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insistance

L’inconscient, c’est-à-dire le "refoulé", n’oppose aux efforts de la cure [psychanalytique] aucune espèce de résistance ; en fait il ne tend même à rien d’autre qu’à vaincre la pression qui pèse sur lui pour se frayer un chemin vers la conscience ou vers la décharge par l’action réelle. La résistance dans la cure provient des mêmes couches et systèmes supérieurs de la vie psychique qui avaient produit le refoulement en son temps. [...] Nous échapperons à l’obscurité en opposant non pas le conscient et l’inconscient mais le moi, avec sa cohésion, et le refoulé. Il est certain qu’une grande part du moi est elle-même inconsciente, précisément ce que l’on peut nommer le noyau du moi ; le terme de préconscient ne recouvre qu’une petite partie du moi. [...] la résistance de l’analysé provient de son moi et nous saisissons du coup que la compulsion de répétition doit être attribuée au refoulé inconscient. [...]

Il n’est pas douteux que la résistance du moi conscient et préconscient est au service du principe de plaisir ; elle veut éviter le déplaisir que provoquerait la libération du refoulé tandis que nos efforts tendent à obtenir que ce déplaisir soit admis, en faisant appel au principe de réalité. Mais la compulsion de répétition, cette manifestation de force du refoulé, quel est donc son rapport au principe de plaisir ? Il est clair que la majeure partie des expériences que la compulsion de répétition fait revivre ne peut qu’apporter du déplaisir au moi puisque cette compulsion fait se manifester et s’actualiser des motions pulsionnelles refoulées ; mais il s’agit d’un déplaisir qui, nous l’avons déjà montré, ne contredit pas le principe de plaisir, déplaisir pour un système et en même temps satisfaction pour l’autre. Mais le fait nouveau et remarquable qu’il nous faut maintenant décrire tient en ceci : la compulsion de répétition ramène aussi des expériences du passé qui ne comportent aucune possibilité de plaisir et qui même en leur temps n’ont pu apporter satisfaction, pas même aux motions pulsionnelles ultérieurement refoulées.

Auteur: Freud Sigmund

Info: Dans "Au-delà du principe de plaisir" (1920), trad. de l'allemand par Jean Laplanche et J.-B. Pontalis, éditions Payot, Paris, 2010, pages 61 à 64

[ essai d'instanciation symbolique ] [ problèmes ]

 
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étymologies

Jahvé était sans conteste un dieu des volcans. Les habitants de l'Égypte n'avaient aucune raison de l'adorer. Je ne suis certes pas la premier à être frappé de la similarité qui existe entre le nom de Jahvé et le radical de cet autre nom divin : Jupiter, Jovis. Le nom de Jochanan, qui dérive du Jahvé hébraïque et qui a à peu près la même signification que Godefroy (faveur de Dieu) et que son équivalent punique : Hannibal, est devenu sous les formes de Johann, John, Jean, Juan, l'un des prénoms favoris de la chrétienté européenne. Quand les Italiens en font Giovanni et appellent un jour de la semaine Giovedi, ils ne font que mettre en lumière une similarité peut-être insignifiante, mais peut-être aussi fort importante. De très vaste, mais très incertaines perspectives s'offrent ainsi à nous. Il semble qu'au cours de ces siècles obscurs, à peine devenus accessibles aux recherches historiques, les pays du bassin oriental de la Méditerranée furent le théâtre de fréquentes et violentes éruptions qui durent faire sur les populations de ces régions la plus vive impression. Evans admet même que la destruction définitive du palais de Minos à Cnossos fut causée par un tremblement de terre. En Crète, comme probablement partout dans le monde égéen, l'on adorait la grande divinité mère. Le fait qu'elle n'avait pas été capable de protéger sa maison contre les attaques d'une puissance plus forte dut contribuer à la faire détrôner par une divinité mâle et, en ce cas, le dieu des Volcans était tout indiqué pour la remplacer. Zeus n'est-il pas toujours "celui qui ébranle la terre"? Il est presque certain qu'en ces temps obscurs, la divinité femelle fut remplacée par des dieux mâles (peut-être originellement par ses fils.) Le destin de Pallas Athéné est particulièrement impressionnant, car cette déesse était certainement une forme locale de la déité mère. Le bouleversement religieux la réduisit à l'état de déité fille, elle fut privée de sa propre mère et frustrée pour toujours, du fait d'une virginité imposée, de tout espoir de maternité.

