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immigration

Il se sentait le fils d'une France sous-alimentée, en proie aux maladies étrangères : pelade pâle des exils russes, acide urique anglais ; eczéma périodique de l'émigration italienne ; taches suspectes d'origine roumaine, colonies de furoncles américains; suppuration levantine, et autres germes pondus entre le cuir et la chair des nations. Avec plus de fatalisme que d'humeur, il considérait tous ces nouveaux venus se chauffant à son soleil provençal, écrémant son lait picard, déménageant ses meubles angevins, crevant les routes basques, coupant les cheveux des Gauloises en servitude, dépréciant sa monnaie et le traquant jusque dans son atelier qu'il était obligé de sous-louer meublé. Au fond, il ne leur en voulait que de déformer sa langue maternelle et de vider les dernières vraies bouteilles. Avec la plus vive curiosité, il observait cette aventure française, cette vivante anecdote absolument nouvelle dans l'histoire, d'un pays victime des agréments qu'il a su se créer et de la convoitise universelle. Il y avait bien eu des migrations de races, des confiscations politiques de nations, des anéantissements militaires, mais jamais ce spectacle d'un peuple disparaissant soudain dans son propre sol, comme par une trappe. "Von Cluck a réussi, se disait Daniel, Paris est bien cerné, et pris."

Il errait sur le trottoir comme une chèvre d'Hubert Robert dans les pierres d'une Rome ruineuse. Son article de demain aurait pour en-tête : Vœ Victoribus. Cela pourrait commencer ainsi : "Pourquoi dans une France anémiée, ne pas choisir des globules germaniques ou anglo-saxonnes, pleins de courage et d'honneur ? Pourquoi l'ignorance des pouvoirs publics laisse-t-elle de préférence verser aux veines de la patrie d'horribles mélanges latins, levantins ou nègres, en ouvrant aveuglément les frontières ?"

Auteur: Morand Paul

Info: L'Europe galante (1925, 250 p., Grasset, les cahiers rouges) p 224, 225, 226

[ métissage ] [ méfaits ] [ processus de destruction ] [ déclin ] [ mauvaise sélection ] [ prophétie ] [ effacement ] [ melting-pot ]

 

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indiscrétion séditieuse

Avoir une âme tendancieusement rebelle ; haïr convulsivement les injustices à l’œuvre sous le soleil ; trembler devant le souffle bestial de ses semblables ; être étranglé par le ricanement assassin de la créature et maudire la Création, solidification trop visible de l'idée d'injustice...

Et être empêché par un reste de philosophie et par les enseignements de l'expérience de faire quoi que ce soit, renoncer à l'acte de révolte, capituler dans l'inconsolation ou dans le dans le réconfort de la vacuité.

C'est là toute la contradiction entre la réaction spontanée de ton être et la pétrification qui résulte d'une réflexion désabusée. — Lucifer a été le moins philosophe d'entre tous les anges. Ses ailes n'ont pas connu l'éreintement d'un vol lucide ; ses connaissances n'ont pas épuisé sa fraîcheur, dont émane la naïveté sublime de n'importe quelle contestation. Un ange sans expérience, noble proie de quelque amertume qui n'est pas incurable. Car croire que l'on peut améliorer quelque chose, que la créature et la Création peuvent figurer dans un meilleur ordre, c'est ne connaître la temporalité que dans ce qu'elle a d'amer, et imaginer à son terme une issue qui ne serait pas illusoire. Ses camarades qui sont restés au sein du Tout-Puissant ce sont eux qui ont tout su, parce qu'ils ont connu la vanité de toute tentation : ce sont eux qui se reposent dans le doux sommeil de l'irréparable éternité, gouvernés par la chaleur à jamais insipide, mais sûre, de leurs ailes réactionnaires. Ils logent encore dans le vieux bien divin, qui est notre mal.

