Du réel des hommes, sa transposition en signes, aux perspectives futuristes.
Préambule pour la chaîne chronologique sur l'évolution sémio-sémantique des communication humaines, et de leurs supports liés.
A partir de notre réel - monde de signes -, puis de la création de signes propres à l'humain, codages communautaires, bientôt externalisables puisque mis sur substrat externe, et en parallèle à l'évolution des supports et autres habitudes de décryptages-lectures, nous avons là une passionnante émergence.
Cette chaîne tente donc une présentation de la continuité diachronique du développement de nos cultures écrites, en commençant par les traces, sons, dessins, symboles, lettres... Et puis le lire à haute voix, jusqu'à, disons Saint Ambroise... Et ensuite dans la tête...
Avant l'explosion de la drogue des mots amenée par les premières presses qui diffusèrent le texte partout. On eut ensuite la photo, la radio, la télé... (huitième art)...
Avec le web quelque chose est en train de nous dépasser. On pourrait parler du fait que les gens qui surfent vont en général rechercher une info qu'ils ont déjà bien cernée avant, il vérifient, précisent. Avant, souvent, très souvent,de diverger. Sur Internet c'est tout qui se mélange avec tout : images, citations, dessins, mots, Gifs, phrases, liens... Sans parler de l'utilisation du CTRL F qui permet de trouver instantanément un mot sur des dizaines de pages.
Et aussi souligner une forme d'incroyable bêtise idiomatique que Google est en train de faire émerger puisque les infos y sont laminées de manière à sélectionner et mettre en avant celles qui arrangent la multinationale ricaine consumériste et les intérêts de ses clients-partenaires payeurs...
Et sont arrivées les IAs sémantiques, grandes compilatrices numériques... dictionnaires intelligents ? lissage ultime de nos savoirs communautaires codés ?
L'avenir le dira.
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Info: 11 avril 2015 - 2024
Un jour, quelque part, à un moment donné, dans la mystérieuse chimie du carbone, la longue marche vers l'animal parlant avait commencé.
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Info: The Immense Journey, The Secret of Life (p. 198), Random House, Inc. New York, New York, États-Unis. 1957
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Pourquoi nos ancêtres ont-ils développé un protolarynx, qui va devenir plus tard l'instrument de la parole ? Personne ne le sait. Mais le développement du protolarynx fait partie des développements physiologiques de la réussite des hominiens, préalable nécessaire à l'outil fatal du développement verbal.
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Info: L'univers bactériel, p. 246
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Avant même de parler, nous jurions.
Furieux de ce qu'il considère comme une pandémie virtuelle de vulgarité verbale émanant de personnalités aussi diverses que Howard Stern, Bono de U2 et Robert Novak, le Sénat des États-Unis est sur le point d'examiner un projet de loi qui augmenterait fortement les sanctions pour obscénité à l'antenne.
En multipliant par quinze les amendes qui seraient infligées aux radiodiffuseurs contrevenants, pour atteindre un montant d'environ 500 000 dollars par diffusion de grossièretés, et en menaçant de révoquer les licences des contrevenants récidivistes, le Sénat cherche à redonner à la place publique la teneur plus douce d'antan, lorsque l'on entendait rarement des propos calomnieux et que les célébrités n'étaient pas grossières à longueur de journée.
Pourtant, les chercheurs qui étudient l'évolution du langage et la psychologie des jurons disent qu'ils n'ont aucune idée du modèle mystique de gentillesse linguistique que les critiques pourraient avoir en tête. Le juron, disent-ils, est un universel humain. Toutes les langues, tous les dialectes et tous les patois étudiés, vivants ou morts, parlés par des millions de personnes ou par une petite tribu, ont leur part d'interdits, une variante de la célèbre liste des sept gros mots qui ne doivent pas être prononcés à la radio ou à la télévision, établie par le comédien George Carlin.
Les jeunes enfants mémorisent cet inventaire illicite bien avant d'en saisir le sens, explique John McWhorter, spécialiste de la linguistique au Manhattan Institute et auteur de "The Power of Babel", et les géants de la littérature ont toujours construit leur art sur sa colonne vertébrale.
"Le dramaturge jacobéen Ben Jonson a parsemé ses pièces de fackings et de "Culs peremptoirs", et Shakespeare ne pouvait guère écrire une strophe sans insérer des blasphèmes de l'époque comme "zounds" ou "sblood" - contractions offensantes de "God's wounds" et "God's blood" - ou autre étonnant jeu de mots sexuel.
Le titre "Much Ado About Nothing", dit son auteur le Dr McWhorter, est un jeu de mots sur "Much Ado About an O Thing", le O thing étant une référence aux organes génitaux féminins.
Même la quintessence du bon livre abonde en passages coquins comme les hommes de II Kings 18:27 qui, comme le dit la traduction relativement douce du King James, "mangent leur propre merde et boivent leur propre pisse".
En fait, selon Guy Deutscher, linguiste à l'université de Leyde, aux Pays-Bas, et auteur de "The Unfolding of Language : An Evolutionary Tour of Mankind's Greatest Invention", les premiers écrits, qui datent d'il y a 5 000 ans, comportent leur lot de descriptions colorées de la forme humaine et de ses fonctions encore plus colorées. Et les écrits ne sont que le reflet d'une tradition orale qui, selon le Dr Deutscher et de nombreux autres psychologues et linguistes évolutionnistes, remonte à l'apparition du larynx humain, si ce n'est avant.
Certains chercheurs sont tellement impressionnés par la profondeur et la puissance du langage grossier qu'ils l'utilisent comme un judas dans l'architecture du cerveau, comme un moyen de sonder les liens enchevêtrés et cryptiques entre les nouvelles régions "supérieures" du cerveau chargées de l'intellect, de la raison et de la planification, et les quartiers neuronaux plus anciens et plus "bestiaux" qui donnent naissance à nos émotions.
Les chercheurs soulignent que le fait de jurer est souvent un amalgame de sentiments bruts et spontanés et de ruse ciblée, à la dérobée. Lorsqu'une personne en insulte une autre, disent-ils, elle crache rarement des obscénités et des insultes au hasard, mais évalue plutôt l'objet de son courroux et adapte le contenu de son explosion "incontrôlable" en conséquence.
Étant donné que l'injure fait appel aux voies de la pensée et des sentiments du cerveau dans une mesure à peu près égale et avec une ferveur facilement évaluable, les scientifiques affirment qu'en étudiant les circuits neuronaux qui la sous-tendent, ils obtiennent de nouvelles informations sur la façon dont les différents domaines du cerveau communiquent - et tout cela pour une réplique bien sentie.
D'autres chercheurs se sont penchés sur la physiologie de l'injure, sur la façon dont nos sens et nos réflexes réagissent à l'audition ou à la vue d'un mot obscène. Ils ont déterminé que le fait d'entendre un juron suscite une réaction littérale chez les gens. Lorsque des fils électrodermiques sont placés sur les bras et le bout des doigts d'une personne pour étudier les schémas de conductivité de sa peau et que les sujets entendent ensuite quelques obscénités prononcées clairement et fermement, les participants montrent des signes d'excitation instantanée. La conductivité de leur peau augmente, les poils de leurs bras se dressent, leur pouls s'accélère et leur respiration devient superficielle.
Il est intéressant de noter, selon Kate Burridge, professeur de linguistique à l'université Monash de Melbourne, en Australie, qu'une réaction similaire se produit chez les étudiants universitaires et d'autres personnes qui se targuent d'être instruites lorsqu'elles entendent des expressions de mauvaise grammaire ou d'argot qu'elles considèrent comme irritantes, illettrées ou déclassées.
"Les gens peuvent se sentir très passionnés par la langue, dit-elle, comme s'il s'agissait d'un artefact précieux qu'il faut protéger à tout prix contre les dépravations des barbares et des étrangers lexicaux."
Le Dr Burridge et un collègue de Monash, Keith Allan, sont les auteurs de "Forbidden Words : Taboo and the Censoring of Language", qui sera publié au début de l'année prochaine par la Cambridge University Press.
Les chercheurs ont également découvert que les obscénités peuvent s'insinuer dans la peau d'une personne qui a la chair de poule, puis ne plus bouger. Dans une étude, les scientifiques ont commencé par le célèbre test de Stroop, qui consiste à montrer à des sujets une série de mots écrits en différentes couleurs et à leur demander de réagir en citant les couleurs des mots plutôt que les mots eux-mêmes.
Si les sujets voient le mot "chaise" écrit en lettres jaunes, ils sont censés dire "jaune".
Les chercheurs ont ensuite inséré un certain nombre d'obscénités et de vulgarités dans la gamme standard. En observant les réponses immédiates et différées des participants, les chercheurs ont constaté que, tout d'abord, les gens avaient besoin de beaucoup plus de temps pour triller les couleurs des mots d'injures que pour des termes neutres comme "chaise".
L'expérience de voir un texte titillant détournait manifestement les participants de la tâche de codage des couleurs. Pourtant, ces interpolations osées ont laissé des traces. Lors de tests de mémoire ultérieurs, les participants ont non seulement été beaucoup plus aptes à se souvenir des vilains mots que des mots neutres, mais cette supériorité s'appliquait également aux teintes des mots vilains, ainsi qu'à leur sens.
Oui, il est difficile de travailler dans la pénombre des ordures idiomatiques. Dans le cadre d'une autre étude, des chercheurs ont demandé à des participants de parcourir rapidement des listes de mots contenant des obscénités, puis de se souvenir du plus grand nombre possible de ces mots. Là encore, les sujets se sont montrés plus aptes à se remémorer les injures, et moins aptes à se souvenir de tout ce qui était acceptable et qui précédait ou suivait les injures.
Pourtant, si le langage grossier peut donner un coup de fouet, il peut aussi aider à évacuer le stress et la colère. Dans certains contextes, la libre circulation d'un langage grossier peut signaler non pas l'hostilité ou une pathologie sociale, mais l'harmonie et la tranquillité.
"Des études montrent que si vous êtes avec un groupe d'amis proches, plus vous êtes détendu, plus vous jurez", a déclaré le Dr Burridge. "C'est une façon de dire : 'Je suis tellement à l'aise ici que je peux me défouler. Je peux dire ce que je veux".
Il est également prouvé que les jurons peuvent être un moyen efficace d'évacuer l'agressivité et de prévenir ainsi la violence physique.
Avec l'aide d'une petite armée d'étudiants et de volontaires, Timothy B. Jay, professeur de psychologie au Massachusetts College of Liberal Arts à North Adams et auteur de "Cursing in America" et "Why We Curse", a exploré en détail la dynamique du juron.
Les enquêteurs ont découvert, entre autres, que les hommes jurent généralement plus que les femmes, à moins que ces dernières ne fassent partie d'une sororité, et que les doyens d'université jurent plus que les bibliothécaires ou les membres du personnel de la garderie universitaire.
Selon le Dr Jay, peu importe qui jure ou quelle est la provocation, la raison de l'éruption est souvent la même.
"À maintes reprises, les gens m'ont dit que le fait de jurer était pour eux un mécanisme d'adaptation, une façon de réduire le stress", a-t-il déclaré lors d'un entretien téléphonique. "C'est une forme de gestion de la colère qui est souvent sous-estimée".
En effet, les chimpanzés se livrent à ce qui semble être une sorte de match de jurons pour évacuer leur agressivité et éviter un affrontement physique potentiellement dangereux.
Frans de Waal, professeur de comportement des primates à l'université Emory d'Atlanta, a déclaré que lorsque les chimpanzés sont en colère, "ils grognent, crachent ou font un geste brusque et ascendant qui, si un humain le faisait, serait reconnu comme agressif".
Ces comportements sont des gestes de menace, a déclaré le professeur de Waal, et ils sont tous de bon augure.
"Un chimpanzé qui se prépare vraiment à se battre ne perd pas de temps avec des gestes, mais va tout simplement de l'avant et attaque". De la même manière, a-t-il ajouté, rien n'est plus mortel qu'une personne trop enragée pour utiliser des jurons, qui prend une arme à feu et commence à tirer sans bruit.
Les chercheurs ont également examiné comment les mots atteignent le statut de discours interdit et comment l'évolution du langage grossier affecte les couches plus lisses du discours civil empilées au-dessus. Ils ont découvert que ce qui est considéré comme un langage tabou dans une culture donnée est souvent un miroir des peurs et des fixations de cette culture.
"Dans certaines cultures, les jurons sont principalement liés au sexe et aux fonctions corporelles, tandis que dans d'autres, ils sont principalement liés au domaine de la religion", a déclaré le Dr Deutscher.
Dans les sociétés où la pureté et l'honneur des femmes sont d'une importance capitale, "il n'est pas surprenant que de nombreux jurons soient des variations sur le thème "fils de pute" ou fassent référence de manière imagée aux organes génitaux de la mère ou des sœurs de la personne concernée".
Le concept même de juron ou de serment trouve son origine dans la profonde importance que les cultures anciennes accordaient au fait de jurer au nom d'un ou de plusieurs dieux. Dans l'ancienne Babylone, jurer au nom d'un dieu était censé donner une certitude absolue contre le mensonge, a déclaré le Dr Deutscher, "et les gens croyaient que jurer faussement contre un dieu attirerait sur eux la terrible colère de ce dieu." La mise en garde contre tout abus du serment sacré se reflète dans le commandement biblique selon lequel il ne faut pas "prendre le nom du Seigneur en vain", et aujourd'hui encore, les témoins dans les tribunaux jurent sur la Bible qu'ils disent toute la vérité et rien que la vérité.