Auteur: Freud Sigmund

Info: Dans "Moïse et le monothéisme", trad. Anne Berman, éditions Gallimard, 1948, note de bas de page, page 62

[ mythologie ] [ religion ] [ archéologie mystérieuse ] [ Éternel ]

 

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céphalée

Migraine, points établis

1. Une affaire de sommation. Entre l’élément déclencheur et l’éruption des symptômes, il se passe des heures, voire des jours. On a comme la sensation qu’un obstacle est surmonté et qu’ensuite un processus se poursuit.

2. Une affaire de sommation. Même sans élément déclencheur, on a l’impression qu’il a fallu qu’un stimulus s’accumule, celui-ci étant présent au début de l’intervalle en très petite quantité, en très grande quantité vers la fin.

3. Une affaire de sommation, dans laquelle la sensibilité aux étiologies reste au niveau du stimulus déjà présent.

4. Une affaire à étiologie complexe, peut-être selon le schéma de l’étiologie en chaîne, où une cause immédiate peut être produite directement et indirectement par de nombreux facteurs, ou bien selon le schéma de l’étiologie supplétive où, à côté d’une cause spécifique, peuvent intervenir, pour la remplacer quantitativement, des causes banales.

5. Une affaire sur le modèle de la migraine menstruelle et appartenant au groupe sexuel. Preuves :

a) Très rare chez les hommes en bonne santé.

b) Limitée à l’âge sexuel de la vie, enfance et vieillesse quasiment exclues.

c) Si elle est produite par sommation, le stimulus sexuel est aussi quelque chose qui est produit par sommation.

d) L’analogie de la périodicité.

e) Fréquence chez des personnes à éconduction sexuelle perturbée (neurasthénie, coitus interruptus).

6. Production certaine de la migraine par des stimulus chimiques : toxine humaine, sirocco, fatigue, odeurs. Or le stimulus sexuel est aussi un stimulus chimique.

7. Arrêt de la migraine pendant la grossesse, où la production est probablement dirigée ailleurs.

En fonction de cela, on serait en droit de penser que la migraine constitue l’effet d’une action toxique, elle est produite par la substance stimulante sexuelle quand celle-ci ne trouve pas d’éconduction suffisante, ce à quoi se rapporte peut-être encore le fait qu’une certaine voie, qu’il faudra déterminer topiquement, se trouve dans un état de réceptivité particulière. Se demander quelle est cette voie, c’est se demander quelle est la localisation de la migraine.

Auteur: Freud Sigmund

Info: Manuscrit I dans une lettre à Wilhelm Fliess (1895), trad. Françoise Kahn et François Robert, éditions P.U.F., Paris, 2006

[ explication ] [ psychanalyse ]

 

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sublimation

Sur quelques-uns des problèmes qui se rattachent à l'art et aux artistes, l'examen psychanalytique donne des éclaircissements satisfaisants ; d'autres lui échappent complètement.

La psychanalyse reconnaît également dans la pratique de l'art une activité qui se propose l'apaisement de désirs inassouvis et à la vérité tout d'abord chez l'artiste créateur et en conséquence chez l'auditeur et le spectateur.

Les forces pulsionnelles à l'œuvre dans l'art sont les mêmes conflits qui poussent à la névrose d'autres individus, qui ont déterminé la société à ériger ses institutions.

D'où vient à l'artiste la capacité de créer, cela ne relève pas de la psychologie.

L'artiste aspire d'abord à une autolibération et fait partager celle-ci, par l'intermédiaire de son œuvre, aux autres hommes qui souffrent des mêmes désirs réfrénés.

Il représente sans doute ses fantasmes de désirs les plus personnels comme accomplis, mais ceux-ci ne deviennent œuvre d'art que par un changement de forme qui atténue le choquant de ceux-ci, en dissimule l'origine personnelle et offre aux autres hommes, par le respect de règles esthétiques, des primes de plaisir séduisantes.

