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origines

La réalité serait-elle, dans son essence, obsessionnelle ? Etant donné que nous construisons nos mondes en associant des phénomènes, je ne serais pas surpris qu'au tout début des temps il y ait eu une association gratuite et répétée fixant une direction dans le chaos et instaurant un ordre.

Auteur: Gombrowicz Witold

Info: "Quelques extraits de mon journal au sujet de Cosmos" dans "Cosmos", trad. Georges Sédir, éd. Denoël, 1966, page 11

[ trait unaire ] [ arbitraire ] [ signifiant ] [ source déterministe ] [ verbe créateur ]

 
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existence

Nous ne sommes des ratés que si la vie a un sens. Car dans ce cas seulement, tout ce que nous n'avons pas accompli constitue une chute ou un péché. Dans un monde pourvu d'une finalité extérieure, un monde qui tend vers quelque chose, nous sommes obligés d'être jusqu'à nos limites.

Auteur: Cioran Emil Michel

Info: Le crépuscule des pensées, 1940, oeuvres, Gallimard 1995, p.390

[ épreuve ] [ déterministe ? ]

 

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solipsismes orthogonaux

Le monde sous jacent, bytié, neutre... mystère d'où nous surgissons... est nécessairement insaisissable et indéterministe.

Prérequis indispensable pour permettre l'apparition de nous autres, idiosyncrates singuliers... dotés de libre arbitre.

Si le mystère créateur qui nous fait exister était totalement déterministe cette liberté, ou marge de manoeuvre de chacun d'entre nous, ne serait pas possible.

Conséquence, même si la source est véritablement neutre et donc déterministe, ce qui est manifesté, la réalité - priméité, réel, univers commun, etc. - ne pourra jamais générer un cosmos anthropique totalement consensuel dans la mesure où chaque émergence-singularité biologique dont nous sommes un exemplaire, étant miroir-original-unique de son environnement (un peu comme un flocon de neige), ne peut témoigner autrement de ce réel admis qu'en le modifiant, plus ou moins légèrement, par une diffraction qui marque son individualité. 

C'est peut-être en ce sens que la recherche du consensus scientifique absolu, sur lequel semblent butter bien des quêtes de théoriciens quantiques, ressemblera pour bien longtemps encore à un cul-de-sac. 

Il se pourrait que pour en sortir une nouvelle approche spirituelle (sur base d'égoïsmes métaphysiques ?) soit nécessaire.

Auteur: Mg

Info: 23 mai 2023

[ spéculation ] [ perspectivisme ] [ non subatomique ] [ autonomie personnelle ] [ croyance propre ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

auto-détermination

Récemment, j'ai constaté, lors de discussions avec divers scientifiques et autres non-philosophes (par exemple, les scientifiques qui participaient avec moi à l'atelier de Sean Carroll sur l'avenir du naturalisme), qu'ils penchent dans l'autre sens : le libre arbitre, à leurs yeux, est manifestement incompatible avec le naturalisme, avec le déterminisme, et reste très probablement incohérent quel que soit le contexte. Aussi insistent-ils allègrement sur le fait que, bien sûr, ils n'ont pas le libre arbitre, ne pourraient pas l'avoir, et alors ? Tout ça n'a rien à voir avec la moralité ou le sens de la vie. Le conseil qu'ils me donnèrent lors de ce symposium était simple : reformuler mon incessante question en me demandant si le naturalisme (matérialisme, déterminisme, science...) a une quelconque implication concernant ce que nous nommerons compétence morale. Par exemple, les neurosciences montrent-elles que nous ne pouvons pas être responsables de nos choix, que nous ne pouvons pas être loués ou blâmés, récompensés ou punis à juste titre ? Abandonnez le terme de "libre arbitre" aux philosophes libertariens (à ne pas confondre avec les libertariens politiques) et autres incompatibilistes*, qui pourront poursuivre leurs fantasmes sans être inquiétés. Notez qu'il ne s'agit pas d'un rejet des questions importantes, mais d'une proposition visant à déterminer quel camp peut utiliser et définir le terme. Je commence à apprécier les avantages qu'il y a à se débarrasser complètement du terme "libre arbitre", mais cette voie implique aussi beaucoup de travail si l'on veut éviter d'être mal compris.

Auteur: Dennett Daniel C.

Info: Consciousness Explained. *Incompatibilisme, thèse philosophique selon laquelle un univers déterministe est en total désaccord avec la notion de libre arbitre.

[ causalité ] [ liberté ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

physique quantique

Mais revenons à l’article de 1990, dont voici l’introduction : "Le concept de hasard intrigue depuis longtemps les physiciens, et même l'humanité en général. Quelle est l'origine du hasard ? Dans quelle mesure le futur peut-il être prédit ? Notre incapacité à prédire l'avenir est-elle la conséquence de nos limites humaines ou plutôt la conséquence d'une impossibilité de principe ? Ces questions ont, en physique, une longue histoire. La physique classique héritée d'Isaac Newton était complètement déterministe : la connaissance parfaite de l'état d'un système à un instant donné permettait en principe la détermination de son état à tout instant ultérieur. Puis vint au début de ce siècle la mécanique quantique, où probabilités et hasard interviennent au niveau le plus fondamental de la théorie ; en effet, celle-ci ne peut fournir que des probabilités de mesurer telle ou telle valeur de la position, de l'énergie, etc. La mécanique quantique introduisit donc une indétermination fondamentale dans la nature, chose qu'Einstein lui-même ne voulut jamais accepter, comme en témoigne son célèbre "Dieu ne joue pas aux dés". Puis, assez récemment, on s'aperçut avec l'étude des "systèmes dynamiques", qu'après tout, la physique classique avait aussi du hasard, ou plus exactement de l'imprévisibilité, enfouis en son sein, puisque certains systèmes même très simples, comme un système de pendules, peuvent exhiber un comportement imprévisible. Le hasard, souvent associé au désordre, est ainsi devenu, du moins en physique, une notion pleine de contenu." (…)
Mais définir le hasard (ou une suite aléatoire de résultats de mesure) par un programme "minimal", qu’on ne peut pas réduire par un algorithme, c’est faire sauter en souriant l’interprétation métaphysique qui établit une équivalence entre forme aléatoire et absence d’intentionnalité, de sens, de volonté et de conscience. On en revient finalement à Kant qui expliquait que l’on ne peut pas plus démontrer l’existence de Dieu que son inexistence, que toute la métaphysique échappe à la démonstration logique.(…)
Alors sans doute faut-il reconnaître aujourd’hui que ces limites sont inhérentes à la raison humaine, outil magnifique mais incapable de tout surplomber et que, plus nous avancerons dans la connaissance de l’univers et de nous-mêmes, plus nous buterons sur l’inconnaissable ou, plus exactement, l’inexprimable par nos langages, qu’il s’agisse des mots ou des équations. Un inexprimable qui n’empêche pas la conscience et semble jaillir des noces paradoxales de la rigueur et de la liberté, autre nom du hasard.

Auteur: Anonyme

Info: Dans "Les magiciens du nouveau siècle"

[ connaissance maximale ] [ butée ] [ impossible ]

 
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chauvinisme idiomatique

La logique des mots

Que vient faire la langue dans la géopolitique ? Comprendre la vision du monde de V. Poutine suppose qu’on s’intéresse de près à cette question, qui attire peu l’attention en Europe occidentale, à l’exception de la Catalogne.

Le russe et l’ukrainien sont des langues différentes mais proches, comme sont proches l’espagnol et l’italien, mais moins que le tchèque et le slovaque, langues officielles de deux États différents, moins encore que le serbe et le croate, pratiquement identiques.

Après des siècles d’interdiction et de répression de la langue ukrainienne dans la Russie tsariste, puis de russification des normes de l’ukrainien sous Staline, l’immense majorité des citoyens ukrainiens sont bilingues, ou du moins comprennent parfaitement l’autre langue. Beaucoup d’entre eux parlent un mélange des deux langues, appelé le surzhyk, ou passent d’une langue à l’autre en fonction des interlocuteurs ou de la situation. Il est donc impossible de faire des statistiques fiables sur la répartition des langues, même si la question de la langue fait partie des recensements de population. Le gouvernement ukrainien a peut-être été maladroit d’imposer l’ukrainien comme seule langue officielle et de transformer le russe en langue étrangère au même titre que l’anglais, ce qui a profité à la démagogie poutinienne qui a argumenté sur la "répression" dont seraient victimes les "Russes" en Ukraine. Or "les Russes" en Ukraine ne sont pas "des Russes". Une nuance sémantique fondamentale doit être prise en compte : en Europe orientale certains pays font une différence entre "nationalité" et "citoyenneté". La citoyenneté est l’appartenance à un État (définition politique, non essentielle), la nationalité est une identité ethnique (essentielle, inaliénable). La nationalité se définit, entre autres, par la langue. Sur les papiers d’identité soviétiques était inscrite la "nationalité" : russe, ouzbèque, lettone, juive, ukrainienne… En 1975 A. Soljenitsyne a été privé de sa citoyenneté soviétique, mais les sbires du KGB n’auraient jamais eu l’idée de le priver de sa nationalité russe, idée dénuée de sens. Cette double appartenance subsiste dans la Russie post-soviétique (même si elle n’est plus mentionnée sur les papiers d’identité), mais pas en Ukraine, où tous les citoyens sont ukrainiens au même titre que ceux dont la langue maternelle est le hongrois ou le roumain.

Dans cette logique du point de vue russe, les Suisses romands, parce qu’ils sont francophones, sont des citoyens helvétiques de nationalité française, qui rêveraient de réintégrer un jour la mère-patrie, comme les Tessinois des citoyens helvétiques de nationalité italienne, injustement séparés de la mère-patrie, logique irrédentiste. A l’inverse, les Bretons, les Basques et les Alsaciens sont, toujours de ce point de vue, des citoyens français, de nationalité bretonne, basque ou alsacienne.

Cette définition de l’identité, ou appartenance d’un individu à un groupe remonte à l’opposition entre la définition française jacobine, politique, de la nation, et la définition allemande, romantique, culturelle, d’où la différence entre Gemeinschaft (essentielle, naturelle) et Gesellschaft (superficielle, non essentielle) (un thème récurrent de l’idéologie völkisch au début du XXe siècle).

Toute comparaison doit être maniée avec précaution, mais une s’impose : en 1938 pour Hitler les citoyens tchécoslovaques de langue allemande étaient "des Allemands", dont le territoire (les Sudètes) devait revenir dans le giron de la nation. Pour Poutine, les citoyens ukrainiens de langue maternelle (ou principale) russe sont "des Russes" avant d’être des citoyens ukrainiens. Il est donc logique, dans cette idéologie déterministe, que le territoire où ils sont en majorité revienne à la mère-patrie, dont ils n’auraient jamais dû être séparés. Mais cette logique a un prix : le mépris total de tout choix démocratique, de toute auto-détermination, puisque, dans ces conditions, l’individu n’existe pas en dehors du groupe auquel il est censé appartenir : la "nation" au sens ethnique.

La logique des mots

Le discours de Poutine n’est pas raciste (au sens biologique), mais ethniciste. Or, au final, la différence n’est pas grande, puisque pour lui la démocratie n’est qu’une faiblesse décadente, un facteur de division, et que seul compte le déterminisme ethnique. Chauvinisme, xénophobie et mépris du droit en sont l’expression la plus manifeste.

Quant Poutine prétend défendre ce qu’il appelle "nos concitoyens" ou "nos compatriotes" opprimés en Ukraine, il est indispensable de décoder ces mots démagogiques dont le sens premier a été détourné. Considérer que l’appartenance ethnique prime sur l’appartenance citoyenne est une idéologie politique dangereuse, qui repose sur l’idée de pseudo-naturalisme, à savoir que tout russophone, quelle que soit sa citoyenneté, est en même temps redevable de son être profond à l’État russe.

La Lettonie (membre de l’UE), où réside une importante minorité russophone, sera-t-elle la prochaine cible de la reconstitution de l’Empire soviétique ? La fragile Moldavie, presque bilingue, n’est-elle pas encore plus en danger ?

Auteur: Sériot Patrick

Info: Journal Le Temps, février 2022

[ dialectes parents ]

 

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chair-esprit

Le libre-arbitre existe-t-il ? Comment le cerveau déforme la réalité temporelle
Nous avons coutume de penser que nous sommes libres de décider et de choisir nos actes. Et pourtant, une série d'expériences de neurosciences jettent un doute sur ce qu'on a l'habitude d'appeler notre libre-arbitre.
Même si elles sont largement débattues, tant du point de vue de leurs résultats scientifiques que de l'interprétation philosophique qui en est donnée, ces expériences sont plutôt troublantes !
Libre-arbitre et activité neurologique
Nous avons tous une notion intuitive de ce qu'est le libre-arbitre. Sur le plan biologique, il peut être associé à la notion d'action volontaire, qui s'oppose à celle de réflexe. Alors que les réflexes empruntent des chemins neuronaux simples (comme un rapide circuit via la moelle épinière), les actions volontaires font intervenir de nombreuses aires cérébrales.
1983 : L'expérience fondatrice de Benjamin Libet*
Dans l'expérience de Libet, on vous place devant une horloge qui défile rapidement, et on vous donne un bouton sur lequel vous pouvez appuyer au moment qui vous plaira. La seule chose qu'on vous demande c'est de retenir le nombre indiqué par l'horloge au moment où vous prenez votre décision d'appuyer. Dans le même temps, des électrodes placées sur votre crâne suivent votre activité cérébrale.
Ce dispositif permet de mesurer 1) le moment où vous prenez la décision d'appuyer, 2) le moment où votre cerveau commence à s'activer, et 3) le moment où vous appuyez physiquement sur le bouton. Et la découverte spectaculaire de Libet, c'est que l'activation cérébrale précède la décision consciente, et ce de plusieurs centaines de millisecondes.
Interprétée de manière brute, l'expérience de Libet semble condamner le libre-arbitre : vous avez l'impression de décider d'appuyer à un certain moment, mais votre cerveau a déjà décidé depuis presque une demi-seconde ! Comment puis-je être libre de décider quelque chose, si au moment où j'ai conscience de choisir, mon cerveau a déjà commencé à agir ? Comme on peut s'en douter, cette expérience possède de nombreux points faibles que les spécialistes n'ont pas été longs à relever.
Il y a tout d'abord les incertitudes de mesure, puisqu'on parle ici d'un écart de seulement quelques centaines de millisecondes. Ensuite le fait que l'estimation du moment de décision par le sujet lui-même n'est certainement pas très fiable : elle est subjective et l'horloge peut constituer une source de distraction et donc d'erreur. Enfin, le signal électrique relevé dans le cerveau pourrait être simplement un signal "préparatoire", qui indique que le cerveau s'active mais qui ne détermine pas spécifiquement la décision que l'on va prendre.
Bref, il y a plein de critiques à faire à l'expérience de Libet, et qui permettent de se rassurer quant à l'existence de notre libre-arbitre. Tout va bien donc, jusqu'à une nouvelle expérience réalisée en 2008, et qui s'affranchit de la plupart de ces critiques.
Dans cette nouvelle expérience, plusieurs choses diffèrent par rapport au protocole de Benjamin Libet. Tout d'abord, le sujet dispose de 2 boutons, un dans sa main gauche et un dans sa main droite. Il peut appuyer quand il le souhaite, soit à gauche soit à droite. Ensuite, le cerveau du sujet est suivi cette fois dans une IRM, ce qui permet d'observer simultanément l'activité de tout un ensemble d'aires cérébrales.
Et le moins que l'on puisse dire, c'est que les résultats de cette expérience sont perturbants. D'une part, l'IRM révèle qu'une activité cérébrale préparatoire existe 7 à 10 secondes AVANT que le sujet ne prenne sa décision d'appuyer. Encore plus troublant, cette activité cérébrale permet dans une bonne mesure de prédire de quel côté le sujet va appuyer.
Oui oui, vous avez bien lu, plusieurs secondes avant que vous soyiez conscient de choisir, votre cerveau a déjà décidé entre droite et gauche, et l'IRM peut révéler le côté qui sera choisi !
Pour modérer un peu ce résultat apparemment catastrophique pour notre libre-arbitre, il faut noter que la prédiction faite par l'IRM est loin d'être infaillible, puisqu'elle fonctionne au mieux dans 60% des cas, ce qui est significativement mieux que le hasard, mais reste tout de même limité.
Quelle conclusion raisonnable tirer de ces expériences ?
Il faut savoir qu'il n'existe chez les scientifiques et les philosophes aucun consensus quant à l'interprétation de ces expériences. Pour certains comme Patrick Haggard, le libre-arbitre n'existe tout simplement pas, il affirme "We feel that we choose, but we don't". Pour d'autres, au contraire, ces expériences n'ont aucune valeur, "Circulez ya rien à voir !".
Une position intermédiaire raisonnable c'est d'admettre que ces expériences montrent au moins que nos intentions ne sont pas systématiquement à l'origine de nos actions. Les processus inconscients jouent peut être un plus grand rôle que nous ne pouvions le penser, et la conscience d'une décision est un phénomène qui se construit au cours du processus de décision, pas à son origine.
Comme cette conclusion prudente semble quand même en mettre un coup à notre vieille notion de libre-arbitre, une manière de se rassurer c'est de considérer que notre cerveau prépare nos décisions assez en avance par rapport à notre conscience, mais qu'il nous laisse jusqu'au dernier moment un droit de veto. Il semblerait qu'une des fonctions de cette aire appelée SMA soit justement de pouvoir inhiber certaines actions décidées et préparées en amont. Donc jusqu'au dernier moment, on aurait le choix de ne pas faire. C'est ce que les anglo-saxons appellent le "free won't", par analogie au libre-arbitre appelé "free will".
Pour d'autres philosophes comme Dan Dennett, ces expériences sont correctes, mais elles ne sont pas incompatibles avec le libre-arbitre. Ces philosophes adhèrent à une position appelée compatibilisme, selon laquelle la réalité est totalement déterministe mais le libre-arbitre existe quand même. J'avoue que je ne comprends pas ce que ça signifie, et que pour moi ça ressemble beaucoup à une posture de façade "pour sauver les meubles". Ce qu'on peut comprendre car si le libre-arbitre était vraiment réfuté, les conséquences pour la société pourraient être terribles.
Les implications morales de l'absence de libre-arbitre
Imaginons que l'on montre scientifiquement que le libre-arbitre n'existe pas, alors on est mal car toutes nos lois et notre droit reposent sur la notion de responsabilité individuelle : nous sommes responsables de nos actes car nous sommes libres de les accomplir ou pas.
D'ailleurs en droit, pour être puni d'un crime, il faut qu'il y ait à la fois l'intention et l'action. La pensée n'est pas un crime, donc si vous avez juste l'intention de commettre un forfait, on ne peut pas vous condamner pour ça (encore que ce ne soit pas totalement vrai, notamment dans le cas de la préparation d'actes terroristes). Réciproquement, si quelqu'un commet un crime mais est jugé irresponsable, il ne sera pas condamné. Donc si le libre-arbitre n'existe pas, nous sommes tous irresponsables de nos actes et toutes nos structures juridiques s'effondrent !
Ceci a amené Dan Dennett à mettre en garde les scientifiques à ne pas trop faire d'annonces intempestives au sujet de leurs expériences sur le libre-arbitre !...
Pour aller plus loin...
Il faut ajouter un commentaire sur ce résultat de 60% de prédiction du côté gauche/droit quand on fait l'IRM. Cela peu paraître peu, bien peu. Mais songez que l'IRM est loin d'être en général un prédicteur parfait de nos actes. Ce qu'ont notamment montré les auteurs, c'est que même en utilisant l'information disponible dans le cortex moteur après la prise de décision et pendant le mouvement, on n'arrivait à correctement prédire le côté que dans 75% des cas. Alors qu'en théorie on devrait être capable de le faire à 100%. Cela montre que l'IRM est une information peut être trop agrégée pour permettre une prédiction très fiable.
Ainsi une récente étude montre qu'en faisant un suivi individuel de neurones avec des électrodes implantées dans le cerveau (plutôt qu'une IRM), on peut prédire le résultat avec une acuité de 80%, et ce 700 millisecondes avant la décision consciente. Tout ça pour dire que rien ne nous met à l'abri de futures expériences avec de meilleurs systèmes de mesure et de prédiction, qui pourraient deviner nos décisions 5 secondes en avance avec 90% de fiabilité.
Pour finir sur un peu de philo, ces expériences semblent au moins réfuter le modèle dualiste du corps et de l'esprit. Dans ce modèle popularisé par Descartes, l'esprit existe indépendamment du corps, et est capable de le contrôler. Si cette vision était correcte, alors le sentiment d'avoir l'intention d'agir (qui viendrait de l'esprit) devrait précéder les manifestations cérébrales et musculaires (du corps). Il paraît que les philosophes dualistes, ça n'existe plus, mais malgré tout la vision dualiste reste probablement la plus reflétée dans le langage commun, quand on dit "JE décide" (esprit), mais "le cerveau s'active" et "le muscle bouge" (corps).

Auteur: Internet

Info: sciencetonnante.wordpress.com,*voir aussi les expériences de Walter Grey

[ sciences ]

 

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strates biologiques

Les chemins aléatoires de l'évolution mènent à un même endroit

Une étude statistique massive suggère que le résultat final de l’évolution – la forme physique – est prévisible.

(Photo  : Différentes souches de levure cultivées dans des conditions identiques développent des mutations différentes, mais parviennent finalement à des limites évolutives similaires.)

Dans son laboratoire du quatrième étage de l'Université Harvard, Michael Desai a créé des centaines de mondes identiques afin d'observer l'évolution à l'œuvre. Chacun de ses environnements méticuleusement contrôlés abrite une souche distincte de levure de boulangerie. Toutes les 12 heures, les assistants robots de Desai arrachent la levure à la croissance la plus rapide de chaque monde – sélectionnant celle qui est la plus apte à vivre – et jettent le reste. Desai surveille ensuite les souches à mesure qu'elles évoluent au cours de 500 générations. Son expérience, que d'autres scientifiques considèrent comme d'une ampleur sans précédent, cherche à mieux comprendre une question qui préoccupe depuis longtemps les biologistes : si nous pouvions recommencer le monde, la vie évoluerait-elle de la même manière ?

De nombreux biologistes affirment que ce ne serait pas le cas et que des mutations fortuites au début du parcours évolutif d’une espèce influenceraient profondément son destin. "Si vous rejouez le déroulement du vivant, vous pourriez avoir une mutation initiale qui vous emmènera dans une direction totalement différente", a déclaré Desai, paraphrasant une idée avancée pour la première fois par le biologiste Stephen Jay Gould dans les années 1980.

Les cellules de levure de Desai remettent en question cette croyance. Selon les résultats publiés dans Science en juin, toutes les variétés de levures de Desai ont atteint à peu près le même point final d'évolution (tel que mesuré par leur capacité à se développer dans des conditions de laboratoire spécifiques), quel que soit le chemin génétique précis emprunté par chaque souche. C'est comme si 100 taxis de la ville de New York acceptaient d'emprunter des autoroutes distinctes dans une course vers l'océan Pacifique et que 50 heures plus tard, ils convergeaient tous vers la jetée de Santa Monica.

Les résultats suggèrent également un décalage entre l’évolution au niveau génétique et au niveau de l’organisme dans son ensemble. Les mutations génétiques se produisent pour la plupart de manière aléatoire, mais la somme de ces changements sans but crée d’une manière ou d’une autre un modèle prévisible. Cette distinction pourrait s’avérer précieuse, dans la mesure où de nombreuses recherches en génétique se sont concentrées sur l’impact des mutations dans des gènes individuels. Par exemple, les chercheurs se demandent souvent comment une seule mutation pourrait affecter la tolérance d’un microbe aux toxines ou le risque de maladie d’un humain. Mais si les découvertes de Desai s'avèrent valables pour d'autres organismes, elles pourraient suggérer qu'il est tout aussi important d'examiner comment un grand nombre de changements génétiques individuels fonctionnent de concert au fil du temps.

"En biologie évolutive, il existe une sorte de tension entre penser à chaque gène individuellement et la possibilité pour l'évolution de modifier l'organisme dans son ensemble", a déclaré Michael Travisano, biologiste à l'université du Minnesota. "Toute la biologie s'est concentrée sur l'importance des gènes individuels au cours des 30 dernières années, mais le grand message à retenir de cette étude est que ce n'est pas nécessairement important". 

La principale force de l’expérience de Desai réside dans sa taille sans précédent, qui a été qualifiée d’« audacieuse » par d’autres spécialistes du domaine. La conception de l'expérience est ancrée dans le parcours de son créateur ; Desai a suivi une formation de physicien et, depuis qu'il a lancé son laboratoire il y a quatre ans, il a appliqué une perspective statistique à la biologie. Il a imaginé des moyens d'utiliser des robots pour manipuler avec précision des centaines de lignées de levure afin de pouvoir mener des expériences évolutives à grande échelle de manière quantitative. Les scientifiques étudient depuis longtemps l’évolution génétique des microbes, mais jusqu’à récemment, il n’était possible d’examiner que quelques souches à la fois. L'équipe de Desai, en revanche, a analysé 640 lignées de levure qui avaient toutes évolué à partir d'une seule cellule parent. L'approche a permis à l'équipe d'analyser statistiquement l'évolution.

"C'est l'approche physicienne de l'évolution, réduisant tout aux conditions les plus simples possibles", a déclaré Joshua Plotkin, biologiste évolutionniste à l'Université de Pennsylvanie qui n'a pas participé à la recherche mais a travaillé avec l'un des auteurs. "Ce qui pourrait permettre de définir la part du hasard dans l'évolution, quelle est la part du point de départ et la part du bruit de mesure."

Le plan de Desai était de suivre les souches de levure à mesure qu'elles se développaient dans des conditions identiques, puis de comparer leurs niveaux de condition physique finaux, déterminés par la rapidité avec laquelle elles se développaient par rapport à leur souche ancestrale d'origine. L’équipe a utilisé des bras robotisés spécialement conçus pour transférer les colonies de levure vers une nouvelle maison toutes les 12 heures. Les colonies qui s’étaient le plus développées au cours de cette période passèrent au cycle suivant et le processus se répéta pendant 500 générations. Sergey Kryazhimskiy , chercheur postdoctoral dans le laboratoire de Desai, passait parfois la nuit dans le laboratoire, analysant l'aptitude de chacune des 640 souches à trois moments différents. Les chercheurs ont ensuite pu comparer la variation de la condition physique entre les souches et découvrir si les capacités initiales d'une souche affectaient sa position finale. Ils ont également séquencé les génomes de 104 souches pour déterminer si les mutations précoces modifiaient les performances finales.

Des études antérieures ont indiqué que de petits changements au début du parcours évolutif peuvent conduire à de grandes différences plus tard, une idée connue sous le nom de contingence historique. Des études d'évolution à long terme sur la bactérie E. coli, par exemple, ont montré que les microbes peuvent parfois évoluer pour manger un nouveau type d'aliment, mais que des changements aussi importants ne se produisent que lorsque certaines mutations habilitantes se produisent en premier. Ces mutations précoces n’ont pas d’effet important en elles-mêmes, mais elles jettent les bases nécessaires pour des mutations ultérieures qui en auront.

Mais en raison de la petite échelle de ces études, Desai ne savait pas clairement si ces cas constituaient l'exception ou la règle. "Obtenez-vous généralement de grandes différences dans le potentiel évolutif qui surviennent au cours du cours naturel de l'évolution, ou l'évolution est-elle en grande partie prévisible?" il répond "Pour répondre à cette question, nous avions besoin de la grande échelle de notre expérience."

Comme dans les études précédentes, Desai a constaté que les mutations précoces influencent l'évolution future, en façonnant le chemin que prend la levure. Mais dans cette expérience, ce chemin n'a pas eu d'incidence sur la destination finale. "Ce type particulier de contingence rend en fait l'évolution de la forme physique  plus prévisible, et pas moins prévisible", a déclaré M. Desai.

Desai a montré que, tout comme une seule visite à la salle de sport profite plus à un amateur flappi par la TV qu'à un athlète, les microbes qui commençent par croître lentement tirent bien plus parti des mutations bénéfiques que leurs homologues plus en forme qui démarrent sur les chapeaux de roue. " Si vous êtes à la traîne au début à cause de la malchance, vous aurez tendance à aller mieux dans le futur ", a déclaré Desai. Il compare ce phénomène au principe économique des rendements décroissants - après un certain point, chaque unité d'effort supplémentaire aide de moins en moins.

Les scientifiques ne savent pas pourquoi toutes les voies génétiques chez la levure semblent arriver au même point final, une question que Desai et d'autres acteurs du domaine trouvent particulièrement intrigante. La levure a développé des mutations dans de nombreux gènes différents, et les scientifiques n'ont trouvé aucun lien évident entre eux. On ne sait donc pas exactement comment ces gènes interagissent dans la cellule, voire pas du tout. "Il existe peut-être une autre couche du métabolisme que personne ne maîtrise", a déclaré Vaughn Cooper, biologiste à l'Université du New Hampshire qui n'a pas participé à l'étude.

Il n’est pas non plus clair si les résultats soigneusement contrôlés de Desai sont applicables à des organismes plus complexes ou au monde réel chaotique, où l’organisme et son environnement changent constamment. "Dans le monde réel, les organismes réussissent dans différentes choses, en divisant l'environnement", a déclaré Travisano. Il prédit que les populations situées au sein de ces niches écologiques seraient toujours soumises à des rendements décroissants, en particulier à mesure qu'elles s'adaptent. Mais cela reste une question ouverte, a-t-il ajouté.

Cependant, certains éléments suggèrent que les organismes complexes peuvent également évoluer rapidement pour se ressembler davantage. Une étude publiée en mai a analysé des groupes de drosophiles génétiquement distinctes alors qu'elles s'adaptaient à un nouvel environnement. Malgré des trajectoires évolutives différentes, les groupes ont développé des similitudes dans des attributs tels que la fécondité et la taille du corps après seulement 22 générations. " Ainsi beaucoup de gens pensent à un gène pour un trait, une façon déterministe de résoudre des problèmes par l'évolution ", a déclaré David Reznick, biologiste à l'Université de Californie à Riverside. " Cela montre que ce n'est pas vrai ; on peut évoluer pour être mieux adapté à l'environnement de nombreuses façons. "





 

Auteur: Internet

Info: Quanta Magazine, Emily Singer, September 11, 2014

[ bio-mathématiques ] [ individu-collectif ] [ équilibre grégaire ] [ compensation mutationnelle ]

 
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physique fondamentale

La "problèmatique de la mesure" en théorie quantique pourrait être une pilule empoisonnée pour la réalité objective

La résolution d'un problème quantique notoire pourrait nécessiter l'abandon de certaines des hypothèses les plus chères à la science concernant le monde physique.

Imaginez qu'un physicien observe un système quantique dont le comportement s'apparente à celui d'une pièce de monnaie : qui peut tomber sur pile ou face. Il effectue le jeu de pile ou face quantique et obtient pile. Pourrait-il être certain que son résultat est un fait objectif, absolu et indiscutable sur le monde ? Si la pièce était simplement du type de celles que nous voyons dans notre expérience quotidienne, le résultat du lancer serait le même pour tout le monde : pile ou face ! Mais comme pour la plupart des choses en physique quantique, le résultat d'un jeu de pile ou face quantique serait un "ça dépend" beaucoup plus compliqué. Il existe des scénarios théoriquement plausibles dans lesquels un autre observateur pourrait trouver que le résultat de la pièce de notre physicien est pile ou face.

Au cœur de cette bizarrerie se trouve ce que l'on appelle le problème de la mesure. La mécanique quantique standard rend compte de ce qui se passe lorsque l'on mesure un système quantique : en substance, la mesure provoque l'"effondrement" aléatoire des multiples états possibles du système en un seul état défini. Mais cette comptabilité ne définit pas ce qui constitue une mesure, d'où le problème de la mesure.

Les tentatives visant à éviter le problème de la mesure, par exemple en envisageant une réalité dans laquelle les états quantiques ne s'effondrent pas du tout, ont conduit les physiciens sur un terrain étrange où les résultats des mesures peuvent être subjectifs. "L'un des principaux aspects du problème de la mesure est l'idée que les événements observés ne sont pas absolus", explique Nicholas Ormrod, de l'université d'Oxford. En bref, c'est la raison pour laquelle notre pile ou face quantique imaginaire pourrait être pile d'un point de vue et face d'un autre.

Mais ce scénario apparemment problématique est-il physiquement plausible ou s'agit-il simplement d'un artefact de notre compréhension incomplète du monde quantique ? Pour répondre à ces questions, il faut mieux comprendre les théories dans lesquelles le problème de la mesure peut se poser. C'est exactement ce qu'Ormrod, Vilasini Venkatesh de l'École polytechnique fédérale de Zurich et Jonathan Barrett d'Oxford ont réussi à faire. Dans une prépublication récente, le trio a prouvé un théorème qui montre pourquoi certaines théories, comme la mécanique quantique, ont un problème de mesure en premier lieu et comment on pourrait développer des théories alternatives pour l'éviter, préservant ainsi l'"absoluité" de tout événement observé. De telles théories banniraient, par exemple, la possibilité qu'une pièce de monnaie soit tirée à pile ou face par un observateur et qu'elle soit tirée à pile ou face par un autre.

Mais leurs travaux montrent également que la préservation d'un tel caractère absolu a un coût que de nombreux physiciens jugeraient prohibitif. "C'est la démonstration qu'il n'existe pas de solution indolore à ce problème", explique M. Ormrod. "Si nous parvenons un jour à retrouver l'absoluité, nous devrons alors renoncer à certains principes physiques qui nous tiennent vraiment à cœur".

 L'article d'Ormrod, Venkatesh et Barrett "aborde la question de savoir quelles catégories de théories sont incompatibles avec l'absoluité des événements observés et si l'absoluité peut être maintenue dans certaines théories, en même temps que d'autres propriétés souhaitables", explique Eric Cavalcanti, de l'université Griffith, en Australie. (M. Cavalcanti, le physicien Howard Wiseman et leurs collègues ont défini le terme "absoluité des événements observés" dans des travaux antérieurs qui ont jeté les bases de l'étude d'Ormrod, Venkatesh et Barrett).

S'en tenir à l'absoluité des événements observés pourrait signifier que le monde quantique est encore plus étrange que ce que nous savons.

LE CŒUR DU PROBLÈME

Pour comprendre ce qu'Ormrod, Venkatesh et Barrett ont réalisé, il faut suivre un cours accéléré sur les arcanes des fondations quantiques. Commençons par considérer notre système quantique hypothétique qui, lorsqu'il est observé, peut donner soit pile, soit face.

Dans les manuels de théorie quantique, avant l'effondrement, on dit que le système se trouve dans une superposition de deux états, et cet état quantique est décrit par une construction mathématique appelée fonction d'onde, qui évolue dans le temps et l'espace. Cette évolution est à la fois déterministe et réversible : étant donné une fonction d'onde initiale, on peut prédire ce qu'elle sera à un moment donné, et on peut en principe remonter l'évolution pour retrouver l'état antérieur. La mesure de la fonction d'onde entraîne cependant son effondrement, mathématiquement parlant, de sorte que le système de notre exemple apparaît comme étant soit pile, soit face.

Ce processus d'effondrement est la source obscure du problème de la mesure : il s'agit d'une affaire irréversible et unique, et personne ne sait même ce qui définit le processus ou les limites de la mesure. Qu'est-ce qu'une "mesure" ou, d'ailleurs, un "observateur" ? Ces deux éléments ont-ils des contraintes physiques, telles que des tailles minimales ou maximales ? Doivent-ils également être soumis à divers effets quantiques difficiles à saisir, ou peuvent-ils être considérés comme immunisés contre de telles complications ? Aucune de ces questions n'a de réponse facile et acceptée, mais les théoriciens ne manquent pas de solutions.

Étant donné le système de l'exemple, un modèle qui préserve l'absoluité de l'événement observé - c'est-à-dire que c'est soit pile, soit face pour tous les observateurs - est la théorie de Ghirardi-Rimini-Weber (GRW). Selon cette théorie, les systèmes quantiques peuvent exister dans une superposition d'états jusqu'à ce qu'ils atteignent une taille encore indéterminée, à partir de laquelle la superposition s'effondre spontanément et aléatoirement, indépendamment de l'observateur. Quel que soit le résultat - pile ou face dans notre exemple - il sera valable pour tous les observateurs.

Mais la théorie GRW, qui appartient à une catégorie plus large de théories de "l'effondrement spontané", semble aller à l'encontre d'un principe physique chéri depuis longtemps : la préservation de l'information. Tout comme un livre brûlé pourrait, en principe, être lu en réassemblant ses pages à partir de ses cendres (en ignorant l'émission initiale de rayonnement thermique du livre brûlé, pour des raisons de simplicité), la préservation de l'information implique que l'évolution d'un système quantique dans le temps permette de connaître ses états antérieurs. En postulant un effondrement aléatoire, la théorie GRW détruit la possibilité de savoir ce qui a conduit à l'état d'effondrement, ce qui, selon la plupart des témoignages, signifie que l'information sur le système avant sa transformation est irrémédiablement perdue. "La théorie GRW serait un modèle qui renonce à la préservation de l'information, préservant ainsi l'absoluité des événements", explique M. Venkatesh.

Un contre-exemple qui autorise la non-absoluité des événements observés est l'interprétation de la mécanique quantique selon le principe des "mondes multiples". Selon cette interprétation, la fonction d'onde de notre exemple se ramifiera en de multiples réalités contemporaines, de sorte que dans un "monde", le système sortira pile, tandis que dans un autre, il sortira face. Dans cette conception, il n'y a pas d'effondrement. "La question de savoir ce qui se passe n'est donc pas absolue ; elle est relative à un monde", explique M. Ormrod. Bien entendu, en essayant d'éviter le problème de mesure induit par l'effondrement, l'interprétation des mondes multiples introduit la ramification abrutissante des fonctions d'onde et la prolifération galopante des mondes à chaque bifurcation de la route quantique - un scénario désagréable pour beaucoup.

Néanmoins, l'interprétation des mondes multiples est un exemple de ce que l'on appelle les théories perspectivistes, dans lesquelles le résultat d'une mesure dépend du point de vue de l'observateur.

ASPECTS CRUCIAUX DE LA RÉALITÉ

Pour prouver leur théorème sans s'embourber dans une théorie ou une interprétation particulière, mécanique quantique ou autre, Ormrod, Venkatesh et Barrett se sont concentrés sur les théories perspectivistes qui obéissent à trois propriétés importantes. Une fois encore, il nous faut un peu de courage pour saisir l'importance de ces propriétés et pour apprécier le résultat plutôt profond de la preuve des chercheurs.

La première propriété est appelée nonlocalité de Bell (B). Elle fut identifiée pour la première fois en 1964 par le physicien John Bell dans un théorème éponyme et s'est avérée être un fait empirique incontesté de notre réalité physique. Supposons qu'Alice et Bob aient chacun accès à l'une des deux particules décrites par un état unique. Alice et Bob effectuent des mesures individuelles de leurs particules respectives et le font pour un certain nombre de paires de particules préparées de manière similaire. Alice choisit son type de mesure librement et indépendamment de Bob, et vice versa. Le fait qu'Alice et Bob choisissent leurs paramètres de mesure de leur plein gré est une hypothèse importante. Ensuite, lorsqu'ils compareront leurs résultats, le duo constatera que les résultats de leurs mesures sont corrélés d'une manière qui implique que les états des deux particules sont inséparables : connaître l'état de l'une permet de connaître l'état de l'autre. Les théories capables d'expliquer de telles corrélations sont dites non locales de Bell.

La deuxième propriété est la préservation de l'information (I). Les systèmes quantiques qui présentent une évolution déterministe et réversible satisfont à cette condition. Mais la condition est plus générale. Imaginez que vous portiez aujourd'hui un pull-over vert. Dans une théorie préservant l'information, il devrait toujours être possible, en principe, de retrouver la couleur de votre pull dans dix ans, même si personne ne vous a vu le porter. Mais "si le monde ne préserve pas l'information, il se peut que dans 10 ans, il n'y ait tout simplement aucun moyen de savoir de quelle couleur était le pull que je portais", explique M. Ormrod.

La troisième est une propriété appelée dynamique locale (L). Considérons deux événements dans deux régions de l'espace-temps. S'il existe un cadre de référence dans lequel les deux événements semblent simultanés, on dit que les régions de l'espace sont "séparées comme dans l'espace". La dynamique locale implique que la transformation d'un système dans l'une de ces régions ne peut affecter causalement la transformation d'un système dans l'autre région à une vitesse supérieure à celle de la lumière, et vice versa, une transformation étant toute opération qui prend un ensemble d'états d'entrée et produit un ensemble d'états de sortie. Chaque sous-système subit sa propre transformation, de même que le système dans son ensemble. Si la dynamique est locale, la transformation du système complet peut être décomposée en transformations de ses parties individuelles : la dynamique est dite séparable. "La [contrainte] de la dynamique locale permet de s'assurer que l'on ne simule pas Bell [la non-localité]", explique M. Venkatesh.

Dans la théorie quantique, les transformations peuvent être décomposées en leurs éléments constitutifs. "La théorie quantique est donc dynamiquement séparable", explique M. Ormrod. En revanche, lorsque deux particules partagent un état non local de Bell (c'est-à-dire lorsque deux particules sont intriquées, selon la théorie quantique), on dit que l'état est inséparable des états individuels des deux particules. Si les transformations se comportaient de la même manière, c'est-à-dire si la transformation globale ne pouvait pas être décrite en termes de transformations de sous-systèmes individuels, alors le système entier serait dynamiquement inséparable.

Tous les éléments sont réunis pour comprendre le résultat du trio. Le travail d'Ormrod, Venkatesh et Barrett se résume à une analyse sophistiquée de la manière dont les théories "BIL" (celles qui satisfont aux trois propriétés susmentionnées) traitent une expérience de pensée faussement simple. Imaginons qu'Alice et Bob, chacun dans son propre laboratoire, effectuent une mesure sur l'une des deux particules. Alice et Bob effectuent chacun une mesure, et tous deux effectuent exactement la même mesure. Par exemple, ils peuvent tous deux mesurer le spin de leur particule dans le sens haut-bas.

Charlie et Daniela observent Alice et Bob et leurs laboratoires de l'extérieur. En principe, Charlie et Daniela devraient pouvoir mesurer le spin des mêmes particules, par exemple dans le sens gauche-droite. Dans une théorie préservant l'information, cela devrait être possible.

Prenons l'exemple spécifique de ce qui pourrait se produire dans la théorie quantique standard. Charlie, par exemple, considère Alice, son laboratoire et la mesure qu'elle effectue comme un système soumis à une évolution déterministe et réversible. En supposant qu'il contrôle totalement le système dans son ensemble, Charlie peut inverser le processus de manière à ce que la particule revienne à son état d'origine (comme un livre brûlé qui serait reconstitué à partir de ses cendres). Daniela fait de même avec Bob et son laboratoire. Charlie et Daniela effectuent maintenant chacun une mesure différente sur leurs particules respectives dans le sens gauche-droite.

En utilisant ce scénario, l'équipe a prouvé que les prédictions de toute théorie de la BIL pour les résultats des mesures des quatre observateurs contredisent le caractère absolu des événements observés. En d'autres termes, "toutes les théories de la BIL ont un problème de mesure", explique M. Ormrod.

CHOISISSEZ VOTRE POISON

Les physiciens se trouvent donc dans une impasse désagréable : soit ils acceptent le caractère non absolu des événements observés, soit ils renoncent à l'une des hypothèses de la théorie de la BIL.

Venkatesh pense qu'il y a quelque chose de convaincant dans le fait de renoncer à l'absoluité des événements observés. Après tout, dit-elle, la physique a réussi à passer d'un cadre newtonien rigide à une description einsteinienne de la réalité, plus nuancée et plus fluide. "Nous avons dû ajuster certaines notions de ce que nous pensions être absolu. Pour Newton, l'espace et le temps étaient absolus", explique M. Venkatesh. Mais dans la conception de l'univers d'Albert Einstein, l'espace et le temps ne font qu'un, et cet espace-temps unique n'est pas quelque chose d'absolu mais peut se déformer d'une manière qui ne correspond pas au mode de pensée newtonien.

D'autre part, une théorie perspectiviste qui dépend des observateurs crée ses propres problèmes. En particulier, comment peut-on faire de la science dans les limites d'une théorie où deux observateurs ne peuvent pas se mettre d'accord sur les résultats des mesures ? "Il n'est pas évident que la science puisse fonctionner comme elle est censée le faire si nous ne parvenons pas à des prédictions pour des événements observés que nous considérons comme absolus", explique M. Ormrod.

Donc, si l'on insiste sur le caractère absolu des événements observés, il faut faire un compromis. Ce ne sera pas la non-localité de Bell ou la préservation de l'information : la première repose sur des bases empiriques solides, et la seconde est considérée comme un aspect important de toute théorie de la réalité. L'accent est mis sur la dynamique locale, en particulier sur la séparabilité dynamique.

La séparabilité dynamique est "une sorte d'hypothèse du réductionnisme", explique M. Ormrod. "On peut expliquer les grandes choses en termes de petits morceaux.

Le fait de préserver le caractère absolu des événements observés pourrait signifier que ce réductionnisme ne tient pas : tout comme un état non local de Bell ne peut être réduit à certains états constitutifs, il se peut que la dynamique d'un système soit également holistique, ce qui ajoute un autre type de nonlocalité à l'univers. Il est important de noter que le fait d'y renoncer ne met pas une théorie en porte-à-faux avec les théories de la relativité d'Einstein, tout comme les physiciens ont soutenu que la non-localité de Bell ne nécessite pas d'influences causales superluminales ou non locales, mais simplement des états non séparables.

"Peut-être que la leçon de Bell est que les états des particules distantes sont inextricablement liés, et que la leçon des nouveaux théorèmes est que leur dynamique l'est aussi", ont écrit Ormrod, Venkatesh et Barrett dans leur article.

"J'aime beaucoup l'idée de rejeter la séparabilité dynamique, car si cela fonctionne, alors ... nous aurons le beurre et l'argent du beurre", déclare Ormrod. "Nous pouvons continuer à croire ce que nous considérons comme les choses les plus fondamentales du monde : le fait que la théorie de la relativité est vraie, que l'information est préservée, et ce genre de choses. Mais nous pouvons aussi croire à l'absoluité des événements observés".

