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penseurs

Question : Gómez Dávila entretenait une méfiance vis-à-vis de la philosophie qu’il réduisait volontiers à une simple rhétorique. Pourquoi cette critique de la philosophie chez lui sachant que son œuvre n’est pas seulement un exercice littéraire mais bien la défense de vues proprement philosophiques ?

Réponse : En paphrasant Pascal, je dirai que se méfier de la philosophie, c’est vraiment philosopher. Cette méfiance, en dehors de son aspect proprement méthodologique, tient certainement à la fois à son scepticisme et à son fidéisme. Méfiant par tempérament des nouveautés philosophiques et des systèmes totalisants de la modernité ou post-modernité. Il s’agit là de la même défiance que l’on trouvait chez certains, dont il est l’héritier, à l’égard de ceux que l’on appelait les "Philosophes" au XVIIIe.

L’ "anti-philosophie", ou la critique des "philosophes" est une caractéristique des penseurs contre-révolutionnaires et réactionnaires – à commencer par Joseph de Maistre – mais aussi des penseurs non-systématiques, existentiaux pour ne pas dire "existentialistes" (Pascal encore une fois, Kierkegaard, Nietzsche, Wittgenstein, etc.). Sa méfiance dans les pouvoirs de la raison, ou du rationalisme, de parvenir, seuls, à une quelconque vérité également. Ici, c’est l’héritier du romantisme, allemand mais pas seulement si l’on se souvient des critiques de Rousseau contre le culte de la science et de la raison de ses contemporains, autre facette des anti-Lumières. À l’instar d’un Pascal et d’un Rousseau ou Novalis, Gómez Dávila place la foi d’une part, puis le sentiment, la sensibilité ou l’intuition d’autre part, au-dessus de la raison et surtout de la ratiocination. Mais par ailleurs et paradoxalement, c’est également un héritier des Lumières et surtout de Voltaire par la dimension critique et même sarcastique de son œuvre, la liberté de sa pensée et le "grand style" de son écriture.

Pour finir, justement à propos de style, ce n’est pas tant la rhétorique qu’il méprise chez certains philosophes que le "jargon" c’est-à-dire, "l’impureté", voire l’absence, de style propre à l’expression technique du spécialiste (je renvoie sur ce sujet au paragraphe 101 du Gai savoir de Nietzsche dédié à Voltaire). Or selon Gómez Dávila, ainsi qu’il l’exprime à plusieurs reprises, la philosophie a besoin, pour sortir de sa routine académique et se revivifier, d’amateurs, de non-spécialistes ou "aficionados" tels que Socrate, Descartes, Hume, Kierkegaard, Nietzsche, etc. Pour lui, ainsi que j’ai essayé de le démontrer dans l’ouvrage en suivant l’interprétation de Pierre Hadot, la philosophie est plus une manière de vivre qu’une profession ; ou, si elle était un métier, ce serait un "métier de vivre" pour reprendre la belle formule de Pavese. Il y a incontestablement une dimension existentielle de la philosophie qui échappe, par définition, aux universitaires.

Auteur: Rabier Michaël

Info: https://philitt.fr/2021/03/05/

[ historique ]

 

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fraicheur juvénile

"Il y a des êtres qui font d’un soleil une simple tache jaune, mais il y en a aussi qui font d’une simple tache jaune, un véritable soleil" (Pablo Picasso)

Un jour où j’ai montré à l’un de mes petits-fils quelques plantes en pots sur le balcon de l’appartement familial, j’ai été un peu décontenancé et très agréablement impressionné de le surprendre, peu après, en train d’expliquer à son frère : "C’est incroyable, la plus belle fleur dans les pots de Papy, c’en est une qu’il n’a pas plantée !". Il parlait d’une fleur de pissenlit qui s’était développée à partir d’une graine amenée par le vent. Nombre d’adultes n’y auraient vu qu’une "mauvaise herbe" qu’il fallait arracher pour préserver la prétendue harmonie des plantations artificielles. Pourtant, un enfant, dont la perception n’était pas encore émoussée, était capable de s’émerveiller de ce qu’un adulte un peu trop "mûr" finit par trouver banal. Cet émoussement n’est pas une fatalité : je pense qu’un François d’Assise, par exemple, montrait qu’il avait su conserver cette aptitude naturelle des enfants quand il recommandait de ne pas cultiver tout le jardin, mais d’accepter d’en laisser une partie en friche, pour garder intacte notre capacité à nous émerveiller devant la beauté des herbes sauvages.

