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annotations

Parfois, les notes sont féroces,

escarmouches contre l'auteur

qui font rage le long des bords des pages

en minuscules caractères noirs.

Si seulement je pouvais mettre la main sur vous,

Kierkegaard, ou Conor Cruise O'Brien,

semblent-elles dire,

je bloquerai la porte et vous ferais entrer la logique dans la tête.



D'autres commentaires sont plus désinvoltes, dédaigneux...

"C'est absurde." "Ben voyons !" "HA !!" -

ce genre de choses.

Je me souviens d'une fois où j'ai levé les yeux de ma lecture,

le pouce en guise de marque-page,

en essayant d'imaginer à quoi devait ressembler la personne

qui avait écrit "Ne sois pas si stupide"

en bordure d'un paragraphe de La vie d'Emily Dickinson.



Les étudiants sont plus modestes

et laissent de plus rares empreintes au hasard

des longs rivages de la page.

L'un d'eux griffonne "Métaphore" à côté d'une strophe d'Eliot.

Un autre inscrit juste "Ironie"

cinquante fois face aux paragraphes de A Modest Proposal



D'autres sont comme ces fans qui crient depuis les gradins vides,

mains autour de la bouche.

"Absolument", crient-ils

à Duns Scot et James Baldwin.

"Oui." "En plein dans le mille." "Tu es mon homme !"

Coches, astérisques et points d'exclamation

constellent les lignes de touche.



Et si vous avez réussi à obtenir votre diplôme universitaire

sans jamais avoir écrit "L'homme contre la nature"

dans une marge, peut-être est-il maintenant temps

de faire un pas en avant.



Nous nous sommes tous appropriés le périmètre blanc

et avons pris un stylo, ne serait-ce que pour montrer

que nous ne nous sommes pas contentés de paresser dans un fauteuil en tournant des pages ;

et avons laissé quelque remarque sur le bas côté,

planté une impression dans la bordure.



Même les moines irlandais en leurs scripts glaciaux

ont noté en bordure des évangiles 

de brèves remarques sur les difficultés de la copie,

le chant d'un oiseau près de leur fenêtre,

ou la lumière du soleil qui illuminait leur page -

ombres anonymes de passage dans le futur

sur un vaisseau plus durable qu'eux-mêmes.



Et tu n'as pas lu Joshua Reynolds,

disent-elles, avant que tu le découvres

intriqué dans le furieux gribouillage de Blake.



Pourtant, celle à laquelle je pense le plus souvent,

que je conserve comme un médaillon,

était inscrite dans l'exemplaire de l'Attrape-Coeurs

que j'avais emprunté à la bibliothèque locale

un été calme et chaud.

Je venais juste de commencer le lycée à l'époque,

je lisais sur un canapé du salon de mes parents,

et ne puis que difficilement avouer

à quel point ma solitude s'amplifia,

combien le monde s'est aggrandi

lorsque j'ai trouvé sur une page



quelques taches graisseuses

et à côté d'elles, écrit au crayon -

par une jolie fille, ça se devinait,

que jamais je ne rencontrerai -

Pardonnez les taches de salade aux oeufs, mais je suis amoureuse.


Auteur: Collins Billy William James

Info: Picnic, Lightning. Trad Mg

[ soulignages ] [ scolies ] [ réflexivité ] [ romantisme ] [ adolescence ]

 
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cognition

L'Étude d'une obscure tribu d'Amazonie jette un nouvel éclairage sur la façon dont le langage affecte la perception

En fin des années 30, le linguiste amateur Benjamin Lee Whorf posa la théorie que la langue peut déterminer la nature et la teneur de la pensée. Mais y a il des concepts dans une culture que les gens d'une autre culture ne peuvent pas simplement pas comprendre parce que leur langue n'a aucun mot pour elle ?

Personne n'a jamais répondu définitivement à cette question, mais les nouveaux résultats du Dr. Peter Gordon, scientifique bio-comportemental à Columbia University, vont vers une réponse positive.

Gordon a passé plusieurs années à étudier les Pirahã, une tribu isolée d'Amazonie comprenant moins de 200 personnes. Leur langue ne contient aucun mot pour les nombres au delà de "un", "deux" et "beaucoup." Même le mot Pirahã pour "un" semble se rapporter plutôt à "approximativement un" voire à "une petite quantité", par opposition à la connotation exacte du "un" dans les langues en général. Selon Gordon, ce que ces expériences montrent, c'est qu'avoir d’autres ressources linguistiques peut sculpter différemment la réalité.

Whorf indique que la langue divise le monde en différentes catégories. Il dit. "Qu'une langue choisisse de distinguer une chose contre une autres affecte la manière qu’ont les individu de percevoir la réalité." Quand Gordon donna aux gens de la tribu des tâches numériques dans lesquelles ils étaient invités à assortir de petits ensembles d'objets dans des configurations variables, les membres adultes répondirent avec précision jusqu'à deux ou trois articles, mais leur performance diminua une fois l'exercice passant de 8 à 10 articles, pour tomber à zéro avec de plus grands ensembles d'objets.

La seule exception à ce résultat fut lorsque les tâches impliquèrent des objets inégalement espacés. Ici, la performance des participants se détériora lorsque le nombre d'articles grimpa à 6 articles. Pourtant pour des ensembles de 7 à 10 objets, l'exécution était presque parfaite, alors que ces tâches étaient considérées comme plus difficiles. Gordon présume que l'espacement inégal permet aux sujets de percevoir les articles comme des parties "amas" de 2 ou 3 articles qu'ils peuvent ensuite assortir aux groupes correspondants.

Selon l'étude, l’exercice des Pirahã fut médiocre pour des tailles au-dessus de 2 ou 3, (qui n'étaient pas aléatoire). "Les participants Pirahã essayèrent réellement très dur d'obtenir les réponses correctes et ils avaient clairement compris les tâches" dit Gordon. Ces participants ont donc mis en évidence qu'ils utilisent des méthodes d'évaluation "par paquets" pour évaluer des quantités de plus grandes tailles. En moyenne, ils répondirent aux taches à peu près aussi bien que des étudiants d'université utilisant des estimations numérique bien plus complexes.

Leurs niveaux de compétence étant semblables à ceux d’enfants en bas âge (pré-linguistiques), à ceux des singes, d'oiseaux et de rongeurs, ceci semble se corréler avec les études récentes d'imagerie cérébrale qui montrent parfois une capacité différente de compétence numérique, différence qui apparaît être indépendante de la privation du langage.

De manière intéressante Gordon note que si les adultes Pirahã eurent des difficulté pour apprendre de grands nombres, leurs enfants non. Alors que les mots Pirahã pour "un" et "deux" ne se rapportent pas nécessairement à ces montants spécifiques. Gordon a également constaté que les membres de la tribu n'ont jamais l'habitude d'utiliser ces mots en association pour dénoter de plus grandes quantités. Dans l'étude, ils utilisèrent également leurs doigts en plus de leurs rapport verbaux de quantités, mais cette pratique s’avéra aussi fortement imprécise même pour les petits nombres de moins de cinq. La langue Pirahã n'a aucun mot pour "nombre," et les pronoms n'indiquent pas de quantité. "Lui" et "eux" sont le même mot. La plupart des quantificateurs standard comme "plus" "plusieurs" "tous" et "chacun" n'existent pas.

De manière générale, tout en utilisant une structure très complexe de verbes commune à beaucoup de langues américaines indigènes, la langue Pirahã ne tient pas compte de certains genres de constructions comparatives. Par exemple, il ne fut pas possible de demander aux participants si un groupe d'objets "avait plus de volume que l'autre" en raison du manque de cette construction grammaticale dans leur idiome. Cependant, le mot qu'ils emploient pour "beaucoup" - qui dans leur langue est dérivé d'un forme de la signification de verbe "rassembler" - est très distinct d'un mot qui signifie quelque chose comme "plus de".

Auteur: Fortean Times

Info: Les détails de cette étude paraîtront dans le journal Science du jeudi 19 août 2004. Source, Teachers College, Columbia University

[ idiomes ] [ sciences ] [ compter ] [ comptage ] [ termes quasi-esprit ]

 

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extraterrestres parmi nous

Comment reconnaître un non-terrestre

Les conditions ci-après ne sont ni nécessaires ni suffisantes car ces personnes sont capables de mimétisme, elles peuvent véritablement singer notre comportement.

Singer est le mot juste...

1°) Pas de gestes parasites.

La personne contrôle parfaitement son corps et n'a aucun mouvement, ni aucune expression faciale inutiles.

Ceci est maintenu aussi longtemps que nécessaire, et est opéré SANS EFFORT. Le corps biologique qu'ils utilisent n'est pas robotique, ce n'est pas lui qui prime sur les actions, il est majoritairement voire totalement intriqué avec la conscience de la Personne, contrairement à un humain terrestre standard dont on peut estimer ce pourcentage à moins de 1% .

Cette prise en contrôle par la conscience s'exerce sur TOUS les fonctionnements et dans TOUTES les parties de leur enveloppe biologique.

Un des moyens de déceler ce type de maîtrise est d'observer les mouvements des paupières et de ceux des yeux, très différents d'un humain standard, y compris d'un humain terrestre même spirituellement "avancé".

Si l'apparence peut s'avérer similaire, en réalité le corps biologique est intrinsèquement différent.

2°) Une aura et un champ d'énergie différents de l'humain terrestre standard.

Une aura deux à trois fois plus large que celle d'un humain terrestre est un indice. La hauteur également. Ensuite la distribution des fils colorés qui forment l'aura présente des caractéristiques différentes, par exemple beaucoup moins de rouge sombre, de marron, de vert "sale" dans la couronne cérébrale. Les filaments or, bleus vifs, vert pomme, violets vont constituer la trame essentielle de leur habit de lumière, les couleurs sont en général plus belles et les compositions sont nettement plus diversifiées.

(Par parenthèse, ceux qui ne voient pas l'aura imaginent souvent que c'est un patchwork de taches de couleurs, mais ces personnes là n'ont pas la moindre idée de la réalité)

Si vous ne VOYEZ PAS l'aura avec vos yeux, laissez tomber ce que vous pouvez supposer ou "ressentir". Ce que vous "ressentez" alors est le contact epsilon, énergétique, ce qui n'est absolument pas la même chose.

Le champ d'énergie en lui même des personnes non terrestres est parfois différent de celui des humains terrestres.

S'il est VIOLET ou s'il contient une forte proportion de rouge clair mêlé aux différentes nuances de bleu que l'on connaît ordinairement chez l'humain terrestre standard, il y a un bon indice.

Pour valider cet indice, vérifiez qu'il n'y ait pas un contexte orageux ou une présence de forts champ magnétiques, et comparez avec les humains terrestres présents au même endroit. S'ils sont plusieurs à avoir cette caractéristique et s'ils ont l'air d'être ensemble, vous avez une forte probabilité de vous trouver en présence d'un groupe de non-terrestres.

3°) Impact mental, présence.

Si l'humain terrestre à un mental d'un watt, celui d'une personne exogène sera EN GÉNÉRAL très supérieur: 10, 50, 200 watts.

Une des implications de ce mental surpuissant est de contrôler facilement celui d'une espèce inférieure : les humains terrestres.

Par exemple, une personne exogène va induire chez l'humain terrestre standard différentes choses possibles :

Une peur instinctive qui débordera TOUT son mental.

Une occultation de sa conscience pour une durée variable (missing time).

Un sentiment de sécurité voire de béatitude.

Une non-mémorisation transitoire: la personne voit tout et est pleinement consciente DANS L'INSTANT, mais l'empreinte mémorielle, neuronale, est empêchée.

Une seconde après, ce que cette personne a vécu n'a tout simplement jamais existé pour elle, car il y a zéro enregistrement.

LA PRESENCE:

Pour les plus perceptifs d'entre nous, c'est tout notre champ d'énergie et tout notre mental incarné qui détecte une présence étrangère. Nous sommes totalement CERTAINS que la personne qui est là n'est pas originaire de la planète terre.