Jeffrey Bub, philosophe de la physique et professeur émérite à l'université du Maryland, College Park, est prêt à avaler quelques pilules amères si cela signifie vivre dans un univers objectif. "Je voudrais m'accrocher à l'absoluité des événements observés", déclare-t-il. "Il me semble absurde d'y renoncer simplement à cause du problème de la mesure en mécanique quantique. À cette fin, Bub pense qu'un univers dans lequel les dynamiques ne sont pas séparables n'est pas une si mauvaise idée. "Je pense que je serais provisoirement d'accord avec les auteurs pour dire que la non-séparabilité [dynamique] est l'option la moins désagréable", déclare-t-il.

Le problème est que personne ne sait encore comment construire une théorie qui rejette la séparabilité dynamique - à supposer qu'elle soit possible à construire - tout en conservant les autres propriétés telles que la préservation de l'information et la non-localité de Bell.

UNE NON LOCALITÉ PLUS PROFONDE

Howard Wiseman, de l'université Griffith, qui est considéré comme une figure fondatrice de ces réflexions théoriques, apprécie l'effort d'Ormrod, Venkatesh et Barrett pour prouver un théorème qui s'applique à la mécanique quantique sans lui être spécifique. "C'est bien qu'ils poussent dans cette direction", déclare-t-il. "Nous pouvons dire des choses plus générales sans faire référence à la mécanique quantique.

 Il souligne que l'expérience de pensée utilisée dans l'analyse ne demande pas à Alice, Bob, Charlie et Daniela de faire des choix - ils font toujours les mêmes mesures. Par conséquent, les hypothèses utilisées pour prouver le théorème n'incluent pas explicitement une hypothèse sur la liberté de choix, car personne n'exerce un tel choix. Normalement, moins il y a d'hypothèses, plus la preuve est solide, mais ce n'est peut-être pas le cas ici, explique Wiseman. En effet, la première hypothèse, selon laquelle la théorie doit tenir compte de la non-localité de Bell, exige que les agents soient dotés d'un libre arbitre. Tout test empirique de la non-localité de Bell implique qu'Alice et Bob choisissent de leur plein gré les types de mesures qu'ils effectuent. Par conséquent, si une théorie est nonlocale au sens de Bell, elle reconnaît implicitement le libre arbitre des expérimentateurs. "Ce que je soupçonne, c'est qu'ils introduisent subrepticement une hypothèse de libre arbitre", déclare Wiseman.

Cela ne veut pas dire que la preuve est plus faible. Au contraire, elle aurait été plus forte si elle n'avait pas exigé une hypothèse de libre arbitre. En l'occurrence, le libre arbitre reste une exigence. Dans ces conditions, la portée la plus profonde de ce théorème pourrait être que l'univers est non local d'une manière entièrement nouvelle. Si tel est le cas, cette nonlocalité serait égale ou supérieure à la nonlocalité de Bell, dont la compréhension a ouvert la voie aux communications quantiques et à la cryptographie quantique. Personne ne sait ce qu'un nouveau type de nonlocalité - suggéré par la non-séparabilité dynamique - signifierait pour notre compréhension de l'univers.

En fin de compte, seules les expériences permettront de trouver la bonne théorie, et les physiciens quantiques ne peuvent que se préparer à toute éventualité. "Indépendamment de l'opinion personnelle de chacun sur la meilleure [théorie], toutes doivent être explorées", déclare M. Venkatesh. "En fin de compte, nous devrons examiner les expériences que nous pouvons réaliser. Cela pourrait être dans un sens ou dans l'autre, et il est bon de s'y préparer."

Auteur: Internet

Info: https://www.scientificamerican.com, Par Anil Ananthaswamy le 22 mai 2023

[ enchevêtrement quantique ] [ régions de l'espace-temps ] [ monde subatomique ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

intrications

Vers une science de la complexité
La physique quantique n’est pas une théorie de l’univers ; elle n’est qu’un formalisme génial qui permet d’abandonner les vieilles notions simplistes d’objet physique et de force physique, au centre de la physique de Galilée, Newton et Einstein, pour migrer vers les notions plus riches et plus souples de fonctions d’état (que l’on continue d’appeler, à tort, fonctions d’onde) et d’opérateurs. Il n’y a plus d’objet (ni d’onde, ni de particule, ni rien) : il y a un processus qui, à un moment donné, est décrit par une fonction d’état. Cette fonction évolue dans le temps. Faire une mesure (une observation quantifiée) consiste à appliquer à cette fonction d’état un opérateur qui spécifie la mesure que l’on fait, mais qui, en retour, modifie la fonction d’état. Ce formalisme ne dit rien de l’évolution réelle du Réel. Il permet seulement, dans certains cas, de prédire le résultat d’une mesure spécifique sur le Réel.

Le piège relativiste et le piège quantique.
Pour le dire en suivant Niels Bohr, la physique quantique n’est pas une ontologie : elle ne dit rien du Réel, mais explicite seulement certains de nos rapports avec le Réel. Ceci résume d’un mot la célèbre controverse entre ces deux Juifs géniaux que furent Einstein et Bohr. Einstein voulait fonder une ontologie post-newtonienne ("Connaître la pensée de Dieu"), alors que Bohr ne voulait que développer une phénoménologie opératoire et avait renoncé, dans une posture typiquement kantienne, à toute forme d’ontologie ("Ne dites pas à Dieu ce qu’Il doit faire").

Le problème, tel qu’il se présente aujourd’hui, se résume à ceci. L’ontologie relativiste, parce qu’elle n’a pas su quitter le mécanicisme déterministe et analytique des modernes, aboutit à des impasses monstrueuses qui, pour sauver le modèle, appellent des hypothèses de plus en plus invraisemblables et abracadabrantesques. Quant à la phénoménologie quantique, si elle se cantonne à demeurer une pure phénoménologie, elle se réduit à une technique mathématique plus ou moins efficiente dans les cas les plus simples et elle n’est guère satisfaisante pour l’esprit qui, toujours, a soif d’ontologie ; mais, si elle se laisse tenter à se prendre pour une ontologie (ce qui est de plus en plus souvent le cas, surtout en physique des hautes énergies et des "particules" élémentaires), elle aboutit à des absurdités logiques, et des "théories" fumeuses (comme la supersymétrie, les cordes, etc.) tentent en vain de masquer les inconsistances.

Nous sommes au seuil de ce que Thomas Kuhn appela une "mutation paradigmatique" majeure dans le monde de la science fondamentale. Spiritualité et physique sont en train de converger.

Notre époque appelle à refonder radicalement une nouvelle ontologie qui devra prendre garde à éviter, à la fois, le piège relativiste (l’ontologie mécaniciste) et le piège quantique (la phénoménologie subjectiviste). La physique complexe est la seule voie connue actuellement qui puisse tenter de relever ce défi. Mais les institutions physiciennes en place veillent à ne pas laisser saccager leur fonds de commerce. Nous sommes au seuil de ce que Thomas Kuhn appela une "mutation paradigmatique" majeure dans le monde de la science fondamentale. Spiritualité et physique sont en train de converger.

Les sciences modernes.
Toutes les sciences modernes se sont construites à partir du refus de la Renaissance de continuer le paradigme aristotélicien d’un univers organiciste, finaliste, géocentrique, limité, divisé en monde céleste et en monde sublunaire et dirigé par le principe de l’harmonie des sphères. Parmi les premiers, Galilée et Descartes éradiquèrent ce paradigme aristotélicien et le remplacèrent par un paradigme platonicien (donc pythagoricien et atomiste) qui allait devenir le moteur de la pensée entre 1500 et 2000. Ce paradigme moderne repose tout entier sur le mécanicisme. Plongé dans un espace et un temps infinis, l’univers serait un assemblage de briques élémentaires appelées "atomes", interagissant entre eux au moyen de forces élémentaires partout les mêmes (un univers isotrope) et parfaitement quantifiables (un univers mathématique) où tout effet a une cause et où cause et effet sont proportionnés selon des rapports mesurables et permanents, soumis à des lois mathématiques éternelles. Le hasard y joue le rôle central de moteur des évolutions.

Cette vision du monde fut fructueuse et permit de grandes avancées, dont les très nombreuses retombées techniques ont radicalement transformé le monde des hommes et leur ont permis, dans bien des cas, de les libérer des contraintes "naturelles" qui pesaient sur eux. Cependant, les sciences modernes, dès la fin du XIXe siècle, mais surtout depuis 1950, se sont heurtées, partout, au "mur de la complexité".

Le mur de la complexité.
Ce "mur de la complexité" a fait prendre conscience que certains systèmes où le nombre des ingrédients et les densités d’interaction entre eux étaient très grands ne pouvaient plus être compris selon le paradigme mécaniste : ils ne sont pas que des assemblages d’élémentaires, car leur tout est irréductible à la simple somme de leurs parties ; là s’observent des propriétés émergentes qui n’appartiennent à aucun des ingrédients impliqués et qui surgissent sans cause particulière, comme solution globale à un problème global. Aristote ressuscite, et les traditions indiennes et chinoises viennent à sa rescousse…

Ce fut la thermodynamique qui, la première, osa les questions de fond dont la toute première, résolument contradictoire avec les sciences mécanistes, fut celle de l’irréversibilité ; celle de la flèche du temps, celle du Devenir en lieu et place de l’Etre. L’univers réel n’est pas une machine mécanique réversible, soumise à des lois mécaniques prédictibles.

Pour le dire autrement, les sciences classiques font des merveilles pourvu que les systèmes auxquels elles s’intéressent soient d’un niveau de complexité très bas. Alors, l’approximation mécaniste peut être efficace et donne de bons résultats, parfois spectaculaires (il est plus facile d’envoyer une fusée sur Mars que de modéliser la préparation d’un bon cassoulet). Après la thermodynamique, les sciences de la vie et l’étude des sociétés vivantes ont bien dû constater que le "mur de la complexité" était, pour elles aussi, infranchissable si elles restaient à l’intérieur du paradigme mécaniste. Disons-le tout cru : la Vie n’est pas réductible à la Matière, ni la Pensée à la Vie… On commence maintenant à comprendre que même la Matière n’est réductible ni à elle-même, ni à de l’énergie pure. Au fond : rien n’est réductible à rien. Tout ce qui existe n’existe que par soi et pour soi ; c’est l’émergence locale d’un flux cosmique de devenir. Mais tout ce qui existe est aussi partie prenante d’un tout plus grand qui l’englobe… Et tout ce qui existe est, en même temps, le résultat des interactions infinies entre les ingrédients multiples qui le constituent en interagissant entre eux. Rien de ce qui existe n’est un assemblage construit "de l’extérieur", mais bien plutôt quelque chose qui "pousse de l’intérieur".

Cette dernière remarque permet d’alimenter une réflexion de fond. Nous avons pris l’habitude de parler et de penser en termes d’objets : cette table, ce chien, ce nuage, etc. Et il nous semble naturel de faire de ces mots les images de ce qui existe, en leur gardant une atemporalité abstraite et idéalisante qui ne correspond à rien de réel. Cette table, ce chien et ce nuage auront changé – un peu, beaucoup, énormément – dans trois minutes, dans trois jours, dans trois ans, etc. Rien n’est permanent dans le réel, même si nos habitudes de pensée, par l’usage de mots figés et abstraits, alimentent notre illusion que tout reste "fondamentalement" identique à soi. Ce qui est notoirement faux.

Tout cela relève d’un débat métaphysique qui n’a pas vraiment sa place ici. Disons seulement que la philosophie occidentale est obsédée par la notion d’un Etre immuable qui se cacherait "derrière" les accidents et évolutions de tout ce qui existe. Le pensée complexe prend l’exact contre-pied de cette croyance. Il n’y a pas d’Etre ; tout est processus. Ce chien appelé "Médor" est l’image, ici et maintenant, d’un processus canin particulier (un individu chien singulier) qui exprime un processus canin global (une lignée canine remontant à des ancêtres chacals, loups et renards) qui, à son tour, est un mode particulier d’expression du processus Vie sur notre petite Terre. Et cette terre elle-même constitue un processus planétaire, lié au processus solaire, lié au processus d’une galaxie parmi d’autres, appelée "voie lactée". Le processus chien appelé "Médor" est la résultante de milliards de processus cellulaires qui furent tous déclenchés par la rencontre d’un ovule fertile et d’un spermatozoïde.

Les mots s’arrêtent à la surface des choses.
Ce que nos mots appellent un "objet" n’est que la photographie extérieure et instantanée d’un processus qui a commencé, comme tout le reste, avec le big-bang. Il n’y a au fond qu’un seul processus unique : le cosmos pris comme un tout. Ce processus cosmique engendre des processus particuliers, de plus en plus complexes, de plus en plus intriqués les uns aux autres, qui sont autant de processus émergeants. Nous appelons "objet" la surface extérieure apparente d’un processus volumique intérieur qui engendre cette surface. Cette surface objectale n’est que l’emballage apparent de la réalité processuelle sous-jacente.

Les mots s’arrêtent à la surface des choses, à leur apparence, que notre mental débarrasse de tout ce qui change pour n’en garder que les caractéristiques atemporelles qui ne changent pas ou peu. Médor est ce chien qui est un berger noir et feu, couché là au soleil, avec quatre pattes, une queue touffue, une truffe noire, deux yeux pétillants, deux oreilles dressées, etc. "Médor" désigne l’ensemble de ces caractéristiques objectales censées être temporairement permanentes. Mais, en fait, "Médor" désigne l’entrelacs de milliers de milliards de processus cellulaires intriqués et corrélés, fédérés par l’intention commune de survivre le mieux possible, dans un environnement peu maîtrisé mais globalement favorable, appelé domesticité.

La méthode analytique, mise à l’honneur par René Descartes, part d’un principe parfaitement arbitraire – et qui se révèlera faux – que le tout est l’exacte somme de ses parties. Que pour comprendre un système, il "suffit" de le démonter en ses constituants, puis ceux-ci en les leurs, et ainsi de suite, pour atteindre les élémentaires constitutifs du tout et les comprendre, pour, ensuite, les remonter, étage par étage, afin d’obtenir "logiquement" la compréhension du tout par la compréhension de chacune de ses parties. On trouve là le fondement ultime du mécanicisme qui fait de tout, à l’instar de la machine, un assemblage de parties ayant et gardant une identité propre irréfragable. Le piston et la soupape sont piston et soupape qu’ils soient, ou non, montés ensemble ou démontés séparément.

Tout l’analycisme repose sur cette hypothèse largement fausse que les interactions entre éléments n’altèrent pas la nature de ces éléments. Ils restent intègres et identifiables qu’il y ait, ou non, des interactions avec d’autres "objets". Encore une fois, l’analycisme est une approche qui n’est jouable que pour les systèmes rudimentaires où l’hypothèse mécaniste est approximativement acceptable, c’est-à-dire à des niveaux de complexité ridiculement bas.

Un bon exemple de système complexe "simple" où le principe d’analycité est mis à mal est la mayonnaise. Rien de plus simple, en effet : trois ingrédients et un battage à bonne température. Une fois que la réaction d’émulsion s’est enclenchée et que la mayonnaise a pris, on ne pourra pas la faire "déprendre", même en battant le tout en sens inverse. Il y a là une irréversibilité liée aux relations émulsives qui unissent entre elles, selon des schémas complexes, des milliards de molécules organiques intriquées les unes aux autres par des ponts "hydrogène", des forces de van der Waals, des quasi-cristallisations, etc. Dans l’émulsion "mayonnaise", il n’y a plus de molécules d’huile, de molécules de jaune d’œuf, etc. Il y a un tout inextricablement corrélé et intriqué, un magma biochimique où plus aucune molécule ne garde sa propre identité. Le tout a absorbé les particularités constitutives des parties pour engendrer, par émergence, quelque chose de neuf appelé "mayonnaise" qui est tout sauf un assemblage de molécules distinctes.

Un autre exemple typique est fourni par les modèle "en goutte liquide" des noyaux atomiques. Le noyau d’hélium n’est pas un assemblage de deux protons et de deux neutrons (comme le neutron n’est pas un assemblage d’un proton avec un électron avec quelques bricoles de plus). Un noyau d’hélium est une entité unitaire, unique et unitive que l’on peut engendrer en faisant se télescoper violemment nos quatre nucléons. Ceux-ci, une fois entrés en interaction forte, constituent un objet à part entière où plus aucun neutron ou proton n’existe comme tel. Si l’on percute ce noyau d’hélium avec suffisamment de violence, il peut se faire qu’il vole en éclat et que ces fragments, après un très court temps d’instabilité, reconstituent protons et neutrons. Cela donne l’illusion que ces protons et neutrons seraient restés entiers au sein du noyau. Il n’en est rien.

Un système devient d’autant plus complexe que la puissance des interactions en son sein transforme radicalement la nature et l’identité des ingrédients qui y interviennent. De là, deux conséquences majeures. Primo : un système vraiment complexe est un tout sans parties distinctes discernables, qui se comporte et évolue comme un tout unique, sans composant. Les méthodes analytiques y sont donc inopérantes. Secundo : lorsqu’on tente de "démonter" un système vraiment complexe, comme le préconise Descartes, on le tue purement et simplement, pour la bonne raison qu’en le "démontant", on détruit les interactions qui en constituent l’essentiel.

Le processus d’émergence.
Tout ce qui existe pousse "du dedans" et rien n’est assemblé "du dehors". Tout ce qui existe est le développement, par prolifération interne, d’un germe initial (que ce soit un nuage, un flocon de neige, un cristal, un brin d’herbe, un arbre, une méduse, un chien ou un être humain). Rien dans la Nature n’est assemblé comme le seraient les diverses pièces usinées d’un moteur d’automobile. Seuls les artéfacts humains sont des produits d’assemblage qui appellent deux éléments n’existant pas dans le Nature : des pièces usinées préfabriquées et un ouvrier ou robot monteur. Dans la nature, il n’existe pas de pièces préfabriquées exactement selon le plan de montage. Il n’y a d’ailleurs aucun plan de montage. La Nature procède par émergence, et non pas par assemblage.

Le processus d’émergence se nourrit des matériaux qu’il trouve à son contact. Il n’y a pas de plan préconçu et, souvent, la solution trouvée naturellement est approximative et imprécise ; l’à-peu-près est acceptable dans la Nature. Par exemple, il est bien rare qu’un cristal naturel soit exempt d’anomalies, de disruptions, d’anisotropies, d’inhomogénéité, etc.