Je trouve que la remarque de mon petit-fils exprimait une vérité très profonde et nous donnait une leçon très importante. Jésus-Christ ne disait-il pas, paraît-il : "Si vous ne changez pas d'attitude et ne devenez pas comme de petits enfants, vous n'entrerez pas dans le royaume des cieux" (Nouveau Testament, Matthieu 18:3). Je ne sais pas ce qu’est le "royaume des cieux", encore moins ce qu’il faut faire pour y entrer. Par contre, ce dont je suis convaincu, c’est que nous ne pouvons pas être vraiment heureux si nous ne retrouvons pas ou  n’entretenons pas la pureté du regard qu’on avait quand on était enfant. Il faut parvenir à comprendre et ressentir en profondeur, avec son esprit, son cœur et son corps, que rien n’est banal !

Heureusement, cela s’apprend (comme beaucoup d’autres choses) ! Il faut, patiemment, entretenir la flamme au fond de soi, rejeter les tendances "adultes" à considérer comme "puéril" l’émerveillement, mais au contraire, adresser régulièrement à ce soleil intérieur, la même louange que celle adressée par Edmond Rostand au soleil extérieur : "Ô Soleil ! toi sans qui les choses ne seraient que ce qu'elles sont !" (Hymne au soleil dans Chantecler).

Mais si jamais vous n’y parveniez pas, au moins, par pitié, abstenez-vous d’étouffer l’émerveillement des autres ! Ne dites jamais, surtout à un enfant, quelque chose comme : "Ce n’est que le soleil " ou "Ce n’est qu’une fleur". Rien n’est banal !

Auteur: Santarini Gérard

Info: Extrait de "Croire ou savoir ? Petites graines de réflexion pour un monde meilleur", Librinova, 2019

[ émerveillement ] [ spiritualité ] [ chiasme ]

 
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green washing

La "transition écologique" promise par le numérique, le tout électrique et le photovoltaïque exige beaucoup d’électricité. Selon le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), l'affinage du silicium en polysilicium consomme 150 MWh par tonne de produit fini. La transformation du polysilicium en lingot monocristallin, 31 MWh par tonne. Enfin, la découpe des plaquettes, 42,5 MWh par tonne. Voilà pour les économies d’énergie.

Du côté de la matière, il faut 7,14 tonnes de quartz pour une tonne de silicium monocristallin. Et la découpe de celui-ci en tranches produit des déchets de sciage (le "kerf") perdus pour les puces, estimés à 40 % du lingot. Mais on ne rebouche pas les carrières avec. Quant aux produits chimiques utilisés tout au long du procédé, la filière est pudique à ce sujet. Difficile d’en établir une liste précise et quantifiée. Le CNRS donnait en 2010 le chiffre de 280 kg de produits chimiques par kilo de silicium produit (acides, ammoniaque, chlore, acétone, etc.).

Tout de même, pensent les électeurs Verts, si les ingénieurs assurent que les technologies issues du silicium permettent la "transition écologique", il doit bien y avoir une raison ? La raison, c’est une de ces duperies dont les technocrates sont coutumiers et que les écocitoyens sont trop heureux de gober. Leur "transition écologique" repose sur le seul indicateur des émissions de gaz à effet de serre. Leur unique objectif, la "décarbonation" de l’économie, ignore l’entropie de la matière et de l’énergie, c’est-à-dire la réalité physique du désastre industriel, sans parler de la dévastation des milieux par les pollutions industrielles et l’artificialisation.

Les ingénieurs parviendront peut-être à maintenir un mode de vie techno-consommateur sans émission de carbone (quid du méthane, autre gaz à effet de serre ?), avec une hausse des températures limitée à 2°, c’est-à-dire des catastrophes climatiques en chaîne, tout de même. Ce sera au prix d’une Terre dévastée par la production énergétique. Des millions d’éoliennes à perte de vue, sur terre et en mer, des océans de panneaux solaires, des installations électriques partout, sans oublier le nucléaire, ses déchets éternels, son poison et sa menace. Quant aux barrages alpins, à la vitesse où fondent les glaciers, qui peut garantir que l’eau y sera suffisante ? La Romanche coulera-t-elle aussi impétueusement dans les périodes de sécheresse de la vertueuse économie décarbonée ?

