîner, nous dînons, petit déjeuner et sandwich, dix-neuf. Yeux, mains et cheveux, quatorze. Puis la conversation devint plus fluide.

Auteur: Bolaño Roberto

Info: 2666

[ dissection ] [ dialogue ]

 

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barbarie

J'ai peur des hommes... Ça me vient de la guerre... Sous la menace de mitrailleuses, ils nous ont emmenés... dans la forêt. Ils ont choisi l'endroit le plus bas, là où l'eau stagnait. Ils ont donné des pelles à mon père et à mon frère pour creuser un trou. Maman et moi, on nous a postées sous un arbre pour regarder. Maman et moi, on les a regardés se faire fusiller. On n'avait pas le droit de se retourner ou de fermer les yeux. Ils nous ont dit : "si vous pleurez, on tire. Souriez..." Ils sont là, plantés... Tous jeunes, beaux... Ils sourient... Une terreur animale me serre le cœur. Ce n'est plus des morts que j'ai peur, mais des vivants. Depuis, j'ai peur des Hommes jeunes. J'ai passé ma vie, seule... Je ne me suis pas mariée... Je ne sais pas ce que c'est que l'amour... J'ai toujours eu peur : des fois que j’accoucherais d'un garçon ?

Auteur: Alexievitch Svetlana

Info: Derniers témoins

[ atrocité ] [ hommes-par-femme ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

personnage

Alice est une journaliste d'investigation québécoise résolument indépendante. Elle n'est ni salariée d'un média, ni la moitié d'un couple, et n'envisage pas de devenir un jour le tiers d'une famille, puis le quart, etc. Elle ne veut pas rétrécir. Elle choisit soigneusement ses enquêtes, investiguant le plus souvent sur des crimes comme il s'en pratique au Canada où chaque foyer possède haches, pelles à neige et tisonniers. Alice a une approche originale qui postule qu'un crime nécessite un ou plusieurs gestes pour se concrétiser, mais qu'un geste possède des privilèges plus étendus : il peut exister par et pour lui-même. C'est même là la définition d'un beau geste. Alice croit en la beauté essentielle des gestes. Elle vit seule pour ne pas se réveiller le matin assiégée par des gestes qui ne sont pas le siens. Elle souhaite l'exclusivité des gestes qui façonnent son existence. Ce qu'elle regarde en premier chez un homme, ce ne sont pas ses chaussures mais ses gestes.

Auteur: Baqué Joël

Info: La Fonte des glaces

[ féminin ]

 

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animal domestique

Quelle tristesse de jeter cette première pelletée de terre sur sa tête, de voir cette découpure effectuée dans ce corps qui avait si souvent couru après des jouets que j'avais lancés ou frissonné sur le sol au cours de rêves dans lesquels il galopait en aboyant.
La pelle entrait et sortait du faisceau lumineux tandis que la terre heurtait son ventre, son dos, pénétrait dans ses oreilles, dans ses yeux, et que je l'ensevelissais, ainsi que tout ce qui avait contribué à faire de lui ce qu'il était : ses promenades, ses moments de repos, ses repas quand il avait faim, les étoiles qu'il contemplait parfois, le jour où je l'avais amené à la maison, la première fois où il avait vu la neige, et chaque seconde de son amitié, tout ce qu'il a emporté avec lui dans le silence et l'immobilité.
J'ai jeté sur mon ami le monde entier à coups de pelle et en ai ressenti le poids, comme si j'étais étendu à ses côtés dans ces ténèbres.

