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excrément

Vous êtes bien heureuse d'aller chier quand vous voulez; chiez donc tout votre chien de soûl...
(Alors que sa correspondante a entière liberté, la Palatine est "obligée de garder son étron pour le soir". La raison ? Elle habite une maison sans lieux d'aisance, ce qui l'oblige à faire la chose dehors.)
Cela me fâche, parce que j'aime à chier à mon aise, et je ne chie pas à mon aise quand mon cul ne porte sur rien.
Je voudrais que celui qui a le premier inventé de chier, ne pût chier, lui et toute sa race, qu'à coups de bâton. Comment, mordi! Qu'il faille qu'on ne puisse vivre sans chier? Soyez à table avec la meilleure compagnie du monde, qu'il vous prenne envie de chier, il vous faut aller chier. Soyez avec une jolie fille, une femme qui vous plaise ; qu'il vous prenne envie de chier, il faut aller chier ou crever. Ah! maudit chier, je ne sache point de plus vilaine chose que de chier.
(...)
Voyez passer une jolie personne, bien mignonne, bien propre, vous vous récriez: ah! que cela serait joli si cela ne chiait pas! Je le pardonne à des crocheteurs, à des soldats aux gardes, à des porteurs de chaises et à des gens de ce calibre-là. Mais les empereurs chient, les impératrices chient, le pape chie, les cardinaux chient, les princes chient, les archevêques et les évêques chient, les généraux d'ordres chient, les curés et les vicaires chient. Avouez donc que le monde est rempli de vilaines gens, car enfin, on chie en l'air, on chie sur la terre, on chie dans la mer, tout l'univers est rempli de chieurs et les rues de Fontainebleau de merde, car ils font des étrons gros comme vous, madame.
La conséquence est terrible. Vous pensez "baiser une belle petite bouche avec des dents bien blanches"? Erreur! En réalité, "vous baisez un moulin à merde".

Auteur: Bavière Charlotte-Elisabeth de

Info: 9 octobre 1694, lettre à sa tante, l'Electrice de Hanovre

[ vulgarité ] [ fiente ] [ grossièreté ]

 

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subversion

Ce que les gnostiques avaient fait au judaïsme d’abord, au christianisme ensuite, les Beatles, à travers leur pop music, pleine et légère, complexe de toute la culture européenne et simple comme un enfant qui danse, l’avaient fait au rock. "Nous avons combattu la loi, écrit John Lennon en 1978 dans son livre Éclats de ciel écrits par ouï-dire, et la loi a perdu."

Ce n’est pas en rejetant la loi qu’on s’extrait de son emprise, mais en la pervertissant, en la métissant et en l’épissant. Les gnostiques furent d’abord de grands parodistes, insistant sur le ratage de la Création et l’imbécillité congénitale du dieu à l’origine de notre monde. L’auteur du Deuxième Traité du grand Seth est formel : "Et une voix, celle du Cosmocrator, s’éleva alors vers les anges : “Je suis Dieu et il n’y en a pas d’autre que moi.” Mais je me mis à rire gaiement à la vue de sa vanité." Ce que comprirent les gnostiques, c’est que, pour se dépêtrer d’une fiction totalisante, il faut accumuler les fictions singulières, dissipatrices, noyautées par le vide qui les fonde, le secret qu’elles révèlent (Dieu n’existe pas, moi non plus, donc je suis Dieu et tout est possible) et autour duquel elles tournent. C’est même la seule condition de la liberté et le seul athéisme qui sache rire. "Leur “simplicité” consiste à vrai dire dans le rejet total de la discipline" (Tertullien).

La gnose n’a jamais créé d’ordres du monde que pour les contraindre à se révéler ultérieurement comme des absurdités grotesques et terribles, ce qui fit de ses praticiens les cibles systématiques de tous les pouvoirs organisés. "Il me semble, écrit encore Lennon dans Éclats de ciel écrits par ouï-dire, que les seuls chrétiens dignes de ce nom étaient (sont ?) les gnostiques, qui croient en la connaissance de soi, c’est-à-dire en la nécessité de devenir des Christ, de trouver le Christ qui est en soi."