Votre voiture électrique n’émet certes pas de CO2 et votre smartphone vous économise des déplacements, mais la société numérique et automobile dévore les ressources naturelles – matière et énergie – qui nous permettent de vivre. Un détail. Et on ne vous parle pas de la faune, de la flore et des paysages - pas de sensiblerie.

Auteur: PMO Pièces et main-d'oeuvre

Info: https://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/cycle_silicium.pdf

[ développement durable ] [ coûts cachés ] [ conséquences ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

mystère

Des centaines d'étoiles ont mystérieusement disparu du ciel

On les cherche encore.

(Image : À l'oeil nu, nous voyons seulement 6.000 étoiles sur les 200 trillions estimées présentes dans l'espace. ) Les étoiles ne disparaissent pas du ciel sans laisser de traces. Une étoile dite ordinaire va petit à petit perdre l'hélium qui la compose avant de s'éteindre, mourir puis devenir une naine blanche. Une étoile massive va quant à elle finir sa vie par une explosion de supernova: son noyau se contracte alors brutalement et le reste de l'étoile est expulsé dans l'espace, avant de former un trou noir. Deux processus connus et identifiés par les astronomes.

Pourtant, des centaines d'étoiles ont soudainement disparu. Selon des scientifiques, ces astres pourtant répertoriés dans des relevés astronomiques, sont absents des nouveaux. D'après une équipe internationale dirigée par l'astrophysicien Alejandro Vigna-Gómez de l'Institut Niels Bohr au Danemark et de l'Institut Max Planck d'astrophysique en Allemagne, certaines étoiles massives ne meurent pas par explosion de supernova avant la formation d'un trou noir.

L'effondrement est si complet qu'aucune explosion ne se produit, rien ne s'échappe et on ne voit aucune supernova brillante dans le ciel nocturne ", explique l'astrophysicien. Lorsqu'une étoile massive meure, sa masse est éjectée dans l'espace autour d'elle et se crée alors un nuage de poussière et de gaz qui reste durant des centaines de milliers voire millions d'années. Pendant ce temps, son noyau s'effondre sous l'effet de la gravité et se forme parfois un trou noir. De plus en plus de preuves suggèrent que des étoiles massives peuvent s'effondrer directement dans ces trous noirs, sans passer par une supernova. Un processus qui ne laisse alors aucun résidu visible derrière lui et qui expliquerait la disparition soudaine de l'astre.

La thèse des extraterrestres

Pour comprendre ce phénomène, des chercheurs ont lancé en 2019 le projet Vasco, pour The Vanishing and Appearing Sources during a Century of Observations (La disparition et l'apparition de sources au cours d'un siècle d'observations). En s'appuyant sur d'anciennes données, les scientifiques analysent ces étoiles disparues pour les recenser et estimer leur nombre. Le but est aussi de vérifier qu'il ne s'agit pas là d'erreurs de relevé. Actuellement, plus de 800 étoiles manquent à l'appel selon les recensements établis depuis les années 1950. En plus de la formation de trou noir, les chercheurs ont émis la thèse d'une intelligence extraterrestre.

Participent également au projet Vasco des astronomes du programme Search for Extra-Terrestrial Intelligence (SETI). Ces chercheurs ont émis l'hypothèse de civilisations extraterrestres avancées, qui pourraient avoir développé des technologies capables de modifier l’aspect d’une étoile. Une thèse qui frôle la science-fiction et qui n'est pour le moment pas privilégiée par les experts.



 

Auteur: Internet

Info: https://www.slate.fr/, Mona Delahais - 26 mai 2024

[ énigme ] [ cosmogonie ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

prophète

Tout repose donc sur la notion de Moïse l’Égyptien et de Moïse le Midianite. Moïse l’Égyptien est le Grand Homme, le Législateur, et aussi le Politique, le Rationaliste, celui dont FREUD prétend découvrir la voie dans l’apparition historique à une date précise, au XIVème siècle avant JÉSUS-CHRIST de la religion d’AKHÉNATON attestée par des découvertes récentes. C’est à savoir quelque chose qui promeut la fonction unique, l’unitarisme de l’énergie d’où rayonne, si l’on peut dire, la distribution du monde symbolisée par l’organe solaire. 