Auteur: Donovan Gerard

Info: Julius Winsome

[ enterrement ] [ deuil ] [ au revoir ]

 

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désordre

Parfois les livres étaient rangés sous le panneau correspondant à leur genre, mais il n'était pas rare qu'ils atterrissent un peu n'importe où. Au fur et à mesure que j'apprenais à connaître les humains, je me suis aperçu que les gens aimaient "Pembroke Books" justement à cause de ce capharnaüm. Ils ne venaient pas que pour faire de la gratte sur quelques livres. Ils venaient là pour se perdre dans les allées. Ils appelaient ça fouiner, mais leurs regards s'apparentaient davantage à de l'excavation ou à de l'exploitation minière. J'étais toujours étonné qu'ils n'entrent pas équipés de pelles. Ils creusaient à mains nues, parfois jusqu'aux aisselles, dans l'espoir de déterrer un trésor, et lorsqu'ils extrayaient une pépite littéraire d'une montagne de déchets, ils étaient encore plus ravis que s'ils l'avaient trouvée et achetée directement après avoir franchi la porte. De ce point de vue, faire ses emplettes chez "Pembroke" ressemblait à la lecture : impossible de deviner ce que vous réserve la page suivante - l'étagère, le carton ou la pile d'à côté -, tout le plaisir tient dans la surprise.

Auteur: Savage Sam

Info: Firmin

[ chiner ] [ littérature ] [ librairie ] [ brocante ]

 

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résignation

Et Jérôme Calvière, glissant les feuillets dans l'enveloppe, comprenait ce que jusqu'ici il n'avait jamais entrevu. Il devinait avec lenteur que la terre dont parlait Max Leblond n'était pas le sol qui s'étendait, au matin de chaque jour, devant lui et sur lequel il marchait. Elle ne se découvrait plus comme une étendue qu'on domine mais comme une substance pâteuse, tantôt active, tantôt souffrante, intime quoique impersonnelle, dans laquelle on s'abrite avant de se fondre.
Soldat ou terrassier, mais homme, Max Leblond l'avait abordée à la pelle et à la pioche. Il avait perpétré cet inceste et la guerre l'avait ramené à ce sein et à ce ventre, pour s'y enfouir.
Entre ces lèvres, encore une fois réceptrices avant d'être parturientes, il avait connu dans l'obscurité de la nuit la souveraine indifférence de ceux qui sont parvenus au port qu'ils avaient depuis si longtemps quitté. Et il avait accepté de penser que sa chair était faite de cette matière qui était aussi celle du monde. Il était juste que le flot rouge teinté de ce pigment de fer à elle emprunté lui retournât.

Auteur: Chauviré Jacques

Info: La Terre et la Guerre

[ conflit ] [ littérature ]

 

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vingtième siècle

On a tendance à oublier à quoi ressemblaient vraiment les années soixante-dix. On se souvient des cols pelle à tarte et du glam rock, on évoque, avec des larmes dans les voix, les Monty Python et les émissions pour enfants, mais on refoule toute la sinistre étrangeté de cette période, tous ces trucs bizarres qui se passaient tout le temps. On se rappelle le pouvoir qu'avaient les syndicats à l'époque, mais on oublie comment réagissaient les gens : tous ces tordus militaristes qui parlaient de mettre sur le pied des armées privées pour rétablir l'ordre et protéger la propriété quand la loi ne serait plus en mesure de le faire. On oublie l'arrivée des réfugiés indiens d'Ouganda à Heathrow en 1972, qui avait fait dire que Powell avait raison, à la fin des années soixante, de prophétiser un bain de sang ; on oublie à quel point sa rhétorique devait résonner pendant toute la décennie, jusqu'à cette remarque qu'un Eric Clapton ivre mort fit sur scène en 1976 au Birmingham Odeon. On oublie à l'époque, le National Front apparaissait comme une force avec laquelle il allait falloir compter.

Auteur: Coe Jonathan

Info: Bienvenue au club

 

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racines

C’était une chose de faire des recherches sur un sujet, une autre, ô combien différente, de l’avoir vécu. De l’avoir éprouvé. Comment expliquer à Marjorie que ce qu’il voulait capter avec son projet était la sensation du temps, l’impression d’être une part de quelque chose qui remontait si loin en arrière, qui était si désespérément vaste qu’il était facile d’oublier qu’elle, lui, chacun d’entre nous, en faisait partie – non pas isolément, mais fondamentalement.