Il n'est pas difficile à la psychanalyse de montrer, à côté de la participation manifeste au plaisir artistique, une participation latente, ô combien plus active, provenant de sources cachées de la libération des pulsions.

La relation entre les impressions psychiques et le cours de la vie de l'artiste et ses œuvres comme réactions à ces excitations appartient aux plus attrayants objets de l'examen psychanalytique.

Du reste, la plupart des questions de la création artistique et de la jouissance artistique attendent encore un traitement qui laisse tomber sur elles l'éclairage d'une connaissance analytique et assigne sa place dans l'édifice complexe des compensations des désirs de l'homme.

En tant que réalité acceptée conventionnellement et dans laquelle, par la vertu de l'illusion artistique, des symboles et des formations substitutives peuvent provoquer de véritables affects, l'art forme un royaume intermédiaire entre la réalité qui interdit le désir et le monde imaginaire qui réalise le désir, et dans lequel les aspirations de toute-puissance de l'humanité primitive sont restées pour ainsi dire en vigueur.

Auteur: Freud Sigmund

Info: L'intérêt de la psychanalyse, 1913

[ activité transitionnelle ] [ signification ] [ planche de salut ]

 

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étiologie des névroses

On peut considérer comme connu que la neurasthénie est la conséquence fréquente d’une vie sexuelle anormale. Mais l’affirmation que j’aimerais avancer et vérifier sur des observations, c’est que la neurasthénie d’une façon générale est seulement une névrose sexuelle. [...]

La neurasthénie des hommes est acquise à l’âge de la puberté et fait son apparition entre vingt et trente ans. Sa source est la masturbation dont la fréquence est exactement parallèle à la fréquence de la neurasthénie des hommes. On peut faire l’expérience dans le cercle de ses connaissances que les personnes qui ont été précocement mises en contact avec une séduction féminine, du moins dans la population citadine, ont échappé à la neurasthénie. Là où cette nuisance a agi longtemps et de manière intense, elle transforme l’individu concerné en un neurasthénique sexuel dont la puissance a aussi subi un dommage ; à l’intensité de la cause correspond la persistance de cet état durant toute la vie. Une autre preuve de la corrélation causale réside aussi dans le fait que le neurasthénique sexuel est toujours en même temps un neurasthénique général.

[...]

La neurasthénie des femmes

Normalement la jeune fille est saine, non neurasthénique. – La jeune femme également, malgré tous les traumas sexuels de cette période [de la vie]. Dans des cas plus rares, la neurasthénie se montre sous une forme pure chez des femmes et des vieilles filles, et doit alors être considérée comme une neurasthénie apparue spontanément et de la même manière. Bien plus souvent, la neurasthénie des femmes est dérivée de celle des hommes ou produite en même temps qu’elle. Elle est presque toujours mêlée à de l’hystérie : la névrose mixte habituelle des femmes.

La névrose mixte des femmes apparaît à la suite de la neurasthénie des hommes dans tous ces cas, qui ne sont pas rares, où l’homme en tant que neurasthénique sexuel a subi une perte de sa puissance. L’adjonction de l’hystérie résulte directement du fait que l’excitation de l’acte est retenue. Plus la puissance de l’homme est mauvaise, plus l’hystérie de la femme prédomine, de sorte que le neurasthénique sexuel rend sa femme, en réalité, non pas tan neurasthénique qu’hystérique.

Auteur: Freud Sigmund

Info: Manuscrit B dans la lettre à Wilhelm Fliess du 8 février 1893, trad. Françoise Kahn et François Robert, éditions P.U.F., Paris, 2006

[ sexualité ] [ genèse de la psychanalyse ] [ impuissance ] [ hommes-femmes ]

 