Renverser le monde, impossible ; l'accepter, encore moins. Ce conflit est la formule qui résume la vie terrestre, dont le caractère irréparable fait figure de seule solution.

Auteur: Cioran Emil Michel

Info: Divagations

[ dualité ] [ monothéisme ] [ connaissance interdite ] [ fruit défendu ] [ rebelle curiosité ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

éthologie

Que ces animaux dans leur état sauvage aiment, ainsi que beaucoup d'autres, la solitude pour se livrer paisiblement et sans risque d'être troublé, à l'acte régénérateur ! cela peut être ; mais c'est un goût qu'ils se passent aisément de satisfaire, et quand, privés, ils sont sous les yeux des hommes, ce goût ne l'emporte pas, et ce serait en vain qu'on chercheroit en eux les effets de la pudeur ! Eh ! quelle notion d'indécence trouveroient-ils donc à se reproduire ? Quelle seroit cette perfection ou cette exaltation de l'intelligence, qui leur feroit distinguer l'honnête du malhonnête dans un acte auquel les pousse la nature. Ah ! que l'homme civilisé, pour le maintien de ce que l'on appelle les moeurs publiques, pour multiplier les liens des familles, et ne point détruire les rapports sociaux, se soit fait des loix de pudeur, j'y consens ; mais que l'Eléphant soit plus scrupuleux que ne l'est le cheval, cet utile compagnon de nos travaux ; que ne l'est le taureau vigoureux qui, sous les yeux de l'innocente pastourelle, saille la vache qu'elle conduit ; que l'âne qui, dans le milieu des villes, offre à tous les regards les symptômes étonnans de sa passion qu'il assouvit ; que le chien qui, dans les rues, dispute à vingt rivaux la proie de son amour, et long-temps laisse apercevoir la preuve de son union ; que le coq qui, voltigeant de belle en belle, chante à chaque fois sa victoire, sans que les crêtes de ses poulettes acquièrent un rouge plus foncé ; que la simple et timide colombe qui roucoule tout haut ses amour et bat des ailes en signe du plaisir qu'elle a de se reproduire... ; cela paroît une erreur. 

Auteur: Houël Jean-Pierre

Info: A propos de la prétendue pudeur des éléphants - in "Histoire naturelle des deux éléphants mâle et femelle du muséum de Paris", p. 106-107 - disponible sur Gallica

[ moralité ] [ zoologie ] [ sexualité ] [ homme-animal ] [ copulation ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

anti-psy

En face de la lucidité de Van Gogh, qui travaille, la psychiatrie n’est plus qu’un réduit de gorilles eux-mêmes obsédés et persécutés et qui n’ont, pour pallier les plus épouvantables états de l’angoisse et de la suffocation humaines, qu’une ridicule terminologie, digne produit de leurs cerveaux tarés.
Pas un psychiatre, en effet, qui ne soit un érotomane notoire. Et je ne crois pas que la règle de l’érotomanie invétérée des psychiatres puisse souffrir aucune exception. J’en connais un qui se rebella, il y a quelques années, à l’idée de me voir ainsi accuser en bloc tout le groupe de hautes crapules et de faiseurs patentés auquel il appartient. Moi, monsieur Artaud, me dit-il, je ne suis pas un érotomane, et je vous défie bien de me montrer un seul des éléments sur lesquels vous vous basez pour porter votre accusation.
Je n’ai qu’à vous montrer vous-même, docteur L., comme élément, vous en portez sur votre gueule le stigmate, bougre d’ignoble saligaud.
C’est la binette de qui introduit sa proie sexuelle sous la langue et la retourne ensuite en amande, pour faire digue d’une certaine façon.
Cela s’appelle faire son beurre et trier son propre persil.
Si dans le coït vous n’avez pas obtenu de glousser de la glotte d’une certaine façon que vous connaissez, et de gargouiller en même temps du pharynx, de l’oesophage, de l’urètre et de l’anus, vous ne pouvez pas vous déclarer satisfait.