Comment expliquer à Marjorie qu’il n’aurait pas dû être là ? Vivant. Libre. Que le fait qu’il soit né, ne soit pas enfermé dans la cellule d’une prison quelque part, n’était pas dû à un travail acharné ou à sa foi dans le Rêve Américain ; il n’était pas arrivé là à la force du poignet, mais par simple chance. Il avait seulement entendu raconter l’histoire de l’arrière-grand-père H par Ma Willie, mais ces histoires suffisaient à le faire pleurer et à l’emplir de fierté. On l’appelait H les Deux Pelles. Mais comment avait-on appelé son père et le père de son père avant lui ? Et les mères ? Ils avaient tous fait partie de leur temps et, en marchant dans Birmingham aujourd’hui, Marcus était une somme de ces époques. C’était là son sujet.

Auteur: Yaa Gyasi

Info: No home

[ filiation ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

double existence

Ce récit et la magie d'Internet permettent de nous familiariser avec quelques vies singulières. Celles de l'espagnol Francisco del Puerto au XVIe siècle en Uruguay. De James Morill (1824 - 1865) dans le queensland australien et celle, mieux documentée, du français Narcisse Pelletier en Australie vers 1890. Ces deux derniers, adolescents, furent sauvés ou épargné, avant d'être adoptés et intégrés durant un grand nombre d'année par deux tribus locales anthropophages avant de réintégrer la civilisation. Chacune de ces histoires mériterait de longs récits, par exemple pour conter comment Narcisse Pelletier fut récupéré de force et amené dans un poste militaire de l'extrême nord-est Australien (d'où il tenta de s'échapper) parce que la présence d'un blanc dans une tribu sauvage était insupportable à la représentation hiérarchique d'alors, celle des colonisateurs omniscients - nous. Ou comment ce même Pelletier termina sa vie comme gardien de phare, avec la houle, le fil de l'horizon et les embruns comme musique d'accompagnement à ses aller-et-retour mentaux... méditations insensées sur sa double vie. " Mourir de ne pas pouvoir penser à la fois ces deux mondes. Mourir de ne pas pouvoir être en même temps blanc et sauvage", selon la formule de François Garde dans le récit romancé qu'il a fait de la vie du vendéen.

Auteur: Mg

Info: avril 2014, à propos du livre, Ce qu'il advint du sauvage blanc

[ colonialisme ] [ aborigène ]

 

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malbouffe

Et les saucisses… On ne prêtait jamais attention aux produits qui entraient dans leur composition. Pourtant, pour les fabriquer, on utilisait toutes celles que l’Europe avait refusées et réexpédiées en Amérique : la chair blanchâtre et moisie était traitée avec du borax et de la glycérine, puis jetée dans les trémies et proposées sur le marché national. On y ajoutait également les rognures qui avaient traîné par terre dans la sciure et la saleté, qui avaient été piétinées par les ouvriers, souillées par leurs crachats infectés de milliards de bacilles de Koch. Sans parler des monceaux de viande, stockés en d’énormes tas dans des entrepôts dont les toits fuyaient et qui grouillaient de rats. […] Les patrons luttaient contre ce fléau avec du pain empoisonné. Tout partait dans les trémies : rats morts, pain et viande. […] Quand les ouvriers chargeaient à pleine pelle la viande dans les wagonnets, ils ne prenaient pas la peine d’éliminer les cadavres des rongeurs, même s’ils les voyaient. Pourquoi l’auraient-ils fait quand, dans la fabrication des saucisses, entraient certains ingrédients en comparaison desquels un rat empoisonné était un morceau de choix ? Ainsi, comme les hommes n’avaient aucun endroit où se laver les mains avant le déjeuner, ils avaient pris l’habitude de le faire dans l’eau destinée à la saucisse.

Auteur: Sinclair Upton Beall Jr.

Info: La jungle

[ charcuterie ] [ répugnante ] [ repoussante ]

 

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Ajouté à la BD par miguel