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frustration

Si les "identifications projectives*" ne trouvent pas un espace où être accueillies et transformées, et se heurtent à une rêverie négative […], elles sont renvoyées en arrière amplifiées : elles restent à l’état d’émotions dinosaures, d’émotions-fusées.

*Selon Mélanie Klein : passage obligé et provisoire de la mise en place de la psyché de l'enfant relativement à l'objet primaire, associé au mécanisme de projection - introjection qu'elle décrit. "Il s'agit de décrire le monde fantasmatique de l'enfant (son imaginaire), sur la valeur structurante de l'image maternelle."
En général l'enfant garde schématiquement en lui ce qui est bon, et projette dans l'image maternelle ce qui est mauvais. Une deuxième étape suivant la projection est l'identification à ce qui a ainsi été projeté, c'est l'identification projective qui aboutit donc, dans le développement normal, à la réintégration de ce qui a été projeté. Pour W. Bion l'idée est que l'identification projective est un mécanisme structurant autorisant la capacité de penser. L'identification projective peut devenir pathologique si elle n'est plus transitoire mais un moyen de déni de la réalité.

Auteur: Ferro Antonino

Info: Facteurs de maladie facteurs de guérison.

[ inconscient ] [ explosion latente ]

 

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mise en garde

L'un des moments les plus troublants de Ceux de 14, presque surnaturel, est celui où Genevoix est sauvé de la mort par un mourant. Un soldat, sans doute paralysé par une balle reçue dans la moelle épinière, est étendu sur d'autres cadavres en travers du boyau où s'est engagé l'officier. Par la seule intensité de son regard, où s'est concentré ce qui lui reste de vie, le blessé prévient Genevoix de la balle qui l'attend au créneau où lui vient d'être abattu, dans l'axe de tir au bout duquel le guerrier allemand embusqué guette sa prochaine cible. Ce qui relie alors le mourant à celui qui conserve la vie grâce à lui est inexprimable, sauf par Ceux de 14. Il faut aller voir comment c'est dit et comment est dit l’effort d’expression muette du mourant, puis le soulagement dans ses yeux quand il sait qu'il a été compris, qu'il a sauvé la vie de l'inconnu qui passe, ce soldat français, son camarade. Le regard de cet homme - qui était-il ? - a sauvé le sous-lieutenant Genevoix devenu, pour toujours, leur regard à tous.

Auteur: Bernard Michel

Info: Pour Genevoix

[ yeux messagers ] [ alerte ] [ agonie ]

 
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historiographes

C'est sans doute là que se situe la différence majeure entre "les historiens de garde" et les tenants de toute forme de roman national et nous [les historiens "scientifiques"]. Nous fouillons le passé pour partir à la rencontre d'un Autre et tenter de le comprendre. Eux tentent de tordre le passé pour justifier leurs choix et leurs obsessions d'aujourd'hui. Loin d'apercevoir une altérité dans le passé, ils ne partent qu'à la recherche de leur propre reflet égocentrique.

Cette mise à distance de soi qui définit, bien plus qu'aucun titre universitaire, la pratique historienne, ne fait pas de ceux qui en font leur métier et leur passion des surhommes. Quiconque a fait des recherches historiques sait pertinemment à quel point nos recherches restent imparfaites. On ne peut reconstituer exactement le passé, notamment celui des sociétés où les sources sont rares, malgré l'apport précieux de l'archéologie. C'est encore plus vrai pour les catégories sociales les plus modestes qui, jusqu'à une date récente, ont laissé peu de traces. Et si nous pouvons parfois avancer quelques certitudes, celles-ci pèsent toujours bien peu face à la masse de notre ignorance.

Cet état de fait enseigne au pratiquant de l'histoire - car oui, l'histoire est avant tout une pratique qui ne nécessite en rien des grades académiques - la modestie et à considérer que le récit du passé n'est jamais clos. C'est pour cela que les affirmations péremptoires des "historiens de garde" qui prétendent en trois lignes analyser des phénomènes historiques complexes nous font réagir.