(Lacan, chef de clinique à Sainte-Anne en 1939, avait fait une expertise extrêmement sévère d'Antonin Artaud écrivant, "il est définitivement fixé et perdu pour la littérature". De plus, des années plus tard, après la guerre, Lacan se disait satisfait d'avoir détourné ses élèves d'Antonin Artaud.
Il semble avéré que cette partie du texte fasse rapport à cette expertise)

Auteur: Artaud Antonin

Info: Van Gogh, le suicidé de la société 1947, introduction

[ transfert meurtrier ] [ vacherie ] [ insulte ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

désenchantement général

La lente annulation de l'avenir s'est accompagnée d'une déflation des attentes. Rares sont ceux qui croient qu'au cours de l'année à venir sortira un disque aussi génial que, par exemple, Funhouse des Stooges ou There's A Riot Goin' On de Sly Stone. On s'attend encore moins à des ruptures comme celles provoquées par les Beatles ou le disco. Le sentiment d'être en retard, de vivre après la ruée vers l'or, est aussi omniprésent qu'il est désavoué. Comparez le terrain en friche de l'époque actuelle avec la fécondité des périodes précédentes et vous serez rapidement accusé de "nostalgie". Mais la dépendance des artistes actuels à l'égard de styles établis il y a longtemps suggère que le moment actuel est en proie à une nostalgie formelle, dont nous reparlerons bientôt.

Ce n'est pas que rien ne se soit passé pendant la période où la lente annulation de l'avenir s'est installée. Au contraire, ces trente années ont été une période de changements massifs et traumatisants. Au Royaume-Uni, l'élection de Margaret Thatcher avait mis fin aux compromis difficiles du soi-disant consensus social de l'après-guerre. Le programme politique néolibéral de Thatcher a été renforcé par une restructuration transnationale de l'économie capitaliste. Le passage à ce qu'on appelle le post-fordisme - avec la mondialisation, l'informatisation omniprésente et la précarisation du travail - a entraîné une transformation complète de l'organisation du travail et des loisirs. Dans le même temps, au cours des dix à quinze dernières années, l'internet et la technologie des télécommunications mobiles ont modifié la texture de l'expérience quotidienne au-delà de toute reconnaissance. Pourtant, peut-être à cause de tout cela, on a de plus en plus l'impression que la culture a perdu la capacité de saisir et d'articuler le présent. Ou peut-être que, dans un sens très important, il n'y a plus de présent à saisir et à articuler.


Auteur: Fisher Mark

Info: Ghosts of My Life: Writings on Depression, Hauntology and Lost Futures

[ pop-culture ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

néologisme

Il y a un champ de FLP qui a posé problème. Celui de certaines manifestations récurrentes qui nous dépassent (pour l'instant).

Dans le cadre des observations humaines, en général scientifiques, émergent des constats, certaines proportions, ou formes ou nombres... reviennent, souvent à diverses échelles - c'est étonnant. Des phénomènes (des lois ?) qui semblent immuables. Le nombre d'or (1,618) vient à l'esprit ici. Ou le septénaire.

Ou cet exemple concernant les requins, race demeurée stable depuis plus de 100 millions d'années. Il semble établi que les requins ont pu se maintenir grâce à une magnifique adéquation avec le biotope qui serait due principalement à leur furtivité (leur proies se font surprendre). Mais on a aussi pu montrer que ce qui est "resté" le plus longtemps, ce qui semble avoir stabilisé et assuré la pérennité de cette forme "requin" dans son ADN (un ADN sans cesse changeant au cours des âges), est une petite fonction de maintien de l'ordre. Une fonction "flic", demeurée identique sur des dizaines de millions d'années. Maintien de l'ordre à une échelle éonique, ou projection du point de vue humain ?

Donc, pour ce champ que FLP s’essaye à préciser, qui serait celui d'un ordre supérieur que les hommes constatent et décrivent dans certaines manifestations du réel, nous avons choisi le terme/catégorie/tag de "méta-moteur".