Chez les chrétiens, cette interdiction de prendre le nom du Seigneur en vain s'étendait à toute allusion désinvolte envers le fils de Dieu ou à ses souffrances corporelles - aucune mention du sang, des plaies ou du corps, et cela vaut aussi pour les savantes contractions. De nos jours, l'expression "Oh, golly !" peut être considérée comme presque comiquement saine, mais il n'en a pas toujours été ainsi. "Golly" est une compaction de "corps de Dieu" et, par conséquent, était autrefois un blasphème.
Pourtant, ni les commandements bibliques, ni la censure victorienne la plus zélée ne peuvent faire oublier à l'esprit humain son tourment pour son corps indiscipliné, ses besoins chroniques et embarrassants et sa triste déchéance. L'inconfort des fonctions corporelles ne dort jamais, a déclaré le Dr Burridge, et le besoin d'une sélection toujours renouvelée d'euphémismes sur des sujets sales a longtemps servi de moteur impressionnant à l'invention linguistique.
Lorsqu'un mot devient trop étroitement associé à une fonction corporelle spécifique, dit-elle, lorsqu'il devient trop évocateur de ce qui ne devrait pas être évoqué, il commence à entrer dans le domaine du tabou et doit être remplacé par un nouvel euphémisme plus délicat.
Par exemple, le mot "toilette" vient du mot français "petite serviette" et était à l'origine une manière agréablement indirecte de désigner l'endroit où se trouve le pot de chambre ou son équivalent. Mais depuis, le mot "toilettes" désigne le meuble en porcelaine lui-même, et son emploi est trop brutal pour être utilisé en compagnie polie. Au lieu de cela, vous demanderez à votre serveur en smoking de vous indiquer les toilettes pour dames ou les toilettes ou, si vous le devez, la salle de bains.
De même, le mot "cercueil" (coffin) désignait à l'origine une boîte ordinaire, mais une fois qu'il a été associé à la mort, c'en fut fini du "cercueil à chaussures" ou de la "pensée hors du cercueil". Selon le Dr Burridge, le sens tabou d'un mot "chasse toujours les autres sens qu'il aurait pu avoir".
Les scientifiques ont récemment cherché à cartographier la topographie neuronale du discours interdit en étudiant les patients atteints du syndrome de Tourette qui souffrent de coprolalie, l'envie pathologique et incontrôlable de jurer. Le syndrome de Gilles de la Tourette est un trouble neurologique d'origine inconnue qui se caractérise principalement par des tics moteurs et vocaux chroniques, une grimace constante ou le fait de remonter ses lunettes sur l'arête du nez, ou encore l'émission d'un flot de petits glapissements ou de grognements.
Seul un faible pourcentage des patients atteints de la maladie de Gilles de la Tourette sont atteints de coprolalie - les estimations varient de 8 à 30 % - et les patients sont consternés par les représentations populaires de la maladie de Gilles de la Tourette comme une affection humoristique et invariablement scatologique. Mais pour ceux qui souffrent de coprolalie, dit le Dr Carlos Singer, directeur de la division des troubles du mouvement à la faculté de médecine de l'université de Miami, ce symptôme est souvent l'aspect le plus dévastateur et le plus humiliant de leur maladie.
Non seulement il peut être choquant pour les gens d'entendre une volée de jurons jaillir sans raison apparente, parfois de la bouche d'un enfant ou d'un jeune adolescent, mais les jurons peuvent aussi être provocants et personnels, des insultes fleuries contre la race, l'identité sexuelle ou la taille d'un passant, par exemple, ou des références obscènes délibérées et répétées au sujet d'un ancien amant dans les bras d'un partenaire ou d'un conjoint actuel.
Dans un rapport publié dans The Archives of General Psychiatry, le Dr David A. Silbersweig, directeur du service de neuropsychiatrie et de neuro-imagerie du Weill Medical College de l'université Cornell, et ses collègues ont décrit leur utilisation de la TEP pour mesurer le débit sanguin cérébral et identifier les régions du cerveau qui sont galvanisées chez les patients atteints de la maladie de Tourette pendant les épisodes de tics et de coprolalie. Ils ont constaté une forte activation des ganglions de la base, un quatuor de groupes de neurones situés dans le cerveau antérieur, à peu près au niveau du milieu du front, connus pour aider à coordonner les mouvements du corps, ainsi qu'une activation des régions cruciales du cerveau antérieur arrière gauche qui participent à la compréhension et à la production du langage, notamment l'aire de Broca.
Les chercheurs ont également constaté l'activation de circuits neuronaux qui interagissent avec le système limbique, le trône des émotions humaines en forme de berceau, et, de manière significative, avec les domaines "exécutifs" du cerveau, où les décisions d'agir ou de s'abstenir d'agir peuvent être prises : la source neuronale, selon les scientifiques, de la conscience, de la civilité ou du libre arbitre dont les humains peuvent se prévaloir.
Selon le Dr Silbersweig, le fait que le superviseur exécutif du cerveau s'embrase lors d'une crise de coprolalie montre à quel point le besoin de dire l'indicible peut être un acte complexe, et pas seulement dans le cas du syndrome de Tourette. La personne est saisie d'un désir de maudire, de dire quelque chose de tout à fait inapproprié. Les circuits linguistiques d'ordre supérieur sont sollicités pour élaborer le contenu de la malédiction. Le centre de contrôle des impulsions du cerveau s'efforce de court-circuiter la collusion entre l'envie du système limbique et le cerveau néocortical, et il peut y parvenir pendant un certain temps.
Mais l'envie monte, jusqu'à ce que les voies de la parole se déchaînent, que le verboten soit prononcé, et que les cerveaux archaïques et raffinés en portent la responsabilité.
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Info: The New York Times, 20 septembre 2005
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Un code caché dans des peintures préhistoriques décrypté par un amateur (source de l'article)
Du Morse avant l'heure?
Alors que Ben Bacon, un conservateur de meubles de Londres, parcourait des galeries de peintures préhistoriques sur internet, une idée lui est venue: et si les petits traits et points figurant sur plusieurs centaines d'entre elles étaient des marqueurs de temps?
HistoryNet évoque la théorie de cet amateur passionné, qui a conduit à une publication dans le Journal archéologique de Cambridge. Fasciné par ces œuvres réalisées il y a 15.000 à 40.000 ans dans des grottes situées en Europe, Ben Bacon avait fini par prendre conscience de la présence d'un certain nombre de motifs récurrents.
À côté des animaux dessinés sur les parois, on peut régulièrement trouver des petites lignes et des petits points, que le passionné décrit comme " les premières écritures connues dans l'histoire de l'Homo sapiens ". Un détail a particulièrement marqué Ben Bacon: il n'y en avait jamais plus de treize. Lui est alors venue une idée: ces symboles discrets pourraient avoir fait office de marqueurs temporels, se basant peut-être sur un calendrier lunaire.
" Une nuit, a-t-il raconté à Vice, j'étais sur internet en train de regarder ces peintures datant du Paléolithique sans y prêter vraiment attention. Lorsque j'ai remarqué, vraiment par hasard, que plusieurs animaux représentés avaient un nombre qui semblait leur être associé. "
Plusieurs pistes
Le conservateur s'est alors empressé de partager son hypothèse avec des archéologues de l'université de Durham (nord de l'Angleterre) et de l'University College de Londres, pour qu'ils l'aident à confirmer cette théorie. Lors de la découverte des grottes il y a plus de 150 ans, les archéologues avaient d'abord pensé que les symboles " servaient à compter le nombre d'animaux aperçus ou tués par ces artistes préhistoriques ", nous apprend Vice.
Pour les chercheurs, la théorie du calendrier lunaire formulée par Ben Bacon " colle au fait que la connaissance des périodes de migration, d'accouplement ou de mise-bas des animaux du Paléolithique était un sujet central, puisque toute l'organisation humaine en dépendait ". Un tel calendrier ne fonctionne d'ailleurs pas sur un principe annuel, mais bien sur une comptabilisation par saisons. Question de survie.
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Info: https://www.slate.fr/, Elena Gillet - 4 août 2023
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On estime l'âge des proto-langages à près d'un million d'années (époque d'homo erectus), tandis que les premières langues remonteraient à environ 100 000 ans, en gros à l'avènement d'homo sapiens. Dans les deux cas, il s'agirait de langues uniquement orales, les systèmes d'écriture datant, eux, de 6 à 10 000 ans avant notre ère. Là encore, l'incertitude règne : les traces que nous avons découvertes (comme la fameuse pierre de Rosette ou, plus anciennes, les tablettes d'argiles mésopotamiennes et autres kudurrus - stèles de donation de terre - tels que le caillou Michaux, kudurru découvert en Mésopotamie par le botaniste André Michaux (1746-1802) et ramené en France en 1786) sont celles qui ont résisté aux ravages du temps. Une écriture plus ancienne a pu exister, utilisant des supports périssables comme des peaux ou des morceaux de bois.
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Info: Comment parler à un alien ?
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Comme le fera plus tard Hawthorne, Rousseau déplore l’impuissance du langage abstrait et rationnel du monde moderne à remplir sa vocation originelle, qui était d’exprimer les passions. Ce qu’il appelle "la langue des géomètres" n’est plus que la forme abâtardie d’une langue première dont les "plus anciens mots inventés" étaient "des accents, des cris, des plaintes", seuls vrais modèles d’une parole vive. Aussi le voit-on, dans un passage de ce même ouvrage où il se prend à rêver d’une langue idéale, réduire au minimum la part du langage articulé pour en faire reposer toute la force sur des qualités strictement musicales.
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Info: Poétiques de la voix : Angleterre, Irlande, Etats-Unis. Discours sur l’origine des langues, 480-81
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Le "coin" désigne le triangle pileux qui décore le pubis féminin et constitua dès l’aube de l’humanité le blason adoré et adorable de la femme. Ce triangle fut parmi les premiers signes que tracèrent les premiers hommes sur les parois des cavernes. Autant qu’hommage à la génitrice – la femme donneuse de vie – il était un ex-voto dédié à la divine – la femme par qui leur venait la suprême ivresse de l’orgasme. Première représentation artistique, le triangle pointe en bas, symbole de la femme, fut aussi la première lettre de l’écriture qui fut d’abord "cunéiforme". Ainsi c’est à partir de la femme, par le truchement du désir, que s’inventèrent et naquirent l’art et le langage écrit.
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Info: L'art de la fellation / L'art du cunnilingus
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Dans toutes les civilisations, l'écriture a commencé par un dessin (appelé pictogramme) représentant quelque chose de réel : objet, animal, plante, corps ou partie du corps... Les pictogrammes sont des dessins plus ou moins fidèles. Certains peuvent être relativement abstraits, mais le principe de base de cette écriture est la représentation graphique du mot.
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Info: La grande encyclopédie de l'écriture
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Toute la différence entre le langage animal et le langage humain se situe dans le passage de l'usage de stimuli-signaux à celui de signes-symboles. Alors qu'un signal fait réagir, un signe fait penser. Le signal est en effet quelque chose qui désigne quelque chose d'autre qu'il indique ou demande. C'est un stimulus, càd quelque chose de sensible qui a pour fonction de provoquer une réaction, de faire faire. En présence d'un feu rouge, l'automobiliste s'arrête : il ne se met pas à évoquer des considérations sur la rougeur du feu !
Les stimuli-signaux et, avec eux le "langage" animal, sont des "instruments d'action immédiate". Le signe-symbole est "un instrument de pensée et non seulement d'action immédiate". Il permet l'évocation inactuelle! C'est précisément le jour où Helen Keller cesse de réagir aux stimuli-signaux, auxquels sa gouvernante l'a conditionnée, qu'elle comprend que les mots ont un sens et qu'elle devient capable de "parler" (avec le langage tactile des sourds-muets).
Ainsi, jusque-là elle n'avait fait que réagir au mot eau. A présent ce mot évoquait pour elle l'eau elle-même, "ce quelque chose de merveilleux qui était en train de couler sur sa main". Le langage est ainsi ce par quoi se réalise en l'être humain l'ouverture de son moi hors de l'immédiateté de l'instant, donc à l'universel.
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L’archéologie nous montre que l’homme a un sens inné de la géométrie, comme en témoignent les vestiges de signes primaires aux formes semblables trouvés dans de nombreuses régions de la terre. On peut supposer que ces signes eurent un sens similaire, à différentes époques, pour des races bien distinctes.
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Info: L'Homme et ses Signes
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Les signes, aussi bien ceux de la Mésopotamie que ceux de Gutenberg, étaient inféodés à la matière. Les lettres avaient un corps et ce corps était lui-même appliqué sur des supports qui étaient pêle-mêle des carapaces de tortues, des lamelles de bambou, du papyrus, des peaux de mouton. Or aujourd’hui, les signes chevauchent les électrons. Le signe s’est dématérialisé. C’est une ère nouvelle qui débute là actuellement.