Auteur: Blanc William

Info: Les historiens de garde, postface à l'édition de 2016

[ honnêtes ] [ justifications nationalistes ]

 

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religion

Ce qu'il faut souligner fortement, c'est que ces apparitions [mariales] en série n'étaient pas sans liens avec la politique du trône et de l'autel. Rue du Bac, la Vierge avait pleuré à chaudes larmes sur le renversement de Charles X, devenu bigot sur le tard. Les prédictions et les menaces qu'elle avait proférées à La Salette furent présentées par le clergé comme une mise en garde anticipée contre la révolution de 1848 qui avait instauré la Deuxième République. A Lourdes, enfin, la Vierge avait opportunément déclaré à Bernadette : "Je suis l'Immaculée Conception", quatre ans à peine après que Pie IX eut proclamé ce dogme sans même convoquer un concile, ce qui ne s'était encore jamais vu dans l'histoire de l'Église, et dix ans tout juste avant que ce pape se fasse proclamer infaillible, ainsi que ses successeurs, en matière de dogme. C'était vraiment pour lui une aubaine que la Vierge de Lourdes en personne fût venue certifier en quatre mots cette infaillibilité. De plus, l'apparition avait eu lieu au moment où Pie IX, monarque absolu, résistait, avec l'aide de l'Autriche, à l'unification de l'Italie sous une monarchie constitutionnelle, entreprise qui exigeait l'absorption des États pontificaux.
Tout comme ses prédécesseurs immédiats Léon XII et Grégoire XVI, Pie IX était bien résolu à "ne pas transiger avec le progrès, le libéralisme et la civilisation moderne", ainsi qu'il l'écrivit en toutes lettres dans son fameux Syllabus. On peut donc dire que, par-delà les motifs politiques mais en parfaite cohérence avec ceux-ci, la promotion d'un occultisme bien encadré fut pour l'Église du XIX siècle une riposte à l'essor de la culture rationaliste.

Auteur: Sède Gérard de baron Géraud de Liéoux

Info: L'occultisme dans la politique : De Pythagore à nos jours... pp. 161-162

[ pouvoir ] [ idées ] [ manipulation ]

 

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parents-enfants

Par exemple, il est difficile pour des enfants dont les parents divorcent et sont en conflit officiel, un conflit qui doit se résoudre par la remise de la garde de l’enfant à l’un ou à l’autre, de se sentir en sécurité pour utiliser de façon créatrice leur libido en société. La distance affective qu’il est nécessaire de prendre vis-à-vis des deux parents devient impossible du fait soit de leur conflit, soit du mode de garde décidé en faveur de l’un ou de l’autre. [...] On retrouve, comme symptôme de leur souffrance, des altérations de la communication du sujet avec son schéma corporel, ou encore on retrouve des troubles de par l’invalidation de la sublimation des pulsions orales et anales qui avait été mise en route par les castrations de la petite enfance, avant l’Œdipe. Ces difficultés ainsi retrouvées d’une castration œdipienne non maintenue par le modèle parental coïncident avec les conflits familiaux, dévitalisent la libido engagée dans des sublimations antérieures. Ces sublimations qui donnent valeur à l’enfant en famille et en société en accord avec la sexuation, s’étaient construites à l’époque où le parent qui donnait la castration était crédible sans conteste. Mais la séparation des parents a modifié chez l’enfant en cours de structuration et de croissance la valeur de modèle et de crédibilité de l’adulte, en tant que valeureux.

Et puis, il y a aussi, en sus de la pudeur qui est apparue dès l’époque de la différence sexuelle, mais plus encore à la castration œdipienne, une pudeur symbolique, qui joue sur le fait de se montrer ou de ne pas se montrer heureux lorsqu’on sent les parents malheureux, ou de se voir obligé à réussir, dans le seul but de consoler père ou mère de leur échec conjugal. L’enfant régresse alors, ou reste piégé dans la relation duelle pré-œdipienne qui se prolonge.