Pour mieux caractériser ce concept on utilisera aussi des mots-tags comme : guidage, pilotage, ordre, invariant, lamanage, loi de la nature, archétype... Cependant "Méta-moteur" reste notre préféré...

En décidant ceci on peut presque parler de la création d'un signe (au sens de C.S. Peirce) qui permet d'isoler un concept. Ce qui permettra peut-être de préciser et d'approfondir certaines formes d'organisation que nous pensons percevoir, sans en savoir plus. Elle se se dévoileront éventuellement mieux avec le temps. Tout ceci étant probablement du à notre "jeunesse" intrinsèque et aux niveaux/échelles à partir desquels ces manifestations sont discernables.

Un peu comme si nous vivions dans un film en 3D et qu'il s'agirait de comprendre un peu mieux les mécanismes du projecteur ou, encore plus fou, le (ou les) projectionniste(s), pour reprendre l'idée de Vallée.

Auteur: Mg

Info: 14 sept. 2015

[ organisation ] [ quête ] [ horizon ] [ conservation ] [ mémoire ] [ citation s'appliquant à ce logiciel ] [ pérennisation ]

 
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question

"Hélas ! Qu’est-ce donc que le bien et le mal ! Est-ce une même chose par laquelle nous témoignons avec rage notre impuissance, et la passion d’atteindre à l’infini par les moyens même les plus insensés ? Ou bien sont-ce deux choses différentes ? Oui… que ce soit plutôt une même chose… car sinon que deviendrais-je au jour du jugement ! Adolescent, pardonne-moi ; c’est celui qui est devant ta figure noble et sacrée, qui a brisé tes os et déchiré les chairs qui pendent à différents endroits de ton corps. Est-ce un délire de ma raison malade, est-ce un instinct secret qui ne dépend pas de mes raisonnements, pareil à celui de l’aigle déchirant sa proie, qui m’a poussé à commettre ce crime ; et pourtant, autant que ma victime, je souffrais ! Adolescent, pardonne-moi. Une fois sorti de cette vie passagère, je veux que nous soyons entrelacés pendant l’éternité ; ne former qu’un seul être, ma bouche collée à ta bouche. Même, de cette manière, ma punition ne sera pas complète. Alors, tu me déchireras, sans jamais t’arrêter, avec les dents et les ongles à la fois. Je parerai mon corps de guirlandes embaumées, pour cet holocauste expiatoire ; et nous souffrirons tous les deux, moi, d’être déchiré, toi, de me déchirer… ma bouche collée à ta bouche. O adolescent, aux cheveux blonds, aux yeux si doux, feras-tu ce que je te conseille ? Malgré toi, je veux que tu le fasses, et tu rendras heureuse ma conscience." Après avoir parlé ainsi, en même temps tu auras fait le mal à un être humain, et tu seras aimé du même être : c’est le bonheur le plus grand qu’on puisse concevoir. Plus tard, tu pourras le mettre à l’hôpital ; car le perclus ne pourra pas gagner sa vie. On t’appellera bon, et les couronnes de laurier et les médailles d’or cacheront tes pieds nus, épars sur la grande tombe, à la vieille figure. O toi dont je ne veux pas écrire le nom sur cette page qui consacre la sainteté du crime, je sais que ton pardon fut immense comme l’univers. Mais, moi, j’existe encore !