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Info: France Culture, 29/03/2019
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Les Chinois, dit M. Klaproth, ont aussi une manière phonétique d'écrire les noms propres, qu'ils entourent souvent d'une cartouche comme les égyptiens. La seule différence entre leur système phonétique et celui des bords du Nil, est que chez eux les caractères idéographiques employés phonétiquement ne deviennent pas des lettres alphabétiques, mais qu'elle représentent la syllabe entière qu'ils expriment dans leur usage ordinaire.
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Info: Nouvel essai sur les hiéroglyphes égyptiens, d'après la critique de M. Klaproth sur les travaux de M. Denis-Auguste Affre
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Les lettres ont d'abord été des images. Les deux premières lettres de notre alphabet, qui lui donnent son nom, étaient à l'origine, respectivement, une tête de taureau, et une maison.
A toutes les époques, s'exprime le souci, derrière les signes abstraits de notre alphabet, de retrouver une dimension figurative. Peintres, calligraphes, graphistes ou publicitaires, illustrateurs de livres pour enfants, écrivains et poètes, réintroduisent dans la lettre les images perdues.
Rappel de l'origine figurative de notre alphabet à travers l'histoire de l'aleph au travers de trois phases dans l'évolution qui mène de l'image à la lettre, du dessin à l'alphabet.
Dans un premier temps, le dessin représente le plus fidèlement possible un objet réel. Ce type d'écriture suppose qu'il existe autant de signes que d'objets.
Pour éviter la multiplicité des signes, on inventa certains procédés. Le premier consiste à permettre au dessin non seulement de signifier l'objet dessiné mais aussi certaines réalités rattachées au même objet : aussi, en Mésopotamie, pays entouré de montagnes, le signe signifie montagne mais aussi frontière et, au-delà de la frontière, l'étranger. On passe ainsi du pictogramme à l'idéogramme.
A l'étape suivante, le son du signe initial est préservé mais il ne renvoie plus à l'image ou à l'objet mais seulement au son prononcé. Le signe devient phonogramme et s'associe à d'autres signes-sons comme dans les rébus pour former des mots.
La dernière étape consiste à garder le signe en ne le référant plus ni à l'image, ni au son de l'objet désigné, juste au début du son. Par le principe de l'acrophonie* naît alors l'alphabet.
C'est ainsi que le signe aleph permettant de désigner le bœuf ne signifie plus que le son "a".
Au commencement était donc le bœuf ou le taureau. Le bœuf avait une grande importance dans une civilisation rurale : force motrice, symbole d'énergie.
Chez les Egyptiens, le hiéroglyphe du taureau est un "déterminatif " permettant de préciser que le signe précédent désigne du bétail. Le taureau est alors dessiné sur pieds.
Chez les Phéniciens, le aleph ne représente plus qu'une image stylisée de la tête du taureau avec quelques variantes : parallèlement, au moment où l'image se réduit, elle se met à représenter au-delà du taureau, tout ce qu'il symbolise : force, énergie, vigueur.
La phase suivante aboutit à la disparition de l'image figurative. La tête devient un simple trait sur lequel reposent les cornes :
Ensuite le signe tourne à 90°, les cornes traversant la tête.
Enfin, après un nouveau pivotement à 90 degrés la forme est complètement retournée et donne le alpha grec, d'où provient le "A" de notre alphabet :
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Info: https://musicienintervenant.pagesperso-orange.fr/Templates/musiquepeintureletrsign.htm. *n.f. Énonciation d'une lettre de l'alphabet à l'aide d'un mot dont la lettre initiale représente cette lettre (ex. A comme Anatole).
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Avant moi, Livre, il y eut la Voix.
Il y a bien longtemps, autour du feu, les humains contaient des histoires. Ils chantaient et dansaient, fêtaient les saisons, et les aïeux transmettaient aux plus jeunes les récits des temps anciens. Tout passait par la voix. Par la mémoire. En fait, j'existais déjà : dans les têtes. Je vivais de bouche-à-oreille, transmis "par coeur" indéfiniment.
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Info: Je m'appelle LIVRE et je vais vous raconter mon histoire
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Il y a dix mille ans les premiers messages humains sont inscrits. Gravés dans ce qu'il y a de plus dur, la substance même de la planète. Dès lors, plus le discours se complique, plus le support de la communication s'assouplit, s'allège, s'amincit : de la terre cuite on passera aux écorces, aux tablettes de cire ; il y a ensuite des peaux de bêtes, des papiers qui les imitent, puis du papier de plus en plus blanc, de plus en plus fin.
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Info: Le papier 2000 ans d'histoire
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C'est dès ce moment-là, nous n'en doutons pas, et dans ces villes qu'éclot la civilisation sumérienne, avec ses remarquables réalisations architecturales et artistiques, et surtout l'invention de l'écriture, véritable "révolution", aussi importante pour l'humanité que la "révolution néolithique".
Auteur:
Info: La Mésopotamie, la période dynastique archaïque. p 90. On est vers 3750 avant J.-C:
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Au fur et à mesure que progresse l'effort d'appropriation, il faut constamment mettre à jour les registres de livraisons de céréales, de corvées effectuées, de réquisitions, de reçus, etc. […] À l'origine, ni en Chine ni en Mésopotamie l'écriture ne fut conçue comme un moyen de représenter le langage.
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Info: Homo Domesticus. Ch 4 : Agroécologie de l'Etat archaïque, Quand l'écriture engendre l'état : comptabilité et lisibilité.
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C'est Suse qui a livré la série stratifiée la plus représentative, révélant que l'écriture n'est pas née de l'évolution d'une iconographie supposée pictographique. Elle a été créée pour répondre au besoin de garder mémoire des opérations comptables spécifiques de la complexité de la société urbanisée.
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Info: L'Antiquité orientale
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Depuis toujours l’homme a cherché à donner un sens au mystère de sa propre vie, à trouver la clé du futur, en espérant de pouvoir contrôler son propre destin. On l’oublie souvent, mais le chinois comme langue écrite, est apparu non comme mode de communication entre les hommes, mais comme moyen pour consulter les dieux. Un roi faisait écrire sur un os plat, des questions, “Dois-je ou non faire la guerre à mon état voisin ?”, “Gagnerais-je ou non la bataille?”, sur les trous duquel on passait par la suite le bout d’un fer incandescent, et les fissures crées par la chaleur donnaient la réponse. Il fallait juste savoir la lire. Ces os aux idéogrammes anciens de 3500 ans, sont les premiers manuscrits chinois connus de l’histoire.
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Info: Un devin m'a dit : Voyages en Asie
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Surtout dans ces phases initiales des civilisations de l'écriture, au cours des quinze cents premières années de l'histoire écrite de l'humanité, les textes sont le plus souvent dans leur forme très différents de la parole ordinaire, et même de toute parole. La plus caractéristique de ces formes n'apparaît que rarement dans le discours oral (sauf parfois dans les rituels) : c'est la liste.
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Info: La raison graphique, p. 148
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Les conséquences de l'écriture sur les processus cognitifs, ses potentialités pour déployer de nouveaux moyens de communication ont provoqué une modification de la perception du monde chez ceux qui l'avaient inventée. Elle a permis que se développe un système de pensée différent et a progressivement donné à ses utilisateurs de nouvelles manières, non seulement de se projeter dans le temps et dans l'espace, mais aussi d'entreprendre une réflexion sur le monde et son organisation.
On le constate, dès l'origine, par l'existence de tablettes qui, à côté des textes administratifs et comptables, se présentent sous la forme de listes lexicales. Constituant environ 15% du total du corpus des textes d'Uruk, ce sont des inventaires de noms de villes, d'animaux, de plantes, de professions, d'objets manufacturés, etc. Il s'agit de textes de nature savante qui, tout en ayant servi d'abord à la formation des scribes et à la transmission des savoirs, ont constitué autant de tentatives de mise en ordre du monde et d'appropriation de ses composantes.
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Info: La Mésopotamie, De Gilgamesh à Artaban
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Aux populations primitives, la puissance des mots sur les choses apparaît évidente. On déchiffre un peu partout des inscriptions funéraires dans lesquelles les défunts ou leurs proches supplient qu'on prononce leur nom ou qu'on lise à haute voix une formule d'offrande contenant celui-ci afin de les faire quasiment revivre. [...] Pour les Égyptiens, enfin, les dieux n'avaient qu'à parler pour créer, et on retrouve encore au début de la Bible une idée analogue.
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Info: Histoire et pouvoirs de l'écrit
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Le codex est l'ancêtre du livre actuel, formé de plusieurs cahiers. Il a progressivement remplacé le rouleau, fragile et difficilement transportable. Les premiers codex datent du IIe siècle. Leur petit format permettait une circulation plus aisée des textes sacrés, notamment pendant les croisades.
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Info: Lettres enluminées du Moyen Âge
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Ce n’est pas à toi, le professeur d'hîstoire, que j'apprendrai que le mot livre vient du latin liber, qui désigne la pellicule située entre le bois de l'arbre et son écorce. Au temps des papyrus, les habitants des forêts européennes, qui n’étaient pas plus bêtes que les Égyptiens, avaient trouvé de quoi écrire avec cette pellicule prélevée sur le tronc du bouleau. Un arbre sacré ! Mais je n ai pas besoin de t'en raconter plus. Tu sais tout cela mieux que moi.
Xavier se trompait. Je connaissais un peu l'histoire du livre*, je savais que le passage des anciens rouleaux au volumen, le livre tel que nous le connaissons aujourd'hui, s'était produite aux alentours du IVe siècle, dans les derniers temps de l'Antiquité et de la Gaule romaine, mais j'ignorais cette affaire d'écorce de bouleau. Nous n'avions plus pour mission d'enseigner des choses aussi simples et aussi concrètes à nos élèves. Les manuels scolaires étaient emplis d'une matière atrocement cérébrale. Surtout ceux de géographie. C'était de la propagande pour l'unification du monde autour d'une morale planétaire, citoyenne et écoresponsable.
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Info: Ce monde est tellement beau. * Le volumen est le rouleau qui a cédé la place au codex, le livre tel que nous le connaissons, au quatrième siècle.
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Si l'on fabrique des livres, manuscrits ou imprimés, il paraît évident que c'est pour qu'ils soient lus. Or, en fait, cet usage ne s'impose pas toujours. Les innombrables copies bouddhiques de la Chine ancienne qu'évoque Jean-Pierre Drège furent, il le souligne, beaucoup moins effectuées pour la diffusion des textes qu'elles portent que pour valoir aux fidèles qui les faisaient exécuter "les mérites de leur offrande", attestée par leur conservation dans le trésor d'un monastère (ou leur enfermement dans un autre lieu sûr, telle la grotte de Dunhuang où l'on a pu en retrouver en masse après plus d'un millénaire). Quant au "cadre confucéen de la copie", pour n'être pas aussi paradoxal (à nos yeux), il n'en réduit pas moins celle-ci au rôle mineur d'adjuvant transitoire : l'essentiel tient dans l'apprentissage par coeur du corpus fondateur. Plutôt "individuelle" et "solitaire", la copie ne serait donc alors qu'un aide-mémoire, sorte d'escabeau qu'on repousse du pied une fois la hauteur souhaitée atteinte. L'Occident a d'ailleurs aussi connu, mais sous d'autres modes, l'existence de ces livres qui ne sont pas fait - en tout cas pas d'abord - pour être lus : somptueux ouvrages "de présentation" solennellement offerts à des grands pour, indépendamment de toute éventuelle lecture, accroître le prestige de leurs bibliothèques; collections de "belles" reliures vendues au mètre pour venir habiller avec ostentation les murs et meubler les étagères de pièces de réception, mais n'être jamais ouvertes. Quant aux "grand papiers" que les bibliophiles achètent fort cher et collectionnent jusqu'à nos jours, avec peut-être d'autant plus de passion que peu d'éditeurs en produisent encore, on sait qu'ils perdent, à être coupés pour pouvoir être lus, la majeure partie de leur valeur vénale.
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Info: Lieux de savoir : Tome 1, Espaces et communautés
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La période de la basse Antiquité et du haut Moyen Age, décisive pour la tradition de la culture livresque occidentale, est marquée par plusieurs phénomènes contradictoires.
Nous sommes, à l'origine, dans une époque de déconstruction, voire de destruction, qui voit la disparition des plus grandes bibliothèques et collections de livres et, avec elle, d'une grande partie de la culture de l'Antiquité classique. (...)
Cet effacement de la civilisation livresque ancienne s'est produit alors même qu'un nouveau paradigme émerge et s'impose, celui du christianisme. Originaires souvent d'Orient, les cadres de l'Eglise sont formés selon le cursus d'études traditionnel, dont ils conserveront le modèle à la fois comme projet et comme méthode. En Occident, d'abord dans les territoires byzantins, en Italie, puis en Gaule, non seulement les élites de l'Eglise catholique, à commencer par les évêques, sont des lettrés, membres des plus grandes familles, mais ils se substituent aux pouvoir traditionnels en voie de désagrégation. Même si les destructions de livres sont massives, le modèle de l'Eglise articulera ainsi la foi chrétienne avec la tradition de la culture antique, tandis que le pouvoir politique se pense lui-même comme fondamentalement chrétien. Lorsque Charlemagne et ses proches conseillers et collaborateurs procèdent à la renovation imperii de 800, ils affirment que l'héritage de l'Antiquité est désormais relevé par l'Occident, et qu'il s'accompagne d'une renaissance intellectuelle portée par l'écrit et par le livre. La société chrétienne s'organise ainsi autour du double pouvoir de l'empereur et du pape. (...)