Auteur: Thiellement Pacôme

Info: Pop yoga

[ ouverture ] [ indépendance ] [ citation s'appliquant à ce logiciel ]

 

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église

Si tu veux, c’est là le trait fondamental du catholicisme romain, à mon avis du moins : "Tout a été confié par Toi au pape, et tout est donc maintenant entre les mains du pape, quant à Toi, Tu peux ne plus venir du tout, ne nous dérange pas, du moins pas avant l’heure". C’est dans ce sens que non seulement ils parlent mais même qu’ils écrivent, les jésuites du moins. Je l’ai lu moi-même chez leurs théologiens. "As-Tu le droit de nous révéler ne fût-ce qu’un seul des mystères du monde d’où Tu viens ?" lui demande mon vieillard, et il répond lui-même à Sa place : "Non, Tu ne l’as pas, pour ne rien ajouter à ce qui a déjà été dit et pour ne pas enlever aux hommes la liberté à laquelle Tu tenais tant quand Tu étais sur terre. Tout ce que Tu annoncerais encore porterait atteinte à la liberté de foi des hommes, car cela apparaîtrait comme un miracle ; or, il y a déjà quinze cent ans, Tu plaçais au-dessus de tout la liberté de leur foi. N’est-ce pas Toi qui disais si souvent alors : "Je veux vous rendre libres". Or, Tu les as vus maintenant, ces hommes "libres", ajoute soudain le vieillard avec un sourire méditatif. Oui, cette tâche-là nous a coûté cher, continue-t-il en Le regardant sévèrement, mais nous en sommes enfin venus à bout, en Ton nom. Pendant quinze siècles, nous avons peiné avec cette liberté, mais maintenant tout est fait et solidement fait. Tu ne crois pas que ce soit solidement fait ? Tu me regardes avec douceur et Tu ne me fais même pas l’honneur de Ton indignation ? Mais sache qu’à présent, et précisément aujourd’hui, ces hommes sont plus persuadés que jamais d’être entièrement libres, et cependant ce sont eux qui nous ont apporté leur liberté et qui l’ont docilement déposée à nos pieds. Mais c’est notre œuvre à nous, et Toi, est-ce cela que Tu souhaitais, est-ce cette liberté-là ?"

Auteur: Dostoïevski Fédor Mikhaïlovitch

Info: Le Grand Inquisiteur s'adresse au Christ, dans "Les Frères Karamazov", volume 1, traduction d'Elisabeth Guertik, le Cercle du bibliophile, page 322

[ fixation du dogme ] [ messie entropique ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

ambivalence

Elle n'est pas heureuse, la vie, à Raïssa. Dans les rues, les gens marchent en se tordant les mains, disputent les enfants qui pleurent, s'appuient aux parapets des fleuves en prenant leurs tempes entre leurs mains ; le matin, ils émergent d'un mauvais rêve et en commencent un autre. Dans les ateliers où à chaque instant on se tape à coups de marteau sur les doigts et se pique avec une aiguille, sur les colonnades de chiffres tordus des registres de négociants et de banquiers, devant les verres vides rangés sur le zinc des bistrots, c'est un moindre mal quand les têtes se penchent en t'épargnant des regards torves. Dans les maisons, c'est pire, et il n'est pas nécessaire d'y entrer pour le savoir : l'été, les fenêtres retentissent de disputes et de bris de vaisselle. Et pourtant, à Raïssa, à tout moment, un enfant rit à sa fenêtre, en voyant un chien sauter sur un auvent pour mordre dans le morceau de polenta qu'un maçon à lâché du haut d'un échafaudage, en s'exclamant : "Mon trésor, laisse-moi plonger !" à l'adresse d'une jeune hôtelière qui soulève un plat de ragoût sous sa pergola, contente de le servir au marchand de parapluies qui fête une bonne affaire, l'ombrelle de dentelle blanche avec quoi  va se pavaner aux courses une grande dame amoureuse d'un officier qui lui a souri alors qu'il sautait la dernière haie, heureux lui-même mais plus heureux encore son cheval qui volait par-dessus les obstacles voyant voler dans le ciel un francolin, heureux oiseau libéré de sa cage par un peintre heureux de l'avoir peint plume à plume, tacheté de rouge et de jaune, dans une miniature, à cette page du livre où le philosophe dit : "Même à Raïssa, ville triste, court un fil invisible qui par instants réunit un être vivant à un autre et se défait, puis revient se tendre entre des points en mouvement, dessinant de nouvelles figures rapides, si bien qu'à chaque seconde la ville malheureuse contient une ville heureuse sans même qu'elle le sache."

Auteur: Calvino Italo

Info: Villes invisibles

[ cité imaginaire ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

déprise de soi

Bien qu'aujourd'hui on semble l'ignorer, la formation de la faculté d'attention est le but véritable et presque l'unique intérêt des études. La plupart des exercices scolaires ont aussi un certain intérêt intrinsèque ; mais cet intérêt est secondaire. Tous les exercices qui font vraiment appel au pouvoir d'attention sont intéressants au même titre et presque également.