Le personnage qu’est Moïse l’Égyptien est pour FREUD au-delà des débris humains de cette première entreprise d’une vision entièrement scientifique, rationaliste du monde, qui est supposée dans cet unitarisme, qui est unitarisme du réel, unité substantielle du monde centrée dans le soleil, et dont vous savez que l’histoire de l’Égypte a démontré l’échec. À savoir qu’à peine disparu AKHÉNATON, le fourmillement des thèmes religieux, multipliés en Égypte plus qu’ailleurs, le pandémonium des dieux reprend le dessus et la barre, et réduit à néant toute la réforme d’AKHÉNATON. Un homme garde avec lui le flambeau de cette visée rationaliste, c’est Moïse l’Égyptien qui choisit un petit groupe d’hommes pour les mener à travers l’épreuve qui les rendra dignes de fonder une communauté acceptant à sa base ces principes. [...]

Et il y a Moïse le Midianite, le gendre de JETHRO, et c’est celui-là dont FREUD nous enseigne que la figure a été confondue avec celle du premier, Moïse le Midianite que FREUD appelle aussi celui du Sinaï, de l’Horeb. C’est en effet bien là la question. C’est celui-là qui entend surgir du buisson ardent la Parole, à mes yeux, tout à fait décisive, qui ne saurait être élidée en la matière. FREUD l’élide, cette parole fondamentale qui est celle-ci : "Je suis, non pas... comme toute la gnose chrétienne a essayé de le faire entendre, c’est-à-dire de nous introduire dans des difficultés concernant l’être qui ne sont pas près de finir, et qui peut-être n’ont pas été sans compromettre ladite exégèse ...celui qui est", mais "Je suis ce que je suis". [...]

Pour tout dire, Moïse le Midianite me paraît poser son problème propre, celui que je voudrais bien savoir : en face de qui, en face de quoi il était sur le Sinaï et sur l’Horeb.

Mais enfin, faute d’avoir pu soutenir l’éclat de la face de celui qui a dit "Je suis ce que Je suis", nous nous contenterons du point où nous sommes, de dire que le buisson ardent en somme c’était la Chose de MOÏSE et puis de la laisser là où elle est, quitte à supputer les conséquences qu’ont eu la révélation de ces choses.

Auteur: Lacan Jacques

Info: 16 mars 1960

[ judaïsme ] [ psychanalyse ] [ monothéisme ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

autoportrait

Je suis probablement ce qu’on appelle un décadent, et il doit exister en moi (comme définition extérieure de mon esprit) de ces scintillations tristes, d’une étrangeté postiche, qui cristallisent en mots imprévus une âme exotique et véhémente. Je sens que je suis ainsi fait, et que je suis absurde. C’est pourquoi je tente, pour imiter une hypothèse des auteurs classiques, de figurer tout au moins, par le biais d’une mathématiques expressive, les sensations décoratives de mon âme de remplacement. Il arrive un moment, au cours de mes méditations écrites, où je ne sais plus bien où se trouve le centre de mon attention - dans les sensations éparses que j’essaye de décrire, telles des tapisseries inconnues, ou bien dans les mots au milieu desquels, en voulant décrire ma description elle-même, je finis par m’embrouiller, m’égarer et voir d’autres choses par-delà. Je sens se former en moi des associations d’idées, de mots et d’images - tout cela de façon lucide et diffuse en même temps -, et je dis tout autant ce que j’éprouve que ce que je crois éprouver ; je ne distingue plus ce que mon âme me suggère des images qui fleurissent sur le sol où elle les a laissé choir ; je ne discerne même plus si le son d’un mot barbare, ou le rythme d’une phrase intercalée, ne m’éloignent pas du sujet déjà bien défini, de la sensation engrangée, et ne me dispensent pas ainsi de penser et de dire, comme des grands voyages faits pour me distraire. Et tout cela qui, avec la répétition, devrait me donner une impression de futilité, d’échec, de souffrance enfin, ne réussit qu’à me donner des ailes dorées. Dès que je me mets à parler d’images - et peut-être parce que j’allais en condamner l’abus -, voilà que naissent en moi d’autres images ; dès que je me dresse en moi-même pour refuser ce que je n’éprouve pas, me voilà précisément en train de l’éprouver, et mon refus lui-même devient une impression tout ornée de broderies ; lorsque, ayant finalement perdu confiance en mes efforts, je veux me laisser aller aux voies de traverse, voici qu’un terme bien classique, un adjectif spatial et sobre, me font voir clairement devant moi, avec l’éclat d’un rayon de soleil, la page écrite somnolentement, et les lettres nées de l’encre de ma plume sont alors une carte absurde aux signes magiques. Et je me dépose en même temps que ma plume, et je m’enveloppe dans la longue cape de l’inertie, adossé à mon siège, épars, lointain, intervallaire et succube, final comme un naufragé se noyant en vue d’îles merveilleuses, au sein même de ces mers dorées de mauve dont, sur des couches lointaines, il avait véritablement rêvé.

Auteur: Pessoa Fernando (Alv. de Campos)

Info: Le livre de l'intranquillité

[ introspectif ] [ langage ] [ onirisme ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

dernières paroles

Ici nous sommes cinq mille
Dans cette petite partie de la ville.
Nous sommes cinq mille.
Je me demande combien nous sommes en tout
Dans les villes et dans le pays entier ?
Rien qu'ici
Il y a dix mille mains qui sèment les graines
Et font tourner les usines
Combien d'humanité
Exposée à la faim, au froid, à la panique, la douleur,
pression morale, terreur et folie
Six d'entre nous ont été perdus
Comme dans un espace étoilé.
Un mort, autre battu comme je n'ai jamais imaginé
qu'un être humain puisse être battu.
Les autres quatre ont que leur terreur finisse
En bondissant dans le néant,
Un autre tapait sa tête contre un mur,
Mais tous avec le regard fixe de la mort.
Quelle horreur crée le visage du fascisme !
Ils effectuent leurs plans avec la précision du couteau.
Rien ne compte pour eux.
Pour eux le sang égale les médailles,
Le massacre est acte d'héroïsme.
Oh Dieu, est-ce le monde que tu as créé,
Pendant tes sept jours d'étonnement et le travail ?
Entre ces quatre murs seulement un nombre existe
qui ne progresse pas,
qui lentement exigera toujours plus la mort.
Mais soudainement ma conscience se réveille
Et je vois que cette marée n'a aucun battement de coeur,
Seulement l'impulsion de machines
Et les militaires montrant des visages de sages-femmes
pleins de douceur.
Laissez le Mexique, Cuba et le monde
Crier contre cette atrocité!
Nous sommes dix mille mains
Qui ne peuvent rien produire.
Combien d'entre nous dans tout le pays ?
Le sang de notre Président, notre compagnon
Frappera avec plus de force que des bombes et des mitrailleuses!
Ainsi notre poing mènera la grève à nouveau!
Comme il est dur de chanter
Quand il faut chanter d'horreur.
Horreur que je vis,
Horreur dont je meurs.
Me voir parmi tant et
tant de moments d'infini
dans lequel silence et cris
sont la fin de ma chanson.
Ce que je vois, je n'ai jamais vu
Ce que j'ai ressenti et ce que je sens
Donneront naissance au moment...

Il ne peut achever car rapidement on le sépare des autres prisonniers. Mais il peut à le transmettre à un prisonnier qui parvient à le dissimuler dans sa chaussure. Plusieurs témoignages rapportent qu'il fut ensuite battu, qu'on lui coupa les doigts à la hache et qu'ensuite ses tortionnaires lui proposèrent ironiquement de jouer de la guitare et de chanter. C'est alors qu'il aurait entonné "Venceremos" l'hymne de campagne de Salvador Allende... dont voici le premier couplet et le refrain.

Desde el hondo crisol de la patria
se levanta el clamor popular,
ya se anuncia la nueva alborada,
todo Chile comienza a cantar.

Venceremos, venceremos,
mil cadenas habrá que romper,
venceremos, venceremos,
la miseria al fascismo sabremos vencer.