Cependant, même les plus performants d'entre nous sont des handicapés à 100% par rapport à certains êtres exogènes.

En leur présence, et suite à leur rencontre, vous aurez une juste idée de ce que vous êtes comme humain terrestre : presque rien. Idem pour les différences entre VOUS ET LES AUTRES HUMAINS TERRESTRES: elles sont quasi nulles, dérisoires, ridicules.

Même si vous voyez parfaitement l'aura, le champ énergétique, même si vous êtes "télépathe", même si vous avez accès à la grande Mémoire, avoir été en leur présence vous montre ce que vous êtes réellement comme humain terrestre.

Et vous ne pourrez jamais plus faire le malin, plus jamais vous croire "supérieur" à un autre terrestre.

Ce n'est pas du tout une question d'humilité, mais seulement de lucidité en face de l'évidence.

Auteur: Auburn Marc

Info: Sur son fil FB, 7 novembre 2023

[ science-fiction ] [ ésotérisme ] [ paranormal ] [ divinités ] [ hiérarchie ] [ alien identification ]

 

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recombinaison latérale

Ce que nous savons sur la façon dont l'ADN passe d'une espèce à l'autre

Si vous avez les yeux de votre père ou les taches de rousseur de votre grand-mère, vous pouvez remercier les gènes transmis au sein de votre famille. Mais les chercheurs ont commencé à reconnaître qu’à un niveau biologique plus profond, un autre type d’héritage génétique se produit également. Les gènes peuvent glisser entre individus – ou même entre espèces – grâce à un processus connu sous le nom de transfert horizontal de gènes. Cela est peut-être loin d’être quotidien dans des organismes complexes comme les humains, mais sur une échelle de temps évolutive, cela pourrait se produire beaucoup plus souvent qu’on ne le pensait.

Les transferts horizontaux de gènes sont relativement courants dans le monde bactérien, où ils jouent un rôle important dans l’évolution et l’adaptation, ainsi que dans la propagation de la résistance aux antibiotiques. En fait, les biologistes évolutionnistes ont du mal à démêler certaines des premières branches de l’arbre de vie, car le nombre élevé de transferts horizontaux entre ces anciens organismes unicellulaires a si étroitement entrelacé les lignées. Les scientifiques savent également très peu de choses sur la façon dont ce processus pourrait avoir façonné de manière significative les génomes d’organismes complexes comme les plantes et les animaux.

Pendant de nombreuses années, les scientifiques qui soutenaient que des sauts horizontaux pouvaient se produire chez des espèces multicellulaires telles que les poissons ont été critiqués par leurs pairs. Une telle migration nécessite une chaîne d'événements improbables : un gène d'un individu doit d'une manière ou d'une autre pénétrer dans les cellules germinales qui produisent les spermatozoïdes ou les ovules d'un individu d'une autre espèce. De là, il doit pénétrer dans le noyau et pénétrer dans le génome de son nouvel hôte, qui doit ensuite produire une progéniture avec ces ovules ou spermatozoïdes pour transmettre ce génome modifié. Les moteurs importants de ce processus sont souvent les éléments génétiques appelés transposons, ou " gènes sauteurs ", qui peuvent se copier et se coller à différents endroits d’un génome, ou même d’un génome vers un autre. Parfois, ils semblent le faire en pénétrant dans le corps d'un nouvel hôte à l'intérieur d'un parasite ou d'un virus. C'est un parcours qui comporte de nombreuses étapes improbables, mais la biologie moléculaire suggère que ça existe.

Des études ont identifié des cas de transferts horizontaux chez un large éventail d’animaux, notamment des poissons, des grenouilles et des serpents. Pourtant, on ne sait pas exactement dans quelle mesure les organismes eucaryotes complexes partagent ainsi des gènes avec d’autres formes de vie. Les données recueillies jusqu'à présent suggèrent qu'il est plus probable que les gènes passent des bactéries aux eucaryotes que l'inverse : des expériences montrent que lorsque les gènes eucaryotes pénètrent dans les bactéries, celles-ci les éjectent le plus souvent.

Les biologistes ont fait de nombreuses découvertes surprenantes ces dernières années sur le mouvement des gènes entre les espèces.

Quoi de neuf et remarquable

En 2022, des chercheurs ont rapporté qu’un gène appelé BovB s’était déplacé indépendamment des serpents vers les grenouilles au moins 50 fois dans diverses parties de la planète. Bizarrement, ils ont constaté que cela se produisait beaucoup plus souvent à Madagascar qu’ailleurs. On ne sait pas pourquoi. Un facteur pourrait être le nombre élevé de parasites tels que les sangsues qui vivent sur l'île et se déplacent d'hôte en hôte, transportant des séquences d'ADN acquises dans le sang qu'elles ont bu. Les preuves d'anciens transferts de gènes horizontaux sont souvent brouillées avec le temps, mais les chercheurs espèrent désormais détecter les transferts sur le fait en examinant les organismes des sources chaudes du parc national de Yellowstone.

Le transfert horizontal de gènes semble également avoir joué un rôle dans la manière dont la vie marine autour des pôles a développé – ou plutôt emprunté – des défenses pour survivre au froid glacial. Les chercheurs ont pu montrer que les harengs et les éperlans, deux groupes de poissons qui ont divergé il y a plus de 250 millions d'années, utilisent le même gène pour fabriquer des protéines qui empêchent la croissance des cristaux de glace dans leur corps. Il a fallu des décennies pour convaincre les chercheurs que le gène devait être passé du hareng à l'éperlan. On ne sait pas exactement dans quelle mesure ce type de transfert horizontal se produit entre les cellules vertébrées, mais une étude a mis en évidence au moins 975 transferts entre 307 génomes de vertébrés, principalement chez les poissons à nageoires rayonnées.

Les transferts de gènes entre espèces concernent même les humains, ou plus particulièrement nos microbiomes, les puissantes armées de micro-organismes qui occupent nos intestins et d’autres parties du corps. Le microbiome d’un bébé humain vient d’abord de sa mère. Mais étonnamment, ces dons maternels ne sont pas toujours des cellules entières. De petits fragments d'ADN provenant des bactéries de la mère peuvent passer aux bactéries du bébé par le biais de transferts de gènes horizontaux, même des mois après la naissance. Ces gènes, qui proviennent souvent de souches bactériennes utiles chez la mère, pourraient jouer un rôle important dans la croissance et le développement du bébé. Bien qu’il ne soit pas clair si les transferts horizontaux de gènes profitent directement au bébé en lui transmettant des fonctions particulières, ils pourraient être indirectement utiles en assemblant un microbiome intestinal plus performant.



 

Auteur: Internet

Info: https://www.quantamagazine.org/ fév 2024, Yasemin Saplakoglu

[ échange ] [ transduction ] [ HVT ]

 

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déconnexion

La mort telle qu'elle n'avait jamais été vue
L'embrasement final du cerveau mis en lumière par l'expérience de Jens Dreier est-il à l'origine de l'apparition de cette intense lumière blanche que les personnes ayant fait une expérience de mort imminente disent avoir vue briller au bout d'un mystérieux tunnel? Cela, l'étude ne le dit pas.
Une expérience réalisée dans une université berlinoise a permis de visualiser ce qui se passait dans le cerveau d'un mourant au moment fatidique. Et les résultats, inédits, sont étonnants. Cérébralement parlant, la mort est moins une extinction qu'un ultime embrasement électrique.
C'est la grande, la fatidique question : que se passe-t-il dans notre cerveau - et donc dans notre esprit, dans notre conscience - à la minute de notre mort ? La réponse, jusqu'ici, paraissait hors d'atteinte de l'investigation scientifique : personne n'est jamais revenu de l'autre rive pour témoigner de ce qu'il avait vu et ressenti au moment de passer de vie à trépas.

Certes, il y a bien ces récits troublants recueillis sur les lèvres de celles et ceux qui ont frôlé la mort de près. Regroupés sous l'appellation d'"expériences de mort imminente" (EMI), ils sont pris très au sérieux par une partie de la communauté des neuroscientifiques qui les répertorie et les décortique, comme le fait l'équipe du Coma Science Group à l'université de Liège (lire ci-dessous).

Mais, par définition, les survivants dont l'expérience a été reconnue comme authentique EMI après évaluation sur l'échelle de Greyson (du nom du psychiatre américain Bruce Greyson, qui l'a proposée en 1983) ont échappé à la mort. Ils n'en ont vu que l'ombre. La mort elle-même et ce qu'elle provoque dans le cerveau du mourant demeurent entièrement nimbés de mystère. Du moins était-ce le cas jusqu'à cette année...

Dans une étude publiée par la revue "Annals of Neurology" qui a fait sensation - et qui fera sans doute date dans l'histoire encore toute récente de la thanatologie -, le professeur en neurologie expérimentale à l'université Charité de Berlin, Jens Dreier, détaille l'expérience extraordinaire à laquelle son équipe et lui se sont livrés sur neuf patients. Ces neuf personnes, toutes entrées en soins intensifs à la suite de blessures cérébrales, faisaient l'objet d'un monitorage neurologique lourd, plus invasif qu'un simple électroencéphalogramme.

"Il s'agit d'une technique non conventionnelle, qui permet d'enregistrer l'activité électrique du cerveau, y compris à de très basses fréquences, de l'ordre de 0,01 hertz", explique Stéphane Marinesco, responsable du Centre de recherche en neurosciences de Lyon. Les basses fréquences émises par le cerveau ont du mal à traverser le scalp, ce qui les rend indétectables aux appareils d'électroencéphalogramme dont les électrodes sont placées sur le cuir chevelu. Dans le système de monitorage dont étaient équipés les patients du service du Pr Dreier, les électrodes étaient placées à l'intérieur du crâne, et même sous la dure-mère, cette membrane rigide qui entoure le cerveau et la moelle épinière.

Le cerveau, un vaste mystère qui reste à élucider
Cet accès aux très basses fréquences, correspondant à une activité électrique lente, a été la fenêtre qui a permis à Jens Dreier et son équipe de visualiser ce qui se passait dans le cerveau de personnes en train de mourir. Pour leur expérience, les neuroscientifiques allemands ont simplement demandé aux familles, une fois devenu évident que le patient ne survivrait pas à son accident, l'autorisation de poursuivre l'enregistrement jusqu'au bout. Et même un peu au-delà du "bout", c'est-à-dire de la mort cérébrale, ce moment à partir duquel un classique électroencéphalogramme n'enregistre plus aucune activité cérébrale et que l'Organisation mondiale de la santé considère comme le critère médico-légal du décès.

Vague de dépolarisation
Qu'ont montré les enregistrements réalisés à la Charité de Berlin ? Quelque chose de tout à fait fascinant, jusque-là inédit, et qui devrait peut-être amener les spécialistes à reconsidérer leur définition du décès et de son moment exact. Ce phénomène cérébral, indique l'étude, survient entre 2 et 5 minutes après l'ischémie, moment où les organes (dont le cerveau) ne sont plus alimentés en sang et donc en oxygène. Et il dure lui-même une petite dizaine de minutes. On peut l'assimiler à une sorte d'incendie électrique qui s'allume à un bout du cerveau et, de là, se propage à la vitesse de 50 microns par seconde dans tout l'encéphale avant de s'éteindre à l'autre bout, son oeuvre de destruction accomplie. Les neuroscientifiques parlent de "vague de dépolarisation".

Pour maintenir le "potentiel de membrane" qui lui permet de communiquer avec ses voisins sous forme d'influx nerveux, un neurone a besoin d'énergie. Et donc d'être irrigué en permanence par le sang venu des artères qui lui apporte l'oxygène indispensable à la production de cette énergie sous forme d'adénosine triphosphate (ATP). Tout le travail de Jens Dreier a consisté à observer ce qui se passait pour les neurones une fois que, le coeur ayant cessé de battre et la pression artérielle étant tombée à zéro, ils n'étaient plus alimentés en oxygène.