Les lycéens, les étudiants qui aiment Dieu ne devraient jamais dire : "Moi, j'aime les mathématiques", "Moi, j'aime le français", "Moi, j'aime le grec". Ils doivent apprendre à aimer tout cela parce que tout cela fait croître cette attention, qui, orientée vers Dieu, est la substance même de la prière.

N'avoir ni don ni goût naturel pour la géométrie n'empêche pas la recherche d'un problème ou l'étude d'une démonstration de développer l'attention. C'est presque le contraire. C'est presque une circonstance favorable.

Même il importe peu qu'on réussisse à trouver la solution ou à saisir la démonstration, quoiqu'il faille vraiment s'efforcer d'y réussir. Jamais, en aucun cas, aucun effort d'attention véritable n'est perdu. Toujours il est pleinement efficace spirituellement, et par suite aussi, par surcroît, sur le plan inférieur de l'intelligence, car toute lumière spirituelle éclaire l'intelligence.

Si on cherche avec une véritable attention la solution d'un problème de géométrie et si, au bout d'une heure, on n'est pas plus avancé qu'en commençant, on a néanmoins avancé, durant chaque minute de cette heure, dans une autre dimension plus mystérieuse. Sans qu'on le sente, sans qu'on le sache, cet effort en apparence stérile et sans fruit a mis plus de lumière dans l'âme. Le fruit se retrouvera un jour, plus tard, dans la prière. Il se retrouvera sans doute aussi par surcroît dans un domaine quelconque de l'intelligence, peut-être tout à fait étranger à la mathématique. Peut-être un jour celui qui a donné cet effort inefficace sera-t-il capable de saisir plus directement, à cause de cet effort, la beauté d'un vers de Racine. Mais que le fruit de cet effort doive se retrouver dans la prière, cela est certain, cela ne fait aucun doute.

Auteur: Weil Simone

Info: "Attente de Dieu"

[ persévérance ] [ gratuité ] [ karma yoga ] [ travail ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

grand-maman

Il s'agenouille face à elle, pour qu'elle le voie. Mais elle somnole. Alors il la regarde. La peau fine comme du papier à cigarette. Les bleus. Les petites croûtes sur le crâne aux cheveux épars, le cou cassé, le buste attaché au fauteuil par un drap, la bave qui s'échappe lentement de sa bouche ouverte. Grand-mère, c'est moi, il le dit tout bas d'abord, en caressant doucement son bras maigre et qui n'est plus que rides. C'est moi, Joseph. Elle ouvre les yeux et le regarde sans comprendre, elle ne le reconnaît pas, et il répète, Bonjour grand-mère, ça va grand-mère ? pour qu'elle sache qui elle est, qui elle est pour lui, et il lui dit, Ça fait longtemps, hein, ça fait longtemps qu'on s'est pas vus ? Elle sourit en hochant la tête, et d'une voix lointaine, une voix à peine elle dit, Oh oui, comme ça, sans étonnement ni chagrin, et sa main se pose sur la sienne, alors Joseph y pose l'autre main, et elle son autre main, et ainsi leurs quatre mains sont superposées, bien ensemble, et elle dit de sa voix minuscule, On est faits pour être ensemble. Alors il lui demande doucement, Tu sais qui je suis ?. Elle sourit sans répondre, mais son sourire se crispe un peu, il la tourmente avec sa question, mais il ne peut s'empêcher de la lui poser encore, Tu sais qui je suis ?. Elle le regarde droit dans les yeux et chante de son filet de voix, J'ai descendu dans mon jardin j'ai descendu dans mon jardin, pour y cueillir du romarin, et elle sourit de bonheur, et puis elle est fatiguée soudain, elle ferme de nouveau les yeux, et sa tête retombe sur sa poitrine. Joseph pose son visage sur ses genoux, comme quand il était tout gosse, il sent son odeur de vieille femme mal lavée, mal nourrie, si seule. Il pense, Je suis Joseph Vasseur, le fils de Paul. Ce n'est pas grave si tu ne sais pas qui je suis, moi je sais qui tu es. Je sais qui tu es.