Partout, des monarchies se mettent en place, liées à l'Eglise catholique, partout, le maillage de la hiérarchie ecclésiastique progresse, partout, des maisons religieuses s'établissent. Désormais, l'avenir du monde occidental sera lié au christianisme et se jouera, aussi dans les livres et dans les bibliothèques.
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Info: Histoire des bibliothèques: D'Alexandrie aux bibliothèques virtuelles. Conclusion : un changement de climat
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Quand il lisait ses yeux balayaient la page, son coeur dictait le sens mais sa voix était silencieuse et sa langue immobile. Chacun pouvait s'approcher et les invités n'étaient pas annoncés, et lors de nos visites, nous le trouvions ainsi plongé dans le silence, car il ne lisait jamais à haute voix.
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Info: impressionné par Ambroise, capable de lire sans le faire à haute voix, sorte d'exploit à l'époque
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Les œuvres d'Homère, de Platon et d'Euclide étaient écrites à la main sur des rouleaux faits ordinairement de roseaux de papyrus. De ces originaux, des copies furent établies, toujours à la main, sur papyrus et plus tard sur parchemin (vélin). Aucun de ces matériaux n'est indestructible. Ce qui survécut fut, en dehors de quelques exceptions, ce qui avait été jugé digne d'être copié et recopié pendant des siècles d'histoire grecque, puis pendant des siècles plus nombreux encore d'histoire byzantine, au cours desquels les valeurs et les mœurs s'étaient plus d'une fois transformées, souvent de façon radicale.
Il n'est pas difficile de montrer combien peu a survécu à ce processus de filtrage. Nous connaissons les noms de quelque cent cinquante auteurs grecs de tragédies, mais, en dehors de quelques fragments cités ça et là par des auteurs et anthologistes grecs ou romains de basse époque, il ne nous reste les pièces que de trois auteurs, des Athéniens du cinquième siècle avant J-C. Mais ce n'est pas tout. Eschyle a écrit quatre-vingt-deux pièces, nous n'en avons que sept complètes ; Sophocle en aurait écrit cent vingt-trois, dont il ne reste que sept ; et nous pouvons lire dix-huit ou dix-neuf des quatre-vingt-douze œuvres d'Euripide.
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Info: Le monde d'Ulysse
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Lorsqu'il observait Saint-Ambroise en train de lire, en cet après-midi de l'an 384, Augustin ne pouvait guère se douter de ce qu'il avait devant lui. Il pensait voir un lecteur désireux d'éviter les visiteurs indiscrets, d'économiser sa voix réservée à l'enseignement. En réalité, il voyait une multitude, une armée de lecteurs silencieux qui au cours des nombreux siècles à venir inclurait Luther, inclurait Calvin, inclurait Emerson, nous inclurait, nous, qui le lisons aujourd'hui.
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Info: Une histoire de la lecture
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Au milieu du VIe siècle, au cours de la guerre des Goths et dans la période plus sombre qui suivit, les derniers ateliers de fabrication de livres fermèrent et ce qui restait du marché du livre périclita. Tout commerce avec les fabricants de papyrus d'Egypte avait cessé depuis longtemps, et en l'absence d'un marché commercial de livres, les ateliers de parcheminerie, où les peaux d'animaux étaient transformées en supports d'écriture, étaient tombés en désuétude. Les moines durent alors apprendre l'art difficile de restaurer le parchemin existant et d'en fabriquer de nouveaux. Leur objectif n'était pas d'imiter les élites païennes en plaçant les livres ou l'écriture au centre de la société, ni d'affirmer l'importance de la rhétorique ou de la grammaire, ni de valoriser l'érudition ou le débat, mais de fait ils devinrent les principaux lecteurs, bibliothécaires, producteurs et conservateurs des livres dans le monde occidental.
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Info: Quattrocento
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Jack Goody (1977) a montré de façon convaincante comment les changements jusqu'ici étiquetés comme des passage de la magie vers la science, ou de ce qu'on appelle du "prélogique" à un état de conscience de plus en plus "rationnel", ou de l'esprit "sauvage" de Lévi-Strauss vers la pensée domestiquée, peuvent être explicités de manière plus convaincante "économiquement" comme le passage de l'oralité vers diverses étapes de l'alphabétisation. J'avais suggéré précédemment (1967b, p. 189) que beaucoup des contrastes souvent établis entre les points de vue "occidentaux" et les autres semblent réductibles aux contrastes entre une "alphabétisation lecture" profondément intériorisée et des états de conscience issus d'une oralité plus récente.
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Info: Orality and Literacy: The Technologizing of the Word
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Une importante mutation de l'écriture romanesque est, au début du XIII°siècle, l'avènement de la prose comme langue littéraire. Une fiction désormais sûre d'elle-même semble n'avoir plus besoin de cette diction marquée qu'est le couplet d'octosyllabes à rimes plates, forme quasi unique du roman, arthurien ou non, au XII° siècle.
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Info: Chrétien de Troyes : Yvain, Lancelot, La Charrette et le Lion
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Alors même qu’il est plus que jamais un genre aristocratique, produit des cours princières et consommé par elles, le roman de cette époque [15e siècle], en tant qu’il est un roman historique et un roman gratifiant, est l’ancêtre du roman "populaire", c’est-à-dire s’adressant à un public soit socialement indifférencié, soit constitué de ceux qui viennent d’accéder à la lecture et à qui échappe la mise en forme de la culture […]. Définir la fascination exercée par le roman de la fin du Moyen Age comme celle du roman historique, c’est préparer la compréhension de la fascination exercée du XVIe siècle à nos jours par le roman, comme la littérature popularisante ou comme infra-littérature.
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Info: Littérature française du Moyen Age
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- Rabelais, dit-il, est le premier écrivain à l'ère de l'imprimerie. Comme Luther est le dernier écrivain de l'ère manuscrite. Bien sûr, dit-il, sans l'imprimerie Luther serait resté un simple moine hérétique. L'imprimerie, dit-il, en ôtant la mousse à la surface de sa tasse, a fait de Luther le puissant qu'il est devenu mais c'était essentiellement un prédicateur, et non un écrivain. Il connaissait son public et écrivait pour lui. Rabelais, lui, dit-il en suçant sa cuiller, a compris ce que signifiait pour l'écrivain ce nouveau miracle qui était l'imprimerie. Ça signifiait avoir gagné le monde et perdu le public. Ne plus savoir qui vous lisait ni pourquoi. Ne plus savoir pour qui vous écriviez. Rabelais, dit-il, trouvait ça insupportable, comique et délectable, tout ça en même temps. - Tu comptes écrire sur Rabelais ? demande-t-elle. - Oui, dit-il. Je crois que oui. Je voudrais expliquer aux gens sa modernité. Ce qu'il signifie et devrait signifier pour nous tous, maintenant. Il la regarde. Elle sourit.
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Info: Tout passe
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Le livre imprimé se détache de ses origines, il s'aère, il multiplie les blancs avec la baisse du prix du papier. L'objet précieux et rare prend l'aspect robuste et simple d'un objet courant accessible aux échelles intermédiaires d'une élite de l'intelligence et de l'aisance.
Il faudra poursuivre une histoire quantitative du livre. Henri-Jean Martin l'a entreprise au niveau de la production. On peut la concevoir également à l'arrivée. Les inventaires après décès, le contenu des bibliothèques, ce que nous entrevoyons nous permet de de supposer, entre 1680 et 1780, dans l'Europe de l'Ouest, où l'implantation est ancienne, un décuplement du stock existant. Cette multiplication se fait par deux voies. Dans le milieu aisé et qui lit, là où l'on trouvait avant cinquante livres, on en trouve facilement deux cent cinquante. Le livre est un objet qui s'use peu et qui se conserve facilement. Avec l'extension et la modification du contenu de l'alphabétisation, le livre franchit pour la première fois des portes closes. Les bibliothèques bleues, les contes, qui foisonnent fin XVIIe, sont le signe de conquête culturelle et sociale. La lecture qui est ainsi diffusée à travers les bibliothèques populaires est une culture de rêve, archaïsante et rétrograde. On regrette le livre de la piété populaire du XVIe, qui s'adressait, il est vrai, à une autre couche. Et pourtant, même la bibliothèque bleue est un instrument de progrès ; elle contribue au perfectionnement de la lecture par récompense immédiate, elle dégage peu à peu, parmi les lisants déchiffrant, des lisants capables d'une utilisation difficile du langage écrit, dans la catégorie des lecteurs à haute voix, notamment à la veillée collective au coin du feu, éclairée par les cosses de haricots, chandelle du pauvre. Pour cela, il fallait un outil abondant, bon marché. Voyez les coûts. L'étude, pour l'essentiel reste à faire.
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Info: , Les grandes Civilisations, t. 11 : La Civilisation de l'Europe des Lumières, p. 243-247
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Au seuil du XVI ème siècle, le livre, encore engoncé dans sa ressemblance avec le manuscrit, se met au service de l'esprit de renouveau et de contestation qui touche presque toute l'Europe. Ferment d'innovation, il est aussi objet de méfiance, de la part du pouvoir politique et religieux.
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Info: Histoire du livre, tome 1 : A pleines pages
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Au XVIII ème siècle, le régime monarchique se trouve remis en cause, dans les faits comme dans les idées. Le livre imprimé, encore sans concurrent malgré le développement considérable de la presse, constitue le principal vecteur de la philosophie des Lumières, qui est au centre de toute la vie intellectuelle et scientifique européenne et prépare le terrain de nombreuses révolutions.
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Info: Histoire du livre, tome 1 : A pleines pages
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Le monde agrandi et démultiplié du livre connaît au XIXème siècle son premier bouleversement depuis Gutenberg. L'élargissement rapide des marchés, conjugué avec la mécanisation des techniques, entraîne une modification totale de ses modes de production et affecte jusqu'à sa forme.
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Info: Histoire du livre, tome 2 : Le triomphe de l'édition
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En 1786, Benjamin Franklin observa que les Américains étaient si occupés à lire les journaux et les pamphlets qu'ils n'avaient presque plus de temps pour les livres. (...) Alexis de Tocqueville note ce fait dans De la démocratie en Amérique, publié en 1835 : "En Amérique, écrivit-il, les partis n'écrivent pas des livres pour combattre les opinions les uns des autres, mais des pamphlets qui circulent pendant une journée à une vitesse incroyable puis disparaissent".
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Info: Se distraire à en mourir
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Sous la forme imprimerie, la pensée est plus impérissable que jamais; elle est volatile, insaisissable, indestructible. Elle se mêle à l'air. Du temps de l'architecture, elle se faisait montagne et s'emparait puissamment d'un siècle et d'un lieu. Maintenant elle se fait troupe d'oiseaux, s'éparpille aux quatre vents, et occupe à la fois tous les points de l'air et de l'espace.
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Info: Notre-Dame de Paris
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On ne lit plus, on n'a plus le temps. L'esprit est appelé à la fois de trop de côtés ; il faut lui parler vite où il passe. Mais il y a des choses qui ne peuvent être dites, ni comprises si vite, et ce sont les plus importantes pour l'homme. Cette accélération de mouvement qui ne permet de rien enchaîner, de rien méditer, suffirait seule pour affaiblir et, à la longue, pour détruire entièrement la raison humaine.
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Info: Mélanges religieux et philosophiques, 1819
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Sur sa lancée, et malgré quelques soubresauts, le livre poursuit, pendant la première moitié du XXème siècle, une expansion, que le cinéma et la radio, nouveaux venus dans l'univers des médias, ne menacent pas encore.
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Info: Histoire du livre, tome 2 : Le triomphe de l'édition
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Au lieu des bons et sérieux articles d'autrefois, qu'on savourait à loisir au coin du feu, le public se contente de comptes rendus bâclés, ou même de simples annonces de librairies ; si bien que le lecteur, faute de guide, ne prend plus la peine de choisir et n'achète plus que les "prix littéraires".
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Info: Comment on devient Écrivain, chapitre VIII : Ce que doit être la critique littéraire.
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Il est impossible que les habitudes contractées devant la télévision ne se retrouvent pas ailleurs. Comment lire placidement un journal quand on a dans l'oeil l'impatience de l'ubiquiste ? Comment lire un livre dans sa longue continuité quand on est un zappeur invétéré ? Je suis convaincu qu'une des raisons pour lesquelles les jeunes lisent de moins en moins, c'est l'inaptitude de l'écrit à se prêter aux pratiques du zapping. On en est conscient dans la presse lorsque l'on parle de ménager dans une enquête plusieurs "entrées", lorsqu'on s'efforce de déstructurer un article-fleuve en rivières et ruisseaux dont il sera plus tentant et plus facile d'emprunter le cours. Mais quel zapping pour Guerre et Paix ?
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Info: Le métier de lire, folio Gallimard 2001<p.90>
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Sans doute s'achemine-t-on vers une complémentarité des supports. Si le numérique est voué à se développer, essentiellement dans le domaine des bases de données (dictionnaires, encyclopédies, textes de loi...), cette nouvelle révolution, loin d'entraîner la disparition du livre imprimé, fera alors la part belle à ses qualités essentielles d'espace de la pensée et du rêve.
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Info: Histoire du livre, tome 2 : Le triomphe de l'édition
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L'anthropologie et la linguistique ont déjà intégré nos connaissances de l'oralité et ce qui la différencie de l'écriture. Pour l'heure, la sociologie en a moins tenu compte, et l'historiographie pas du tout : comment interpréter les historiens de l'Antiquité qui, comme Tite Live, écrivaient pour être lus à voix haute ? Quel rapport existe-t-il entre l'historiographie de La Renaissance et l'oralité embaumée dans la rhétorique ?
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Info: Oralité et écriture, la technologie de la parole, p 190
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Internet, l'iPhone, Facebook, les jeux virtuels, ont en quelques années révolutionné notre quotidien. Mieux encore, ils modifient la mémoire et la plasticité du cerveau de nos adolescents. Pour certains experts, nous vivons une révolution digne de Gutemberg et de la découverte de l'imprimerie.
La Student Academy, à Bruxelles, est une magnifique maison de maître nichée à deux pas de l'ULB. Ici, avant d'entrer, les étudiants déposent leurs smartphones. Aujourd'hui, une vingtaine d'étudiants, tous issus du secondaire, viennent suivre un cours de techniques de concentration. Ils apprennent à mémoriser durablement les matières qu'ils étudient. Au préalable, leur coach les soumet à un petit exercice. Pendant neuf minutes, ils doivent retenir un texte par coeur. David a beaucoup de mal. Le moindre mouvement dans la salle le distrait et la présence de la caméra de la RTBF n'arrange pas les choses. Mais surtout, David a sa mémoire saturée d'informations qu'il puise sur internet. Il l'avoue lui-même : il passe toutes ses journées sur son ordinateur et se sent ensuite incapable de se concentrer sur ses cours.
Pour Lola Van Lierde, coach à la Student Academy, David n'est pas une exception. Soumis à des tests de concentration, la plupart des étudiants qui jonglent avec internet, Facebook et les réseaux sociaux, sont devenus "multitâches", mais sont aussi plus facilement distraits. A la Student Academy, ils apprennent à renforcer leur mémoire. Mais dès la pause de midi, l'Iphone reprend ses droits. Eloi discute athlétisme avec son copain pour connaître le chrono de Hussein Bolt au championnat du monde. Il consulte internet et obtient la réponse en un clic.
Révolution de Gutenberg
L'Iphone et internet sont une vraie révolution digne de la découverte de l'imprimerie par Gutemberg.
Commentaire :
Par contre, l'imprimerie ne nous à pas enlevé notre capacité à la concentration ni à la mémoire à long terme. S'il y a, c'est tout le contraire.
Aujourd'hui, plus besoin de mémoriser des chiffres, des adresses ou des numéros de téléphone, nous avons toutes ces infos. Résultat, plutôt que de mémoriser du contenu, notre cerveau a plutôt tendance à mémoriser comment y accéder. La génération 'Google' a tellement intégré cette nouvelle forme d'apprentissage que son cerveau s'est transformé. Valérie Cornil, neuropsychiatre aux Cliniques de l'Europe à Bruxelles, observe que l'hippocampe, siège de consolidation de l'information, est moins développé chez nos ados. Tandis que les lobes frontaux, sièges du traitement de l'information multiple, la synthèse, ont tendance à se renforcer.
En d'autres termes, leur cerveau s'adapte. Les ados développent le sens de la synthèse.
Commentaire :
Quoiqu'intéressant, paradoxal : comment développer le sens de la synthèse si nous perdons le sens de la consolidation de l'information?
Nous sommes loin du temps où un professeur était dépositaire d'un savoir universel. Aujourd'hui, les sources d'information se bousculent, à nous de faire le tri. A moins d'accepter de s'offrir plus de plages de concentrations coupées d'internet.
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Info: Internet et les téléphones "intelligents" modifient le cerveau d'une génération.
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Les effets psychiques du world wide web
Certains chercheurs comparent le "changement cérébral" induit par l'usage des outils informatiques avec le changement climatique. Si les enfants ont gagné des aptitudes en termes de vitesse et d'automatisme, c'est parfois au détriment du raisonnement et de la maîtrise de soi.
De plus en plus de personnes sont rivées à l'écran de leur smartphone ou occupées à photographier tout ce qu'elles croisent... Face à cet usage déferlant de nouveaux outils technologiques, de nombreux chercheurs s'attachent déjà à étudier les modifications éventuellement cérébrales et cognitives susceptibles d'émerger, spécialement chez les plus jeunes. Mieux, ils nous alertent sur ces phénomènes.
C'est le cas notamment, en France, du Pr Olivier Houdé, directeur du laboratoire de psychologie du développement et de l'éducation de l'enfant du CNRS-La Sorbonne, et auteur du livre "Apprendre à résister" (éd. Le Pommier).
S'intéressant à la génération qui a grandi avec les jeux vidéo et les téléphones portables, il affirme que, si ces enfants ont gagné des aptitudes cérébrales en termes de vitesse et d'automatismes, c'est au détriment parfois du raisonnement et de la maîtrise de soi.
Éduquer le cerveau
"Le cerveau reste le même", déclarait-il récemment, "mais ce sont les circuits utilisés qui changent. Face aux écrans, et du coup dans la vie, les natifs du numérique ont une sorte de TGV cérébral, qui va de l'oeil jusqu'au pouce sur l'écran. Ils utilisent surtout une zone du cerveau, le cortex préfrontal, pour améliorer cette rapidité de décision, en lien avec les émotions. Mais cela se fait au détriment d'une autre fonction de cette zone, plus lente, de prise de recul, de synthèse personnelle et de résistance cognitive.
" Aussi le chercheur en appelle-t-il à une éducation qui apprendrait à nos enfants à résister : "Éduquer le cerveau, c'est lui apprendre à résister à sa propre déraison", affirme-t-il. "Un vrai défi pour les sciences cognitives et pour la société d'aujourd'hui."
Le virtuel est donc clairement suspecté de nous atteindre dans le fonctionnement le plus intime de notre être.
Un nouvel "opium du peuple"
Il suffit d'ailleurs d'observer autour de soi les modifications comportementales qu'il entraîne : incapacité de maintenir une conversation ou de rester concentré sur un document ; facilité "brutale" à se déconnecter d'un échange relationnel comme on se débranche d'une machine, etc.
Le philosophe et artiste Hervé Fischer, qui signe l'un des essais les plus intéressants du moment sur "La Pensée magique du Net" (éd. François Bourin), considère lui aussi que si les jeunes sont "les plus vulnérables" à l'aliénation rendue possible par le Net, car ils mesurent leur existence à leur occurrence sur les réseaux sociaux, cela concerne aussi les adultes : "On peut avoir le sentiment qu'on a une vie sociale parce qu'on a des centaines d'amis sur le Net, ou qu'on est très actif et entreprenant parce qu'on échange sans cesse des commentaires et des informations numériques", explique-t-il. "Le retour au réel est alors encore plus difficile. On vit une pseudo-réalisation de soi, virtuelle elle aussi, et la "descente" de ce nouvel "opium du peuple" peut faire très mal à ceux qui ont une existence déjà frustrante sur bien des points." Cette existence qui se mesure et s'expérimente désormais à travers un profil numérique alerte aussi, en Grande-Bretagne, la grande spécialiste de la maladie d'Alzheimer, le Pr Susan Greenfield, qui parle de "changement cérébral" comme on parle de "changement climatique".
Elle s'inquiète des modifications identitaires provoquées par un usage intensif d'internet : "C'est presque comme si un événement n'existe pas tant qu'il n'a pas été posté sur Facebook, Bebo ou YouTube", écrivait-elle récemment dans le Daily Mail. "Ajoutez à cela l'énorme quantité d'informations personnelles désormais consignées sur internet - dates de naissances, de mariages, numéros de téléphone, de comptes bancaires, photos de vacances - et il devient difficile de repérer avec précision les limites de notre individualité. Une seule chose est certaine : ces limites sont en train de s'affaiblir."
Être là
Mais on peut aussi se demander : pourquoi un tel impact ? Pour Hervé Fischer, si internet est aussi "addictif", c'est parce que la société "écranique" réveille nos plus grandes mythologies, dont le rêve de retourner en un seul clic à la matrice collective, et de se perdre alors dans le sentiment océanique d'appartenir à la communauté humaine. "Ce qui compte, c'est d'être là", explique le philosophe. "On poste un tweet et ça y est, on se sent exister." Versants positifs de cette "nouvelle religion" ? "24 heures sur 24, les individus de plus en plus solitaires peuvent, quand ils le veulent, se relier aux autres", observe Hervé Fischer. Et, tout aussi réjouissant, chacun peut gagner en "conscience augmentée", notamment en se promenant de liens en liens pour approfondir ses connaissances.
Désormais, c'est certain, grâce à la Toile, on ne pourra plus dire "qu'on ne savait pas". Le Figaro Smartphone, tablette, etc.
Diminution de la matière grise
Selon les neuroscientifiques Kep Kee Loh et Dr. Ryota Kanai, de l'Université de Sussex, l'usage simultané de téléphones mobiles, ordinateurs et tablettes changerait la structure de nos cerveaux.
Les chercheurs ont constaté une diminution de la densité de la matière grise du cerveau parmi des personnes qui utilisent habituellement et simultanément plusieurs appareils par rapport à des personnes utilisant un seul appareil occasionnellement (publication : "Plos One", septembre 2014).
Interview de Michael Stora, psychologue et psychanalyste, fondateur de l'Observatoire des mondes numériques en sciences humaines (OMNSH) et qui a notamment écrit "Les écrans, ça rend accro..." (Hachette Littératures).
- Selon vous, quel impact majeur ont les nouvelles technologies sur notre psychisme ?
- Je dirais tout ce qui relève du temps. Compressé par l'usage immédiat des smartphones et autres ordinateurs mobiles, celui-ci ne permet plus ni élaboration de la pensée ni digestion des événements. Et l'impatience s'en trouve exacerbée. Ainsi, nous recevons de plus en plus de patients qui demandent à être pris en charge "en urgence". Or, de par notre métier, nous avons appris qu'en réalité - et hors risque suicidaire - il n'y en a pas. Chacun est donc confronté à sa capacité à supporter le manque (quand arrivera la réponse à ce mail, ce texto ?) et se retrouve pris dans la problématique très régressive du nourrisson qui attend le sein.
- En quoi notre capacité de penser s'en trouve-t-elle affectée ?
- Les formats des contenus deviennent si courts, le flux d'informations si incessant que réfléchir devient impossible, car cela demande du temps. Regardez Twitter : son usager ne devient plus qu'un médiateur, il partage rapidement un lien, s'exprime au minimum, on est dans la violence du "sans transition"... Il est évident que l'être humain ne peut traiter tant d'informations, et l'on observe déjà que la dimension analytique s'efface au profit d'une dimension synthétique. Cela semble assez logique : la Toile a été créée par des ingénieurs adeptes d'une pensée binaire, structurée sur le 0 ou le 1 et sans autres ouvertures. Il faudrait vraiment que les sciences humaines soient invitées à participer davantage à ces entreprises, cela permettrait de sortir d'un fonctionnement en boucle où l'on vous repropose sans cesse le même type de produits à consommer par exemple.
- Mais beaucoup parviennent aussi à s'exprimer grâce à Internet ?
- C'est vrai, si l'on regarde Facebook par exemple, le nombre de personnes occupées à remplir leur jauge narcissique est très élevé. Mais il y a de moins en moins de créativité sur la Toile. Auparavant, un certain second degré, qui a pu donner naissance à des sites comme viedemerde.com par exemple, dont la dimension auto-thérapeutique est certaine, dominait. Mais aujourd'hui, la réelle création de soi a disparu. Il s'agit d'être sans arrêt dans la norme, ou dans une version fortement idéalisée de soi. À force de gommer "ce qui fâche", les mauvais côtés de la vie, les efforts ou les frustrations inévitables, on est alors dans un exhibitionnisme de soi très stérile et régressif qui révèle seulement l'immense besoin de chacun d'être valorisé. L'usager souhaite être "liké" (quelqu'un a répondu au message laissé sur Facebook) pour ce qu'il est, pas pour ce qu'il construit, comme le petit enfant à qui l'on répète "qu'il est beau !" sans même qu'il ait produit de dessin.
- Internet rend-il exhibitionniste ?
- Je pense que la Toile ne fait que révéler ce que nous sommes profondément. Regardez comme les internautes qui "commentent" en France sont critiques et râleurs, exactement comme on imagine les Français... Et c'est vrai, j'ai été surpris de constater cet exhibitionnisme fou dans notre pays. Avec les "blacklists", la violence de la désinhibition et des critiques qui laissent peu de possibilité d'échanger, une certaine froideur narcissique l'emporte. Ce que l'on observe, c'est qu'il y a plus d'humains enrôlés dans l'expérience du Web, mais moins d'humanité.