"L'étude a montré que les neurones se mettaient alors en mode 'économie d'énergie'", commente Stéphane Marinesco. Pendant les 2 à 5 minutes séparant l'ischémie de l'apparition de la vague de dépolarisation, ils puisent dans leurs réserves d'ATP pour maintenir leur potentiel de membrane. Pendant cette phase intermédiaire, au cours de laquelle le cerveau est littéralement entre la vie et la mort, celui-ci ne subit encore aucune lésion irréversible : si l'apport en oxygène venait à être rétabli, il pourrait se remettre à fonctionner sans dommages majeurs.

Réaction en chaîne
Mais cette résistance héroïque des cellules nerveuses a ses limites. A un moment donné, en l'un ou l'autre endroit du cerveau, un premier neurone "craque", c'est-à-dire qu'il dépolarise. Les stocks de potassium qui lui permettaient de maintenir son potentiel de membrane étant devenus inutiles, il les largue dans le milieu extra-cellulaire. Il agit de même avec ses stocks de glutamate, le principal neurotransmetteur excitateur du cerveau.

Mais, ce faisant, ce premier neurone initie une redoutable réaction en chaîne : le potassium et le glutamate par lui libérés atteignent un neurone voisin dont ils provoquent aussitôt la dépolarisation ; à son tour, ce deuxième neurone relâche ses stocks et provoque la dépolarisation d'un troisième, etc. Ainsi apparaît et se propage la vague de dépolarisation, correspondant à l'activité électrique lente enregistrée par le système de monitorage spécifique utilisé à la Charité de Berlin. Le "bouquet final" du cerveau sur le point de s'éteindre définitivement.

Il est d'autres circonstances de la vie où l'on observe des vagues de dépolarisation, un peu différentes en ceci qu'elles ne sont pas, comme ici, irréversibles. C'est notamment le cas dans les migraines avec aura, naguère appelées migraines ophtalmiques, car elles s'accompagnent de symptômes visuels qui peuvent être de simples distorsions du champ visuel, mais aussi, parfois, l'apparition de taches lumineuses, voire de véritables hallucinations assez similaires à celles rapportées dans les EMI.

L'embrasement final du cerveau mis en lumière par l'expérience de Jens Dreier est-il à l'origine de l'apparition de cette intense lumière blanche que les personnes ayant fait une expérience de mort imminente disent avoir vue briller au bout d'un mystérieux tunnel ? Cela, l'étude ne le dit pas. Mais l'hypothèse ne paraît pas indéfendable. ,

Auteur: Verdo Yann

Info: Les échos.fr, 25/11 à 17:23

[ cessation ] [ disparition ]

 

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émergence du regard

Les yeux des mollusques révèlent à quel point l'évolution future dépend du passé

Les systèmes visuels d'un groupe obscur de mollusques fournissent un exemple naturel rare d'évolution dépendante du chemin, dans lequel une bifurcation critique dans le passé des créatures a déterminé leur avenir évolutif.

(photo : Les systèmes visuels des chitons, un type de mollusque marin, représentent un rare exemple réel d’évolution dépendante du chemin – où l’histoire d’une lignée façonne irrévocablement sa trajectoire future.)

Les biologistes se sont souvent demandé ce qui se passerait s'ils pouvaient rembobiner la bande de l'histoire de la vie et laisser l'évolution se dérouler à nouveau. Les lignées d’organismes évolueraient-elles de manière radicalement différente si on leur en donnait la possibilité ? Ou auraient-ils tendance à développer les mêmes types d’yeux, d’ailes et d’autres traits adaptatifs parce que leurs histoires évolutives précédentes les avaient déjà envoyés sur certaines voies de développement ?

Un nouvel article publié aujourd'hui dans Science décrit un cas test rare et important pour cette question, qui est fondamentale pour comprendre comment l'évolution et le développement interagissent. Une équipe de chercheurs de l'Université de Californie à Santa Barbara l'a découvert alors qu'elle étudiait l'évolution de la vision chez un groupe obscur de mollusques appelés chitons. Dans ce groupe d’animaux, les chercheurs ont découvert que deux types d’yeux – les ocelles et les yeux en coquille – ont chacun évolué deux fois indépendamment. Une lignée donnée peut évoluer vers un type d’œil ou vers l’autre, mais jamais les deux.

Curieusement, le type d’œil d’une lignée était déterminé par une caractéristique plus ancienne apparemment sans rapport : le nombre de fentes dans l’armure du chiton. Cela représente un exemple concret d' " évolution dépendante du chemin ", dans lequel l'histoire d'une lignée façonne irrévocablement sa trajectoire évolutive future. Les moments critiques dans une lignée agissent comme des portes à sens unique, ouvrant certaines possibilités tout en fermant définitivement d’autres options.

"C'est l'un des premiers cas où nous avons pu observer une évolution dépendante du cheminement", a déclaré Rebecca Varney , chercheuse postdoctorale au laboratoire de Todd Oakley à l'UCSB et auteur principal du nouvel article. Bien qu’une évolution dépendante du chemin ait été observée chez certaines bactéries cultivées en laboratoire, " montrer cela dans un système naturel était une chose vraiment excitante ".

"Il y a toujours un impact de l'histoire sur l'avenir d'un trait particulier", a déclaré Lauren Sumner-Rooney , qui étudie les systèmes visuels des invertébrés à l'Institut Leibniz pour les sciences de l'évolution et de la biodiversité et n'a pas participé à la nouvelle étude. "Ce qui est particulièrement intéressant et passionnant dans cet exemple, c'est que les auteurs semblent avoir identifié le moment où se produit cette division."

Pour cette raison, les chitons "sont susceptibles d'entrer dans les futurs manuels sur l'évolution" comme exemple d'évolution dépendante du chemin, a déclaré Dan-Eric Nilsson, un écologiste visuel à l'Université de Lund en Suède qui n'a pas participé à la recherche.

Les chitons, petits mollusques qui vivent sur les roches intertidales et dans les profondeurs marines, ressemblent à de petits réservoirs protégés par huit plaques de coquille – un plan corporel resté relativement stable pendant environ 300 millions d'années. Loin d'être des armures inertes, ces genres de plaques d'obus sont fortement décorées d'organes sensoriels qui permettent aux chitons de détecter d'éventuelles menaces.

(photo : Chiton tuberculatus , qui vit sur les côtes rocheuses des Caraïbes, utilise de nombreux ocelles pour obtenir une vision spatiale. Les chitons ont développé des ocelles à deux reprises au cours de leur histoire évolutive.)

Les organes sensoriels sont de trois types. Tous les chitons ont des esthètes (aesthetes : récepteur tout-en-un extrêmement synesthésique qui permet de détecter la lumière ainsi que les signaux chimiques et mécaniques de l'environnement.)

Certains chitons possèdent également un système visuel approprié : soit des milliers d'ocelles sensibles à la lumière, soit des centaines d'yeux en forme de coquille plus complexes, dotés d'un cristallin et d'une rétine permettant de capturer des images grossières. Les animaux dotés d'yeux en forme de coquille peuvent détecter les prédateurs imminents, en réponse à quoi ils se cramponnent fermement au rocher.

Pour comprendre comment cette variété d’yeux de chiton a évolué, une équipe de chercheurs dirigée par Varney a examiné les relations entre des centaines d’espèces de chiton. Ils ont utilisé une technique appelée capture d'exome pour séquencer des sections stratégiques d'ADN provenant d'anciens spécimens de la collection de Doug Eernisse , spécialiste du chiton à la California State University, Fullerton. Au total, ils ont séquencé l’ADN de plus de 100 espèces soigneusement sélectionnées pour représenter toute l’étendue de la diversité des chitons, assemblant ainsi la phylogénie (ou l’arbre des relations évolutives) la plus complète à ce jour pour les chitons.

Ensuite, les chercheurs ont cartographié les différents types d’yeux sur la phylogénie. Les chercheurs ont observé que la première étape avant l’évolution des yeux en coquille ou des ocelles était une augmentation de la densité des esthètes sur la coquille. Ce n’est qu’alors que des yeux plus complexes pourraient apparaître. Les taches oculaires et les yeux en coquille ont chacun évolué à deux reprises au cours de la phylogénie, ce qui représente deux instances distinctes d'évolution convergente.

Indépendamment, les chitons ont fait évoluer les yeux - et, à travers eux, ce que nous pensons être probablement quelque chose comme la vision spatiale - à quatre reprises, ce qui est vraiment impressionnant", a déclaré M. Varney. 

" Cette évolution s'est faite incroyablement rapidement ". Les chercheurs ont estimé que chez le genre néotropical Chiton, par exemple, les yeux ont évolué en l'espace de 7 millions d'années seulement, soit un clin d'œil à l'échelle de l'évolution.

Les résultats ont surpris les chercheurs. "Je pensais qu'il s'agissait d'une évolution progressive de la complexité, passant des esthètes à un système d'ocelles et à des yeux en forme de coquille - une progression très satisfaisante", a déclaré Dan Speiser , écologiste visuel à l'Université de Caroline du Sud et co-auteur d'un article. auteur. " Au lieu de cela, il existe plusieurs chemins vers la vision."

Mais pourquoi certaines lignées ont-elles développé des yeux en coquille plutôt que des ocelles ? Au cours d'un trajet de six heures en voiture depuis une conférence à Phoenix jusqu'à Santa Barbara, Varney et Oakley ont commencé à développer l'hypothèse selon laquelle le nombre de fentes dans la coquille d'un chiton pourrait être la clé de l'évolution de la vision du chiton.

Toutes les structures sensibles à la lumière sur la coquille du chiton, a expliqué Varney, sont attachées à des nerfs qui passent à travers les fentes de la coquille pour se connecter aux nerfs principaux du corps. Les fentes fonctionnent comme des organisateurs de câbles, regroupant les neurones sensoriels. Plus il y a de fentes plus il y les ouvertures par lesquelles les nerfs peuvent passer.

Il se trouve que le nombre de fentes est une information standard qui est enregistrée chaque fois que quelqu'un décrit une nouvelle espèce de chiton. " L'information était disponible, mais sans le contexte d'une phylogénie sur laquelle la cartographier, elle n'avait aucune signification ", a déclaré Varney. " Alors je suis allé voir ça et j'ai commencé à voir ce modèle."

Varney a constaté qu'à deux reprises, indépendamment, des lignées comportant 14 fentes ou plus dans la plaque céphalique ont développé des ocelles. Et deux fois, indépendamment, des lignées comportant 10 fentes ou moins ont développé des yeux en coquille. On se rend ainsi compte que le nombre de fentes verrouillées et le type d'yeux pouvaient évoluer : un chiton avec des milliers d'ocelles a besoin de plus de fentes, tandis qu'un chiton avec des centaines d'yeux en coquille en a besoin de moins. En bref, le nombre de fentes dans la  coquille déterminait l’évolution du système visuel des créatures.

Les résultats conduisent vers une nouvelle série de questions. Les chercheurs étudient activement pourquoi le nombre de fentes limite le type d'œil dans son évolution. Pour répondre à cette question, il faudra travailler à élucider les circuits des nerfs optiques et la manière dont ils traitent les signaux provenant de centaines ou de milliers d’yeux.

Alternativement, la relation entre le type d’œil et le nombre de fentes pourrait être déterminée non pas par les besoins de vision mais par la manière dont les plaques se développent et se développent dans différentes lignées, a suggéré Sumner-Rooney. Les plaques de coquille se développent du centre vers l'extérieur par accrétion, et des yeux sont ajoutés tout au long de la vie du chiton à mesure que le bord se développe. " Les yeux les plus anciens sont ceux au centre de l'animal, et les plus récents sont ajoutés sur les bords. ", a déclaré Sumner-Rooney. En tant que chiton, " vous pourriez commencer votre vie avec 10 yeux et finir votre vie avec 200 ".

Par conséquent, le bord de croissance d'une plaque de carapace doit laisser des trous pour les yeux nouceaux – de nombreux petits trous pour les ocelles, ou moins de trous plus grands pour les yeux de la coquille. Des trous trop nombreux ou trop grands pourraient affaiblir une coque jusqu'à son point de rupture, de sorte que des facteurs structurels pourraient limiter les possibilités pour cest yeux.