Auteur: Olmi Véronique

Info: Le Gosse, pp. 206-207

[ repère ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

manipulation

Combien il est louable à un prince de respecter ses promesses et de vivre avec intégrité, non dans les fourberies, chacun le conçoit clairement. Cependant, l'histoire de notre temps enseigne que seuls ont accompli de grandes choses les princes qui ont fait peu de cas de leur parole et su adroitement endormir la cervelle des gens ; en fin de compte ils ont triomphé des honnêtes et des loyaux. Sachez donc qu'il existe deux manières de combattre : l'une par les lois, l'autre par la force. L'une est propre aux hommes, l'autre appartient aux bêtes ; mais comme très souvent la première ne suffit point, il faut recourir à la seconde. C'est pourquoi il importe qu'un prince sache user adroitement de l'homme et de la bête. [...]
Si donc tu dois bien employer la bête, il te faut choisir le renard et le lion ; car le lion ne sait se défendre des lacets, ni le renard des loups. Tu seras renard pour connaître les pièges, et lion pour effrayer les loups. Ceux qui se bornent à vouloir être lions n'y entendent rien. C'est pourquoi un seigneur avisé ne peut, ne doit respecter sa parole si ce respect se retourne contre lui et que les motifs de sa promesse soient éteints. Si les hommes étaient tous gens de bien, mon précepte serait condamnable ; mais comme ce sont tous de tristes sires et qu'ils n'observeraient par leurs propres promesses, tu n'as pas non plus à observer les tiennes. Et jamais un prince n'a manqué de raisons légitimes pour colorer son manque de foi. On pourrait alléguer des exemples innombrables dans le temps présent, montrer combien de traités, combien d'engagements sont partis en fumée par la déloyauté des princes ; et celui qui a su le mieux user du renard en a tiré les plus grands avantages. Toutefois, il est bon de déguiser adroitement ce caractère, d'être parfait simulateur et dissimulateur. Et les hommes ont tant de simplesse, ils se plient si servilement aux nécessités du moment que le trompeur trouvera toujours quelqu'un qui se laisse tromper.

Auteur: Machiavel Nicolas

Info: Le Prince p.91-93

[ pouvoir ]

 

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pensée-de-femme

C'est dur, mais y a pas d'os dedans. Ça bouge tout seul, mais ça n'a pas de muscles. C'est doux et touchant quand ça a fini de jouer, arrogant et obstiné quand ça veux jouer. C'est fragile et capricieux, ça n'obéit pas à son maître, c'est d'une susceptibilité maladive, ça fait la grève sans qu'on sache pourquoi, ça refuse tout service ou ça impose les travaux forcés, ça tombe en panne quand le terrain est délicat et ça repart quand on n'en a plus besoin ; ça veut toujours jouer les durs alors que ça pend vers le sol pendant la majeure partie de son existence...

Il parait que nous aurions adoré avoir un truc comme ça. Il paraît que quand on n'en a pas, c'est bien simple, on n'a RIEN.

Et puis ce n'est pas fini : à côté du machin, il y a les machines. Et là c'est nettement pire... Où elles sont placées, pauvres minouchettes, on dirait deux crapauds malades tapis sous une branche trop frêle. C'est mou, c'est froid, ni vide ni plein ; ça n'a aucune tenue, peu de forme, une couleur malsaine, le contact sépulcral d'un animal cavernicole ; enfin c'est parsemé de poils rares et anémiques qui ressemblent aux derniers cheveux d'un chauve. Et il y en a deux !

...Disons le tout net : votre panoplie, mes chéris, même si vous ennoblissez la pièce maîtresse de phallus ne forme pas un ensemble extraordinaire... Et pourtant nous l'aimons, cette trinité, avec humour parce qu'elle est objectivement laide, avec amour parce qu'elle est subjectivement émouvante. Mais qu'on ne nous empoisonne plus avec cette prétendue envie de pénis, qu'on ne nous définisse plus, au physique et au moral, par rapport au pénis et qu'on nous soulage de tous ces psychanalystes et sexanalystes qui s'acharnent à réanimer nos vieux conflits au lieu de nous apprendre à nous aimer nous mêmes, ce qui est une condition essentielle pour aimer l'autre. Sinon, nous allons le prendre en grippe, l'objet, comme certaines ont commencé à le faire. Ce serait dommage pour tout le monde.

Auteur: Groult Benoîte

Info: Ainsi soit-elle

[ verge ] [ humour ]

 

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chair-esprit

Position de l'esprit au milieu de cette tactique Dans la Voie de la tactique l'esprit doit avoir la même position que dans la vie quotidienne. Dans la vie courante ou au moment d'appliquer la tactique rien ne doit changer. Conservez un esprit vaste, droit, sans trop de tension ni aucun relâchement, évitez qu'il soit unilatéral, maintenez-le au juste milieu, faites-le agir tranquillement de façon que cette agitation ne s'arrête même un seul instant: réfléchissez bien à tout cela. Même si le corps est en position tranquille l'esprit, lui, ne doit pas demeurer tranquille. Même si le corps agit très rapidement, l'esprit, quant à lui, ne doit pas du tout agir rapidement.
L'esprit ne suit pas le corps et le corps ne suit pas l'esprit. Prêtez attention à l'esprit mais ne prêtez pas attention au corps. N'ayez pas l'esprit étroit mais ne débordez pas d'esprit. Même si la surface de l'esprit est faible, le fond de l'esprit doit être fort. Rendez votre esprit indécelable par les autres. Tous ceux qui possèdent un corps petit doivent avoir en esprit tout ce qui se passe dans un corps grand; tous ceux qui possèdent un corps grand doivent avoir en esprit tout ce qui se passe dans un corps petit. Qu'il s'agisse d'un corps grand ou d'un corps petit on doit posséder un esprit droit et il est important de conserver un esprit dégagé de tout sentiment de faiblesse vis-à-vis de soi-même. Il faut maintenir sans tache et large notre esprit, en même temps que maintenir vaste notre sagesse. Il est essentiel de polir assidûment la sagesse et l'esprit. Pourvu que l'on polisse la sagesse, que l'on sache discerner les avantages et inconvénients du monde, que l'on connaisse le bon et le mauvais côté des choses, que l'on pénètre tous les arts ou toutes les Voies, que l'on ne puisse plus être trompé par aucun, alors notre esprit est apte à aborder la sagesse de la tactique. Quant à la sagesse de la tactique (duel ou bataille), elle est très différente des autres. Même au plus fort de la mêlée d'une bataille, il faut rechercher les vérités de la tactique et bien réfléchir afin d'atteindre l'esprit immobile.

Auteur: Musashi Miyamoto

Info: Traité des cinq roues : Gorin-no-sho

 

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langages

À Hambourg, où jamais elle ne prenait le train urbain sans avoir un auteur français avec elle, jamais Yuna ne serait posé la question de savoir pourquoi elle ne voulait pas apprendre le français. Cette vieille interrogation dont Yuna ne s'était jamais souciée se présenta à elle en gare de Bruxelles. Bruxelles, ce n'était pas le but de son trajet, ce n'était qu'un point d'interrogation sur le trajet. Elle avait une correspondance à y prendre et cette question à se poser : pourquoi n'ai-je pas voulu apprendre cette langue et pourquoi ne me suis-je jamais demandé à quoi cela tenait? Yuna regarda sa montre-bracelet comme si les chiffres du cadran pouvaient lui livrer réponse. Il restait encore du temps avant que n'arrive le train par lequel elle poursuivait son voyage jusqu'à Bordeaux. Elle alla dans un café à tables hautes de la gare et commanda un express. Elle s'y trouva environnée de voix parlant un français dont la mélodie lui sembla plus violemment étrangère que jamais. Fais attention! Quelque chose d'inconnu, peut-être même de dangereux, t'y attend. Cette mise en garde la secoua, son coeur battit plus nettement qu'auparavant, son sang circula plus vite, elle se mit à avoir chaud. Elle respira plus profondément, plus vite, se mit sans arrêt à changer de posture. Sa nervosité ressemblait à une sensation de bonheur. Peu après, un couple d'un certain âge se plaça près de Yuna, il parlait en néerlandais. Elle se sentit apaisée par la sonorité de cette langue qui lui donnait la sensation de ne pas être encore bien loin de chez elle. Bruxelles, est-ce loin ou près? Qui donc sait répondre à cette question embrouillée? Tour coeur est pris dans au moins un -sinon plusieurs- conflit de langues. Chaque tête contient une carte déformée de l'Europe. Sur la carte de Yuna, Bruxelles était partout sauf là où elle aurait dû se trouver. Il n'y avait qu'un trou. Un nom depuis longtemps oublié lui revint à l'esprit : Viviane. Au même instant, Yuna déchire si maladroitement le bâtonnet de sucre que de la poudre blanche se répandit sur le sol noir en ardoise. Elle essaya de balayer discrètement avec ses chaussures mais n'osa pas aller ensuite reprendre un sachet de sucre à la caisse. Le goût amer de l'express fit revenir Viviane, elle se tenait devant Yuna.

Auteur: Tawada Yoko

Info: Le voyage à Bordeaux

[ vieux continent ] [ idiomes ] [ sonorités ]

 
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