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pulsion de mort

Les pulsions organiques conservatrices se sont assimilé chacune des modifications du cours vital qui leur ont été ainsi imposées, elles les ont conservées pour les répéter de sorte qu’elles nous donnent nécessairement l’impression fallacieuse de forces qui tendent vers le changement et le progrès alors qu’elles ne font que chercher à atteindre un but ancien par des voies à la fois anciennes et nouvelles. On pourrait même indiquer quel est ce but final vers quoi tend tout ce qui est organique. Si le but de la vie était un état qui n’a pas encore été atteint auparavant, il y aurait là une contradiction avec la nature conservatrice des pulsions. Ce but doit bien plutôt être un état ancien, un état initial que le vivant a jadis abandonné et auquel il tend à revenir par tous les détours du développement. S’il nous est permis d’admettre comme un fait d’expérience ne souffrant pas d’exception que tout être vivant meurt, fait retour à l’inorganique, pour des raisons internes, alors nous ne pouvons que dire : le but de toute vie est la mort et, en remontant en arrière, le non-vivant était là avant le vivant.

Il advint un jour que les propriétés de la vie furent suscitées dans la matière inanimée par l’action d’une force qu’on ne peut encore absolument pas se représenter. Il s’agissait peut-être d’un processus préfigurant celui qui plus tard a fait apparaître la conscience dans une certaine couche de la matière vivante. La tension survenue dans la substance jusque-là inanimée cherche alors à se réduire ; ainsi était donnée la première pulsion, celle du retour à l’inanimé. La substance vivante avait encore en ce temps la mort facile ; elle n’avait vraisemblablement à parcourir dans la vie qu’un court chemin dont la direction était déterminée par la structure chimique de la jeune vie. Pendant toute une longue période, il se peut que la substance vivante ait été ainsi recréée sans cesse et soit morte facilement jusqu’au jour où des influences externes déterminantes se transformèrent, obligeant la substance qui survivait encore à dévier toujours davantage de son cours vital originaire et à faire des détours toujours plus compliqués pour atteindre son but : la mort. Ces détours sur le chemin qui mène à la mort, fidèlement maintenus par les pulsions conservatrices, seraient ce qui nous apparaît aujourd’hui comme phénomènes vitaux.

Auteur: Freud Sigmund

Info: Dans "Au-delà du principe de plaisir" (1920), trad. de l'allemand par Jean Laplanche et J.-B. Pontalis, éditions Payot, Paris, 2010, pages 99 à 101

[ erreur ] [ complexification ]

 
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première topique

La spéculation psychanalytique prend pour point de départ cette impression qu’elle retire de l’investigation des processus inconscients : la conscience ne serait pas le caractère le plus général des processus psychiques, mais seulement une fonction particulière de ceux-ci. [...] Ce que la conscience nous livre consiste essentiellement en perceptions d’excitations venant du monde extérieur et en sensations de plaisir et de déplaisir qui ne peuvent provenir que de l’intérieur de l’appareil psychique ; de ce fait, on peut attribuer au système Pc [préconscient]-Cs [conscient] une situation spatiale. [...]

La conscience n’est pas la seule propriété qui spécifie les processus de ce système. En nous appuyant sur les impressions tirées de notre expérience psychanalytique, nous admettons que tous les processus d’excitation qui se produisent dans les autres systèmes y laissent des traces durables qui constituent le fondement de la mémoire, donc des restes mnésiques qui n’ont rien à faire avec le fait de devenir conscient. Souvent leur force et leur ténacité sont plus grandes si le processus qui les a laissées derrière lui n’est jamais venu à la conscience. Mais il ne nous est vraiment pas facile de croire que de telles traces durables de l’excitation apparaissent aussi dans le système Pc-Cs. Si elles restaient toujours conscientes, elles limiteraient très vite la capacité du système à recevoir de nouvelles excitations, mais si, à l’inverse, elles devenaient inconscientes, elles nous mettraient dans l’obligation d’expliquer l’existence de processus inconscients dans un système dont le fonctionnement s’accompagne, d’autre part, du phénomène de la conscience. [...] Même si nos considérations ne sont pas absolument décisives, elles peuvent cependant nous pousser à supposer qu’il y a incompatibilité au sein d’un même système entre le fait de devenir conscient et le fait de laisser derrière soi une trace mnésique. Ainsi pourrions-nous dire que dans le système Cs le processus d’excitation devient conscient mais ne laisse derrière lui aucune trace durable ; toutes les traces de ce processus, sur lesquelles se fonde la mémoire, se déposeraient dans les systèmes internes voisins lorsque l’excitation s’y propage. [...] la conscience apparaît à la place de la trace mnésique [...].

Le système Cs se spécifierait donc en ceci qu’en lui, à la différence de ce qui se passe dans tous les autres systèmes psychiques, le processus d’excitation ne laisse pas derrière lui une modification durable des éléments du système mais se dissipe pour ainsi dire dans le phénomène de devenir conscient.

Auteur: Freud Sigmund

Info: Dans "Au-delà du principe de plaisir" (1920), trad. de l'allemand par Jean Laplanche et J.-B. Pontalis, éditions Payot, Paris, 2010, pages 71 à 74

[ point de vue dynamique ] [ fonctionnement ]

 
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voyance

Le patient, en mars dernier, se décida à consulter la diseuse de bonne aventure, et il lui proposa la date de naissance de son beau-frère, sans bien entendu le nommer ou lui révéler qu’il pensait à lui. L’énoncé de l’oracle fut : en juillet-août prochain, cette personne mourra d’un empoisonnement causé par des écrevisses ou des huîtres. Après m’avoir raconté cela, il ajouta : c’est vraiment faramineux.

Ne comprenant pas, je lui répliquai vigoureusement : qu’y a-t-il de si faramineux ? Voilà déjà plusieurs semaines que vous êtes revenu chez moi ; si votre beau-frère était effectivement mort, vous me l’auriez raconté depuis longtemps ; il est donc toujours vivant. La prophétie s’est produite en mars, elle devait s’accomplir au milieu de l’été, nous sommes maintenant en novembre. Elle ne s’est donc pas réalisée, qu’y trouvez-vous de si merveilleux ?

Il me répondit : bien sûr que ce n’est pas arrivé. Mais ce qui est remarquable, c’est ceci : mon beau-frère est un grand amateur d’écrevisses, d’huîtres, etc., et il a effectivement été empoisonné par des écrevisses en août de l’année dernière, et il en est presque mort. Il n’en fut plus question.

Voulez-vous que nous discutions maintenant ce cas.

[…] L’affaire s’explique sans reste, si nous voulons admettre que ce savoir s’est transféré à elle, la soi-disant prophétesse, par des voies inconnues excluant les modes de communication qui nous sont connus. C’est-à-dire qu’il nous faut conclure : il y a du transfert de pensée. Le travail astrologique de la diseuse de bonne aventure y a joué le rôle d’une activité qui détourne et occupe de façon anodine ses forces psychiques de manière à ce qu’elle puisse recevoir et transmettre l’effet des pensées d’un autre, devenir un véritable "médium". Nous connaissons par exemple dans le trait d’esprit de semblables arrangements, lorsqu’il s’agit d’assurer à un processus psychique une décharge plus automatique. 

Mais l’analyse fournit à ce cas un surcroît de sens. Elle nous apprend que ce n’est pas un fragment quelconque de savoir indifférent qui s’est transmis par voie d’induction d’une personne à une autre, mais qu’un souhait extraordinairement fort de quelqu’un […] peut se trouver une expression consciente légèrement voilée à l’aide de quelqu’un d’autre […]. On pourrait reconstruire le cours des pensées du jeune homme après la maladie et le rétablissement du beau-frère haï comme rival. Bien, ce coup-ci c’est vrai qu’il en a vraiment réchappé, mais c’est bien pourquoi il ne va pas renoncer à ce goût dangereux et, la prochaine fois, espérons qu’il en mourra. C’est cet "espérons" qui est transformé en prophétie.

Auteur: Freud Sigmund

Info: "Psychanalyse et télépathie", trad. Wladimir Granoff et Jean-Michel Rey in "La transmission de pensée", éd. Flammarion, 2005, pages 47 à 53

[ explication psychanalytique ] [ désir refoulé ] [ inconscient ] [ parapsychologie ]

 
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songes

Le travail du rêve [...] fait subir au matériel de pensées mis au mode optatif une élaboration tout à fait singulière. Tout d’abord, il fait le pas qui mène de l’optatif au présent, il substitue à la tournure "Ah, si seulement il était possible... " un : "Cela est." Ce "Cela est" a une destination, la figure hallucinatoire, processus que j’ai désigné du nom de "régression" du travail du rêve : la voie qui mène des pensées aux images perceptives, ou bien [...] la voie qui mène de la région des formations de pensée à celle des perceptions sensibles. En empruntant cette voie, qui est à l’opposé de la direction dans laquelle se développent les processus de complication psychique, les pensées du rêve gagnent en caractère concret ; ce qui apparaît, en fin de compte, c’est une situation plastique, qui est le noyau de l’ "image manifeste du rêve". [...] On comprend comme un nécessaire succès annexe de la régression le fait que presque toutes les relations existant à l’intérieur des pensées, relations qui ont structuré celles-ci, sont perdues pour le rêve manifeste. Ce que le travail du rêve prend en charge pour le figurer, ce n’est, pour ainsi dire, que le matériel brut des représentations, il n’y adjoint pas les rapports de pensée que celles-ci avaient les unes avec les autres, ou du moins se réserve-t-il la possibilité de n’en pas tenir compte. Par contre, il existe une autre partie du travail du rêve que nous ne pouvons faire découler de la régression, de la transformation rétroactive en images sensibles, et c’est précisément celle que nous jugeons importante pour l’analogie que nous établissons avec la formation du mot d’esprit. Durant le travail du rêve, le matériel des pensées du rêve subit une compression ou condensation tout à fait extraordinaire. [...] Les éléments communs nécessités par la condensation, qui ont été nouvellement créés, entrent dans le contenu manifeste du rêve en tant que représentants des pensées du rêve, de sorte qu’un élément du rêve correspond, pour les pensées du rêve, à un point nodal et crucial et qu’il nous faut dire de lui, en tenant compte de ces dernières, qu’il est, d’une façon très générale, "surdéterminé". Le fait que constitue la condensation est la partie du travail du rêve la plus facile à repérer : il suffit de comparer l’énoncé littéral d’un rêve tel qu’on l’a mis par écrit au texte des pensées du rêve qu’on a réussi à connaître grâce à l’analyse, pour se faire une bonne idée de l’envergure de la condensation qui est à l’œuvre dans le rêve.

Il est moins aisé de se convaincre de l’existence de la deuxième grande modification que le travail du rêve provoque en agissant sur les pensées du rêve, à savoir du processus que j’ai appelé déplacement dans le rêve. Ce dernier se manifeste comme suit : ce qui, dans le rêve manifeste, occupe une position centrale et se présente avec une grande intensité sensible, c’est cela même qui, dans les pensées du rêve, occupait une position périphérique et qui était d’importance accessoire ; et inversement. [...] Pour qu’un tel déplacement se fasse, il a fallu que l’énergie d’investissement puisse, sans être inhibée, passer des représentations importantes sur celles qui ne le sont pas, ce qui, dans la pensée préconsciente normale, ne peut que donner l’impression d’une "faute de raisonnement".

Auteur: Freud Sigmund

Info: "Le Mot d'esprit et sa relation à l'inconscient", éditions Gallimard, Paris, 1988, pages 294 à 297

[ interprétation ] [ étapes ]

 

