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procréation incompatible

" Monsieur Marcel " aurait dit à Céleste : " Je suis marié avec mon œuvre. " C'est là souligner l'incompatibilité entre la vie conjugale et le travail d'écriture. Si celui-ci est le cœur battant des préoccupations de la Recherche, fiction de son propre processus de création, il faut bien remarquer que la famille en est éliminée, la reproduction aussi - aucun enfant ne naît durant le long cours du roman ; quant à l’amour, il n'est qu'une illusion douloureuse et, du reste, passagère : celui de Swann pour Odette, du narrateur pour Albertine, de Saint-Loup pour " Rachel, quand du Seigneur " en sont les meilleures preuves.

Seuls l'amour maternel et grand-maternel sont véritablement dignes de ce nom. L'interdit sur la reproduction, ajouté chez Proust à une forme de renoncement à la vie sentimentale et sexuelle, est d'ailleurs là aussi l'objet d'une tradition, et solidaire du modèle sacerdotal, ascétique de l'écrivain-voyant, de l'oracle laïque. Faire des enfants ou faire œuvre ? C'est cette alternative qui se pose telle quelle à Jane Austen, Emily Dickinson, Virginia Woolf et Simone de Beauvoir, choisissant et justifiant ainsi leur refus d'enfanter.

Auteur: Loyer Emmanuelle

Info: L'impitoyable aujourd'hui

[ filiation maternelle ] [ littérature ] [ femmes-hommes ]

 

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ethnocide

Une extraordinaire page d'archive, conservée dans les " Papiers Lemkin " de l'université de Columbia, enregistre la cogitation du juriste et l'instant eurêka : d'abord, des " gribouillis " comme ceux que l'on fait dans une réunion où l'esprit s'absente ; la main qui tient le crayon semble soudain inscrire, en deçà de la raison tourmentée par le savoir contenu dans les valises, le mot-mana* de l'inconscient graphique : " génocide " émerge d'une série de ratures, puis se répète comme une litanie, écrit plusieurs fois, de nouveau biffé, et réécrit pour voir et entendre s'il sonne juste...

Ce gribouillis deviendra la pierre de touche de l'imposant ouvrage publié par Lemkin l'année suivante, en novembre 1944, Axis Rule in Occupied Europe, qui décrit les meurtres de masse perpétrés dans l'Europe sous occupation nazie.


Auteur: Loyer Emmanuelle

Info: L'impitoyable aujourd'hui. **mana désigne une force ou puissance spirituelle surnaturelle qui peut être attribuée à : Des êtres (personnes, ancêtres, esprits), des objets, des lieux, des paroles ou formules rituelles. Cette force est considérée comme sacrée et confère une efficacité magique ou un pouvoir charismatique. Ce terme est central dans les croyances et religions animistes de Polynésie, son usage s'est étendu au-delà du contexte océanien pour désigner plus largement une force spirituelle abstraite.

[ terminologie ] [ origine ]

 

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femmes-par-femmes

De lettres ou pas, les femmes deviennent au XIXe siècle de grandes lectrices de littérature romanesque. Lire c'est bien alors s’immerger tout entière dans l'univers fictif de l'ouvrage choisi. Ce type de lecture, qui correspond à l'avènement du roman, n'est pas sans interroger les autorités morales du siècle.

La lectrice de l'âge romantique devient en soi un motif d'époque, et même un sujet d'inquiétude ; les débats concernant les effets délétères de la " mauvaise littérature " sont récurrents dans les journaux du temps ; la description des nerfs affaiblis de femmes qui seraient les victimes consentantes de ce " vice " pas si impuni côtoie la représentation picturale de la lectrice " affalée sur un sofa, un divan, ou lovée dans son lit, la bouche rieuse et la mine gourmande, [...] lieu commun de la peinture érotique.

Les femmes qui lisent sont dangereuses ", écrit Michelle Perrot.


