Elle invoque la Nuit, mère des mystères,
Les astres qui, du char d’or, lancent leurs feux prospères,
La Lune aux trois visages, Hécate, dont la voix
Sait ébranler la terre et les cieux à la fois.
Elle appelle à son aide et les vents et les ondes,
Les monts, les lacs, les dieux des forêts profondes.
[...]
Par elle, les ruisseaux remontent vers leur source,
Les fleuves s’arrêtent, et la mer, dans sa course,
Retient ses flots grondants. Elle apaise les bois,
Fait tomber les nuages et chasser les effrois.
Par elle, les dragons, d’un sommeil invincible,
S’endorment, et les rocs, d’un mouvement sensible,
S’arrachent à la terre et roulent dans les champs.
[...]
Elle dit, et soudain, de ses mains souveraines,
Elle mêle les sucs des herbes inhumaines,
Les pierres que le feu du ciel a pénétrées,
Le sable des déserts, les eaux ensorcelées,
La mousse arrachée aux chênes séculaires,
Les ailes des hiboux, les entrailles des lièvres.
Elle ajoute à ces dons des paroles sacrées,
Des mots qui font trembler les ombres égarées."