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élaboration psychologique

L’enfant n’était nullement précoce dans son développement intellectuel ; à l’âge d’un an et demi, il ne pouvait dire que quelques mots compréhensibles ; il utilisait en outre un certain nombre de sons offrant un sens intelligible pour l’entourage. Il était pourtant en bons termes avec ses parents et leur unique servante et l’on louait son "gentil" caractère. Il ne dérangeait pas ses parents la nuit, il obéissait consciencieusement à l’interdiction de toucher toutes sortes d’objets et d’entrer dans certaines pièces ; et surtout il ne pleurait jamais quand sa mère l’abandonnait pendant des heures, bien qu’il fût tendrement attaché à cette mère qui ne l’avait pas seulement nourri elle-même mais encore élevé et gardé sans aucune aide extérieure. Cependant ce bon petit garçon avait l’habitude, qui pouvait être gênante, de jeter loin de lui dans un coin de la pièce, sous le lit, etc., tous les petits objets dont il pouvait se saisir, si bien qu’il n’était souvent pas facile de ramasser son attirail de jeu. En même temps, il émettait avec une expression d’intérêt et de satisfaction un o-o-o-o, fort prolongé, qui, de l’avis commun de la mère et de l’observateur, n’était pas une interjection, mais signifiait "parti". Je remarquai finalement que c’était là un jeu et que l’enfant n’utilisait tous ses jouets que pour jouer avec eux à "parti". Un jour, je fis une observation qui confirma ma façon de voir. L’enfant avait une bobine en bois avec une ficelle attachée autour. Il ne lui venait jamais, par exemple, l’idée de la traîner par terre derrière lui pour jouer à la voiture ; mais il jetait avec une grande adresse la bobine, que retenait la ficelle, par-dessus le rebord de son petit lit à rideaux où elle disparaissait, tandis qu’il prononçait son o-o-o-o riche de sens ; il retirait ensuite la bobine hors du lit en tirant la ficelle et saluait alors sa réapparition par un joyeux "voilà". Tel était donc le jeu complet : disparition et retour ; on n’en voyait en général que le premier acte qui était inlassablement répété pour lui seul comme jeu, bien qu’il ne fût pas douteux que le plus grand plaisir s’attachât au deuxième acte.

L’interprétation du jeu ne présentait plus alors de difficulté. Le jeu était en rapport avec les importants résultats d’ordre culturel obtenus par l’enfant, avec le renoncement pulsionnel qu’il avait accompli (renoncement à la satisfaction de la pulsion) pour permettre le départ de sa mère sans manifester d’opposition. Il se dédommageaient pour ainsi dire en mettant lui-même en scène, avec les objets qu’il pouvait saisir, le même "disparition-retour". [...] Le départ de la mère n’a pas pu être agréable à l’enfant ou même seulement lui être indifférent. Comment alors concilier avec le principe de plaisir le fait qu’il répète comme jeu cette expérience pénible ? On voudra peut-être répondre que le départ devait être joué, comme une condition préalable à la joie de la réapparition, et que c’est en celle-ci que réside le but véritable du jeu. Mais l’observation contredit cette façon de voir : le premier acte, le départ, était mis en scène pour lui seul comme jeu et même bien plus souvent que l’épisode entier avec sa conclusion et le plaisir qu’elle procurait.

L’analyse d’un exemple unique comme celui-ci ne permet pas de trancher avec assurance ; à considérer les choses sans préjugé, on acquiert le sentiment que l’enfant a transformé son expérience en jeu pour un autre motif. Il était passif, à la merci de l’événement ; mais voici qu’en le répétant, aussi déplaisant qu’il soit, comme jeu, il assume un rôle actif. [...] En rejetant l’objet pour qu’il soit parti, l’enfant pourrait satisfaire une impulsion, réprimée dans sa vie quotidienne, à se venger de sa mère qui était partie loin de lui ; son action aurait alors une signification de bravade : "Eh bien, pars donc, je n’ai pas besoin de toi, c’est moi qui t’envoie promener !" Ce même enfant dont j’avais observé le premier jeu à un an et demi avait coutume, un an plus tard, de jeter à terre un jouet contre lequel il était en colère en disant : "Va-t’en à la guerre !" On lui avait raconté alors que son père absent était à la guerre et, loin de regretter son père, il manifestait de la façon la plus évidente qu’il ne voulait pas être dérangé dans la possession exclusive de la mère. Nous avons d’autres exemples d’enfants qui expriment des mouvements intérieurs hostiles de cet ordre en rejetant au loin des objets à la place des personnes.

Auteur: Freud Sigmund

Info: Dans "Au-delà du principe de plaisir" (1920), trad. de l'allemand par Jean Laplanche et J.-B. Pontalis, éditions Payot, Paris, 2010, pages 51 à 56

[ fort-da ] [ symbolisation ] [ modalité de suppléance ] [ objet transitionnel ]

 
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