Auteur: Loyer Emmanuelle

Info: L'impitoyable aujourd'hui

[ délassement ] [ ​​​​​​​intellectuelles ] [ libérées ]

 

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patriotisme

Il est des moments stendhaliens de l'histoire de France. Son âpre vérité, cette intelligence douloureuse du temps présent, est alors recherchée pour son humeur vigoureuse, sa crudité tonique, son énergie analytique - celle de ses héros à l'ardeur aussi ironique que clairvoyante.

Ainsi en fut-il pendant la Seconde Guerre mondiale. En décembre 1940, Jean Guéhenno s'administre une dose de Stendhal pour se redonner du courage, relisant le petit traité que Léon Blum avait consacré à Beyle quelques décennies plus tôt. Son Journal des années noires est clandestinement stendhalien, comme si Henri Beyle s'affichait comme la plus sûre des boussoles lorsque tout s'affole.

Si les hommes de la Révolution nationale prescrivent Stendhal, peu enclin à s'engourdir dans la resignation vichyste, l'écrivain et journaliste Jean Prévost soutient en 1942, à l'université de Lyon, une thèse remarquée sur La Création chez Stendhal. Sans doute se préparait-il ainsi à la Résistance majuscule puisque, deux ans plus tard, il mourait les armes à la main dans le Vercors. Le livre parut après la guerre de façon posthume. Stendhal, peintre de l'ennui et de l'impuissance postbonapartistes, est alors lu comme un éveilleur, un réveilleur face à la barbarie.

Auteur: Loyer Emmanuelle

Info: L'impitoyable aujourd'hui

[ littérature ] [ Gaule ] [ relativité ] [ langage balise ]

 

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héros slave

Quant au maréchal Koutouzov, commandant en chef des forces russes en 1805 et de nouveau en 1812, il est réhabilité par Tolstoï contre les historiens français comme russes qui critiquèrent nombre de ses décisions - en particulier son opposition à toute offensive avant Borodino et son choix d'abandonner Moscou aux mains françaises.

Sous-estimé face à la fausse grandeur napoléonienne, Koutouzov est chez Tolstoï un personnage inoubliable, un homme rare et précieux, le vrai sauveur de la Russie. Mais certes pas un héros au sens classique du terme ! Il a le goût de la débauche, boit et mange trop, a tendance à s'endormir dans les réunions d’état-major... Ses ensommeillements malencontreux opposent toute sa force d'inertie aux décisions souvent absurdes et coûteuses des " agîtés ". En lui, dans sa corpulence de moujik, c'est toute la Russie qui s'incarne, patiente, fataliste, indomptable.

Maître du temps, il est le seul à anticiper l'hiver qui arrive et la signification de chaque événement, à chaque étape. Il ne se presse pas. Juste avant Borodino, il lit un roman français, Les Chevaliers du cygne de Mme de Genlis. Ce représentant de la guerre nationale a le patriotisme discret et pitié des prisonniers. Il disparaît pourtant dans l'ingratitude et l'incompréhension une fois sa mission accomplie. " II ne restait rien d'autre à faire que mourir. Et il mourut. "


Auteur: Loyer Emmanuelle

Info: L'impitoyable aujourd'hui

[ littérature ]

 

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déprime

Il y a toutes sortes de manières de sombrer dans l'ennui.

L'ennui est en effet un objet labile et pourtant profond, une catégorie de la vie affective qui, comme le montrent les historiens des sensibilités, semble accompagner l'historicité des expériences humaines : l'acédie médiévale, le spleen romantique, l’" embêtement " fin XIXe ; l'ennui à l'école, l'ennui provincial, l’ennui conjugal, l'ennui à l'usine, l'ennui au bureau ; l'ennui massif de la dépression, l'ennui léger, nuageux de l'enfant en mal d'escapades, l'ennui métaphysique de l'être humain sachant qu'il n'est que poussière, l'ennui historique diagnostiqué par Stendhal dans la France de la monarchie de Juillet... Selon cette dernière perspective, l'ennui, c'est l'exil de l'action.