Auteur: Dolto Françoise

Info: "L'image inconsciente du corps", éditions du Seuil, 1983, page 330

[ adaptation ] [ conséquences ] [ effets ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

psychothérapies

Le Discours de l'Analyste n'est pas le discours tenu par des psychanalystes, (la plupart des soi-disant "psychanalystes" n’ont pas la moindre idée de ce qu’implique de décisif dans le rapport du sujet au réel la structure appelée "Discours de l’Analyste"; pour l'écoute analytique, ce n'est pas le sujet qui tient un discours, mais un Discours qui "tient" le sujet, le sujet entendu au sens lacanien (noté $) ne parle pas, ça parle de lui, et c'est par là qu'il s'appréhende (raison pour laquelle s’il y a bien un sujet de l'inconscient, il n’y a pas d'inconscient du sujet…)

Pour approcher le genre de relation que la théorie analytique entretient avec la psychologie — qui ne répond pas du Discours de l’Analyste, mais du Discours du Maître ou de ses succédanés —, si nous prenons par exemple la locution "ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain": pour le psychologue arrimé au sens commun, voire au "bon sens", les choses se présentent dans une perspective apparemment simple, et même simpliste: il s'agit d'évacuer l'eau sale (symptômes, phobies, tics, tocs, etc.) et de garder le bébé (le moi) aussi propre que possible, débarrassé de ses souillures…

Dans la cure psychanalytique, c'est l'exact contraire, il s'agit de "jeter" le bébé (mettre en "suspens" le moi de l'analysant) et garder l’eau du bain afin que le patient puisse se confronter lui-même à son "eau sale" (ses symptômes, ses fantasmes…) à travers quoi s'organise une certaine jouissance, le plus souvent ruineuse, par lui-même ignorée.

Pour le dire autrement, le principe de l'association libre, de l’interprétation et de la scansion propres à la psychanalyse, permet une mise en suspension du moi de l'analysant (sa "maîtrise" — ou plutôt son illusion de maîtrise!) de façon à ce que "l'eau sale" de la jouissance puisse lui arriver aux oreilles, charriée par sa propre parole, que le psychanalyste s’est engagé à entendre…

Auteur: Dubuis Santini Christian

Info: Publication facebook du 23.06.2021

[ différences ] [ révélation ] [ inversion ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

discours scientifique

Laisse donc là cette Science,

Laisse là cette outrecuidance,

Garde toy bien de ce poison,

Conserve entiere ta raison,

Que ta vertu soit toute tienne,

Et qu’aprez tout il te souvienne

Qu’en un bon Livre il est escript

Bien heureux les pauvres d’esprit.

Que toute la sagesse humaine

Est aussy folle qu’elle est vaine :

Et que si nos premiers Parens

Fussent demeurez ignorans

Sans donner au diable creance,

Nous serions tous dans l’innocence…

Non, je n’ayme point ceste estude

Qui promet une certitude,

Et ne donne que fiction

Qu’erreur, et que presomption ;

En un mot, je hay la Science :

Mais j’ayme la belle Ignorance ;

J’ayme ceste divinité

Qui me donne la liberté

De tout penser et de tout dire…

La debonnaire conscience,

La simple et facile creance,

Sont les plus communes vertus,

Dont les sujets sont revestus.

Ils ne cognoissent point le vice,

Ils vivent sans nul artifice,

Et dans leur sagesse occupez

Ils endurent d’estre trompez.

L’impie et perfide heresie

Vient elle de leur fantaisie ?

Les troubles et les factions

Sont ce de leurs inventions ?

Non, non, par leurs obeissances,

Ils recognoissent les Puissances,

Qui disposent de leur destin,

Et vont tousjours leur grand chemin…

Ce peu suffit, comme je pense,

À te faire aymer l’ignorance

Et rejetter de ton esprit

Ce que les Docteurs ont escript

Pour le tourment de qui se fie

À leur vaine philosophie.

Quittant donc là tous ces fatras

Allons, d’Alibray, de ce pas

Avec Lambert et Benserrade

Chez le Bon-Puis faire grillade ;

C’est là que par un art divin

Dans une bouteille de vin

Nous estoufferons la memoire

De la science et de la gloire,

Et que nous rendrons triomphans

Et l’ignorance et les enfans.