Auteur: Lautréamont Isidore Ducasse

Info: Oeuvres complètes - Les chants de Maldoror, Poésies I et II

[ soliloque ] [ moi gémellaire ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

relations amoureuses

Sandeau, Musset, Chopin… A travers les aventures rocambolesques de sa vie et les couples transitoires qu’elle [George Sand] forme avec ses compagnons successifs dans les décors variés de l’Europe, c’est toujours la même odeur qui persiste, de clinique et de désinfectant. Un hôpital de campagne qu’elle traîne après elle de Venise à Paris et de Paris à Nohant puis encore de Nohant à Majorque… Un bloc opératoire mobile, maternel, bienveillant. Pour ses amants ectoplasmes, ses amis translucides et fluidiques, ses appendices mâles si peu phalliques de plus en plus efflorescents. Sandeau est extrêmement paresseux et à peu près dépourvu de talent, elle l’oblige à se mettre à son bureau, le nourrit quand il oublie de le faire, se fatigue vite de le tenir à bout de bras sur ce bord de son propre néant où il titube. Musset abuse de l’alcool, se montre souvent grossier et violent, s’effondre de temps en temps en proie à des espèces de crises nerveuses qu’elle regarde assez lucidement comme des affaires de possession. Inondé de sueur il se tord et hurle et croit voir des fantômes tomber sur lui. Intensité de l’exhibition du lien démoniaque derrière les jets déclamatifs de passion. "Est-ce que l’amour élevé et croyant est possible ? Est-ce qu’il faut que je meure sans l’avoir rencontré ? Toujours saisir des fantômes et poursuivre des ombres !" s’écrit George Sand qui sait très bien qu’elle va de spectre en spectre quand elle dit chercher l’amour… Elle est frigide, raconte-t-on parfois ? Mais non, bien sûr, pas plus que n’importe qui. Et puis d’ailleurs, comment pourrait-elle "jouir" puisqu’elle n’a à sa disposition dans son lit que des ombres, fatalement ? Au fond ses amants de passage me semblent des incarnations assez modernes de l’espèce masculine, ils ne seraient pas déplacés aujourd’hui. Les bouclettes de Sandeau l’incapable, la vulgarité éthérée de Musset, le retrait digne et silencieux de Chopin derrière sa toux de Dame aux camélias… Le gâtisme final de son mari qui, à la veille de mourir, en 1869, écrit à Napoléon III pour lui demander la Légion d’honneur non pas en tant qu’ancien officier mais parce qu’il a été l’époux de Sand et qu’elle l’a fait cruellement souffrir…

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "Le 19e siècle à travers les âges", page 606, à propos de George Sand

[ déceptions ] [ littérature ] [ femme-hommes ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

volatiles

Cela fait plus de quarante ans que j'observe les oiseaux et j'ai toujours du mal à expliquer la fascination qu'ils exercent sur moi. Parmi les raisons de cette fascination, je citerais leur immense variété, leur extrême beauté et leurs comportements étonnants. Ainsi, leur capacité à parcourir le monde entier au cours de la migration et à s'adapter à tous les milieux, y compris les déserts arides, le grand large ou même la calotte glaciaire de l'Antarctique excite l'imagination.

Il n'est heureusement pas nécessaire de séjourner dans ces contrées éloignées pour observer quelques-uns de ces oiseaux si remarquables. La première hirondelle du printemps a survécu au long voyage aller et retour d'Europe en Afrique australe. Les bécasseaux qui se rassemblent en automne sur nos estuaires ont survolé le cercle polaire et, seul sur une falaise au printemps, le traquet motteux est peut-être en train de faire escale entre ses quartiers d'hiver au sud du Sahara et son aire de nidification au Groenland.

Les oiseaux de nos jardins sont eux aussi source d'inspiration : la grive musicienne cassant la coquille d'un escargot sur le chemin du verger, le rouge-gorge défendant avec acharnement son territoire, l'hirondelle construisant son nid de boue sous la gouttière et le superbe épervier, qui a échappé aux dégâts causés par l'utilisation des pesticides agricoles, engageant jusque dans nos jardins, avec une étonnante agilité, sa chasse aux petits oiseaux.

Le monde moderne nous isole de plus en plus de la nature, mais les oiseaux restent un lien avec la vie sauvage et, un peu comme le canari emporté au fond de la mine, ils nous renseignent sur l'état de santé de notre planète.