Auteur: Jara Victor

Info: battu à nouveau il est ensuite abattu à la mitraillette

[ exécutions ]

 

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hérésie chrétienne

Le défi que les Frères du Libre Esprit lancent à la voie chrétienne de l’intériorité [...] concerne en dernier ressort la dualité créé-Incréé, sur le plan de laquelle se situe l’exotériste pieux. Celui-ci croit se garantir contre les horreurs de ce qu’on appellera plus tard le panthéisme et les déviations morales qu’il entraîne, en posant une distinction ontologiquement radicale entre le Créateur et la créature. Mais cette garantie se révèle à l’examen moins efficace que ne le croit une théologie un peu sommaire. Car voici l’objection : si Dieu est l’être absolu et infini, comment pourra-t-il exister en dehors de Lui un autre être ? Un tel être, non-divin, constituerait en effet, pour l’Être infini, une limitation ; ce qui est contradictoire. Ne faut-il pas alors conclure, ou que la créature n’existe pas – ce qui est impossible – ou que son être est l’Être même de Dieu ? Quand cette conclusion théorique se transforme en prise de conscience effective, estime l’adepte du "libre Esprit", l’âme accède à la "gnose" libératrice de sa nature divine. Pour elle, Dieu est mort en tant qu’idole morale et conceptuelle : elle est vraiment délivrée et tout lui est permis.

La réponse qu’apporte la Theologia teutsch à ce défi radical nous paraît d’une grande profondeur et doit être écoutée attentivement. [...]

Si l’on identifie la créature au Créateur (en quoi consiste le panthéisme), ne risque-t-on pas de tomber dans l’athéisme pur et simple ? Et, si l’on nie la réalité de l’infini divin, qu’en est-il alors de la liberté de l’Esprit ? Seule subsiste la finitude du créé, de la nature et de ses lois, et la prétendue libération de toute règle se réduit à un asservissement indéfini aux déterminismes des instincts les plus aveugles. Il s’agit donc de montrer que la solution du Libre Esprit est une illusion, qu’elle conduit à la servitude, non à la liberté, mais sans renoncer à la vérité de l’Esprit, à son exigence d’unité et d’intériorité, qui nous conduit à dépasser l’interprétation exotérique de la dualité du créé et de l’Incréé. Maintenir cette dualité telle quelle, en effet, n’a que les apparences d’une fidélité à l’orthodoxie de la foi. Par cette dualité même, la transcendance de Dieu est sans doute sauvegardée, mais l’indépendance et la suffisance de la créature sont en même temps posées, comme si la créature pouvait exister en dehors de Dieu et se passer ontologiquement de Lui. Il faut donc dépasser la dualité, mais sans l’abolir, de telle sorte qu’au contraire elle soit fondée et confirmée. La créature est à la fois en Dieu et hors de Dieu. Il convient cependant d’observer que la Theologia germanica se préoccupe plus d’enseigner une voie spirituelle qui permette de réaliser cette non-dualité, que d’en exposer théoriquement la doctrine métaphysique.

Auteur: Borella Jean

Info: Dans "Lumières de la théologie mystique", éditions L'Harmattan, Paris, 2015, pages 169-170

[ problème ] [ ésotérisme ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

décompensation psychotique

Quel est le signifiant qui est mis en suspens dans sa crise inaugurale [du président Schreber] ? C'est le signifiant procréation dans sa forme la plus problématique, celle que Freud lui-même évoque à propos des obsessionnels, qui n’est pas la forme être mère, mais la forme être père.

Il convient ici de vous arrêter un instant pour méditer sur ceci, que la fonction d’être père n’est absolument pas pensable dans l’expérience humaine sans la catégorie du signifiant.

Que peut vouloir dire être père ? […] La question est que la sommation de ces faits - copuler avec une femme, qu'elle porte ensuite quelque chose pendant un certain temps dans son ventre, que ce produit finisse par être éjecté - n'aboutira jamais à constituer la notion de ce que c'est qu'être père. Je ne parle même pas de tout le faisceau culturel impliqué dans le terme être père, je parle simplement de ce que c’est qu’être père au sens de procréer.

Il faut un effet de retour pour que le fait pour l’homme de copuler reçoive le sens qu’il a réellement, mais auquel aucun accès imaginaire n’est possible, que l’enfant soit de lui autant que de la mère. Et pour que cet effet d’action en retour se produise, il faut que l’élaboration de la notion d’être père ait été, par un travail qui s’est produit par tout un jeu d’échanges culturels, portée à l’état de signifiant premier, et que ce signifiant ait sa consistance et son statut. Le sujet peut très bien savoir que copuler est réellement à l’origine de procréer, mais la fonction de procréer en tant que signifiant est autre chose. [...]