Auteur: Le Pailleur Jacques

Info: A Monsieur d’Alibray, pour reponse à plusieurs sonnets qu’il luy avoit envoyez par lesquels il luy demandoit son sentiment de l’opinion de Galilée touchant le mouvement de la terre

[ religion ] [ relativisation ] [ mise à distance ] [ imaginaire ] [ simplicité ]

 
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langages

À Hambourg, où jamais elle ne prenait le train urbain sans avoir un auteur français avec elle, jamais Yuna ne serait posé la question de savoir pourquoi elle ne voulait pas apprendre le français. Cette vieille interrogation dont Yuna ne s'était jamais souciée se présenta à elle en gare de Bruxelles. Bruxelles, ce n'était pas le but de son trajet, ce n'était qu'un point d'interrogation sur le trajet. Elle avait une correspondance à y prendre et cette question à se poser : pourquoi n'ai-je pas voulu apprendre cette langue et pourquoi ne me suis-je jamais demandé à quoi cela tenait? Yuna regarda sa montre-bracelet comme si les chiffres du cadran pouvaient lui livrer réponse. Il restait encore du temps avant que n'arrive le train par lequel elle poursuivait son voyage jusqu'à Bordeaux. Elle alla dans un café à tables hautes de la gare et commanda un express. Elle s'y trouva environnée de voix parlant un français dont la mélodie lui sembla plus violemment étrangère que jamais. Fais attention! Quelque chose d'inconnu, peut-être même de dangereux, t'y attend. Cette mise en garde la secoua, son coeur battit plus nettement qu'auparavant, son sang circula plus vite, elle se mit à avoir chaud. Elle respira plus profondément, plus vite, se mit sans arrêt à changer de posture. Sa nervosité ressemblait à une sensation de bonheur. Peu après, un couple d'un certain âge se plaça près de Yuna, il parlait en néerlandais. Elle se sentit apaisée par la sonorité de cette langue qui lui donnait la sensation de ne pas être encore bien loin de chez elle. Bruxelles, est-ce loin ou près? Qui donc sait répondre à cette question embrouillée? Tour coeur est pris dans au moins un -sinon plusieurs- conflit de langues. Chaque tête contient une carte déformée de l'Europe. Sur la carte de Yuna, Bruxelles était partout sauf là où elle aurait dû se trouver. Il n'y avait qu'un trou. Un nom depuis longtemps oublié lui revint à l'esprit : Viviane. Au même instant, Yuna déchire si maladroitement le bâtonnet de sucre que de la poudre blanche se répandit sur le sol noir en ardoise. Elle essaya de balayer discrètement avec ses chaussures mais n'osa pas aller ensuite reprendre un sachet de sucre à la caisse. Le goût amer de l'express fit revenir Viviane, elle se tenait devant Yuna.

Auteur: Tawada Yoko

Info: Le voyage à Bordeaux

[ vieux continent ] [ idiomes ] [ sonorités ]

 
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transdisciplinarité

"Mais si vous ne parlez ni des choses-en-soi ni des humains-entre-eux, c’est que vous ne parlez que du discours, que de la représentation, que du langage, que des textes." Tel est le troisième malentendu. Ceux qui mettent entre parenthèses le référent extérieur — la nature des choses -  et le locuteur (1) — le contexte pragmatique ou social (2) — ne peuvent en effet parler que des effets de sens et des jeux de langage. Pourtant, lorsque MacKenzie scrute l’évolution de la centrale à inertie, il parle bien d’agencements qui peuvent nous tuer tous ; lorsque Callon suit à la trace les articles scientifiques, c’est de stratégie industrielle qu’il parle en même temps que de rhétorique (Callon, Law et al., 1986) ; lorsque Hughes analyse les carnets de notes d’Edison, le monde intérieur de Menlo Park sera bientôt le monde extérieur de l’Amérique entière ; lorsque je décris la domestication des microbes par Pasteur, c’est la société du XIXe que je mobilise et pas seulement la sémiotique des textes d’un grand homme ; lorsque je décris l’invention-découverte des peptides du cerveau, je parle bien des peptides eux-mêmes et non pas simplement de leur représentation au laboratoire du professeur Guillemin. Pourtant, il s’agit bien de rhétorique, de stratégie textuelle, d’écriture, de mise en scène, de sémiotique, mais d’une forme nouvelle qui embraie à la fois sur la nature des choses et sur le contexte social, sans se réduire pourtant ni à l’une ni à l’autre.

Notre vie intellectuelle est décidément bien mal faite. L’épistémologie, les sciences sociales, les sciences du texte ont chacune pignon sur rue, mais à condition d’être distinctes. Si les êtres que vous suivez traversent les trois, vous n’êtes plus compris. Offrez aux disciplines établies quelque beau réseau sociotechnique, quelques belles traductions, les premières extrairont les concepts et en arracheront toutes les racines qui pourraient les relier au social ou à la rhétorique ; les deuxièmes exciseront la dimension sociale et politique et la purifieront de tout objet ; les troisièmes, enfin, garderont le discours mais le purgeront de toute adhérence indue à la réalité — horresco referens — et aux jeux de pouvoir. Le trou de l’ozone au-dessus de nos têtes, la loi morale dans notre cœur, le texte autonome peuvent, séparément, intéresser nos critiques. Mais qu’une fine navette ait attaché le ciel, l’industrie, les textes, les âmes et la loi morale, voilà qui demeure insu, indu, inouï.

Auteur: Latour Bruno

Info: Nous n'avons jamais été modernes. Essai d'anthropologie symétrique. P 8

[ pluridisciplinarité ] [ incompréhensible complexité ]

 

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réforme protestante

Peut-être est-ce en Suisse, comme nous disons aujourd’hui – qu’à cet égard la situation est la plus nette. Depuis 1529, date précoce, on peut dire que les Cantons confédérés forment deux groupes : Zurich, Berne, Bâle, Saint-Gall ont remplacé la messe par le prêche. Encore reste-t-il bien à faire aux novateurs, surtout en Suisse romande, cette dépendance de Berne, pour que la carte religieuse du pays soit mise à jour de façon à peu près définitive. Et ni catholiques ni réformés ne renoncent à faire prévaloir leur foi, au besoin, par des moyens violents. Le 11 octobre 1531, Zwingli laisse sur le champ de bataille de Cappel son corps sanglant, que les catholiques dépècent et brûlent...

En Allemagne ? Situation longtemps indécise, les princes protestants étant contraints à la prudence. L’empereur, au lendemain de Pavie, au lendemain du sac de Rome, était si puissant ! En 1527 seulement, à la diète de Spire, les princes ont obtenu une sorte e liberté provisoire d’organier les Eglises dans leurs Etats, suivant leurs idées et sans avoir à redouter ces éternels conflits avec la Chambre impériale qui jusqu’alors avait tout troublé. – En Angleterre ? C’est en 1532, l’année de Pantagruel, qu’Henri VIII commence à peser sur les décisions du clergé anglais ; mais nul ne sait encore ce que veut en matière de foi ni à quel point s’arrêtera ce prince à la fois anti-romain et anti-luthérien. L’acte de Suprématie ne date que de 1534, et le Gargantua paraît, après le Pantagruel, quand Thomas More est décapité ou quand, sous la vigoureuse impulsion de Thomas Cromwell, commence la suppression des monastères anglais. 

[...]

En France ? L’incertitude est extrême sur les desseins du roi. Il n’a pas rompu avec Rome ; mais il s’entend avec les princes luthériens : jeu de bascule perpétuel. Un jour, il sauve Berquin et le fait arracher, par les archers de sa garde, aux griffes croches des parlementaires. Un autre jour, il suit, cierge en main, les processions expiatoires de juin 1528. Il laisse périr ce Berquin qu’il a d’abord sauvé (17 avril 1529), puis, au début de 1530, institue les lecteurs royaux, et, en avril 1531, invite Zwingli à lui présenter une confession de Foi. – Cependant, en octobre 1533, il se rend à Marseille, rencontre le pape Clément et marie le Dauphin à une Médicis. Mais à la fin de novembre 33, il délibère à Avignon sur un projet d’alliance avec les luthériens ; en janvier 1534, il traite à Bar-le-Duc avec le Landgrave : il faut l’affaire des Placards (le 18 octobre 1534) qui éclate lorsque, selon toute probabilité, le Gargantua est mis en vente, pour que le roi se porte aux pires extrémités, contre les luthériens, sans doute, mais contre les lettres mêmes, l’imprimerie qu’un édit prétend supprimer, l’humanisme et les langues classiques.

Auteur: Febvre Lucien

Info: "Le problème de l'incroyance au 16e siècle", éditions Albin Michel, Paris, 1968, pages 251-253

[ historique ] [ diffusion européenne ] [ ambivalence ]

 

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