Après la Seconde Guerre mondiale, c'est le déclin dramatique du nombre des oiseaux de proie qui alerta le public et lui lit prendre conscience des risques encourus du fait des pesticides répandus dans la nature ; plus récemment, les fluctuations des populations d oiseaux sur les terres cultivées ont permis de reconnaître les effets sur l'environnement des nouvelles méthodes agricoles.

Mais la meilleure raison que l'on peut trouver pour observer les oiseaux reste le plaisir que l'on y prend. Il v a partout des oiseaux et ce plaisir est donc tout proche, quel que soit le heu où nous vivons. C'est un violon d'Ingres sans limites : il peut intéresser les jeunes comme les "plus très jeunes" et durer toute une vie.

Auteur: Holden Peter

Info: Voir les oiseaux, pourquoi observer les oiseaux

[ éthologie ] [ contemplation ]

 

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art religieux

Le genre français, c’est un Jésus glorieux, en robe de brocart pourpré, entr’ouvrant, avec une céleste modestie, son sein, et dévoilant, du bout des doigts, à une visitandine enfarinée d’extase, un énorme cœur d’or couronné d’épines et rutilant comme une cuirasse.

C’est encore le même Jésus plastronné, déployant ses bras pour l’hypothétique embrassement de la multitude inattentive ; c’est l’éternelle Vierge sébacée, en proie à la même recette de désolation séculaire, tenant sur ses genoux, non seulement la tête, mais le corps entier d’un minable Fils, décloué suivant de cagneuses formules. Puis, les innumérables Immaculées Conceptions de Lourdes, en premières communiantes azurées d’un large ruban, offrant au ciel, à mains jointes, l’indubitable innocence de leur émail et de leur carmin.

Enfin, la tourbe polychrôme des subalternes élus : les saints Joseph, nourriciers et frisés, généralement vêtus d’un tartan rayé de bavures de limaces, offrant une fleur de pomme de terre à un poupon bénisseur ; les saints Vincent de Paul en réglisse, ramassant, avec une allégresse réfrénée, de petits monstres en stéarine, pleins de gratitude ; les saints Louis de France ingénus, porteurs de couronnes d’épines sur de petits coussins en peluche ; les saints Louis de Gonzague, chérubinement agenouillés et cirés avec le plus grand soin, les mains croisées sur le virginal surplis, la bouche en cul de poule et les yeux noyés ; les saints François d’Assise, glauques ou céruléens, à force d’amour et de continence, dans le pain d’épice de leur pauvreté ; saint Pierre avec ses clefs, saint Paul avec son glaive, sainte Marie-Madeleine avec sa tête de mort, saint Jean-Baptiste avec son petit mouton, les martyrs palmés, les confesseurs mitrés, les vierges fleuries, les papes aux doigts spatulés d’infaillibles bénédictions, et l’infinie cohue des pompiers de chemins de croix.

Tout cela conditionné et tarifé sagement, confortablement, commercialement, économiquement. Riches ou pauvres, toutes les paroisses peuvent s’approvisionner de pieux simulacres en ces bazars, où se perpétue, pour le chaste assouvissement de l’œil des fidèles, l’indéracinable tradition raphaélique. Ces purgatives images dérivent, en effet, de la grande infusion détersive des madonistes ultramontains. Les avilisseurs italiens du grand Art mystique furent les incontestables ancêtres de ce crépi. Qu’ils eussent ou non le talent divin qu’on a si jobardement exalté sur les lyres de la rengaine, ils n’en furent pas moins les matelassiers du lit de prostitution où le paganisme fornicateur vint dépuceler la Beauté chrétienne. Et voilà leur progéniture !

Auteur: Bloy Léon

Info: Dans "Le Désespéré", Livre de poche, 1962, pages 229-230

[ critique ] [ description dégoûtée ] [ christianisme édulcoré ]

 

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