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Info: Keystone, 1er mai 2015
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Avec Internet livres et littératures se modifiaient insensiblement. Les auteurs avaient toutes les sources possibles dispositions alors que le lecteur prenait l'habitude de construire son propre ouvrage en surfant. Le web était un espace à la liberté infinie alors que le roman devenait un carcan.
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Info: 1 octobre 2015
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Avec Internet la lecture s'était bien modifiée, on ne lisait plus de manière minutieuse, mais en survol, en utilisant la fonction Control F pour trouver plus rapidement un nom ou un mot. On parcourait un texte avec l'aide de la machine qui vous pointait de suite le bon endroit.
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Info: 13 nov. 2014
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Nombreuses sont les sources possibles de surcharge cognitive, mais deux des plus importantes, d'après Sweller, sont "la résolution de problèmes extérieurs" et le "partage de l'attention". Ces deux causes se trouvent aussi être deux des principales caractéristiques du Net en tant que média d'information. Peut-être est-ce que, comme le laisse entendre Gary Small, l'utilisation du Net fait travailler le cerveau comme les mots croisés. Mais quand cet entraînement intensif devient notre principal mode de pensée, il peut entraver la lecture et la pensée profondes. Essayez de lire un livre en faisant une grille de mots croisés ; c'est cela, l'environnement intellectuel d'Internet.
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Info: Internet rend-il bête ? : Réapprendre à lire et à penser dans un monde fragmenté
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La télé a fait mieux, elle a fait bien mieux et bien plus fort que d’encourager la lecture ou la dissuader : elle a intégré la littérature, et ce qu’elle n’intégrait pas à disparu. Elle l’a vassalisée. Les livres ont cessé d’avoir une existence autonome pour devenir la chair et le sang (une petite, une toute petite parcelle de la chair et du sang) des médias. Télétranssubstantiation. Dès 1974, alors qu’il n’avait même pas encore inventé cette arme absolue nommée "Apostrophes", Pivot annonçait la couleur dans une interview : "Ce n’est pas la télévision qui est au service de la littérature ; c’est la littérature qui est au service la télévision"
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Info: Désaccord parfait, in Les mutins de Panurge p 46
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Il n'y a rien de mal à naviguer et à survoler, même à forte cadence. Depuis toujours, nous survolons plus les journaux que nous ne les lisons, et nous parcourons les livres et les magazines pour en saisir l'essentiel et décider s'ils méritent d'être lus plus avant. Il est tout aussi important d'être capable de lire en diagonale que de lire en profondeur. Mais ce qui est différent, et qui dérange, c'est que le survol est en train de devenir notre principal mode de lecture. C'était naguère un moyen pour arriver à une fin, une façon d'identifier les informations à lire en profondeur ; maintenant, cela devient une fin en soi -, c'est notre méthode préférée pour recueillir et comprendre les informations de toutes sortes.
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Info: Internet rend-il bête ? : Réapprendre à lire et à penser dans un monde fragmenté
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Des textes faciles, collages de morceaux choisis sur la Toile, conduisent à interroger les marges du droit d'auteur. J'ai Lu publie "Chers voisins: mots doux & petites querelles de voisinage" qui reprend des messages de Tumblr. Les droits vont aux gestionnaires des sites, les internautes ayant accepté de l'abandonner lors de leur inscription. Mais tous les éditeurs ne sont pas aussi scrupuleux. En janvier 2014, Larousse doit arrêter la commercialisation des "Perles des tweets et du Net". L'éditeur avait jugé superflu de contacter les auteurs des messages compilés. L'éditeur s'était pour l'occasion transmué en apprenti pirate, prêt à de petits compromis avec le droit moral dès lors que le texte, disponible sur le Net, n'appartenait plus à personne. L'affaire montrait surtout à quel point les notions d'auteur, d'oeuvre, d'originalité prennent l'eau dans la vie numérique.
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Info: Le livre à l'heure numérique : Papier, écrans, vers un nouveau vagabondage
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L'érosion des différences entre auteur et lecteur telle qu'elle se déploie dans l'environnement numérique actuel est un écho fidèle des anthologies populaires de la Renaissance et des livres de "lieux communs" qui circulaient librement avant le siècle des Lumières. La culture numérique se constitue alors en avatar de pratiques lettrées répandues avant le XVIIIe siècle ! Ainsi, les utilisateurs d'aujourd'hui forment des sélections de textes, d'images ou de n'importe quel matériel disponible sur la toile, et partagent leur choix tout en l'insérant dans des contextes divers et souvent indépendants de leurs origines. Le lecteur devient auteur non pas en éliminant la trace du créateur original mais plutôt en déplaçant le morceau choisi, en lui trouvant un contexte inédit, en le faisant circuler dans le voisinage d'autres objets. Mieux encore, ces morceaux choisis peuvent circuler dans des espaces nouveaux, dans les mondes virtuels et dans des formats variables mais compatibles. Ainsi, le choix du format est un concentrateur de la conception de l'objet livre : il devient un cas exemplaire des différentes options, parfois conflictuelles, qui se présentent quand on réfléchit sur l'avenir du livre et de ses supports.
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Info: La Grande Conversion numérique. Le livre à l'heure du numérique : objet fétiche, objet de résistance.
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- Misère... Moi ce qui me désespère ce sont les mots exilés. Il y a des mots tellement justes ! Beaux, forts. Et ils disparaissent totalement des radars. Et ça c'est pas anodin ! Ce qui disparaît avec eux c'est la profondeur de nos pensées, de nos réflexions. Ce qui disparaît avec eux c'est un peu de vérité, ce sont nos ambitions de vérité.
- Oui et puis... on ne parle plus que par émojis. C'est taré en quelques années ce que nos messages sont devenus. Nos émotions singées par des billes jaunes. Bonjour la palette de nuance.
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Info: Les Déliés
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Avis aux écrivains. Vous rêvez de gloire, d'argent sonnant et trébuchant, de tirages monstres ? Veillez, en ce cas, à respecter quelques consignes : pas plus de onze mots par phrase, que vos personnages - au moins au nombre de 3 ou 4 - boivent du café, qu'ils se douchent, qu'ils froncent souvent les sourcils, serrent la mâchoire, soupirent, sourient ou hochent la tête. Evitez les rats, les géants et les ours, qui peuplent rarement les best-sellers. Faites fi de la nostalgie liée à l'enfance. Biffez les émotions complexes -telles que la honte et la pitié. Oubliez la nature, mer ou montagne. Il semble qu'elle ne fasse guère recette. Privilégiez les dialogues, les verbes d'action, le vocabulaire à caractère policier et judiciaire (enquêtes, pistolet, meurtre, avocat, indices). Evoquez les technologies les plus en pointe et multipliez les conflits. Tels sont les résultats scientifiques de l'étude algorithmique de 200 romans ayant monopolisé le palmarès des meilleures ventes établi par le New York Times...
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Info: Le Monde, Le best-seller et l'algorithme
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Livre, définition du XXIVème siècle :
Après trois mille ans, ils disparurent dans la première moitié du XXIème siècle, d'abord remplacés par des livres électroniques et ensuite par des systèmes en mesure de porter l'image au cerveau à travers le nerf optique. Tout étant infiniment moins puissant que ceux que la technologie met aujourd'hui à notre disposition, bien qu'ils contiennent une quantité négligeable de savoir par rapport à celui dont on peut jouir aujourd'hui avec notre simple pensée, se sont révélés essentiels pour le développement de la civilisation.
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Info: Le Projet Alpha Centauri, Mondes pensants
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Épeler est une manière de sécuriser les mots, du moins pour le moment, en attendant qu'une autre technologie apparaisse pour adoucir les attaques lâchées par la bouche.
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Info: “Notable American Women: A Novel”, p.55, Vintage 2007
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Il y a plein de fonctions des émojis : informatives, ludiques mais aussi cryptiques, argotiques, voire politiques. Certains émojis sont devenus des marqueurs politiques. Par exemple pour l'extrême droite - je sais pas si vous les connaissez -, la fleur de lys, la grenouille et aussi le verre de lait, un petit signe de ralliement des suprémacistes blancs. (...) Et à l'extrême gauche, plus classiquement, souvent ce sont des explosions qui sont censées être représentatives.
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Info: Les émojis - La chronique de LV, France Inter, 08/10/2021
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Depuis la fin du XXIe siècle, la plupart des citoyens ne savaient plus lire, ni même écrire au moyen de mots. Sur les écrans, infos et les modes d'emploi utilisaient des symboles simples dérivés du Basiquinglish. Un langage pratique, universel mais limité et sans nuances...
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Info: 2115 : Terre en péril
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Aujourd'hui, il prétend qu'avant la fin du siècle "le journalisme sera toute la pensée" ; "l'humanité écrira son livre jour par jour, heure par heure" ; la pensée "se répandra à la vitesse de la lumière ; aussitôt conçue, aussitôt écrite, aussitôt entendue aux extrémités de la terre... Elle n'aura pas le temps de mûrir, de s'accumuler sous forme de livre; le livre arriverait trop tard ; le seul livre aujourd'hui, c'est un journal."
Auteur:
Info: Au moins le souvenir
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Alors moi, je suis pour Saint Jean et son "Au commencement était le verbe", mais c'est un commencement qui en effet est complètement énigmatique. Ça veut dire ceci : les choses ne commencent, pour cet être charnel, ce personnage répugnant qu'est tout de même ce qu'il faut bien appeler un homme moyen, les choses ne commencent pour lui, je veux dire le drame ne commence pour lui que quand il y a le Verbe dans le coup, quand le Verbe , comme dit la religion - la vraie - quand le Verbe s'incarne. C'est quand le Verbe s'incarne que ça commence à aller vachement mal.
Il n'est plus du tout heureux, il ne ressemble plus du tout à un petit chien qui remue la queue ni non plus à un brave singe qui se masturbe. Il ne ressemble plus à rien du tout.
Il est ravagé par le Verbe
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Info: Dans "La troisième"
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Le langage n'est pas un fait scientifique, mais artistique. Il fut inventé par des guerriers et des chasseurs, et il est très antérieur à la science.
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Info: G.F. Watts, 1904, p. 91
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Ce qui frappe d’abord l’homme "moderne", rompu à la théorie et à la science linguistique d’aujourd’hui, et pour lequel le langage est extérieur au réel, pellicule fine et sans consistance sinon conventionnelle, fictive, "symbolique", c’est que dans les sociétés "primitives", ou comme on dit "sans histoire", "pré-historiques", le langage est une substance et une force matérielle. Si l’homme primitif parle, symbolise, communique, c’est-à-dire établit une distance entre lui-même (comme sujet) et le dehors (le réel) pour le signifier dans un système de différences (le langage), il ne connaît pas cet acte comme un acte d’idéalisation ou d’abstraction, mais au contraire comme une participation à l’univers environnant. Si la pratique du langage suppose réellement pour l’homme primitif une distance par rapport aux choses, le langage n’est pas conçu comme un ailleurs mental, une démarche d’abstraction. Il participe comme un élément cosmique du corps et de la nature, confondu avec la force motrice du corps et de la nature. Son lien avec la réalité corporelle et naturelle n’est pas abstrait ou conventionnel, mais réel et matériel. L’homme primitif ne conçoit pas nettement de dichotomie entre matière et esprit, réel et langage, et par conséquent entre "réfèrent" et "signe linguistique", et encore moins entre "signifiant" et "signifié" : pour lui, ils participent tous au même titre d’un monde différencié.
Des systèmes magiques complexes, telle la magie assyrienne, reposent sur un traitement attentif de la parole conçue comme une force réelle. On sait que dans la langue akkadienne "être" et "nommer" sont synonymes. En akkadien, "quoi que ce soit" s’exprime par la locution "tout ce qui porte un nom". Cette synonymie n’est que le symptôme de l’équivalence généralement admise entre les mots et les choses, et qui sous-tend les pratiques magiques verbales. Elle transparaît aussi dans les exorcismes liés à l’interdiction de prononcer tel ou tel nom ou mot, aux incantations dont on exige la récitation à voix basse, etc.
Plusieurs mythes, pratiques et croyances révèlent cette vision du langage chez les primitifs. Frazer (the Golden Bough, 1911-1915) constate que dans plusieurs tribus primitives le nom, par exemple, considéré comme une réalité et non pas comme une convention artificielle, "peut servir d’intermédiaire — aussi bien que les cheveux, les ongles ou toute autre partie de la personne physique — pour faire agir la magie sur cette personne". Pour l’Indien d’Amérique du Nord, d’après ce même auteur, son nom n’est pas une étiquette, mais une partie distincte de son corps, comme l’œil, la dent, etc., et par conséquent un mauvais traitement de son nom le blessera comme une blessure physique. Pour sauvegarder le nom, on le fait entrer dans un système d’interdictions, ou de tabous.
Auteur:
Info: Le langage, cet inconnu, pp. 56-57
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Notre cerveau à l’heure des nouvelles lectures
Maryanne Wolf, directrice du Centre de recherche sur la lecture et le langage de l’université Tufts est l’auteur de Proust et le Calmar (en référence à la façon dont ces animaux développent leurs réseaux de neurones, que nous avions déjà évoqué en 2009). Sur la scène des Entretiens du Nouveau Monde industriel au Centre Pompidou, la spécialiste dans le développement de l’enfant est venue évoquer "la modification de notre cerveau-lecteur au 21e siècle"
Comment lisons-nous ?
"Le cerveau humain n’était pas programmé pour être capable de lire. Il était fait pour sentir, parler, entendre, regarder… Mais nous n’étions pas programmés génétiquement pour apprendre à lire". Comme l’explique le neuroscientifique français Stanislas Dehaene (Wikipédia) dans son livre Les neurones de la lecture, nous avons utilisé notre cerveau pour identifier des modèles. C’est l’invention culturelle qui a transformé notre cerveau, qui a relié et connecté nos neurones entre eux, qui leur a appris à travailler en groupes de neurones spécialisés, notamment pour déchiffrer la reconnaissance de formes. La reconnaissance des formes et des modèles a permis la naissance des premiers symboles logographiques, permettant de symboliser ce qu’on voyait qui nous mènera des peintures rupestres aux premières tablettes sumériennes. Avec l’invention de l’alphabet, l’homme inventera le principe que chaque mot est un son et que chaque son peut-être signifié par un symbole. Le cerveau lecteur consiste donc à la fois à être capable de "voir", décoder des informations, des motifs et à les traiter pour pouvoir penser et avoir une réflexion.
Pour autant, le circuit de la lecture n’est pas homogène. Quand on observe à l’imagerie cérébrale un anglais qui lit de l’anglais, un chinois qui lit du chinois ou le Kanji, un Japonais qui lit le Kana japonais, on se rend compte que ces lectures activent des zones sensiblement différentes selon les formes d’écritures. Ce qui signifie qu’il y a plusieurs circuits de lecture dans notre cerveau. Le cerveau est plastique et il se réarrange de multiples façons pour lire, dépendant à la fois du système d’écriture et du médium utilisé. "Nous sommes ce que nous lisons et ce que nous lisons nous façonne" Ce qui explique aussi que chaque enfant qui apprend à lire doit développer son propre circuit de lecture.
Ce qui stimule le plus notre cerveau, selon l’imagerie médicale, c’est d’abord jouer une pièce au piano puis lire un poème très difficile, explique Maryanne Wolf. Car la lecture profonde nécessite une forme de concentration experte. Comme le souligne Proust dans Sur la lecture : "Nous sentons très bien que notre sagesse commence où celle de l’auteur finit, et nous voudrions qu’il nous donnât des réponses, quand tout ce qu’il peut faire est de nous donner des désirs. Et ces désirs, il ne peut les éveiller en nous qu’en nous faisant contempler la beauté suprême à laquelle le dernier effort de son art lui a permis d’atteindre. Mais par une loi singulière et d’ailleurs providentielle de l’optique des esprits (loi qui signifie peut-être que nous ne pouvons recevoir la vérité de personne, et que nous devons la créer nous-mêmes), ce qui est le terme de leur sagesse ne nous apparaît que comme le commencement de la nôtre, de sorte que c’est au moment où ils nous ont dit tout ce qu’ils pouvaient nous dire qu’ils font naître en nous le sentiment qu’ils ne nous ont encore rien dit."
La lenteur, la concentration et le processus cognitif encouragent le cerveau lecteur. La déduction, la pensée analogique, l’analyse critique, la délibération, la perspicacité, l’épiphanie (c’est-à-dire la compréhension soudaine de l’essence et de la signification de quelque chose) et la contemplation sont quelques-unes des merveilleuses conséquences de notre capacité à lire la pensée d’un autre.
Pourquoi la lecture numérique est-elle différente ?
Est-ce que ce que nous savons de notre cerveau lecteur éclaire ce que nous ne savons pas de la lecture à l’heure de la culture numérique ? Quelles sont les implications profondes sur la plasticité de nos circuits de lecture à mesure que nous utilisons des médiums dominés par le numérique ?
En 2008, dans une interview pour Wired, quelques mois avant d’écrire son célèbre article, "Est-ce que Google nous rend idiot ?", Nicholas Carr expliquait : "La chose la plus effrayante dans la vision de Stanley Kubrick n’était pas que les ordinateurs commencent à agir comme les gens, mais que les gens commencent à agir comme des ordinateurs. Nous commençons à traiter l’information comme si nous étions des noeuds, tout est question de vitesse de localisation et de lecture de données. Nous transférons notre intelligence dans la machine, et la machine transfère sa façon de penser en nous."
Les caractéristiques cognitives de la lecture en ligne ne sont pas les mêmes que celle de la lecture profonde, estime Maryanne Wolf. Avec le numérique, notre attention et notre concentration sont partielles, moins soutenues. Notre capacité de lecture se fixe sur l’immédiateté et la vitesse de traitement. Nous privilégions une forme de lecture qui nous permet de faire plusieurs tâches en même temps dans des larges ensembles d’information. Les supports numériques ont tendance à rendre notre lecture physique (tactile, interactions sensorielles…) tandis que le lire nous plonge plutôt dans un processus cognitif profond. Pour la spécialiste, il semble impossible de s’immerger dans l’hypertexte. Reprenant les propos de Carr, "l’écrémage est la nouvelle normalité", assène-t-elle. "Avec le numérique, on scanne, on navigue, on rebondit, on repère. Nous avons tendance à bouger, à cliquer et cela réduit notre attention profonde, notre capacité à avoir une lecture concentrée. Nous avons tendance à porter plus d’attention à l’image. Nous avons tendance à moins internaliser la connaissance et à plus dépendre de sources extérieures."
Les travaux d’imagerie cérébrale sur les effets cognitifs du multitâche montrent que même si on peut apprendre en étant distraits cela modifie notre façon d’apprendre rendant l’apprentissage moins efficace et utile estime le professeur de psychologie et neurobiologie Russ Poldrack. Les facteurs tactiles et matériels ont aussi une importance. On ne peut s’immerger dans l’hypertexte de la même façon qu’on pouvait se perdre dans un livre, estime la spécialiste de la lecture Anne Mangen du Centre sur la lecture de l’université de Stavanger. Plusieurs études ont montré que notre niveau de compréhension entre l’écran et l’imprimé se faisait toujours au détriment du numérique, rappelle Maryanne Wolf. Mais peut-être faudrait-il nuancer les propos de Maryanne Wolf et souligner, comme nous l’avions déjà rappelé lors de la publication de la charge de Nicholas Carr que les les protocoles d’expérimentation des neuroscientifiques défendent souvent des thèses. La science et l’imagerie médicale semblent convoquées pour apporter des preuves. Alors que les différences de protocoles entre une étude l’autre, la petitesse des populations étudiées, nécessiterait beaucoup de prudence dans les conclusions.
Reste que pour comprendre cette différence entre papier et électronique, estime Maryanne Wolf, il nous faut comprendre comment se forme notre capacité de lecture profonde. Est-ce que la lecture superficielle et notre attente continue d’informations externes seront les nouvelles menaces des lectures numériques ? Ces deux risques vont-ils court-circuiter notre "cerveau lecteur" ? Est-ce que la construction de l’imaginaire de l’enfance va être remplacée par celle, externe, que tous les nouveaux supports offrent ? …
"Nous ne reviendrons pas en arrière, nous ne reviendrons pas à un temps prénumérique", insiste Maryanne Wolf. "Ce n’est ni envisageable, ni enviable, ni faisable."
"Mais nous ne devrions pas accepter une embardée vers l’avant sans comprendre ce que le "répertoire cognitif" de notre espèce risque de perdre ou de gagner." "Ce serait une honte si la technologie la plus brillante que nous ayons développée devait finir par menacer le genre d’intelligence qui l’a produite", estime l’historien des technologies Edward Tenner. Et Maryanne Wolf de nous montrer trois enfants assis dans un canapé, avec chacun son ordinateur sur ses genoux. C’est l’image même qui inspire notre peur de demain. Celle-là même qu’évoquait l’anthropologue Stefana Broadbent à Lift 2012. Sauf que l’anthropologue, elle, nous montrait qu’on était là confronté là à une représentation sociale… une interrogation totalement absente du discours alarmiste de Maryanne Wolf, qui compare l’activité cognitive de cerveaux habitués à la lecture traditionnelle, avec celle de cerveaux qui découvrent les modalités du numérique.
Le numérique a bien un défaut majeur, celui d’introduire dans notre rapport culturel même des modalités de distraction infinies. Comme nous le confiait déjà Laurent Cohen en 2009, l’écran ou le papier ne changent rien à la capacité de lecture. Mais c’est le réseau qui pose problème et ce d’autant plus quand il apporte une distraction permanente, permettant toujours de faire autre chose que ce que l’on compte faire.
Si la lecture profonde peut se faire tout autant sur papier qu’à travers le réseau, le principal problème qu’induit le numérique, c’est la possibilité de distraction induite par l’outil lui-même, qui demande, pour y faire face, un contrôle de soi plus exigeant.
Notre avenir cognitif en sursis ?
Alors, comment résoudre ce paradoxe, se demande Maryanne Wolf. Comment pouvons-nous éviter de "court-circuiter" notre capacité à lire en profondeur, tout en acquérant les nouvelles compétences nécessaires pour le 21e siècle ?
Un premier pas peut-être fait en ayant conscience de nos limites, estime Maryanne Wolf. Rappelons-nous que notre cerveau n’a jamais été programmé génétiquement pour lire. Que chaque lecteur doit construire ses propres circuits de lecture. Que nos circuits de lecture sont plastiques et influencés par les médiums et les systèmes d’écriture que nous utilisons. Notre cerveau-lecteur est capable à la fois des plus superficielles et des plus profondes formes de lecture, de ressenti et de pensées.
Nous pouvons deviner que l’accès à l’information ne va cesser d’augmenter. Mais nous ne savons pas si l’accès immédiat à de vastes quantités d’informations va transformer la nature du processus de lecture interne, à savoir la compréhension profonde et l’internalisation de la connaissance.
Pour le dire autrement, notre cerveau est d’une plasticité totale, mais cela ne veut pas dire que nous allons perdre telle ou telle capacité d’attention, alors que celles-ci ont plus que jamais une importance sociale. Pour l’instant, pourrions-nous répondre à Maryanne Wolf, ce que le cerveau lecteur nous a le plus fait perdre, c’est certainement notre capacité à lire les détails du monde naturel que comprenait le chasseur-cueilleur.
Nous ne savons pas si l’accès immédiat à cette quantité croissante d’information externe va nous éloigner du processus de lecture profonde ou au contraire va nous inciter à explorer la signification des choses plus en profondeur, estime Wolf en reconnaissant tout de même, après bien des alertes, l’ignorance des neuroscientifiques en la matière. Bref, nous ne savons pas si les changements qui s’annoncent dans l’intériorisation des connaissances vont se traduire par une altération de nos capacités cognitives, ni dans quel sens ira cette altération.
Si nous ne savons pas tout de notre avenir cognitif, estime Wolf, peut-être pouvons-nous conserver certains objectifs en vue. Que pouvons-nous espérer ? La technologie va bouleverser l’apprentissage, estime Maryanne Wolf en évoquant l’expérimentation qu’elle mène avec le MIT sur le prêt de tablettes auprès d’enfants éthiopiens qui n’ont jamais été alphabétisés et qui montre des jeunes filles capables de retenir l’alphabet qu’elles n’avaient jamais appris. Comment peut-on créer les conditions pour que les nouveaux lecteurs développent une double capacité… savoir à la fois quand il leur faut écrémer l’information et quand il leur faut se concentrer profondément ?
En semblant à la fois croire dans l’apprentissage par les robots, comme le montre l’expérience OLPC en Ethiopie de laquelle elle participe visiblement avec un certain enthousiasme (alors que certains spécialistes de l’éducation ont montré que l’essentielle des applications d’apprentissage de la lecture ne permettaient pas de dépasser le niveau de l’apprentissage de l’alphabet, en tout cas n’étaient pas suffisantes pour apprendre à lire seul) et en n’ayant de cesse de nous mettre en garde sur les risques que le numérique fait porter à la lecture profonde, Maryanne Wolf semble avoir fait un grand écart qui ne nous a pas aidés à y voir plus clair.
Après la langue et le langage : la cognition
Pour l’ingénieur et philosophe Christian Fauré, membre de l’association Ars Industrialis. "l’organologie générale" telle que définit par Ars Industrialis et le philosophe Bernard Stiegler, organisateur de ces rencontres, vise à décrire et analyser une relation entre 3 types d' "organes" qui nous définissent en tant qu’humain : les organes physiologiques (et psychologiques), les organes techniques et les organes sociaux.
"Nos organes physiologiques n’évoluent pas indépendamment de nos organes techniques et sociaux", rappelle Christian Fauré. Dans cette configuration entre 3 organes qui se surdéterminent les uns les autres, le processus d’hominisation semble de plus en plus porté, "transporté" par l’organe technique. Car dans un contexte d’innovation permanente, le processus d’hominisation, ce qui nous transforme en hommes, est de plus en plus indexé par l’évolution de nos organes techniques. La question est de savoir comment nos organes sociaux, psychologiques et physiologiques vont suivre le rythme de cette évolution. A l’époque de l’invention des premiers trains, les gens avaient peur d’y grimper, rappelle le philosophe. On pensait que le corps humain n’était pas fait pour aller à plus de 30 km à l’heure.