Auteur: Loyer Emmanuelle

Info: L'impitoyable aujourd'hui

[ monotonie ] [ désenchantement ]

 

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art d'écrire

Pourquoi cette " soudaine nécessité de la nuit ", selon la lumineuse expression d'Annie Le Brun ? Pourquoi ces châteaux décatis, emphatiquement médiévaux, avec leurs douves, leurs geôles et leurs revenants ?

Du Château d'Otrante d'Horace Walpole (1764) à Frankenstein de Mary Shelley (1818) en passant par Le Moine de Matthew Lewis (1796), le genre noir déferle, parti des frimas britanniques, pour envelopper de son mauvais goût, de son kitsch et de ses naïvetés aussi bien l'époque des Lumières que celle de la Révolution.

Il continue à phosphorer loin dans le XIXe siècle, contaminant une partie de la littérature anglaise et française, les sœurs Brontë, Young, Chateaubriand, Hugo, Lautréamont et d'autres, jusqu'à la sensibilité fantastique d'Edgar Poe.

Pour le surréalisme tout juste sorti de la grande boucherie de la Première Guerre mondiale et confronté à un monde endeuillé, le roman noir est encore une ressource éthique et poétique - comme le prouve son appropriation passionnée. Cet acquiescement à la nuit fait figure de manifeste politique : noir, c'est noir !

Il prélude à une extraordinaire et énigmatique reviviscence du genre au cinéma à la fin du XXe siècle : films de spectres, films d'horreur dans ses différentes déclinaisons, giallo, zombies, etc., font de nous les contemporains de ce lieu mental, éloigné mais toutefois familier, des châteaux gothiques.

Auteur: Loyer Emmanuelle

Info: L'impitoyable aujourd'hui

[ belles-lettres ] [ terreur ] [ question ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

canaillerie

C’est une catégorie un petit peu commode l' "absurde", depuis quelque temps. Tellement commode que lui vient - comme vous savez, les morts sont respectables, mais tout de même nous ne pouvons pas ne pas noter la complaisance qu’a apporté à je ne sais quels balbutiements sur ce thème, le prix NOBEL [Albert Camus] - cette merveilleuse récompense universelle de cette knaverie dont sans aucun doute l’histoire prouvera le palmarès de ce qui peut bien être dit de stigmates d’une certaine abjection dans notre culture.

Auteur: Lacan Jacques

Info: 30 mars 1960

[ catégorie littéraire ] [ philosophie ] [ conformisme ] [ critique ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

écrivain

On peut admettre que dans aucune littérature d’aucun temps il y eut un ouvrage aussi scandaleux, que nul autre n’a blessé plus profondément les sentiments et les pensées des hommes. Aujourd’hui que les récits de MILLER nous font trembler, qui oserait rivaliser de licence avec SADE ? Oui, on peut prétendre que nous tenons là l’œuvre la plus scandaleuse qui fut jamais écrite. Et Maurice BLANCHOT que je vous cite, continue : "N’est-ce pas un motif de nous en préoccuper ?"

[…] En fait, il semble qu’il n’y ait pas d’atrocité concevable qui ne puisse être trouvée dans ce catalogue où semblait puiser une sorte de défi à la sensibilité dont l’effet est à proprement parler stupéfiant.

Si le mot stupéfiant veut dire qu’en quelque sorte on abandonne la ligne du sens à l’auteur, qu’on perd les pédales autrement dit, et qu’à ce point de vue on peut même dire que l’effet dont il s’agit est obtenu sans art, c’est-à-dire sans considération de l’économie des moyens, par une sorte d’accumulation des détails, des péripéties auxquelles s’ajoute apparemment un truffage de dissertations, de justifications dont assurément les contradictions nous intéressent beaucoup car nous les suivrons dans le détail, et dont pour l’instant je veux seulement faire remarquer que seuls les esprits grossiers peuvent considérer - ce qui leur arrive - que ces dissertations sont là pour faire en quelque sorte passer des complaisances érotiques.