Le signifiant être père est ce qui fait la grand-route entre les relations sexuelles avec une femme. Si la grand-route n'existe pas, on se trouve devant un certain nombre de petits chemins élémentaires, copuler et ensuite la grossesse d'une femme.

Le président Schreber manque selon toute apparence de ce signifiant fondamental qui s’appelle être père. C’est pourquoi il a fallu qu’il commette une erreur, qu’il s’embrouille, jusqu’à penser porter lui-même comme une femme. Il lui a fallu s’imaginer lui-même femme, et réaliser dans une grossesse la deuxième partie du chemin nécessaire pour que, s’additionnant l’un à l’autre, la fonction être père soit réalisée.

[...] comment font-ils, ceux qu’on appelle les usagers de la route, quand il n’y a pas la grand-route, et qu’il s’agit de passer par de petites routes pour aller d’un point à un autre ? Ils suivent les écriteaux mis au bord de la route. C’est-à-dire que, là où le signifiant ne fonctionne pas, ça se met à parler tout seul au bord de la route, des mots écrits apparaissent sur des écriteaux.

Auteur: Lacan Jacques

Info: Dans le "Séminaire, Livre III", "Les psychoses", éditions du Seuil, 1981, pages 459-460

[ analyse ] [ forclusion ] [ hallucination ] [ réel-symbolique-imaginaire ] [ fonction paternelle ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

envie

Désir mimétique. Ce qui me frappait dès le départ c'est ce qui fait que dans des langues différentes certaines oeuvres se ressemblent et en particulier que ces contacts avaient trait au désir. Ce qui me frappait c'était le rapport entre ce que Proust appelle snobisme, ce que nous appelons tous snobisme et ce que Stendhal appelle vanité. Et je me souviens: ce qui a déclenché mon idée du désir mimétique, (ce désir imité qui n'est jamais vraiment spontané) c'est lorsque j'ai compris que chez Cervantès et chez Dostoïevski, au fond, il y avait la même chose que chez Proust et Stendhal, et parfois sous des formes plus outrées, sous des formes qui avaient un caractère psycho-pathologique.
Par exemple, dans Don Quichotte il y a l'histoire intercalaire du Curieux Impertinent, cet homme qui a épousé une jeune femme à cause de son ami. C'est son ami qui lui a présenté sa femme, qui a joué un rôle d'intermédiaire et très vite, par la suite, il demande à son ami de faire la cour à sa femme pour démontrer, dit-il, la fidélité de sa femme. Bien entendu, au bout de quelques temps après avoir longtemps refusé, l'ami finit par accepter et réussit à séduire l'épouse et le mari se tue... C'est donc une histoire assez sinistre, une histoire triste et qu'on retrouve chez Dostoïevski dans des textes tels que l'Eternel mari.. C'est le mari qui est fasciné par l'amant de sa femme et, une fois la femme morte, lorsqu'il veut en épouser une autre, il demande à l'amant de venir faire la connaissance de la nouvelle jeune fille qu'il désire épouser.
Il a besoin en quelque sorte d'une sanction de l'amant de sa femme pour être sûr de bien désirer la femme qu'il doit désirer, et qu'elle est la femme vraiment désirable.
C'est-à-dire qu'il est fasciné par le succès de son rival. Chez Cervantès c'est la même chose.
Alors pourquoi une histoire de ce genre se retrouverait-elle dans une oeuvre comme Don Quichotte ? Eh bien le lien, c'est que le désir de Don Quichotte n'est jamais vraiment spontané, Don Quichotte se précipite sur les moulins à vent parce qu'il pense qu'Amadis de Gaule à sa place aurait fait la même chose, donc il imite le désir d'un autre qui, dans ce cas-là, n'est pas un rival puisqu'il n'existe pas, mais un modèle de désir.
J'ai distingué à ce moment-là deux types de désirs mimétiques : le désir sans rival parce qu'il n'y a pas de contact entre le modèle et l'imitateur, et le désir qui suscite la rivalité parce qu'il est directement empreint de l'objet du rival, désir de l'objet du rival, désir de la même femme, désir du même territoire, désir de la même nourriture, désir des mêmes objets, n'est-ce pas.

Auteur: Girard René

Info: http://home.nordnet.fr/~jpkornobis/Girard/Page_2x.html

[ rapports humains ] [ littérature ]

 

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