L’évolution que nous connaissons se produit via des interfaces entre les différents organes et c’est celles-ci que nous devons comprendre, estime Christian Fauré. Quel est le rôle des organes techniques et quels sont leurs effets sur nos organes sociaux et physiologiques ?L’écriture a longtemps été notre principal organe technique. Parce qu’elle est mnémotechnique, elle garde et conserve la mémoire. Par son statut, par les interfaces de publication, elle rend public pour nous-mêmes et les autres et distingue le domaine privé et le domaine public. Or l’évolution actuelle des interfaces d’écriture réagence sans arrêt la frontière entre le privé et le public. Avec le numérique, les interfaces de lecture et d’écriture ne cessent de générer de la confusion entre destinataire et destinateur, entre ce qui est privé et ce qui est public, une distinction qui est pourtant le fondement même de la démocratie, via l’écriture publique de la loi. Avec le numérique, on ne sait plus précisément qui voit ce que je publie… ni pourquoi on voit les messages d’autrui.
La question qui écrit à qui est devenue abyssale, car, avec le numérique, nous sommes passés de l’écriture avec les machines à l’écriture pour les machines. L’industrie numérique est devenue une industrie de la langue, comme le soulignait Frédéric Kaplan. Et cette industrialisation se fait non plus via des interfaces homme-machine mais via de nouvelles interfaces, produites par et pour les machines, dont la principale est l’API, l’interface de programmation, qui permet aux logiciels de s’interfacer avec d’autres logiciels.
Le nombre d’API publiée entre 2005 et 2012 a connu une croissance exponentielle, comme l’explique ProgrammableWeb qui en tient le décompte. Désormais, plus de 8000 entreprises ont un modèle d’affaire qui passe par les API. "Le web des machines émerge du web des humains. On passe d’un internet des humains opéré par les machines à un internet pour les machines opéré par les machines. L’API est la nouvelle membrane de nos organes techniques qui permet d’opérer automatiquement et industriellement sur les réseaux."
Ecrire directement avec le cerveau
Le monde industriel va déjà plus loin que le langage, rappelle Christian Fauré sur la scène des Entretiens du Nouveau Monde industriel. "Nous n’écrivons plus. Nous écrivons sans écrire, comme le montre Facebook qui informe nos profils et nos réseaux sociaux sans que nous n’ayons plus à écrire sur nos murs. Nos organes numériques nous permettent d’écrire automatiquement, sans nécessiter plus aucune compétence particulière. Et c’est encore plus vrai à l’heure de la captation de données comportementales et corporelles. Nos profils sont renseignés par des cookies que nos appareils techniques écrivent à notre place. Nous nous appareillons de capteurs et d’API "qui font parler nos organes". Les interfaces digitales auxquelles nous nous connectons ne sont plus des claviers ou des écrans tactiles… mais des capteurs et des données." Les appareillages du Quantified Self sont désormais disponibles pour le grand public. La captation des éléments physiologique s’adresse à nos cerveaux, comme l’explique Martin Lindstrom dans Buy.Ology. "Nous n’avons même plus besoin de renseigner quoi que ce soit. Les capteurs le font à notre place. Pire, le neuromarketing semble se désespérer du langage. On nous demande de nous taire. On ne veut pas écouter ce que l’on peut dire ou penser, les données que produisent nos capteurs et nos profils suffisent." A l’image des séries américaines comme Lie to Me ou the Mentalist où les enquêteurs ne s’intéressent plus à ce que vous dites. Ils ne font qu’observer les gens, ils lisent le corps, le cerveau. "L’écriture de soi n’est plus celle de Foucault, les échanges entre lettrés. On peut désormais s’écrire sans savoir écrire. Nous entrons dans une époque d’écriture automatique, qui ne nécessite aucune compétence. Nous n’avons même plus besoin du langage. L’appareillage suffit à réactualiser le connais-toi toi-même !"
Google et Intel notamment investissent le champ des API neuronales et cherchent à créer un interfaçage direct entre le cerveau et le serveur. Le document n’est plus l’interface. Nous sommes l’interface !
"Que deviennent la démocratie et la Res Publica quand les données s’écrivent automatiquement, sans passer par le langage ? Quand la distinction entre le public et le privé disparaît ? Alors que jusqu’à présent, la compétence technique de la lecture et de l’écriture était la condition de la citoyenneté", interroge Christian Fauré.
Les capteurs et les interfaces de programmation ne font pas que nous quantifier, ils nous permettent également d’agir sur notre monde, comme le proposent les premiers jouets basés sur un casque électroencéphalographique (comme Mindflex et Star Wars Science The Force Trainer), casques qui utilisent l’activité électrique du cerveau du joueur pour jouer. Ces jouets sont-ils en train de court-circuiter notre organe physiologique ?
Mais, comme l’a exprimé et écrit Marianne Wolf, nous n’étions pas destinés à écrire. Cela ne nous a pas empêchés de l’apprendre. Nous sommes encore moins nés pour agir sur le réel sans utiliser nos organes et nos membres comme nous le proposent les casques neuronaux.
Quand on regarde les cartographies du cortex somatosensoriel on nous présente généralement une représentation de nous-mêmes selon l’organisation neuronale. Celle-ci déforme notre anatomie pour mettre en évidence les parties de celle-ci les plus sensibles, les plus connectés à notre cerveau. Cette représentation de nous est la même que celle que propose la logique des capteurs. Or, elle nous ressemble bien peu.
(Image extraite de la présentation de Christian Fauré : ressemblons à notre cortex somatosensoriel ?)
Que se passera-t-il demain si nous agissons dans le réel via des casques neuronaux ? La Science Fiction a bien sûr anticipé cela. Dans Planète interdite, le sous-sol de la planète est un vaste data center interfacé avec le cerveau des habitants de la planète qui ne donne sa pleine puissance que pendant le sommeil des habitants. "Ce que nous rappelle toujours la SF c’est que nos pires cauchemars se réalisent quand on interface l’inconscient à la machine, sans passer par la médiation de l’écriture ou du langage. Si la puissance du digital est interfacée et connectée directement aux organes physiologiques sans la médiation de l’écriture et du langage, on imagine alors à quel point les questions technologiques ne sont rien d’autre que des questions éthiques", conclut le philosophe.
Si on ne peut qu’être d’accord avec cette crainte de la modification du cerveau et de la façon même dont on pense via le numérique comme c’était le cas dans nombre d’interventions à cette édition des Entretiens du Nouveau Monde industriel, peut-être est-il plus difficile d’en rester à une dénonciation, comme l’a montré l’ambiguïté du discours de Maryanne Wolf. Si nous avons de tout temps utilisé des organes techniques, c’est dans l’espoir qu’ils nous libèrent, qu’ils nous transforment, qu’ils nous distinguent des autres individus de notre espèce et des autres espèces. Pour répondre à Christian Fauré, on peut remarquer que la SF est riche d’oeuvres qui montrent ou démontrent que l’augmentation de nos capacités par la technique était aussi un moyen pour faire autre chose, pour devenir autre chose, pour avoir plus de puissance sur le monde et sur soi. Il me semble pour ma part qu’il est important de regarder ce que les interfaces neuronales et les capteurs libèrent, permettent. Dans the Mentalist, pour reprendre la référence de Christian Fauré, ce sont les capacités médiumniques extraordinaires de l’enquêteur qui transforme son rapport au monde et aux autres. Si l’interfaçage direct des organes physiologique via des capteurs et des données produit de nouvelles formes de pouvoir, alors il est certain que nous nous en emparerons, pour le meilleur ou pour le pire. On peut légitimement le redouter ou s’en inquiéter, mais ça ne suffira pas à nous en détourner.
Qu’allons-nous apprendre en jouant de l’activité électrique de nos cerveaux ? On peut légitimement se demander ce que cela va détruire… Mais si on ne regarde pas ce que cela peut libérer, on en restera à une dénonciation sans effets.
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Info: https://www.lemonde.fr/blog/internetactu/2013/01/11/notre-cerveau-a-lheure-des-nouvelles-lectures/
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Le psychologue Howard Gardner a utilisé la célèbre description de Seymour Papert, chercheur au MIT. Celle de "l'esprit de sauterelle " de l'enfant, pour décrire la façon spasmodique dont nos jeunes numériques " sautillent d'un point vers l'autre, détournés de leur tâche initiale ".
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L'atteinte faite au langage dépasse largement le cadre des évaluations académiques formelles. Elle s'incarne aussi dans la " vraie vie ".
En ce domaine il apparaît ainsi, par exemple, que les enfants d'aujourd'hui sont incapables d'absorber les ouvrages de la " Bibliothèque rose " que lisaient aisément leurs ascendants dans les années 1960-1970.
Pour ne pas condamner Fantômette et Le Club des Cinq aux oubliettes, nos amis éditeurs ont dû se lancer dans une vaste opération de réécriture.
Ainsi, entre l'édition originale du " Club des Cinq et le trésor de l'île" de 1962 et celle de 2006, la longueur du texte a été réduite de 45 % et le nombre de mots uniques de 42 % !
Tout est désormais court et concis. On ne précise plus " le pique-nique marqua une halte agréable, dans un cadre champêtre à souhait " ; on écrit " la famille s'arrête pique-niquer en haut d'une colline "..
Fini le passé simple, les mots sortant de l'ordinaire, les formes irrégulières, les descriptions fécondes : trop compliqués...
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Info: La fabrique du crétin digital
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( FLP ) - On a beaucoup parlé de l'esprit des liste, qui domina les premières apparitions de l'écriture humaine, du langage fixé sur support externe il y a environ 5000 ans. Es-tu d'accord `?
( Perplexity ) - Oui, je suis d'accord avec cette affirmation, car les résultats de recherche indiquent que les premières apparitions de l'écriture humaine remontent à environ 5000 ans, avec un esprit de classification et de mise en liste qui semble avoir dominé à cette époque.Voici les principaux éléments qui étayent ce point de vue :
- Les plus anciennes traces d'écriture élaborées se rencontrent de manière quasi simultanée vers 3300 ans avant notre ère chez les Égyptiens et les Sumériens.
- Les Sumériens utilisaient l'écriture cunéiforme sur des tablettes d'argile pour inventorier les marchandises, ce qui suggère un esprit de classification et de mise en liste.
- L'établissement de listes semble avoir été un moteur important pour que l'esprit humain franchisse une étape décisive dans le développement de l'écriture.
- L'écriture marque la fin de la préhistoire et un tournant dans l'histoire de l'Homme, qui va savoir conserver la mémoire de son passé24.Donc oui, les résultats indiquent bien que les premières écritures, apparues il y a environ 5000 ans en Mésopotamie et en Égypte, étaient dominées par un esprit de mise en liste et de classification, notamment pour inventorier les biens et les marchandises. Ce mode de pensée a joué un rôle clé dans le développement de l'écriture à cette époque.
(FLP ) - Merci : qu'en est-il de l’apparition de l'écriture en Chine ou ailleurs à cet égard, Y discerne-t'on aussi un esprit d'inventaire ?
(Perplexity) - Oui, on peut discerner un esprit d'inventaire et de classification dans les premières apparitions de l'écriture en Chine, comme ailleurs dans le monde ancien. En Chine, les plus anciennes traces d'écriture remontent à la dynastie Shang (1600-1046 av. J.-C.), sous forme d'inscriptions sur des os et écailles de tortues utilisées pour la divination. Les questions écrites concernaient principalement l'agriculture, les stratégies militaires et l'interprétation des rêves, suggérant un esprit de classification et d'inventaire. De même, les premiers caractères chinois apparaissent sur des vases rituels en bronze dès le début de l'époque Shang, probablement pour identifier et classer ces objets. Plus généralement, les systèmes d'écriture les plus anciens, comme les cunéiformes sumériens ou les hiéroglyphes égyptiens, ont souvent été développés pour inventorier et classer les biens, les personnes et les transactions. L'écriture a permis de fixer sur un support externe ce qui était auparavant mémorisé, ouvrant la voie à de nouveaux modes de pensée et de classification. Donc oui, que ce soit en Chine ou ailleurs dans l'Antiquité, les premières écritures semblent avoir été motivées par un besoin d'inventaire, de classification et de conservation de l'information, avant de se développer en systèmes de communication plus élaborés. Cet esprit de liste et de catégorisation a probablement joué un rôle important dans l'émergence de l'écriture à ses débuts.
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Info: 28 avril 2024
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Le langage et l'outil sont l'expression de la même propriété de l'homme.
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Info: Le Geste et la Parole, tome I (1964)
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La constance extraordinaire du dispositif symbolique est la preuve qu'il existait une mythologie, constituée très tôt puisqu'à l'Aurignacien* déjà, le couplage des animaux et des signes est attesté.
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Info: Les religions de la préhistoire : Paléolithique * de - 40 000 à - 30 000 av JC environ
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Les limites entre la préhistoire et l'histoire sont théoriquement fixées par l'apparition de l'écriture. Les temps immédiatement antérieurs aux textes et vaguement éclairés par ceux-ci constituent la protohistoire.
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Info: Histoire universelle
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