Il reste beaucoup à découvrir sur la façon dont les chitons voient le monde, mais en attendant, leurs yeux sont prêts à devenir le nouvel exemple préféré des biologistes d'évolution dépendante du chemin, a déclaré Nilsson. "Les exemples de dépendance au chemin qui peuvent être vraiment bien démontrés, comme dans ce cas, sont rares - même si le phénomène n'est pas seulement courant, c'est la manière standard dont les choses se produisent."



 



Auteur: Internet

Info: Résumé par Gemini

[ évolution qui dépend du chemin ] [ biologie ]

 

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mental aveugle

Aphantasie - Hors de la vue, hors de l'esprit.

Fermez les yeux et imaginez que vous regardez la maison de votre enfance depuis la rue. Si vous pouvez en voir une représentation visuelle avec une certaine fidélité d'esprit, vous faites partie des 98 % de personnes qui peuvent visualiser. Si, comme moi, vous ne voyez que du noir, vous faites partie des 2 % de gens atteints d'une maladie appelée Aphantasie.

Quand je ferme les yeux, il n'y a pas d'images, de formes, de couleurs, de taches, de flous, de bouts. Rien. Je n'ai jamais vu un seul mouton sauter par-dessus une clôture. Toute ma vie, j'ai pensé que lorsque les gens disaient qu'ils pouvaient penser en images et visualiser des images, c'était métaphorique.

En tant que designer, c'est une révélation. Personnellement, ça change vraiment la donne.

Plutôt que de penser que je n'en avais pas la capacité, j'ai toujours supposé que personne ne voyait vraiment les moutons, ils pensaient juste à eux comme moi. Je me rappelle combien il était ridicule d'essayer de compter les moutons que je ne voyais pas.

L'apprentissage de l'aphantasie (un nouveau "machin" qui n'a pas encore d'entrée dans le dictionnaire) m'a obligé à me demander quels sont mes processus internes et comment je peux obtenir à peu près les mêmes résultats que quelqu'un qui peut visualiser. Tant de choses ont un sens maintenant, mais il y en a encore tant à comprendre. Avant d'entrer dans les détails, voici quelques symptômes de ce syndrome : 

-  Il n'y a aucun souvenir visuel pour quoi que ce soit, que ce soit un visage, un mot, l'endroit où j'ai laissé mes clés, un beau moment, l'enfance.

- Tout comme le passé ne peut être rappelé, je ne peux pas visualiser les événements futurs. Toutes ces techniques de visualisation du développement personnel que j'ai essayées au fil des ans et que je croyais inutiles...

- Il n'y a pas d'endroit agréable où aller. Quand on souffre, c'est un peu comme dans la scène de Chemical Burn du Fight Club, il faut juste rester avec la douleur. 

- Je rêve en images mais jamais avec une quelconque clarté. Même quand je me souviens des rêves, je ne peux pas me les remémorer. Je ne sais pas si la fidélité de mes rêves correspond à celle de quelqu'un qui n'a pas ma condition.

- Quand je rêve le jour, j'imagine des scénarios dans des détails abstraits et des nuages de pensées, ce qui est très difficile à comprendre et encore moins à expliquer.

- Les histoires fictives sont inutiles et n'ont aucun lien viscéral. Même enfant, je n'ai jamais pu me plonger dans des aventures de fiction. Je n'aurais pas été bon à l'école du dimanche.

- C'est une bénédiction de ne pas avoir de flashbacks d'événements traumatisants, mais ;

- C'est une malédiction de ne pas pouvoir évoquer des images d'êtres chers disparus. 

Il y a une myriade d'exemples qui peuvent être ajoutés à cette liste, mais vous avez compris. Mes paupières se ferment et le monde devient noir, ce qui m'a toujours semblé logique - c'est à cela que servent les paupières. Voir des images lorsque les yeux sont fermés ressemble à un super pouvoir qui devrait être pour une minorité exceptionnelle, et non l'inverse.

La voix de l'esprit

Depuis cette découverte, j'ai pu mettre certains points sur les i. Il y a quelques années, je me suis intéressé à la programmation neuro-linguistique (PNL), dont une partie consiste à comprendre les modalités sensorielles. Lorsque je me suis appliqué à moi-même ces techniques, le résultat fut que j'étais auditif. Bien sûr, étant donné que toute ma vie professionnelle avait été en tant que designer, je m'attendais à être visuel.

Alors comment une personne atteinte d'aphantasie peut-elle traiter des données et anticiper les résultats ? Pour moi, j'ai découvert que j'entends les résultats, mais que je ne les vois pas

Par exemple, j'ai eu un combat de boxe professionnelle il y a quelques années. J'ai toujours été en faveur du développement personnel et j'avais lu et entendu si souvent qu'il faut visualiser un résultat réussi que l'on veut atteindre. En l'occurrence, me voir victorieux avec les mains levées et sortir du ring en vainqueur. Rétrospectivement, je n'ai jamais rien vu, mais j'ai tout entendu.

En visualisant le combat, j'écoutais vraiment la foule, j'entendais mes entraîneurs me dire à quel point je m'en sortais bien entre les rounds, et surtout j'écoutais mes propres commentaires et affirmations internes pendant que je jouais mentalement l'événement. Lorsque je visualisais la victoire, je ne voyais rien, mais j'entendais ma propre voix mentale célébrer la victoire.

Oreilles visuelles

La mémoire et la capacité à se souvenir d'un moment, d'un événement ou d'une action sont cruciales. Lorsque quelqu'un d'autre a égaré ses clés, il peut voir où il les a laissées comme un souvenir à rappeler. Pour ce faire, je me souviens de ma voix mentale qui disait à l'époque " tes clés sont sur le bureau " lorsque je les y pose. Et quand j'ai besoin de les retrouver, je reviens à la dernière phrase de mes clés. Les fragments de langage sont un moyen de cloisonner les actions que j'ai prises et celles que je dois prendre.

Si j'assiste à un magnifique coucher de soleil, je ne puis en capturer un instantané mental, c'est plutôt comme un extrait sonore, et c'est surtout mon bavardage interne qui essaie d'enregistrer le moment et de le verbaliser via les détails. Je suis à la limite de l'obsession des couchers de soleil, ce qui frustre tous ceux avec qui je suis si l'un d'entre eux se trouve à proximité, car je dois me rendre à un point d'observation. "On les a tous vus..." mais comme je ne m'en souviens pas, j'ai besoin de les voir encore et encore.

Je suis un fervent iPhoneographe, ce qui n'est pas unique, mais pour moi, c'est une façon de gérer mon incapacité à capturer des images mentales. Lorsque je pars en voyage avec un partenaire, c'est inévitablement frustrant pour lui, car je dois m'arrêter si souvent pour saisir les moments. "Pourquoi ne pouvez-vous pas simplement profiter de l'instant présent ?", ce que je fais, mais si je ne le capture pas, je ne pourrai généralement plus jamais revoir cet endroit. Si je conduis et qu'une scène qui vaut la peine d'être capturée apparaît, ce ne sont pas mes yeux qui m'encouragent à m'arrêter, j'entends "Ce serait une super photo", alors j'ai appris à faire confiance à ma voix au-dessus de mes yeux, même pour les choses visuelles, et j'ai une vision de 20/20.

Le dilemme du designer

Je suis un designer qui est intrinsèquement visuel. J'ai commencé dans le design visuel et j'ai évolué vers le design de l'expérience utilisateur qui, je crois maintenant, est un artefact d'Aphantasia. Lorsque je parle à mes collègues designers, je n'arrive pas à croire qu'ils voient dans leur esprit à l'avance ce qu'ils exécutent ensuite dans Photoshop. Ils disposent d'un canevas mental sur lequel ils peuvent appliquer leurs visualisations. Cela va dans le sens de l'hyperphantasie.

Un collègue peut voir 20 versions du même graphique et être capable de les filtrer dans sa tête pour créer les 5 versions qu'il fera physiquement comme options de révision. Un autre collègue peut évoquer une seule instance d'un graphique mais être capable d'animer et de déplacer les éléments jusqu'à ce qu'il se arrête  la version qu'il va concevoir.

Mais la question est, que fait un Aphantasique ?.

Lorsque j'essaie de résoudre un problème d' expérience-design, je pense que c'est la réalité. Ce n'est pas une bonne description car il n'y a pas de vraie bonne manière d'articuler ce processus. Mais je le verbalise aussi en interne, et cela se fait en grande partie en jouant le rôle de l'utilisateur et en écoutant ce qu'il entendrait de son propre bavardage interne s'il faisait l'expérience du voyage que j'essaie de résoudre pour lui. Par exemple, s'ils rencontrent un problème pendant que je joue leur expérience de la conception, je les entends dire "ça ne marche pas" mais je ne vois pas comment, je dois le traduire de mon point de vue de concepteur puis le manifester à l'écran, sur papier ou autre.

J'ai toujours été un bon collaborateur dans le domaine du design, parce que j'ai eu besoin de l'être. Très souvent, les solutions aux problèmes viennent de moi, qui en parle et qui peint une image mentale d'un problème de ce que je "vois" pendant qu'un collègue crée cette image mentale et qu'ensemble, cela devient une solution. Une véritable conception collaborative, où le partage des connaissances conduit à une compréhension collective et à la résolution des problèmes.

Imagine que

On m'a interrogé sur mon imagination ? Je suis un vrai rêveur, mais une fois "hors fèeries", je ne suis pas vraiment sûr de ce qui se passe. C'est la chose la plus difficile à expliquer parce que je ne peux pas encore vraiment expliquer ce qui se passe quand je suis "loin". La meilleure description est que je sens les choses se passer dans ma tête. Les événements se déroulent et je ne suis pas mentalement vide, mais visuellement noir. Tout cela est assez étrange. Je ressens toujours les rêves comme des images, il semble donc que le conscient ait un filtre sur ce que l'inconscient peut faire passer en douce pendant le sommeil.

Bénédiction ou malédiction

L'un des aspects les plus troublants est de ne pas pouvoir voir ses proches. Mon frère a récemment quitté ce monde et malgré tous mes efforts, je ne puis voir son visage. Je ne peux même pas visualiser une photo de son visage, ou une représentation floue. Depuis, j'en ai parlé à ma mère, qui se couche tous les soirs avec une ou plusieurs photos de lui et peut s'en servir pour se souvenir de lui.

Je peux avoir un sentiment pour une personne et je peux décrire mon frère à quelqu'un. La façon dont il marchait par exemple, je peux la reproduire, mais c'est de mémoire. Parfois, je me sense dissonant au plan émotionnel, comme en vivant un  événement traumatisant comme une rupture. J'ai l'impression d'avancer rapidement et je me demande maintenant si c'est un cas de "loin des yeux, loin du cœur". Cette citation aide à résumer beaucoup de choses pour moi et mon expérience du monde.

Un avantage, cependant, est que les expériences négatives ne peuvent pas être revécues. Des images visuelles horribles, comme un récent accident de moto, ne reviennent jamais nous hanter. Une fois la chose vue, elle est automatiquement invisible.

Voir, c'est croire

Il existe de nombreux exemples de personnes dont un sens est diminué ou inexistant, ce qui encourage d'autres à se renforcer. Le savant qui pense aux nombres comme à des images et qui peut résoudre des équations mathématiques par l'image. Je n'ai pas encore appris exactement comment traiter et traduire l'information, mais je suis maintenant sur cette voie pour comprendre comment je fonctionne et pour développer cette capacité, tout en travaillant à supprimer le filtre et à ouvrir un tout nouveau monde à l'œil de l'esprit.