Même des gens beaucoup plus fins que des esprits grossiers en sont venus à attribuer à ces dissertations, dénommées digressions, la baisse, si l’on peut dire, de la tension suggestive sur le plan où pourtant les esprits fins en question - il s’agit là très précisément de Georges BATAILLE - sur le plan où ils considèrent l’œuvre comme nous donnant proprement l’accès à cette sorte d’assomption de l’être en tant que dérèglement où ils voient la valeur de l’œuvre de SADE.

Attribuer cette espèce d’intérêt à ces dissertations et digressions est pourtant une erreur. L’ennui dont il s’agit est quelque chose d’autre. Il n’est que la réponse de l’être précisément - que ce soit du lecteur ou de l’auteur peu importe - à l’approche d’un centre d’incandescence ou, si je puis dire, de zéro absolu en tant qu’il est psychiquement irrespirable.

Sans doute, que le livre tombe des mains prouve qu’il est mauvais. Mais ici le mauvais littéraire est peut-être le garant de cette mauvaiseté à proprement parler - pour employer un terme qui était encore en usage au XVIIème siècle - qui est l’objet même de notre recherche.

Dès lors SADE se présente dans l’ordre de ce que j’appellerai la littérature expérimentale. À savoir l’œuvre d’art en tant qu’elle est elle–même expérience, et une expérience qui n’est pas n’importe laquelle, une expérience, dirais-je, qui arrache le sujet comme tel, et par son procès, à ce que je pourrais appeler ses amarres psychosociales, et pour ne pas rester dans le vague, je veux dire, à toute appréciation psychosociale de la sublimation dont il s’agit.

Auteur: Lacan Jacques

Info: 30 mars 1960

[ œuvre ] [ critique ] [ das ding ] [ impossible ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

charité triomphaliste

La résistance devant le commandement : "Tu aimeras ton prochain comme toi-même" et la résistance qui s’exerce pour entraver son accès à la jouissance, sont une seule et même chose. Ceci peut paraître, ainsi énoncé, un paradoxe de plus, une gratuite affirmation. N’y reconnaissez-vous pas, pourtant, ce à quoi nous nous référons de la façon la plus commune chaque fois qu’en effet nous voyons le sujet reculer devant sa jouissance ?

De quoi faisons-nous état ? Mais de l’agressivité inconsciente qu’elle contient, de ce noyau redoutable, de cette destrudo qui, quelles que soient à cet égard les petites manières, les chipotages des mijaurées analytiques, n’en est pas moins pourtant ce à quoi nous nous trouvons constamment affronté dans notre expérience. Et ceci, qu’on l’entérine ou non, au nom de je ne sais quelle idée préconçue de la nature, n’en reste pas moins la fibre, la trame même de tout ce que FREUD a enseigné.

Et nommément ceci : que c’est pour autant que cette agressivité, le sujet la tourne et la retourne contre lui, qu’en provient ce qu’on appelle l’énergie du surmoi. FREUD prend soin d’ajouter cette touche supplémentaire : qu’une fois entré dans cette voie, amorcé ce processus, il n’y a, semble-t-il, littéralement pas de limite, à savoir qu’il engendre un effet, une agression toujours plus lourde du moi.

Il l’engendre, si l’on peut dire, à la limite, à savoir très proprement pour autant que vient à manquer cette médiation qui est celle justement de la Loi. De la Loi, pour autant qu’elle proviendrait d’ailleurs, mais de cet ailleurs aussi, où vient à faire défaut pour nous son répondant, celui qui la garantit, à savoir Dieu lui-même. Ce n’est donc pas là une proposition originale que je vous fais en vous disant que le recul devant le "Tu aimeras ton prochain comme toi-même" est la même chose que la barrière devant la jouissance.

[…] Je recule à aimer mon prochain comme moi-même, pour autant sans doute qu’à cet horizon il y a quelque chose qui participe de je ne sais quelle intolérable cruauté.

Dans la même direction, aimer mon prochain peut être la voie la plus cruelle.

Auteur: Lacan Jacques

Info: 30 mars 1960

[ ignorance ] [ risque ] [ pouvoir ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson