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printemps

Un grand souffle chaud parcourt depuis huit jours la vallée de Chamonix. Venant d'Italie, le vent s'engouffre dans le corridor de la mer de Glace, vient heurter les raides pentes herbeuses de l'aiguille à Bochard, puis retombe comme une haleine tiède sur les étroites prairies qui bordent l'Arve, faisant éclore brusquement en une nuit l'admirable flore alpestre. Chaque jour la vieille neige de l'hiver recule, monte, se réfugie dans les alpages, puis plus haut dans les grands couloirs et dans les glaciers... On peut suivre cette progression du printemps : c'est comme un immense assaut que donne la nature à la montagne. Les forêts toutes rougies par les gels et les tourments reverdissent de jeunes pousses d'un vert très tendre, mais plus haut, vers les deux mile, tout est encore brûlé. Les névés fondent les uns après les autres, laissant sur le paysage une tache rougeâtre. On dirait une plaie mal guérie ; cela fait comme une croûte qu'on aurait arrachée et qui laisserait dessous le ton plus clair de la peau mal formée. Puis, ces plaies des alpages se cicatrisent à leur tour, verdissent, et le gazon dru des altitudes vient unifier la teinte fraîche de la montagne.

Auteur: Frison-Roche Roger

Info: Premier de cordée

 

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homme-par-femme

Il est photographe, à ses heures perdues. Bambi hoche la tête d'un air complice. La discussion s'engage comme ça, autour de la photographie et de la peau de Bambi qui prend si bien la lumière. Or Bambi le sait parfaitement, le plâtras dont elle est enduite ne laisse pas passer la lumière, ni même la peau ; son visage cache son visage et là où elle est, il fait noir, il n'y a rien à voir. L'homme, de type méridional, fait le mystérieux quant à ses origines, dit qu'il a beaucoup voyagé pour les affaires. Bambi boit ses paroles, en goûte l'odeur aigre sans reculer. Elle a dans ses regards quelque chose de pressant, comme une urgence. Comme si elle avait besoin d'argent, par exemple. Sauf qu'elle s'en fout de l'argent. Elle a juste besoin de tuer l'angoisse, besoin de se retrouver, de reprendre le dessus. Là elle étouffe, là elle ne se reconnaît plus. Si elle met minable ce mec, tout ira mieux. Quelques verres plus tard, il veut lui montrer son studio photo. Bambi n'hésite pas, elle n'attendait que ça. De son portefeuille, il sort plus de pièces que de billets et donne le compte juste, la voiture n'est pas loin...

Auteur: Mulder Caroline de

Info: Manger Bambi

[ proie ] [ gibier ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

Gaule

Le décrochage très brutal de l'influence du catholicisme observé au cours des dernières décennies constitue un fait social de première importance. Comme le souligne Emmanuel Todd : " Dans un pays comme la France, la présence d'une Eglise catholique minoritaire, mais socialement importante, donnait un sens à l'incroyance, à l'athéisme ou, comme on dit pudiquement, à l'affirmation laïque. La disparition de ce point de repère a détruit l'ensemble de l'organisation idéologique de la France." Avec le déclin accéléré du catholicisme suivi de l'effondrement de la contre-société communiste, c'est tout l'édifice idéologique de la société française qui s'est trouvé déstabilisé.

(...) C’est ainsi, par exemple, qu’en dépit d’une mobilisation importante, la mouvance de la Manif pour tous n’est pas parvenue à faire obstacle à l’adoption de la loi Taubira. Le catholicisme, comme force sociologique et idéologique, n’est plus à même, en France, de peser significativement et d’emporter la décision. C’était encore le cas en 1984, quand la mobilisation de la France Catholique fit reculer la gauche sur l’école libre. En l’espace de trente ans, le processus d’érosion de l’influence du catholicisme (déjà bien amorcé) s’est donc considérablement accéléré. De force centrale et structurante, la France Catholique est devenue une minorité parmi d’autres.

Auteur: Fourquet Jérôme

Info: L'archipel français, 2019

[ historique ] [ religion ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

ténèbres

La terreur, c'est surtout de l'imprévu ; et si la nervosité des peureux s'exaspère dans l'obscurité, c'est que cette nuit aveugle est peuplée pour eux de fantômes, auxquels ils ne peuvent donner de formes. Si, de tous temps, les enfants et les servantes ont craint de se hasarder, le soir, hors des chambres éclairées et closes, c'est que l'ombre impénétrable, l'ombre silencieuse et hostile recule tout l'infini dans le mystère et toute l'épouvante dans l'inconnu... Oh ! les grands arbres bruissants des fonds de parcs d'automne humides et solitaires, les interminables corridors des vieux logis de province à demi abandonnés, les greniers hauts comme des cathédrales, où s'entassent des vieilleries, des paperasses et des malles velues, immobiles depuis des années, et qui ne voyageront jamais plus, les chambres inhabitées des maisons de campagne des grands-parents aujourd'hui morts, la chambre qu'on n'ouvrait jamais parce qu'il s'y était passé quelque chose...
Oh ! Tous ces châteaux d'épouvante effrités aujourd'hui dans nos âmes sceptiques, mais qui tenaient jadis une si formidable place dans notre enfance effarée et inquiète, de quelle atmosphère frissonnante et glacée ils s'emplissaient pour nous à la tombée de la nuit, surtout au retour de l'automne, dans ces mois brumeux et pourris d'incessantes ondées, de torrentielles pluies.

Auteur: Lorrain Jean

Info: Histoires de Masques

[ peur ] [ imagination ]

 

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déhiérarchisation

Que faire si nous ne pouvons ni avancer ni reculer ? Déplacer notre attention. Nous n’avons jamais ni avancé ni reculé. Nous avons toujours activement trié des éléments appartenant à des temps différents. Nous pouvons trier encore. C’est le tri qui fait le temps et non pas le temps qui fait le tri. Le modernisme — et ses corollaires anti- et postmodernes — n’était qu’une sélection faite par un petit nombre au nom de tous. Si nous sommes plus nombreux à récupérer la capacité de trier nous-mêmes les éléments qui font partie de notre temps, nous retrouverons la liberté de mouvement que le modernisme nous déniait, liberté qu’en fait nous n’avions jamais vraiment perdue. Nous n’émergeons pas d’un passé obscur qui confondait les natures et les cultures pour parvenir à un futur où les deux ensembles se sépareront enfin nettement grâce à la continuelle révolution du présent. Nous n’avons jamais été plongés dans un flux homogène et planétaire venu soit de l’avenir, soit du fond des âges. La modernisation n’a jamais eu lieu. Ce n’est pas une marée longtemps montante qui refluerait aujourd’hui. Il n’y a jamais eu de marée. Nous pouvons passer à autre chose, c’est-à-dire revenir aux multiples choses qui ont toujours passé de façon différente.

Auteur: Latour Bruno

Info: Nous n'avons jamais été modernes. Essai d'anthropologie symétrique. P 49

[ redistribution des rôles ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

injustice

- Vous évoquez le suicide de Fabrice Hrycak, éducateur à l’aae qui est survenu après un conflit du travail où il n’a, pour le moins, pas été soutenu après avoir vécu une situation très violente avec un jeune. Pourriez-vous nous expliquer ce qui s’est passé ? 

- Fabrice était un éducateur chevronné qui travaillait sur l’une des structures les plus dégradées de l’aae. Il avait voulu reprendre un jeune qui s’était montré particulièrement violent la veille avec l’une de ses collègues. Lors de l’échange, le jeune s’est rebellé, l’a frappé en lui cassant plusieurs côtes, et, en se dégageant, Fabrice lui a porté un coup de tête (sans gravité puisque le médecin n’a pas jugé qu’il pouvait donner lieu à interruption de travail). Fabrice a fait l’objet d’une mesure de licenciement immédiate sans que la violence du jeune ait été reconnue ou traitée. La direction a agi comme si Fabrice avait été entièrement responsable de la situation de violence, alors qu’en réalité c’était l’inverse ! Une grève a fait reculer la direction mais cette dernière est restée extrêmement ambiguë. Fabrice, en mettant fin à ses jours devant la porte de l’association, a signifié clairement que la souffrance qu’il pouvait vivre sur son lieu de travail l’avait conduit à commettre ce geste.

Auteur: Toulouse Philippe

Info: In : Entretien avec P T, lanceur d’alerte. Propos recueillis par Jean-Marie Vauchez dans VST - Vie sociale et traitements 2015/3 (N° 127), pp 53 à 57

[ . ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

mère-fille

- Ô maman, fais-moi plaisir pour une fois, essaie de crier "maman", à ton tour. Essaie et explique-moi ce que tu ressens.
- Ta grand-mère est morte depuis longtemps. Si je disais "maman", maintenant, je serai folle.
- Mais "maman", tel que je le ressens, peu importante que tu sois vivante ou morte pour prononcer le mot ; c’est une réalité en soi, inaltérable, qui cherche en vain à se libérer, et qui fait mal, si mal. Explique-moi. C’est le supplice de toute chose prisonnière de toute chose ; c’est le supplice du monde dans le ciel, du ciel dans l’univers… c’est comme vouloir s’enfuir et réussir à se sauver mais demeurer piégé dans un tourbillon, qui n’avance ni ne retourne en arrière. C’est horrible, maman, quand je t’appelle ainsi. Est-ce que c’est comme ça quand on naît ? En fait, c’est comme quand on est sur le point de naître et que, tout à coup, on ne sait plus : on se tient là, immobile, de peur de s’accomplir, de se détruire ; mais que l’on avance ou que l’on recule, au seuil de la vie, on se sent pris dans un étau, tout à la fois convié à venir au monde et réabsorbé par le néant : voilà ce que veut dire le mot "maman".

Auteur: Masino Paola

Info: Dans "La Massaia", pages 40-41

[ définition ] [ naissance ] [ incommunicabilité ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

homme-animal

Comme effrayée par une sorte de vision effroyable, Pisicuţa s’arrêta soudain comme foudroyée, se mit à renâcler, à se cabrer et à reculer, montrant le désir de me faire tomber de son dos, et de me projeter bien loin, de me flanquer par terre…

C’est ainsi qu’à tort ou à raison, je soupçonnai que quelque bête sauvage, un loup ou un ours, venait juste de passer, qu’elle avait traversé le chemin et qu’elle avait laissé, derrière elle, un relent de son odeur dans l’air, que l’odorat de Pisicuţa, beaucoup plus sensible que le mien, avait reniflé et que, moins courageuse que moi, elle n’osait pas franchir. Une idée géniale me traversa l’esprit : je fourrai ma main dans l’une de mes besaces et j’en retirai vite ma serviette de toilette, longue comme un jour sans pain, dont l’odeur hétéroclite, j’en étais persuadé, allait vaincre et dominer victorieusement toutes les odeurs aigres et sauvages de tous les fauves de l’univers… ce n’est pas pour rien qu’elle était restée, aussi longtemps, à l’abri dans mes sacs de voyage, en étroit voisinage avec toutes sortes d’olives vieilles et flétries, avec l’ail et l’oignon aux relents puissants, qui formaient l’essentiel de mes victuailles pour le voyage, et avec une immense peau de mouton, dont on avait fait un bonnet pour le mauvais temps…

Auteur: Calistrat Hogaș

Info: PE DRUMURI DE MUNTE, traduction de Dolores Toma

 

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Ajouté à la BD par miguel

Asie

Parmi mes souvenirs de Ceylan, je revois une grande chasse à l'éléphant.
Les éléphants étaient devenus trop nombreux dans un certain secteur et au cours de leurs incursions endommageaient maisons et cultures. Durant plus d'un mois, au long d'un fleuve, les paysans, avec du feu, des brasiers et des gongs, obligèrent peu à peu les troupeaux sauvages à reculer vers un coin de la forêt et à s'y rassembler.
Nuit et jour, les flammes et le bruit des instruments inquiétaient les grands animaux qui se déplaçaient comme un fleuve lent vers le nord-ouest de l'île.
Puis arriva le jour du kraal. Les palissades obstruaient une partie de la forêt. Par un étroit couloir je vis entrer le premier éléphant qui se sentit aussitôt pris au piège. Il était trop tard. Des centaines d'autres s'avançaient dans le corridor sans issue. L'immense troupeau de près de cinq cents éléphants était dans l'impossibilité d'avancer ou de reculer.
Les mâles les plus puissants se dirigèrent vers les palissades en essayant de les briser, mais derrière celles-ci surgirent d'innombrables lances qui les arrêtèrent. Alors ils se replièrent au centre de l'enclos, décidés à protéger les femelles et leurs petits. Leur défense et leur organisation étaient émouvantes. Ils lançaient un appel angoissé, une sorte de hennissement ou un coup de trompette, et dans leur désespoir déracinaient les arbres les plus faibles.

Auteur: Neruda Pablo

Info: La solitude lumineuse

[ littérature ]

 

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fantasmagorie

La nuit dernière encore, cela a commencé ainsi.

En fin d’après-midi, le vent et la pluie avaient forci et, au lieu d’aller accrocher les volets comme je l’aurais dû, je m’étais paresseusement réfugié dans mon lit toujours défait. Mais dans la nuit, les vitres se sont mises à gémir. D’une façon tout à fait différente des vibrations qui les agitaient jusque-là. Cela m’a réveillé. Pour commencer, j’ai pensé à un chat ou quelque autre animal. Je m’apprêtais à me rendormir sans intervenir, mais les craquements empiraient. Pour finir, le vacarme est devenu tel qu’on aurait cru que la maison geignait ; bien obligé, j’ai fini par me lever, j’ai allumé la lampe à pétrole et je suis parti inspecter les fenêtres de la véranda.

Derrière les vitres, la lampe a révélé des ténèbres de poix, des rafales de vent et de pluie qui les battaient follement et, alors qu’en temps normal leur extrémité se contentait de frôler la fenêtre, même par grand vent, les fleurs du lilas des Indes qui se jetaient contre le carreau, face la première, comme aplaties par quelque force gigantesque. Les grandes branches déferlaient contre la fenêtre avant de reculer un instant, telle la vague qui se retire, et ainsi de suite. Leur grincement avait un effet hallucinatoire et, peu à peu, il m’a semblé entendre : … laisse-moi entrer…

Auteur: Nashiki Kaho

Info: Lilas des Indes

[ nocturne ] [ végétaux ]

 

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Ajouté à la BD par miguel