Auteur: Kappler Benny

Info: 9 janvier 2017. https://medium.com/@bennykappler/aphantasia-out-of-sight-out-of-mind-f2b1b4e5cc23. Trad Mg

[ imagination non-voyante ]

 

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homme-animal

La conscience du Dauphin
Bien entendu, les modèles du monde ne manqueront pas de différer selon le degré où les systèmes sensoriels périphériques diffèrent.
Le travail du cerveau est en effet, au moins en partie, de construire une réalité cohérente à partir de données sensorielles spécifiques, réalité qui constitue d’ailleurs la seule connue par celui qui l’expérimente au détriment de toutes les autres.
Dans le cas du dauphin, le système nerveux est celui d’un herbivore retourné à la mer, il y a quelques millions d’années, et ne diffère donc pas fondamentalement de celui de n’importe quel autre grand mammifère.
Le monde physique en revanche, au sein duquel il évolue, nous poserait à nous, humains, d’impossibles défis. C’est pourquoi les cétacés ont développé tout à la fois des formes physiques mieux adaptées au milieu marin mais surtout tout un outillage sensoriel susceptible des les aider à survivre dans un monde humide, froid et obscur, où règnent de fortes pressions.
Faire l’expérience d’une telle subjectivité est par définition une tâche impossible. Même entre époux, entre amis, entre enfants et parents, cette connaissance ne peut s’acquérir que par le biais maladroit du discours mais jamais nous ne pourrons accéder au "goût du monde" d’une autre espèce que la nôtre.
Il se fait heureusement que nos organes sensoriels et nos structures cérébrales sont des outils communs à tous les êtres humains, ce qui nous permet de fonder l’illusion d’un univers de formes stables et tangibles, dont l’existence fait l’unanimité mais que nous sommes les seuls à percevoir comme telles.
En revanche, nous sommes génétiquement incapables de nous figurer un monde filtré par d’autres sens que les nôtres, de la même manière qu’il nous est impossible de visualiser un cube en quatre dimensions ou simplement le monde des abeilles….
"Pouvez-vous imaginer l’expérience que représente le fait d’être sans cesse corrélé à une boussole solaire ?" nous demande le neurologue H.Jerison à ce propos "L’information consiste en la triangulation des objets externes relativement à un observateur (le je) et au soleil comme point de référence. Si cette réaction devait être représentée en terme de perception, on pourrait dire que l’abeille ou la fourmi ressent de manière constante l’existence des points cardinaux au sein d’un monde tridimensionnel de type euclidien. Si notre système sensoriel était celui des hyménoptères, c’est cela la seule réalité que nous pourrions percevoir.
L’intégration de deux points de référence, le soi et le soleil, plutôt qu’un seul soi unitaire en tant qu’origine et centre d’un monde périphérique, doit certainement mener à d’autres perspectives sur les dimensions fondamentales de la réalité. Il est intéressant d’imaginer les catégories additionnelles que Kant aurait pu reconnaître en tant qu’à priori si nous avions été équipés d’un tel système de navigation!"
Les expériences de Louis Herman nous apprennent que les dauphins partagent tout de même les mêmes dimensions que nous : le haut, le bas, la gauche la droite, devant, derrière, tout cela existe chez eux mais il semble qu’ils ignorent la nuance entre les adjectifs "grand" et "petit" et qu’ils construisent leurs phrases selon un mode syntaxique particulier. Ces expériences, profondément anthropocentristes, n’offrent qu’un pâle reflet d’un monde mental autrement plus riche et foisonnant en liberté, comme le montre avec bien plus d’éclat le très étrange langage delphinien mis à jour par le chercheur russe Vladimir Markov, mais elles sont à tout le moins significatives de la nature d’une conscience "autre" qui ne s’appuie pas sur nos paramètres.
Les sens et l’Umwelt
Imaginons un instant ce que pourrait être "l’Umwelt" d’un dauphin.
Au centre d’un réseau d’informations sensorielles qu’il ré-organise sans cesse en tant qu’images du monde, pulse un noyau de conscience conscient de lui-même.
La vision
Le monde visuel du dauphin peut être comparé à celui des espèces-proies, non prédatrices, comme le lapin ou le chevreuil, en ce sens que les champs visuels de ses yeux latéraux couvrent ensemble 360° mais qu’ils ne se chevauchent pas ou très peu.
L’absence de fibres non-croisées dans le chiasma optique suggère une plus large indépendance dans le contrôle des yeux et dans l’usage de l’information qu’ils fournissent, par rapport à ce que l’on observe chez les autres mammifères. Chacun des yeux est capable de mouvements propres, indépendants de ceux de l’autre œil et une certaine focalisation frontale peut donc être obtenue.
On peine cependant à imaginer un monde dans lequel le Soi se trouve ainsi de manière constante au centre d’un champ visuel circulaire de 360°.
Le nôtre, comme on le sait, se réduit à un cône de 120°.
Notre Soi se place juste derrière le front et les yeux, en vis-à-vis de l’objet focalisé par notre regard binoculaire et dans la ligne de fuite du cône, c’est-à-dire à peu près sur la glande pinéale. On comprend mieux dès lors la fausse intuition de René Descartes.
Incapables de distinguer le vert du rouge, les yeux des dauphins n’en sont pas moins d’une sensibilité extrême à l’instar des yeux de chat, percent l’obscurité et peuvent, d’une simple torsion de la rétine, adapter leur vision aux fonds marins ou à l’air libre. Par contre, le sens du relief leur est impossible, puisqu’ils ne sont pas binoculaires.
La "quasi-olfaction"
Le goût et l’odorat sont absents en tant que tels, remplacés par la "quasi-olfaction" qui consiste à filtrer une certaine quantité d’eau au travers de l’évent et à en goûter le parfum. Un tel sens est fondamental : le dauphin s’en sert pour repérer les femelles en rut autant que pour sentir les fèces de son groupe, nuage diffus de couleur foncée expulsé de manière régulière et qui donne à l’ensemble social une "odeur" propre.
Le toucher et le sens proprioceptif
Quiconque a jamais caressé la peau satinée d’un tursiops sait à quel point ce tissu est sensible, doux et fragile. Le sens du toucher joue lui aussi un rôle essentiel dans la vie de ces mammifères nus, qui n’aiment rien tant que de rester collés les uns contre les autres et d’échanger les caresses les plus voluptueuses.
Au niveau plus profond du sens proprioceptif, la différence avec nos perceptions s’accroît cependant encore davantage : "L’Umwelt des dauphins se fonde comme tout autre sur les caractéristiques de leur environnement" déclare Jerison, "et cet univers mental représente très certainement une adaptation cognitive optimale aux exigences environnementales du monde aquatique. A cet égard, l’un des traits principaux de cet univers marin – considéré depuis notre point de vue – est notamment l’absence d’une plate-forme stable tel que les mammifères l’éprouvent en se tenant sur la terre ferme".
Ce point est important, car le sol sur lequel nous nous tenons, le rôle essentiel de la gravité dans les adaptations anatomiques de la plupart des mammifères occupe une place centrale au plan biologique mais ne sont que rarement notées au niveau de la conscience vigile. Notre intuition s’épuise en revanche lorsque nous tentons d’imaginer les adaptations perceptuelles chez certaines espèces dont les données sensorielles sont profondément différentes des nôtres, et cela d’autant plus que nous ne sommes même pas conscients de notre propre spécificité sensorielle. Les informations relatives aux forces gravitationnelles qui s’exercent sur nos corps jouent également un rôle-clé chez le dauphin, mais d’une autre manière.
Celui-ci s’oriente en effet en "s’informant" régulièrement de la position de son corps par rapport aux fonds marins, à la surface de l’eau ou à la place du soleil au moment de l’observation.
Bien que les dauphins ne disposent d’aucun sol référentiel en guise de plate-forme fixe, mais qu’ils possèdent en revanche un degré de liberté dans les trois dimensions plus important que le nôtre, le sens de l’orientation spatiale est certainement fondamental pour eux. On peut imaginer ce que les cétacés ressentent en pensant à ces appareils d’entraînement destinés aux astronautes afin de les préparer à l’apesanteur.
Ces instruments sont de gigantesques balançoires, disposant de six degrés de liberté et permettant aux candidats pour l’espace de contrôler au mieux les diverses rotations possibles de leur axe corporel aussi bien que les mouvements de propulsion linéaire.
Si nous étions dauphins, nous nous trouverions dans un monde un peu semblable à celui d’un vol spatial à gravité zéro. Il est intéressant de noter à ce propos que l’expérience de l’apesanteur a crée chez les astronautes divers problèmes liés à cet environnement, telles que nausées, vertiges, migraines, etc. mais qu’elles n’ont cependant jamais altéré leur perception "juste" des choses.
Rappelons aussi, sans nous y étendre, à quel point la gestuelle constitue un mode de communication privilégié chez les dauphins : les degrés de liberté dont leur corps dispose leur a permis d’élaborer un véritable vocabulaire d’attitudes : ventre en l’air, en oblique, corps groupés par faisceaux, rostre au sol, caudale haute, inclinée, etc., le tout agrémenté ou non d’émissions de bulles et de vocalisations.
L’audition
Mais de tous les sens dont dispose le dauphin, c’est certainement l’audition qui est le plus développé et qui atteint des capacités discriminatoires sans aucun équivalent connu. Ce système sensoriel s’est transformé au cours des millénaires en écholocation, tout à la fois outil de connaissance (le monde externe "vu" par le son) et moyen de communication (le monde interne transmis par le langage). Cette convergence fonctionnelle ne manque pas d’entraîner des conséquences étonnantes !
D’après Harry J. Jerison : "Si le spectre auditif des dauphins est plus large que le nôtre de plusieurs octaves dans les fréquences les plus élevées, la caractéristique principale de ce système auditif est bien évidemment l’écholocation. Celle-ci pourrait contribuer à conférer au monde des dauphins une dimension inhabituelle, dépassant largement les perceptions élémentaires relatives aux événements survenant à distance. En tant qu’adaptation sensori-motrice, l’écholocation partage en effet certaines caractéristiques similaires à celles du langage humain".
Rappelons brièvement en quoi consiste cette vision acoustique d’un type inusité. Le dauphin émet en permanence – dès lors qu’il se déplace et cherche sa route activement – une série de "sons explosés" extrêmement brefs (moins d’une seconde d’émission continue). Ces "clicks" ne sont pas des sons purs mais des "bruits", d’inextricables petits paquets d’ondes situés sur des fréquences de 120 à 130 Khz et d’une puissance frisant parfois les 220 décibels. Ils retentissent sous l’eau comme une grêle de minuscules coups secs et nets enchaînés l’un à l’autre en de courtes séquences.
Les clicks sont émis sous forme d’un large faisceau, qui balaie par intermittence le sol sablonneux à la façon d’un projecteur. On peut donc dire que la nuit ou sous une certaine profondeur, le dauphin ne voit que lorsqu’il éclaire le paysage de ses éclairs sonores. Les informations reçues, assez grossières, concernent l’aspect du fond marin ou une masse importante, bateau ou autre cétacé.
Supposons à présent qu’un poisson soit repéré dans ce champ de vision "stroboscopique". Puisqu’il fait nuit, l’œil ne peut confirmer l’image en mode visuel.
Lorsque la chasse commence, le dauphin resserre alors le rayon de son biosonar et le dédouble en deux faisceaux.
Plus précis, mieux ciblés les trains de click bombardent le poisson sous tous ses angles et peuvent même pénétrer dans son corps en renvoyant l’image de ses organes internes.
Les deux trains de clicks sont produits presque simultanément, l’un à 20° à gauche de la ligne du rostre et l’autre à 20° sur la droite. Les deux rayons se chevauchent au point focal (0°) et fournissent une "visiaudition" de type, cette fois, binoculaire.
Un intervalle de 80 millièmes de seconde sépare l’émission de chacun des faisceaux, de sorte qu’en calculant le léger retard d’un écho par rapport à l’autre, le dauphin peut estimer la profondeur de champ et la distance qui le sépare de chaque élément de l’objet observé.
Se rapprochant de sa proie à toute vitesse, le dauphin n’a de cesse que de conserver le contact avec elle et multiplie la fréquence et l’intensité de ses trains de clicks, comme pour maintenir le "projecteur" allumé presque en continu.
Les ondes à haute fréquence ont une portée plus courte mais fournissent en revanche une bien meilleure définition des détails. En nageant, le dauphin opère un mouvement de balayage avec la tête avant d’obtenir une image complète de sa cible, que ses organes visuels conforteront par ailleurs.
S’il veut obtenir davantage de détails encore sur son contenu, le dauphin la bombardera alors sa cible à bout portant, d’un faisceau de clicks aussi fin et précis qu’un rayon laser.
Celui-ci pénètre la matière et en estime la densité avec une incroyable précision : la nature d’un métal (zinc plutôt que cuivre) ou des variations de l’épaisseur d’un tube de l’ordre d’un millième de millimètres sont alors parfaitement perçus par cette échographie biologique.
Une telle "vision acoustique" nous sera à tout jamais inimaginable, comme la couleur rouge l’est pour l’aveugle. Néanmoins, au prix d’une comparaison grossière, on peut mettre en parallèle la pluie d’échos que perçoivent les cétacés avec les pixels que l’œil humain perçoit sur un écran de télévision. Les pixels dessinent très rapidement une image en se succédant l’un à l’autre et laissent sur la rétine du téléspectateur une série de rémanences qui figurent le mouvement et les formes. Une scène visuelle est ainsi décodée à partir d’une séquence de taches ultra rapides surgissant sur l’écran. De la même manière, une expérience éidétique similaire est sans doute générée par les données discrètes de l’écholocation (clicks).
L’information pourrait être alors parfaitement comparable à celle que l’on obtient grâce au bombardement de photons dans le système visuel, à ceci près qu’elle parviendrait par un autre canal, en l’occurrence le canal auditif.

Auteur: Internet

Info: http://www.dauphinlibre.be/dauphins-cerveau-intelligence-et-conscience-exotiques

[ comparaisons ]

 

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CAPACITÉS COGNITIVES DU DAUPHIN

Au-delà de leur physiologie cérébrale, les dauphins font preuve de capacités extrêmement rares dans le domaine animal. Comme les humains, les dauphins peuvent imiter, aussi bien sur le mode gestuel que sur le mode vocal, ce qui est soi est déjà exceptionnel. Si certains oiseaux peuvent imiter la voix, ils n’imitent pas les attitudes. Les singes, de leur côté, imitent les gestes et non les mots. Le dauphin est capable des deux. Les dauphins chassent les poissons et se nourrissent d’invertébrés, mais ils usent pour ce faire de techniques complexes et variables, acquises durant l’enfance grâce à l’éducation. L’usage des outils ne leur est pas inconnu : un exemple frappant de cette capacité est la façon dont deux dauphins captifs s’y sont pris pour extraire une murène cachée dans le creux d’un rocher à l’intérieur de leur bassin. L’un d’eux a d’abord attrapé un petit poisson scorpion très épineux, qui passait dans le secteur, et l’ayant saisi dans son rostre, s’en est servi comme d’un outil pour extraire la murène de sa cachette. S’exprimant à propos de leur intelligence, le Dr Louis M.Herman, Directeur du Kewalo Basin Marine Mammal Laboratory de l’Université d’Hawaii, note que les dauphins gardent en mémoire des événements totalement arbitraires, sans le moindre rapport avec leur environnement naturel et sans aucune incidence biologique quant à leur existence.

Recherches sur le langage des dauphins

Beaucoup d’humains trouvent intrigante l’idée de communiquer avec d’autres espèces. A cet égard, le dauphin constitue un sujet attractif, particulièrement dans le domaine du langage animal, du fait de ses capacités cognitives et de son haut degré de socialisation. Dès le début des années soixante, c’est le neurologue John Lilly qui, le premier, s’est intéressé aux vocalisations des cétacés. Les recherches de Lilly se poursuivirent durant toute une décennie, tout en devenant de moins en moins conventionnelles. Le savant alla même jusqu’à tester les effets du L.S.D. sur les émissions sonores des dauphins et dut finalement interrompre ses recherches en 1969, lorsque cinq de ses dauphins se suicidèrent en moins de deux semaines. Malheureusement, nombre de découvertes ou de déclarations de John Lilly sont franchement peu crédibles et ont jeté le discrédit sur l’ensemble des recherches dans le domaine du langage animal. De ce fait, ces recherches sont aujourd’hui rigoureusement contrôlées et très méticuleuses, de sorte que les assertions des scientifiques impliquées dans ce secteur restent désormais extrêmement réservées.

Louis Herman est sans doute l’un des plus importants chercheurs à mener des études sur la communication et les capacités cognitives des dauphins. Son instrument de travail privilégié est la création de langues artificielles, c’est-à-dire de langages simples crées pour l’expérience, permettant d’entamer des échanges avec les dauphins. Louis Herman a surtout concentré ses travaux sur le phénomène de la "compréhension" du langage bien plus que sur la "production" de langage, arguant que la compréhension est le premier signe d’une compétence linguistique chez les jeunes enfants et qu’elle peut être testée de façon rigoureuse. En outre, la structure grammaticale qui fonde les langages enseignés s’inspire le plus souvent de celle de l’anglais. Certains chercheurs ont noté qu’il aurait été mieux venu de s’inspirer davantage de langues à tons ou à flexions, comme le chinois, dont la logique aurait parue plus familière aux cétacés. Dans les travaux d’Herman, on a appris à deux dauphins, respectivement nommés Akeakamai (Ake) et Phoenix, deux langues artificielles. Phoenix a reçu l’enseignement d’un langage acoustique produit par un générateur de sons électroniques. Akeakamai, en revanche, a du apprendre un langage gestuel (version simplifiée du langage des sourds-muets), c’est-à-dire visuel. Les signaux de ces langues artificiels représentent des objets, des modificateurs d’objet (proche, loin, gros, petit, etc.) ou encore des actions. Ni les gestes ni les sons ne sont sensés représenter de façon analogique les objets ou les termes relationnels auxquels ils se réfèrent. Ces langages utilisent également une syntaxe, c’est-à-dire des règles de grammaire simples, ce qui signifie que l’ordre des mots influe sur le sens de la phrase. Phoenix a appris une grammaire classique, enchaînant les termes de gauche à droite (sujet-verbe-complément) alors que la grammaire enseignée à Ake allait dans l’autre sens et exigeait de sa part qu’elle voit l’ensemble du message avant d’en comprendre le sens correctement. Par exemple, dans le langage gestuel de Ake, la séquence des signaux PIPE-SURFBOARD-FETCH ("tuyau – planche à surf – apporter") indiquait l’ordre d’amener la planche de surf jusqu’au tuyau, alors que SURFBOARD-PIPE-FETCH ("planche-tuyau- rapporter") signifiait qu’il fallait, au contraire, amener le tuyau jusqu’ à la planche de surf. Phoenix et Ake ont ainsi appris environ 50 mots, lesquels, permutés l’un avec l’autre au sein de séquences courtes, leur permirent bientôt de se servir couramment de plus de mille phrases, chacune produisant une réponse neuve et non apprise.

Compte tenu de l’influence possible de la position dans l’espace des expérimentateurs sur l’expérimentation, les lieux d’apprentissage et les entraîneurs se voyaient changés de session en session. Dans le même temps, des observateurs "aveugles", qui ne connaissaient pas les ordres et ne voyaient pas les entraîneurs, notaient simplement le comportement des dauphins, afin de vérifier ensuite qu’il correspondait bien aux commandes annoncées. Les entraîneurs allaient jusqu’à porter des cagoules noires, afin de ne révéler aucune expression ou intention faciale et se tenaient immobiles, à l’exception des mains. Les dauphins se montrèrent capables de reconnaître les signaux du langage gestuels aussi bien lorsqu’il étaient filmés puis rediffusés sur un écran vidéo que lorsque ces mêmes signes étaient exécutés à l’air libre par l’entraîneur. Même le fait de ne montrer que des mains pâles sur un fond noir ou des taches de lumière blanche reproduisant la dynamique des mains, a largement suffi aux dauphins pour comprendre le message ! Il semble donc que les dauphins répondent davantage aux symboles abstraits du langage qu’à tout autre élément de la communication.

Par ailleurs, si les dauphins exécutent aisément les ordres qu’on leur donne par cette voie gestuelle, ils peuvent également répondre de façon correcte à la question de savoir si un objet précis est présent ou absent, en pressant le levier approprié (le clair pour PRESENT, le sombre pour ABSENT). Ceci démontre évidement leur faculté de "déplacement mental", qui consiste à manipuler l’image d’objets qui ne se trouvent pas dans les environs. Des expériences additionnelles ont conduit à préciser comment le dauphin conçoit l’étiquetage des objets, comment il les qualifie de son point de vue mental. "Nous avons constaté" nous apprend Louis Herman, "qu’au regard du dauphin, le signe CERCEAU n’est pas seulement le cerceau précis utilisé dans le cadre de cette expérience précise, c’est plutôt TOUT OBJET DE GRANDE TAILLE PERCE D’UN GRAND TROU AU MILIEU. Un seul concept général associe donc pour le dauphin les cerceaux ronds, carrés, grands et petits, flottants ou immergés, que l’on utilise généralement lors de la plupart des expériences". Parmi les choses que le Dr Herman estime n’avoir pu enseigner aux dauphins, il y a le concept du "non" en tant que modificateur logique. L’ordre de "sauter au-dessus d’une non-balle" indique en principe que le dauphin doit sauter au-dessus de n’importe quoi, sauf d’une balle ! Mais cela n’est pas compris, pas plus, affirme toujours Herman, que le concept de "grand" ou de "petit".

Communication naturelle chez les dauphins

On sait que les dauphins émettent de nombreux sifflements, de nature très diverse. La fonction de la plupart d’entre eux demeure toujours inconnue mais on peut affirmer aujourd’hui que la moitié d’entre eux au moins constitue des "signatures sifflées". Un tel signal se module dans une fourchette de 5 à 20 kilohertz et dure moins d’une seconde. Il se distingue des autres sifflements - et de la signature de tous les autres dauphins – par ses contours particuliers et ses variations de fréquences émises sur un temps donné, ainsi que le montrent les sonogrammes. Les jeunes développent leur propre signature sifflée entre l’âge de deux mois et d’un an. Ces sifflements resteront inchangés douze ans au moins et le plus souvent pour la durée entière de la vie de l’animal. Par ailleurs, au-delà de leur seule fonction nominative, certains des sifflements du dauphin apparaissent comme de fidèles reproductions de ceux de leurs compagnons et servent manifestement à interpeller les autres par leur nom. Lorsqu’ils sont encore très jeunes, les enfants mâles élaborent leur propre signature sifflée, qui ressemble fort à celle de leur mère. En revanche, les jeunes femelles doivent modifier les leurs, précisément pour se distinguer de leur mère.

Ces différences reflètent sans doute celles qui existent dans les modes de vie des femelles et des mâles. Puisque les filles élèvent leur propre enfant au sein du groupe maternel, un sifflement distinct est donc indispensable pour pouvoir distinguer la maman de la grand mère. La signature sifflée masculine, presque identique à celle de la mère, permet tout au contraire d’éviter l’inceste et la consanguinité. Le psychologue James Ralston et l’informaticien Humphrey Williams ont découvert que la signature sifflée pouvait véhiculer bien plus que la simple identité du dauphin qui l’émet. En comparant les sonogrammes des signatures sifflées durant les activités normales et lors de situations stressantes, ils découvrirent que la signature sifflée, tout en conservant sa configuration générale, pouvait changer en termes de tonalité et de durée et transmettre ainsi des informations sur l’état émotionnel de l’animal. Les modifications causé par cet état émotionnel sur les intonations de la signature varient en outre selon les individus. Les dauphins semblent donc utiliser les sifflement pour maintenir le contact lorsqu’ils se retrouvent entre eux ou lorsqu’ils rencontrent d’autres groupes, mais aussi, sans doute, pour coordonner leur activités collectives. Par exemple, des sifflements sont fréquemment entendus lorsque le groupe entier change de direction ou d’activité.

De son côté, Peter Tyack (Woods Hole Oceanographic Institute) a travaillé aux côtés de David Staelin, professeur d’ingénierie électronique au M.I.T., afin de développer un logiciel d’ordinateur capable de détecter les "matrices sonores" et les signaux répétitifs parmi le concert de couinements, piaulements et autres miaulements émis par les dauphins. Une recherche similaire est menée par l’Université de Singapore (Dolphin Study Group). Avec de tels outils, les chercheurs espèrent en apprendre davantage sur la fonction précise des sifflements.

Dauphins sociaux

Les observations menées sur des individus sauvages aussi bien qu’en captivité révèlent un très haut degré d’ordre social dans la société dauphin. Les femelles consacrent un an à leur grossesse et puis les trois années suivantes à élever leur enfant. Les jeunes s’éloignent en effet progressivement de leur mère dès leur troisième année, restant près d’elle jusqu’à six ou dix ans ! – et rejoignent alors un groupe mixte d’adolescents, au sein duquel ils demeurent plusieurs saisons. Parvenus à l’âge pleinement adulte, vers 15 ans en moyenne, les mâles ne reviennent plus que rarement au sein du "pod" natal. Cependant, à l’intérieur de ces groupes d’adolescents, des liens étroits se nouent entre garçons du même âge, qui peuvent persister la vie entière. Lorsque ces mâles vieillissent, ils ont tendance à s’associer à une bande de femelles afin d’y vivre une paisible retraite. Bien que les dauphins pratiquent bien volontiers la promiscuité sexuelle, les familles matriarcales constituent de fortes unités de base de la société dauphin. Lorsqu’une femelle donne naissance à son premier enfant, elle rejoint généralement le clan de sa propre mère et élève son delphineau en compagnie d’autres bébés, nés à la même saison. La naissance d’un nouveau-né donne d’ailleurs souvent lieu à des visites d’autres membres du groupe, mâles ou femelles, qui s’étaient séparés de leur mère depuis plusieurs années. Les chercheurs ont également observé des comportements de "baby-sitting", de vieilles femelles, des soeurs ou bien encore d’autres membres du groupe, voire même un ancien mâle prenant alors en charge la surveillance des petits. On a ainsi pu observer plusieurs dauphins en train de mettre en place une véritable "cour de récréation", les femelles se plaçant en U et les enfants jouant au milieu ! (D’après un texte du Dr Poorna Pal)

Moi, dauphin.

Mais qu’en est-il finalement de ce moi central au coeur de ce monde circulaire sans relief, sans couleurs constitué de pixels sonores ? C’est là que les difficultés deviennent insurmontables tant qu’un "contact" n’aura pas été vraiment établi par le dialogue car le "soi" lui-même, le "centre de la personne" est sans doute construit de façon profondément différente chez l’homme et chez le dauphin. H.Jerison parle carrément d’une "conscience collective". Les mouvements de groupe parfaitement coordonnés et quasi-simultanés, à l’image des bancs de poissons ou des troupeaux de gnous, que l’on observe régulièrement chez eux, suppose à l’évidence une pensée "homogène" au groupe, brusquement transformé en une "personne plurielle". On peut imaginer ce sentiment lors d’un concert de rock ou d’une manifestation, lorsqu’une foule entière se tend vers un même but mais ces attitudes-là sont grossières, globales, peu nuancées. Toute autre est la mise à l’unisson de deux, trois, cinq (les "gangs" de juvéniles mâles associés pour la vie) ou même de plusieurs centaines de dauphins ensemble (de formidables "lignes de front" pour la pêche, qui s’étendent sur des kilomètres) et là, bien sûr, nous avons un comportement qui traduit un contenu mental totalement inconnu de nous. On sait que lorsqu’un dauphin voit, tout le monde l’entend. En d’autres termes chaque fois qu’un membre du groupe focalise son faisceau de clicks sur une cible quelconque, l’écho lui revient mais également à tous ceux qui l’entourent. Imaginons que de la même manière, vous regardiez un beau paysage. La personne qui vous tournerait le dos et se tiendrait à l’arrière derrière vous pourrait le percevoir alors aussi bien que vous le faites. Cette vision commune, qui peut faire croire à de la télépathie, n’est pas sans conséquence sur le contenu mental de chaque dauphin du groupe, capable de fusionner son esprit à ceux des autres quand la nécessité s’en fait sentir. Ceci explique sans doute la formidable capacité d’empathie des dauphins mais aussi leur fidélité "jusqu’à la mort" quand il s’agit de suivre un compagnon qui s’échoue. Chez eux, on ne se sépare pas plus d’un ami en détresse qu’on ne se coupe le bras quand il est coincé dans une portière de métro ! En d’autres circonstances, bien sûr, le dauphin voyage seul et il "rassemble" alors sa conscience en un soi individualisé, qui porte un nom, fait des choix et s’intègre dans une lignée. Il en serait de même pour l’homme si les mots pouvaient faire surgir directement les images qu’ils désignent dans notre cerveau, sans passer par le filtre d’une symbolisation intermédiaire. Si quelqu’un me raconte sa journée, je dois d’abord déchiffrer ses mots, les traduire en image et ensuite me les "représenter". Notre système visuel étant indépendant de notre système auditif, un processus de transformation préalable est nécessaire à la prise de conscience du message. Au contraire, chez le dauphin, le système auditif est à la fois un moyen de communication et un moyen de cognition "constructiviste" (analyse sensorielle de l’environnement). La symbolisation n’est donc pas nécessaire aux transferts d’images, ce qui n’empêche nullement qu’elle puisse exister au niveau des concepts abstraits. Quant à cette conscience fusion-fission, cet "ego fluctuant à géométrie variable", ils préparent tout naturellement le dauphin à s’ouvrir à d’autres consciences que la sienne. D’où sans doute, son besoin de nous sonder, de nous comprendre et de nous "faire" comprendre. Un dauphin aime partager son cerveau avec d’autres, tandis que l’homme vit le plus souvent enfermé dans son crâne. Ces êtres-là ont décidément beaucoup à nous apprendre...

Auteur: Internet

Info: http://www.dauphinlibre.be/dauphins-cerveau-intelligence-et-conscience-exotiques