Si l’on veut bien récapituler, au contraire des procédés d’assemblage des artefacts humains, les processus d’émergence qui forgent tout ce qui existe dans la Nature ne connaissent ni plan de montage, ni pièces préfabriquées, ni ouvrier monteur, ni outillage externe, ni banc d’essai. Tout s’y fait de proche en proche, par essais et erreurs, avec les matériaux qui sont là. C’est d’ailleurs la présence dense des matériaux utiles qui, le plus souvent, sera le déclencheur d’un processus d’émergence. C’est parce qu’une solution est sursaturée qu’un processus de cristallisation pourra se mettre en marche autour d’un germe – souvent hétérogène, d’ailleurs – ; c’est un petit grain de poussière, présent dans un nuage sursaturé et glacial, qui permettra au flocon de neige de se développer et de produire ses fascinantes et fragiles géométries.

Le cerveau humain est autre chose qu’un ordinateur.
Il en va de même dans le milieu humain, où les relations se tissent au gré des rencontres, selon des affinités parfois mystérieuses ; un groupe organisé peut émerger de ces rencontres assez fortuites. Des organisations pourront se mettre en place. Les relations entre les humains pourront rester lâches et distantes, mais des processus quasi fusionnels pourront aussi s’enclencher autour d’une passion commune, par exemple autour d’un projet motivant ou autour d’une nécessité locale de survie collective, etc. La vie quotidienne regorge de telles émergences humaines. Notamment, l’émergence d’une rumeur, d’un buzz comme on dit aujourd’hui, comme celle d’Orléans qu’a étudiée Edgar en 1969 : il s’agit d’un bel exemple, typique d’un processus d’émergence informationnelle qu’aucune technique analytique ou mécanique ne permet de démanteler.

L’assemblage et l’émergence ne participent pas du tout de la même logique. Essayer de comprendre une logique d’émergence au moyen d’une analogie assembliste, est voué à l’échec. Ainsi, toutes les fausses analogies entre le fonctionnement assembliste ou programmatique d’un ordinateur et le fonctionnement émergentiste de la pensée dans un cerveau humain sont définitivement stériles. De façon symétrique, il est absurde de rêver d’un arbre, produit d’on ne sait quelles vastes mutations génétiques, dont les fruits seraient des automobiles toutes faites, pendant au bout de ses branches.

Parce que l’assemblisme est une démarche additive et programmatique, les mathématiques peuvent y réussir des merveilles de modélisation. En revanche, l’émergentisme n’est pas mathématisable puisqu’il n’est en rien ni additif, ni programmatique ; c’est probablement la raison profonde pour laquelle les sciences classiques ne s’y intéressent pas. Pourtant, tout ce qui existe dans l’univers est le fruit d’une émergence !

L’illusion du principe de causalité.
Toute la physique classique et, derrière elle, une bonne part de la pensée occidentale acceptent l’idée de la détermination mécanique de l’évolution de toute chose selon des lois causales universelles et imprescriptibles. Des quatre causes mises en évidence par Aristote, la science moderne n’a retenu que la cause initiale ou efficiente. Tout ce qui se produit serait le résultat d’une cause qui lui serait antérieure. Ceci semble du bon sens, mais l’est bien moins qu’il n’y paraît.

De plus, la vulgate scientifique moderne insiste : tout ce qui se produit serait le résultat d’une cause identifiable, ce qui permet de représenter l’évolution des choses comme des chaînes linéaires de causes et d’effets. Chaque effet est effet de sa cause et cause de ses effets. Cette concaténation des causes et des effets est une représentation commode, par son mécanisme même, mais fausse.

Tout ce qui arrive ici et maintenant est un résultat possible de tout ce qui est arrivé partout, depuis toujours.

Chaque événement local est le résultat d’une infinité de causes. Par exemple, Paul, par dépit amoureux, lance une pierre dans le carreau de la chambre de Virginie. L’effet est le bris de la vitre ; la cause est la pierre. Problème résolu ? Il suffit de poser toute la séries des "pourquoi" pour se rendre compte qu’il faut encore savoir pourquoi la maison de Virginie est là, pourquoi sa chambre donne sur la rue, pourquoi un caillou traînait sur le trottoir, pourquoi Paul a rencontré Virginie et pourquoi il en est tombé amoureux, et pourquoi il a été débouté par Virginie (dont le cœur bat pour Pierre : pourquoi donc ?), pourquoi Paul le prend mal, pourquoi il est violent, pourquoi il veut se venger, pourquoi il lance le caillou efficacement et pourquoi celui-ci atteint sa cible, etc., à l’infini. Si l’on veut bien prendre la peine de continuer ces "pourquoi", on en arrive très vite à l’idée que la vitre de la fenêtre de Virginie a volé en éclat parce que tout l’univers, depuis le big-bang, a comploté pour qu’il en soit ainsi. Pour le dire autrement : tout ce qui arrive ici et maintenant est un résultat possible de tout ce qui est arrivé partout, depuis toujours. Cette conclusion est l’essence même du processualisme, qui s’oppose dans toutes ses dimensions au déterminisme mécaniste.

Processualisme contre déterminisme.
Tout effet possède une vraie infinité de causes… et donc n’en possède aucune ! Toutes ces "causes" potentielles qui convergent en un lieu donné, à un moment donné, induisent un événement contingent et non pas nécessaire. Une myriade de bonnes raisons auraient pu faire que la vitre de Virginie ne soit pas brisée, ne serait-ce que parce que la fenêtre eût été ouverte ou le volet baissé. De plus, lorsqu’une infinité de causes se présentent, on comprend qu’il y ait rarement un seul et unique scénario qui puisse y répondre (ce cas rare est précisément celui du déterminisme mécaniste, qui n’opère que dans des univers pauvres et rudimentaires, sans mémoire locale). En fait, dans un monde complexe, un tel faisceau causal ouvre un faisceau de possibles parmi lesquels un choix devra se faire.

Chacun n’est que cela : le point de jonction entre le cône convergent de tous ses héritages venant du passé et le cône divergent de tous ses legs allant vers le futur.

Dans un petit ouvrage magnifique intitulé Le sablier, Maurice Maeterlinck proposait une vision pouvant se résumer ainsi. Chacun de nous est le goulot étroit d’un sablier avec, au-dessous, tout le sable accumulé venu de tout l’univers, depuis l’aube des temps, qui converge vers soi, et, au-dessus, l’éventail de toutes les influences qui engendreront, au fil du temps, des êtres, des choses, des idées, des conséquences. Chacun n’est que cela : le point de jonction entre le cône convergent de tous ses héritages venant du passé et le cône divergent de tous ses legs allant vers le futur.

Le paragraphe précédent a posé un problème qui a été esquivé et sur lequel il faut revenir : le cône convergent des causes infinies induit, ici et maintenant, un cône divergent de possibles entre lesquels le processus devra choisir. Cette notion de choix intrinsèque est évidemment incompatible avec quelque vision mécaniste et déterministe que ce soit. Mais, qui plus est, elle pose la question des critères de choix. Quels sont-ils ? Pourquoi ceux-là et non d’autres ? S’il y a des choix à faire et que ces choix visent une optimisation (le meilleur choix), cela signifie qu’il y a une "économie" globale qui préside à la logique d’évolution du processus. Chaque processus possède une telle logique intrinsèque, une telle approche économique globale de soi. A un instant donné, le processus est dans un certain état global qui est son présent et qui inclut tout son passé (donc toute sa mémoire). Cet état intrinsèque est confronté à un milieu qui offre des matériaux, des opportunités, des champs causaux, plus ou moins riches. De cette dialectique entre le présent du processus et son milieu, lui aussi au présent, naîtra un champ de possibles (plus ou moins riche selon la complexité locale). Il existe donc une tension intérieure entre ce que le processus est devenu au présent, et ce qu’il pourrait devenir dans son futur immédiat. Cette tension intérieure doit être dissipée (au sens qu’Ilya Prigogine donna à sa notion de "structure dissipative"). Et cette dissipation doit être optimale (c’est là que surgit l’idée d’économie logique, intrinsèque du processus).

L’intention immanente du monde.
Il faut donc retenir que cette tension intérieure est une in-tension, c’est-à-dire une intention. La pensée complexe implique nécessairement un intentionnalisme qui s’oppose farouchement aussi bien au déterminisme qu’au hasardisme propres à la science moderne. "Ni hasard, ni nécessité" fut d’ailleurs le titre d’un de mes ouvrages, publié par Oxus en 2013 et préfacé par… mon ami Edgar Morin – il n’y a pas de hasard !

Cette idée d’intention est violemment rejetée par les sciences modernes qui, malicieusement, mais erronément, y voient une forme d’intervention divine au sein de la machinerie cosmique. Bien entendu, rien de tel n’est supposé dans la notion d’intention qu’il faut comprendre comme résolument intrinsèque et immanente, sans aucun Deus ex machina. Mais quelle est donc cette "intention" cosmique qui guide tous les choix, à tous les niveaux, du plus global (l’univers pris comme un tout) au plus local (chaque processus particulier, aussi infime et éphémère soit-il) ? La plus simple du monde : accomplir tout ce qui est accomplissable, ici et maintenant. Rien de plus. Rien de moins.

Mon lecteur l’aura compris, la pensée complexe repose sur cinq notions-clés (processualisme, holisme, émergentisme, indéterminisme et intentionnalisme) qui, chacune, se placent à l’exact opposé des fondements de la science moderne : atomisme, analycisme, assemblisme, mécanicisme et hasardisme. Cette opposition incontournable marque une profonde révolution épistémologique et une immense mutation paradigmatique.

Auteur: Halévy Marc

Info: 30 mars 2019

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