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non-voyant

Le monde tel que l'imaginent ceux qui n'ont jamais vu. (I)
Depuis les opérations pratiquées par le chirurgien anglais Cheselden en 1728 sur des personnes atteintes de cataracte congénitale, redonner la vue aux aveugles ne tient plus du miracle biblique mais de la science - et les avancées extraordinaires que la médecine a effectuées dans ce domaine invitent à être optimistes pour l'avenir. Toutefois, la plupart des aveugles de naissance qui vivent aujourd'hui savent que ces progrès bénéficieront surtout aux générations futures et que, pour la majorité d'entre eux, ils quitteront ce monde sans en avoir rien vu. Pour autant, à en croire certains, il n'y a nullement là de quoi s'affliger :" Je ne regrette jamais de ne pas voir. Je vois autrement et puis je n'ai jamais vu avec les yeux, ça ne peut pas me manquer." affirme Sophie Massieu (36 ans, journaliste).
L'aveugle de naissance "ne sait pas ce qu'il perd", littéralement parlant, il n'a donc aucune raison de soupirer après un état qu'il n'a jamais connu. Ce n'est donc pas, dans son cas, sur le mode de la lamentation ou du regret lyrique qu'il faut entendre le mot "jamais", comme ce peut être le cas pour les aveugles tardifs qui restent longtemps hantés par leurs souvenirs de voyant... Non, pour l'aveugle-né, ce "jamais" fonctionne à la manière d'un levier, d'une faille où s'engouffre son imagination : à quoi peut ressembler ce monde visible dont tout le monde parle autour de lui ? Comment se représenter des notions proprement visuelles, telles que les couleurs, l'horizon, la perspective ? Toutes ces questions pourraient tenir en une seule : comment concevoir ce qu'est la vue sans voir ? Question qui a sa réciproque pour le voyant : comment se représenter ce que c'est que de ne pas voir pour quiconque a toujours vu ? Il y a là un défi lancé à l'imagination, défi d'autant plus difficile à relever que les repères auxquels chacun aura spontanément tendance à se référer seront tirés d'un univers perceptif radicalement différent de celui qu'on cherche à se représenter, et qu'ils risquent fort, par conséquent, de nous induire en erreur. Il n'est pas dit que ce fossé perceptif puisse être franchi par l'imagination - mais comme tout fossé, celui-ci appelle des passerelles : analogies puisées dans les autres sens ou dans le langage, efforts pour s'abstraire de ses automatismes de pensée - ce que Christine Cloux, aveugle de naissance, appelle une forme de "souplesse mentale"... L'enjeu, s'il est vital pour l'aveugle, peut sembler minime pour le voyant : que gagne-t-on à imaginer le monde avec un sens en moins ? On aurait tort de négliger l'intérêt d'une telle démarche intellectuelle, car s'interroger sur la perception du monde d'un aveugle de naissance, c'est remettre la nôtre en perspective, en appréhender le caractère relatif, mesurer à quel point nos représentations mentales dépendent de nos dispositions sensibles - enfin, c'est peut-être le moyen de prendre conscience des limites de notre point de vue et, le temps d'un effort d'imagination, de les dépasser...
Imaginer le monde quand on est enfant
Le jeune enfant voyant croit que les choses cessent d'exister dès lors qu'elles quittent son champ de vision : un moment très bref, dit-on, sépare le temps où il croit encore sa mère absente et celui où il la croit déjà morte. Qu'on s'imagine alors ce qu'il en est pour l'enfant aveugle de naissance... "J'avais peur de lancer un ballon, parce que je pensais qu'il allait disparaître. Mon monde s'arrêtait à un mètre, au-delà, pour moi, c'était le vide. "explique Natacha de Montmollin (38 ans, informaticienne de gestion). Comment être sûr que les objets continuent d'exister quand ils sont hors de portée, d'autant plus quand on ne les retrouve pas là où on les avait laissés ? Comment accorder sa confiance à monde aussi inconstant ? Un enfant aveugle de naissance aura nécessairement besoin de plus de temps qu'un enfant voyant pour trouver ses marques et pour comprendre le monde qui l'entoure.
Dans les premières années de sa vie, l'aveugle de naissance n'a pas conscience de son handicap... De fait, s'il ne vivait dans une société de voyants, il passerait toute sa vie sans se douter de l'existence du monde visible. Dans la nouvelle de H. G. Wells Le pays des aveugles, le héros, voyant débarqué dans une communauté d'aveugles qui vit repliée sur elle-même, découvre à ses dépens qu'on y traite ceux qui se prétendent doués de la vue non comme des dieux ou des rois, mais comme des fous, comme nous traitons ceux qui affirment voir des anges - pour le dire autrement : au royaume des aveugles de naissance, les borgnes seraient internés. C'est uniquement parce qu'il vit dans une société organisée par et pour des voyants que l'aveugle finit par contracter, avec le temps, le sentiment de sa différence. Cette découverte peut se faire de différentes manières : les parents peuvent, quand ils estiment leur enfant assez mûr, lui expliquer son infirmité ; l'enfant peut également la découvrir par lui-même, au contact des autres enfants. "On ne m'a jamais expliqué que j'étais aveugle, j'en ai pris conscience avec le temps, explique Sophie Massieu. Quand je jouais à cache-cache avec les autres enfants, je ne comprenais pas pourquoi j'étais toujours la première débusquée... Evidemment, j'étais toujours cachée sous une table, sans rien autour pour me protéger, je sautais un peu aux yeux..."
Le jeune aveugle de naissance finit donc par comprendre qu'il existe une facette de la réalité que les autres perçoivent mais qui lui demeure inaccessible. Dans un premier temps, cette "face du monde" doit lui paraître pour le moins abstraite et difficile à concevoir. Pour avoir un aperçu de l'effort d'imagination que cela exige, le voyant devrait tenter de se représenter une quatrième dimension de l'espace qui l'engloberait sans qu'il en ait conscience...
Il est inévitable que l'aveugle de naissance commence par se faire de certaines choses une représentation inexacte : ces "fourvoiements de l'imagination" constituent des étapes indispensables à l'élaboration de l'intelligence, qu'on soit aveugle ou non. En outre, ils peuvent avoir leur poésie. Un psychologue russe (cité par Pierre Villey dans son ouvrage Le monde des aveugles) mentionne l'exemple d'un jeune aveugle de naissance qui se représentait absolument tous les objets comme en mouvement, jusqu'aux plus immobiles : "pour lui les pierres sautent, les couleurs jouent et rient, les arbres se battent, gémissent, pleurent". Cette représentation peut prêter à sourire, mais après tout, la science et la philosophie ne nous ont-elles pas enseigné que l'immobilité du monde n'était qu'une illusion de la perception, découlant de l'incomplétude de notre point de vue ? A ce titre, l'imagination de ce garçon semblait lui avoir épargné certaines illusions dont l'humanité a eu tant de mal à se déprendre : par exemple, quoiqu'il ne sut rien du mouvement des corps célestes, on raconte que, lorsqu'on lui posa la question : "le soleil et la lune se meuvent-ils ?", il répondit par l'affirmative, sans aucune hésitation.
L'aveugle de naissance peut se représenter la plupart des objets en les palpant. Quand ceux-ci sont trop imposants, des maquettes ou des reproductions peuvent s'y substituer. "J'ai su comment était foutue la Tour Eiffel en ayant un porte-clefs entre les mains... " se souvient Sophie Massieu. Tant que l'objet demeure hors de sa portée, hors du champ de son expérience, il n'est pas rare que l'aveugle s'en fasse une image fantaisiste en se fondant sur la sonorité du mot ou par associations d'idées. Ce défaut n'est pas propre aux aveugles, et "chez chacun, l'imagination devance l'action des sens", pour reprendre l'expression de Pierre Villey. Mais ce défaut peut avoir des conséquences nettement plus fâcheuses chez l'aveugle de naissance, car s'il se contente de ces représentations inexactes et ne cherche pas à les corriger, il risque de méconnaître le monde qui l'entoure et de s'isoler dans un royaume fantasque construit selon les caprices de son imagination. L'aveugle-né n'a pas le choix : il doit s'efforcer de se représenter le monde le plus fidèlement possible, sous peine d'y vivre en étranger...
Imaginer les individus
Très tôt, l'aveugle va trouver des expédients pour se représenter le monde qui l'entoure, à commencer par les gens qu'il côtoie. Leur voix, pour commencer, constitue pour lui une mine d'informations précieuses : l'aveugle prête autant attention à ce que dit son interlocuteur qu'à la manière dont il le dit. La voix révèle un caractère, le ton une humeur, l'accent une origine... "On peut dire ce qu'on veut, mais notre voix parle de nous à notre insu." explique Christine Cloux (36 ans, informaticienne). Certains aveugles considèrent qu'il est beaucoup plus difficile de déguiser les expressions de sa voix que celles de son visage, et pour eux, c'est la voix qui est le miroir de l'âme : "Un monde d'aveugle aurait ses Lavater [auteur de"L'Art de connaître les hommes par la physionomie"]. Une phonognomie y tiendrait lieu de notre physiognomie." écrit Pierre Villey dans Le monde des aveugles. Mais à trop se fier au caractère révélateur d'une voix, l'aveugle s'expose parfois à de cruelles désillusions... Villey cite le cas d'une jeune aveugle qui s'était éprise d'une actrice pour le charme de sa voix : "Instruite des déportements peu recommandables de son idole elle s'écrie dans un naïf élan de désespoir : "Si une pareille voix est capable de mentir, à quoi pourrons-nous donc donner notre confiance ?".
De nombreux autres indices peuvent renseigner l'aveugle sur son interlocuteur : une poignée de main en dit long (Sophie Massieu affirme haïr "les poignées de main pas franches, mollasses...", qu'elle imagine comparables à un regard fuyant) ; le son des pas d'un individu peut renseigner sur sa corpulence et sa démarche ; les odeurs qu'il dégage peuvent donner de précieux renseignements sur son mode de vie - autant d'indices que le voyant néglige souvent, en se focalisant principalement sur les informations que lui fournit sa vue. Quant à l'apparence physique en elle-même, la perspicacité de l'aveugle atteint ici ses limites : "Il y a des choses qu'on sait par le toucher mais d'autres nous échappent : on a la forme du visage, mais on n'a pas la finesse des traits, explique Sophie Massieu. On peut toujours demander aux copines "tiens, il me plaît bien, à quoi il ressemble ?" Bon, il faut avoir des bonnes copines... " Certains aveugles de naissance sont susceptibles de se laisser influencer par les goûts de la majorité voyante : Jane Hervé mentionne la préférence d'une aveugle de naissance pour les blonds aux yeux bleus :"Je crois que les blonds sont beaux. Peut-être que c'est rare...". "D'une façon générale, je pense que la manière dont nous imaginons les choses que nous ne pouvons pas percevoir tient beaucoup à la manière dont on nous en parle, explique Sophie Massieu. Si la personne qui vous le décrit trouve ça beau, vous allez trouvez ça beau, si elle trouve ça moche, vous allez trouver ça moche...". De ce point de vue, l'aveugle dépend - littéralement - du regard des autres : "Mes amis et ma famille verbalisent beaucoup ce qu'ils voient, alors ils sont en quelque sorte mon miroir parlant..." confie Christine Cloux.
Imaginer l'espace
On a cru longtemps que l'étendue était une notion impossible à concevoir pour un aveugle. Platner, un médecin philosophe du siècle dernier, en était même arrivé à la conclusion que, pour l'aveugle-né, c'était le temps qui devait faire office d'espace : "Eloignement et proximité ne signifient pour lui que le temps plus ou moins long, le nombre plus ou moins grand d'intermédiaires dont il a besoin pour passer d'une sensation tactile à une autre.". Cette théorie est très poétique - on se prend à imaginer, dans un monde d'aveugles-nés, des cartes en relief où la place dévolue à chaque territoire ne serait pas proportionnelle à ses dimensions réelles mais à son accessibilité, au temps nécessaire pour le parcourir... Dans les faits, cependant, cette théorie nous en dit plus sur la manière dont les voyants imaginent le monde des aveugles que sur le contraire. Car s'il faut en croire les principaux intéressés, ils n'ont pas spécialement de difficulté à se figurer l'espace.
"Tout est en 3D dans ma tête, explique Christine Cloux. Si je suis chez moi, je sais exactement comment mon appartement est composé : je peux décrire l'étage inférieur sans y aller, comme si j'en avais une maquette. Vraiment une maquette, pas un dessin ou une photo. De même pour les endroits que je connais ou que j'explore : les gares, des quartiers en ville, etc. Plus je connais, plus c'est précis. Plus j'explore, plus j'agrandis mes maquettes et j'y ajoute des détails."La représentation de l'espace de l'aveugle de naissance se fait bien sous formes d'images spatiales, mais celles-ci n'en sont pas pour autant des images-vues : il faudrait plutôt parler d'images-formes, non visuelles, où l'aveugle projette à l'occasion des impressions tactiles. Pour décrire cette perception, Jane Hervé utilise une comparaison expressive :"les sensations successives et multiples constituent une toile impressionniste - tramée de mille touchers et sensations - suggérant la forme sentie, comme les taches d'or étincelant dans la mer composant l'Impression, soleil devant de Claude Monet."
A l'époque des Lumières, certains commentateurs, stupéfaits par les pouvoirs de déduction des aveugles, s'imaginaient que ceux-ci étaient capables de voir avec le bout de leurs doigts (ils étaient trompés, il faut dire, par certains aveugles qui prétendaient pouvoir reconnaître les couleurs d'un vêtement simplement en touchant son étoffe). Mais les aveugles de naissance eux-mêmes ne sont pas à l'abri de ce genre de méprises : Jane Hervé cite le cas d'une adolescente de 18 ans - tout à fait intelligente par ailleurs - qui pensait que le regard des voyants pouvait contourner les obstacles - exactement comme la main permet d'enserrer entièrement un petit objet pour en connaître la forme. Elle pensait également que les voyants pouvaient voir de face comme de dos, qu'ils étaient doués d'une vision panoramique : "Elle imaginait les voyants comme des Janus bifaces, maîtres du regard dans toutes les directions.". L'aveugle du Puiseaux dont parle Diderot dans sa Lettre sur les aveugles, ne sachant pas ce que voulait dire le mot miroir, imaginait une machine qui met l'homme en relief, hors de lui-même. Chacun imagine l'univers perceptif de l'autre à partir de son univers perceptif propre : le voyant croit que l'aveugle voit avec les doigts, l'aveugle que le voyant palpe avec les yeux. Comme dans la parabole hindoue où des individus plongés dans l'obscurité tentent de déduire la forme d'un éléphant en se fondant uniquement sur la partie du corps qu'ils ont touché (untel qui a touché la trompe prétend que l'éléphant a la forme d'un tuyau d'eau, tel autre qui a touché l'oreille lui prête la forme d'un éventail...) - semblablement les êtres humains imaginent un inconnu radical à partir de ce qu'ils connaissent, quand bien même ces repères se révèlent impropres à se le représenter.
Parmi les notions spatiales particulièrement difficiles à appréhender pour un aveugle, il y a la perspective - le fait que la taille apparente d'un objet diminue proportionnellement à son éloignement pour le sujet percevant. "En théorie je comprends ce qu'est la perspective, mais de là à parvenir à réaliser un dessin ou à en comprendre un, c'est autre chose - c'est d'ailleurs la seule mauvaise note que j'ai eu en géométrie, explique Christine Cloux. Par exemple, je comprends que deux rails au loin finissent par ne former qu'une ligne. Mais ce n'est qu'une illusion, car en réalité il y a toujours deux rails, et dans ma tête aussi. Deux rails, même très loin, restent deux rails, sans quoi le train va avoir des ennuis pour passer..." Noëlle Roy, conservatrice du musée Valentin Haüy, se souvient d'une aveugle âgée, qui, effleurant avec ses doigts une reproduction en bas-relief du tableau l'Angélus de Millet, s'était étonnée que les deux paysans au premier plan soient plus grands que le clocher dont la silhouette se découpe sur l'horizon. Quand on lui expliqua que c'était en vertu des lois de la perspective, les personnages se trouvant au premier plan et le clocher très loin dans la profondeur de champ, la dame s'étonna qu'on ne lui ait jamais expliqué cela... On peut se demander comment cette dame aurait réagi si, recouvrant l'usage de la vue suite à une opération chirurgicale, elle avait aperçu la minuscule silhouette d'un individu dans le lointain : aurait-elle pensé que c'était là sa taille réelle et que cet individu, s'approchant d'elle, n'en serait pas plus grand pour autant ? Jane Hervé cite le témoignage d'une aveugle de 62 ans qui a retrouvé la vue suite à une opération : "Tout était déformé, il n'y avait plus aucune ligne droite, tout était concave... Les murs m'emprisonnaient, les toitures des maisons paraissaient s'effondrer comme après un bombardement. Ce que je voyais ovale, je le sentais rond avec mes mains. Ce que je distinguais à distance, je le sentais sur moi. J'avais des vertiges permanents. "On peut s'imaginer le cauchemar que représente une perception du monde où la vision et la sensation tactile ne concordent pas, où les sens envoient au cerveau des signaux impossibles à concilier... D'autres aveugles de naissance, ayant recouvré l'usage de la vue suite à une opération, dirent avoir l'impression que les objets leur touchaient les yeux : ils eurent besoin de plusieurs jours pour saisir la distance et de plusieurs semaines pour apprendre à l'évaluer correctement. Cela nous rappelle que notre vision du monde en trois dimensions n'a rien d'innée, qu'elle résulte au contraire d'un apprentissage et qu'il y entre une part considérable de construction intellectuelle.

Auteur: Molard Arthur

Info: http://www.jeanmarcmeyrat.ch/blog/2011/05/12/le-monde-tel-que-limaginent-ceux-qui-nont-jamais-vu

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